Combien reste-t-il après une expertise ?

Plusieurs candidats experts m’ont écris pour avoir plus d’éléments que ceux fournis dans un précédent billet intitulé « note de frais et honoraires« .

Les questions tournent en général autour du statut de l’expert, des déclarations fiscales ou du montant des bénéfices.

Je suis bien mal placé pour y répondre, ignare que je suis sur ces sujets.

Néanmoins, j’essaierai ici quelques réponses…

1er conseil: allez voir un expert… en droit fiscal. Comme tous les juristes, il saura vous conseiller et vous (re)mettre dans le droit chemin. Si vous préférez néanmoins faire l’impasse, et bien voici quelques pistes (mais SGDZ!).

Pour ma part, je suis salarié. Mon employeur principal a accepté que j’exerce l’activité d’expert judiciaire sur mon temps libre à condition que cela n’empiète pas sur mon activité professionnelle. Je m’y tiens dans un respect mutuel et selon mon cinquième commandement.

Je déclare mon activité d’expert judiciaire à l’URSSAF qui m’a attribué un numéro SIRET (il paraît que c’est plus difficile aujourd’hui d’en obtenir un). J’y verse donc donc la CAF, CSG et autre RDS.

Je cotise également (c’est obligatoire) à la sécurité sociale (caisse des professions indépendantes). C’est obligatoire, même si je cotise déjà via mon employeur principal. C’est aberrant, mais c’est la France. J’ai ainsi deux jolies cartes vitales 🙂

Je déclare aux impôts l’intégralité du chiffre d’affaire que je réalise en tant qu’expert judiciaire dans la case « revenus non commerciaux non professionnel ». Je rappelle qu’expert judiciaire, ce n’est pas une profession. Comme mes revenus d’expertises sont (très) inférieurs au plafond ad hoc, l’état applique dessus une remise forfaitaire de 34%.

J’ai jeté au fur et à mesure qu’ils me parvenaient tous les documents m’invitant (certains très fermement!) à cotiser à une caisse de retraite. Certainement suite à mon obtention de numéro SIRET…

Je cotise déjà via mon employeur principal.

J’espère que ces différents points ne m’attireront point les foudres de l’état. Que tous les agents attachés à la collecte des différentes gabelles sachent que si erreur j’ai commise, elle est bien involontaire, et n’est liée qu’à mon ignorance regrettée des subtilités administratives en la matière.

J’ai à ce sujet une petite anecdote:

Est paru en cette belle année 2000 s’il en fut, une circulaire portant le doux nom suivant: « Circulaire DSS/SDFGSS/5 B n° 2000-430 du 21 juillet 2000 relative à la mise en oeuvre des dispositions relatives au rattachement au régime général de la sécurité sociale des collaborateurs occasionnels du service public« , dont je ne reprendrai que la portion suivante:

C. – Les personnes redevables du versement des cotisations

Le deuxième alinéa de l’article 1er prévoit que l’Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics en dépendant et les organismes privés chargés de la gestion d’un service public administratif qui font appel aux personnes mentionnées au premier alinéa de cet article premier versent aux URSSAF les cotisations de sécurité sociale, ainsi que la CSG et la CRDS. Ceci vaut également dans le cas où la rémunération est assurée par une tierce personne – expertise judiciaire au civil, gérance de tutelle, certains commissaires-enquêteurs, médiateurs civils, etc.

Dans ce dernier cas, il appartient à l’Etat, aux collectivités territoriales et aux établissements publics administratifs en dépendant, de prendre toutes les mesures de nature à recouvrer, auprès de la tierce personne à la charge de laquelle est mise la rémunération versée aux collaborateurs occasionnels, le montant équivalent à la part patronale des cotisations et contributions, à l’instar de ce que prévoient les dispositions de l’article R. 91 du code de procédure pénale sur la distinction entre les frais qui sont à la charge de l’Etat et ceux dont il fait simplement l’avance.

Il semble que cette circulaire n’ait pas fait beaucoup rire les différents greffiers avec qui j’en ai discuté.

Il est vrai que le sujet ne prête guère à rire.

Peut-être manque-t-il un petit décret d’application pour en éclaircir les modalités?

PS: Si un éminent confrère se trouvant dans la même situation que moi (salarié, etc.) procède différemment, qu’il n’hésite pas à m’en faire part, surtout s’il peut me faire faire quelques économies… Si un conseiller fiscal s’égare sur ce billet et qu’il peut me faire bénéficier de ces lumières, j’irai jusqu’à lui verser 50% des économies qu’il m’aura fait faire (si celles-ci sont légales bien sur).

Le mot de la fin:

Il n’est pas toujours bon d’avoir un haut emploi:

Si tu n’avais servi qu’un meunier, comme moi,

Tu ne serais pas si malade.

La fontaine, « Les deux mulets« .

Flash Gordon

Je viens d’être désigné pour une affaire pédophile (et oui encore!).

La saga continue: pour les épisodes précédents, lire mes billets (1), (2) , (3), (4) et surtout (5).

Finalement, je vais commencer à avoir visualisé plus de photos pédopornographiques que le criminel le plus pédophile…

Bon, ce n’est pas drôle, d’autant que ce blog me sert surtout d’exutoire à cause précisément des affaires de ce type.

Cette fois ci, le parquet me demande d’établir un devis. Comme de toute façon, l’article R107 du code de procédure pénale en fait l’obligation:

Lorsque le montant prévu de ses frais et honoraires dépasse 460 euros, l’expert désigné doit, avant de commencer ses travaux, en informer la juridiction qui l’a commis.

J’ai dans les mains deux ordinateurs dont un contient deux disques durs de 160 Go et 80 Go. L’expertise va donc couter effectivement plus de 460 euros…

J’ai une méthode infaillible pour effectuer un devis: comme je ne sais pas à l’avance si l’un des disques durs est en panne (ce qui augmente considérablement le coût d’investigation), si les données sont cryptées, si les formats utilisés sont exotiques, je procède de la façon suivante: j’effectue complètement l’expertise et j’envoie le devis! Celui-ci est donc particulièrement précis 🙂

Bien sur, s’il est refusé, c’est pour ma pomme.

J’ai donc démarré ce week-end une expertise particulièrement éprouvante, enfermé dans mon bureau.

La procédure d’analyse des scellés commence toujours de la même façon: j’effectue une vérification complète des ordinateurs: y a-t-il un cédérom oublié dans le lecteur, combien de disques sont branchés, débranchés, etc. Et bien pour une fois, mes vérifications ont porté leurs fruits: il y avait une petite carte mémoire flash coincée dans le lecteur ad hoc. Je suis sur que personne ne l’avait remarquée car elle n’apparaît sur aucun procès verbal!

Une carte mémoire flash de 2 Go remplie à ras bord de photos et de films pédophiles!

J’en suis malade.

L’âge d’or est devant nous…

A quoi voit-on que l’on prend de l’âge? Quand on commence à se souvenir d’une époque où l’on était plus mince, plus forts, plus vifs ? Quand nos articulations ne craquaient pas ? Quand on s’aperçoit qu’avant nous pouvions faire plus de chose en se fatiguant moins vite ?

Non!

Quand on commence à dire que c’était mieux avant.

Et cette vision de nos propres capacités s’étend généralement à la société: peu importe à quoi elle ressemblait du temps de notre jeunesse, c’est comme cela qu’elle devrait être, et tout changement survenu depuis lors est considéré comme une dégradation, une dégénérescence, une abomination.

Et puis, notre mémoire, qui n’est pas infaillible, a tendance à idéaliser le passé, à gommer les soucis et les frustrations, à amplifier les joies, tout cela encore enjolivé par le prisme de l’histoire qui met invariablement l’accent sur l’héroïsme, la détermination inébranlable et les vertus civiques, tout en passant sous silence les lâchetés, la corruption et l’injustice.

N’est-ce pas vrai jusque dans le domaine informatique ? Vous qui baignez depuis dix ou vingt ans dans la technologie, ne vous arrive-t-il pas de songer avec nostalgie à l’âge d’or ? De vous plaindre que les systèmes d’exploitation sont moins bons que dans le temps, de rêver à la simplicité des programmes du temps passé ?

« Quand j’utilisais WordStar sur mon TRS 80 avec 48 Ko de mémoire vive et mon lecteur de disquette, je rédigeais mes rapports de 50 pages avec moins de problèmes qu’aujourd’hui »

Avez-vous réessayé les programmes ou les jeux électroniques favoris qui ont illuminé votre enfance sur votre ordinateur d’alors ? Vous souvenez vous des heures passées devant un écran noir et blanc (noir et vert) à jouer au tennis avec une barre verticale servant de « raquette » et une balle carrée qui faisant « bong » avant d’accélérer inexorablement ?

Je viens de refaire une partie de tennis de ce type, et bien c’est NUL ! Je n’ose même pas montrer ce jeu à mes enfants en leur expliquant la larme à l’oeil que mes parents devaient m’en limiter l’usage…

Nous utilisons aujourd’hui des ordinateurs dont les informaticiens d’il y a vingt n’ont pas osé envisager dans leurs rêves les plus fous. Chaque mois, chaque jour, un nouveau concept technologique sort des ateliers ou des laboratoires dans le monde entier. Nos enfants, nos étudiants maitrisent des technologies de façon naturelle et banale que nous avons admirées lors de leurs sorties.

J’ai la chance de travailler dans une école d’ingénieurs au contact de jeunes ayant entre 17 ans et 23 ans. Demandez leur s’il faut autoriser l’usage d’une calculatrice pour un examen en lieu et place d’une règle à calcul.

Eux dont le téléphone est relié à Internet…

Devons nous craindre de voir le ciel nous tomber sur la tête, la technologie prendre le pas sur nos compétences et nous envoyer ringardiser une étagère de musée ?

Nous vivons une époque exaltante où des idées qui affolaient les lecteurs de science fiction sont devenues réalités ou sont en passe de l’être. Cela ne rend pas l’Homme meilleur, mais je suis persuadé que l’apparente complexité du monde actuel prépare un avenir meilleur. Nous devons contraindre nos neurones à suivre le rythme, rester dans la course et si possible en tête. Loin d’être les fainéants qu’ils veulent paraitre, les informaticiens sont les ingénieurs les plus dynamiques.

Et pourquoi pas ? L’âge d’or de l’informatique est devant nous.

PS: une partie importante de ce billet est inspirée d’un article d’Isaac Asimov lu dans « Mais le docteur est d’or » et dont le titre est repris ici.

PS2: C’est vrai qu’avant j’avais des abdos plats et fermes…

It’s raining CATs and dogs…

J’ai mon CAT !

Non, pas un Centre d’Aide par le Travail, mais un beau Certificat d’Aptitude au Tir…

En clair, je suis artificier…

En plus clair, je suis apte à faire sauter des explosifs.

« Pour quelle raison? », allez-vous me dire.

Mais parce que je pratique pratiquais la spéléologie à un niveau tel qu’il fallait commencer à envisager le pire: la sortie sur civière.

Et dans certains gouffres, une civière, cela ne passe pas.

Il faut alors choisir entre:

– faire passer le blessé en vrac malgré ses fractures (boules QUIES obligatoires);

– laisser le blessé où il est, et amener l’hôpital par petits morceaux (prévoir une bonne réserve de morphine, la reconstruction d’un bloc opératoire dans un boyau souterrain sans abimer la nature demandant un certain temps;

– abimer la nature sans tuer le blessé, ni les secouristes (et si possible sans refermer le gouffre).

Le meilleur moyen pour agrandir un passage souterrain loin de toute civilisation (pas d’électricité, pas de compresseur, pas de téléphone portable, par d’accès internet ;), et bien, c’est d’utiliser des explosifs.

Aussi, quand on m’a demandé de participer à l’équipe de secours spéléo de ma région, n’étant plus dans la force de ma jeunesse, j’ai choisi l’option BOOM, et j’ai passé mon CAT:

Le Certificat d’Aptitude au Tir est obligatoire pour certaines professions, comme par exemple pour l’exploitant de carrières. C’est d’ailleurs dans une carrière que j’ai effectué une semaine de stage intensif pour obtenir ce diplôme.

La semaine de stage se termine par un examen théorique ET par une épreuve pratique qui consiste à faire exploser une partie de la carrière: chaque stagiaire dispose d’un trou large de 10 cm, et profond d’environ 10 mètres dans lequel il place les explosifs (amorce de dynamite avec détonateur + mélange explosif) et relie son détonateur au système de mise à feu (l’exploseur).

J’ai eu la chance d’être désigné pour actionner l’exploseur, déclenchant ainsi un tir de carrière contenant 1000 fois plus d’explosifs que je ne ferai jamais sauter sous terre (où l’on utilise des micro charges).

Nous avions appris en cours qu’il faut garder la bouche ouverte au moment de l’explosion pour éviter une surpression au niveau des tympans.

Nous avions également étudié la possibilité d’un « coup de canon ». C’est un phénomène qui se produit quand l’un des trous rempli d’explosif agit comme un canon et expulse toute la roche environnante en l’air.

J’ai eu droit à un « effet canon ».

J’étais donc là debout, la bouche ouverte, les yeux écarquillés par le spectacle magnifique de explosion colossale que j’avais déclenchée, observant la nuée de petits points montant dans le ciel pendant que les instructeurs se ruaient sous le bulldozeur situé près de nous…

Je suis resté seul, bien droit sous mon casque.

J’en ai gardé un souvenir exaltant, ainsi qu’une cicatrice dans le dos quand les pierres ont commencé à pleuvoir autour de moi.

Non, toute peine ne mérite pas salaire !

Je fais chaque année une conférence aux étudiants sur le thème du logiciel libre (présentation des concepts, illustration avec GNU/Linux, avantages et importance croissante, etc.)

Et à chaque fois, un étudiant me pose la question suivante (que je place donc dans ma rubrique « question à deux euros »): « Comment peut-on travailler gratuitement? »

A cela, je réponds:

« Quand on est passionné par quelque chose, il est parfaitement pensable de travailler gratuitement, par plaisir, par altruisme. C’est le principe du bénévolat. »

Et à chaque fois, les étudiants me regardent avec des yeux ronds, eux qui sont formatés pour entrer dans la vie active « traditionnelle ».

Tristan Nitot vient d’écrire un court billet très clair que je vous invite à lire sur ce sujet.

Extraits choisis:

Tous ces gens ont un comportement égoïste, dans le bon sens du terme : ils s’y retrouvent quand ils contribuent. Bien sûr, il n’est pas question d’argent ici. Ils sont en quelque sorte payés « en nature », que ce soit en retirant du plaisir de cette « transaction » qui n’est pas financière, ou en bénéficiant d’un meilleur logiciel.

[…]

si quelqu’un participe à un projet Libre, c’est qu’il y trouve son compte, même si c’est sous une forme non-marchande, en tant que plaisir de s’adonner à un passe temps, considération, réputation, fierté d’avoir fait quelque chose d’utile, intérêt d’avoir un logiciel de meilleure qualité, parce que son patron lui a demandé, ou tout simplement parce que c’était la chose juste…

Je n’aurais pas su dire mieux. J’aime bien aussi l’exemple de la ferme construite gratuitement avec l’aide des voisins. Je prends des notes pour ma prochaine intervention…

Toi aussi mon fils !

Toi aussi mon fils !

Tu quoque, mi fili!

Et tu, Brute!

Le saviez-vous? Jules César, dans l’hypothèse où il a effectivement prononcé cette phrase, l’aurait exprimé en grec :«kai su, teknon» (même toi, mon enfant!), langue des élites romaines.

Si je fais ainsi étalage de ma culture googlesque, c’est simplement parce que mon ignorance me fascine et pour vous narrer la petite mésaventure qui m’est arrivée il y a peu, et qui n’intéressera que moi:

Mon ordinateur est toujours ouvert à tous les vents puisque j’y branche et débranche toutes sortes d’appareils plusieurs fois par expertise. Même la façade est démontée pour pouvoir y mettre mon boitier USB de lecture de disques durs IDE.

J’ai donc sur ma table de travail une machine dénudée particulièrement inesthétique, mais dont tous les voyants, leds et autres loupiotes clignotent à qui mieux mieux dans la pénombre de mon bureau.

Tout ceci est tentant pour des petites mains curieuses.

J’étais concentré sur un travail particulièrement difficile (la lecture d’un billet du carnet de Pikipoki sur la gestion du stress si mes souvenirs sont bons), quand ma fille ainée est entrée dans mon bureau pour discuter avec moi.

Pendant la discussion, elle me montre une lumière en disant « ah c’est joli ça », et sans que je n’ai le temps de réagir, appuie dessus.

Il s’agissait du bouton d’arrêt du PC.

La bouche ouverte, j’ai regardé ma machine se mettre à entamer sa procédure de « shutdown » et s’arrêter.

Une saisie d’image était en cours depuis 3h.

Un article de ce blog était en cours de rédaction sans avoir été « enregistré en mode brouillon » (en mode web 2.0 cela veut dire « circulez y a plus rien à récupérer »).

kai su, teknon

Les Dieux eux-mêmes

J’ai reçu avant hier un email d’un étudiant en droit qui souhaitait que je réponde à plusieurs questions pour lui permettre de faire un exposé qui lui était demandé par un de ses professeurs. La plupart de ses questions trouvaient leur réponse dans les billets de ce blog, aussi lui ai-je répondu de venir préparer son exposé en fouillant ce blog afin de justifier de sa note par un effort personnel. Etant moi-même ancien Maître de Conférences et travaillant encore dans une école d’ingénieurs, je connais bien la tendance naturelle de la plus grande pente (on dit aussi du moindre effort). Après tout, n’ai-je pas été moi même étudiant?

Hélas, l’étudiant piqué par ma réponse a pris la mouche.

Je réponds donc ici d’un coup à tous les étudiants (et lycéens, mais ne s’autoproclament-ils pas étudiants aujourd’hui?) par cette citation:

Et comment ne pas claquer ces têtes à claques devant l’irréelle sérénité de la nullité intello-culturelle qui les nimbe ? Et s’ils n’étaient que nuls, incultes et creux, par la grâce d’un quart de siècle de crétinisme marxiste scolaire, renforcé par autant de diarrhéique démission parentale, passe encore. Mais le pire est qu’ils sont fiers de leur obscurantisme, ces minables.

Ils sont fiers d’être cons.

«Jean Jaurès? C’est une rue, quoi», me disait récemment l’étron bachelier d’une voisine, laquelle et son mari. par parenthèse, acceptent de coucher par terre chez eux les soirs où leur crétin souhaite trombiner sa copine de caleçon dans le lit conjugal.

Ceci expliquant cela : il n’y a qu’un «ah» de résignation entre défection et défécation. J’entends déjà les commentaires de l’adolescentophile de bonne mise : « Tu dis ça parce que t’es en colère.

En réalité, ta propre jeunesse est morte, et tu jalouses la leur, qui vit, qui vibre et qui a les abdominaux plats, « la peau lisse et même élastique « , selon Alain Schifres, jeunologue surdoué au Nouvel Observateur. »Je m’insurge. J’affirme que je haïssais plus encore la jeunesse quand j’étais jeune moi-même. J’ai plus vomi la période yéyé analphabète de mes vingt ans que je ne conchie vos années lamentables de rock abâtardi.

La jeunesse, toutes les jeunesses, sont le temps kafkaïen où la larve humiliée, couchée sur le dos, n’a pas plus de raison de ramener sa fraise que de chances de se remettre toute seule sur ses pattes.

L’humanité est un cafard.

La jeunesse est son ver blanc.

Autant que la vôtre, je renie la mienne, depuis que je l’ai vue s’échouer dans la bouffonnerie soixante-huitarde où de crapoteux universitaires grisonnants, au péril de leur prostate, grimpaient sur des estrades à théâtreux pour singer les pitreries maoïstes de leurs élèves, dont les plus impétueux sont maintenant chefs de choucroute à Carrefour.

Mais vous, jeunes frais du jour, qui ne rêvez plus que de fric, de carrière et de retraite anticipée, reconnaissez au moins à ces pisseux d’hier le mérite d’avoir eu la générosité de croire à des lendemains cheguevaresques sur d’irrésistibles chevaux sauvages.

Quant à ces féroces soldats, je le dis, c’est pas pour cafter, mais y font rien qu’à mugir dans nos campagnes.

Pierre Desproges, chronique de la haine ordinaire

ALors ? Deuxième ou troisième degré ?

Allez, je les aime bien MES étudiants.

Encore qu’hier, un candidat, à ma question « comment vous voyez vous dans sept ou huit ans ? » m’a répondu:

« Moi, mon rêve?, avoir une belle maison bien à moi… »

Mit der Dummheit kämpfen Götter selbst vergebens.

[Contre la stupidité, les dieux eux-mêmes luttent en vain.]

Schiller, Die Jungfrau von Orleans.

Ils ont dix huit ans aujourd’hui

Je travaille dans une école d’ingénieurs et je participe aux entretiens d’admission. J’ai quelques questions « pièges » qui me servent à déstabiliser (un peu) les candidats et des questions de culture générale. Mon problème, c’est que je prends chaque année au compteur de la faucheuse une année supplémentaire, alors que les candidats que j’interroge chaque année ont toujours dix huit ans. Il me faut donc mettre mes questions à jour.

Avez-vous conscience que les jeunes qui vont entrer à l’université dans quelques mois sont nés en 1989? Ils n’ont pas connu le bicentenaire de la révolution française. Ils sont nés l’année de la mort de la mère Denis.

Pour eux internet a toujours existé, et en mode graphique, alors que c’est l’année de leur naissance que Tim Berners-Lee propose de créer un système hypertexte distribué sur le réseau informatique pour que les collaborateurs puissent partager les informations au sein du CERN. Cette même année, le CERN ouvre sa première connexion extérieure avec Internet.

Pour eux, les termes AppleII, MacPlus et Amiga relèvent de la préhistoire. Ils ne connaissent qu’un seul fabricant de processeurs (ils ne connaissent pas le mot microprocesseur) et n’ont jamais entendu parler de « station de travail ». Pour eux, un micro, c’est fait pour chanter dedans. Le Minitel et la norme Vidéotex leur sont inconnus.

Ils n’ont jamais connu le mur de Berlin.

Ils avaient deux ans lors du prix Nobel de Pierre-Gilles de Gennes, trois pour celui de Georges Charpak.

Ils avaient 9 ans lors de la ratification du traité de Kyoto, 10 ans lors de la tempête de décembre 1999.

Ils ne savent pas ce que c’est qu’une cassette audio ou un walkman. Pour eux, MP3 c’est un baladeur numérique, pas un format de fichier. Pour eux, un portable, c’est un téléphone.

Pour eux, un blog, c’est un skyblog…

Salut les vieux!

La nuit, à travers le réseau

Il y a quelques temps, j’ai procédé à la rotation de ma machine de tests qui est allée remplacer le PC de mon fils devenu plus exigeant en matière de jeux (éducatifs). J’ai récupéré son « vieux » PC pour en extraire la « substantifique moelle » et en faire ma nouvelle machine de tests.

Las, il se trouve que, pour une raison inconnue, ma carte PCI me permettant de brancher des disques SATA entre en conflit avec quelque chose que je n’ai pas encore eu le temps de déterminer. Et me voici cette semaine avec un disque dur SATA de 160 Go à analyser! Comment faire?

Je décide alors d’utiliser le PC d’origine (celui sous scellé) en laissant son disque SATA à l’intérieur, et de procéder à une prise d’empreinte à travers le réseau.

Re-las, ma distribution favorite HELIX ne reconnait pas les clavier et souris USB nécessaires sur ce PC. Me voici donc à la recherche d’une nouvelle distribution de type « live boot cd ». Muni d’un cédérom RW et de ma fidèle ligne ADSL, je teste différentes solutions trouvées sur Internet (qui n’est pas encore mort;).

Et, oh las (*), je désespérais de trouver mon bonheur, quand je suis tombé sur DEFT qui me semble pas mal du tout pour l’usage que je compte en faire.

Après démarrage sur le cédérom DEFT basé sur une Ubuntu, je vérifie la présence des commandes « dd » et « nc » (netcat). J’installe cygwin sur mon PC de travail sous Windows XP avec également la commande netcat.

Côté PC de travail, je tape:

« nc -l -p 2000 > image.dsk »

Et côté PC sous scellé booté sous DEFT:

« dd if=/dev/sda | nc IP_PC_de_travail 2000 »

Et me voilà parti pour cinq heures de prise d’image la nuit à travers le réseau.

Et moi, pendant ce temps là, la nuit JE DORS 🙂

(*) Je n’ai pas pu résister…

Billet anonyme

On me demande souvent pourquoi ce blog est anonyme.

Il y a plusieurs raisons:

1) les dossiers dont je parle sont réels. Les noms sont changés, les dates aussi. Mais puisqu’un expert judiciaire dépend d’une cour d’appel, les dossiers sur lesquels il intervient sont localisés géographiquement. Le risque qu’une personne se reconnaisse serait trop grand.

2) l’activité d’expert judiciaire n’est pas une profession. Un expert judiciaire doit exercer une « vraie » profession pour rester dans le coup d’un point de vue « compétences ». Le nombre d’expertises réalisées en une année est faible et ne doit pas être considéré comme un revenu financier (c’est mon point de vue). Par conséquent, la recherche de clients n’est pas mon objectif. Ce blog n’est pas une vitrine de mon savoir faire (ou de ma maladresse) ni un moyen de me faire « mousser » auprès de mes confrères (que je salue au passage), des magistrats (que je salue respectueusement au passage) ou des avocats (que je salue très respectueusement au passage).

3) l’utilisation d’un pseudonyme offre un confort d’écriture et une liberté de ton que j’apprécie. Liberté vis à vis de mon employeur (que je remercie de me faire vivre chaque mois en échange d’un dévouement corps et âme inconditionnel et sans limite), liberté également vis à vis de mes confrères ou de ma compagnie régionale d’experts. J’ai des idées parfois incongrues ou à contre courant, mais je n’ai pas une âme de militant. C’est certainement une forme de lâcheté, mais je tiens à ce confort.

Par ailleurs, je ne résiste pas à adapter une récente diatribe de Maître EOLAS (dont vous trouverez l’original ici):

Alors une petite mise au point.

D’abord, j’existe. J’ai vérifié ce matin auprès d’experts, médecins, juristes et philosophes, qui m’ont tous confirmé mon existence. Aucun doute n’est plus permis là dessus.

Ensuite, le fait que je blogue anonymement ne signifie pas que mon pseudonyme est en libre service et permet à n’importe quel petit malin de se faire passer pour moi impunément. Mon anonymat ne fera jamais obstacle à ce que j’aille en justice demander des comptes à quiconque s’amuserait à cela.

Quand j’interviens en qualité d’expert judiciaire, je le fais sous mon vrai nom, par une lettre recommandée écrite sur mon papier à en tête haut de gamme qui coûte fort cher et justifie mes honoraires hors de prix. Pas par e-mail sauf si je n’ai qu’une adresse électronique pour contacter les parties. Je n’écrirai jamais sous le nom de Zythom, expert judiciaire. Zythom est un nom de plume, dans le seul cadre de la création littéraire qu’est ce blog.

D’un point de vue juridique, le pseudonyme est protégé civilement contre l’usurpation. Pénalement, le délit d’usurpation d’identité est constitué dès lors que je suis aisément identifiable puisque je suis le seul expert à employer ce pseudonyme, si l’usurpateur m’exposait à des poursuites civiles, pénales ou disciplinaires du fait de ses actes sous sa fausse identité.

Mais surtout, au delà de mon humble personne, le fait d’usurper la qualité d’expert judiciaire pour déterminer quelqu’un à effectuer un paiement, fût-ce d’une somme effectivement due, constitue le délit d’escroquerie. Peu importe que vous vous estimiez vous même victime d’une escroquerie ou d’un débiteur indélicat, cela ne vous permet pas de commettre un délit pour obtenir votre dû. On ne vole pas son débiteur, on ne l’escroque pas, pas plus qu’on ne le menace ou qu’on ne l’agresse. On ne se fait pas justice à soi même, c’est une des fondations de la république.

Mais qu’il soit désormais clair que si quelqu’un se disant Zythom prend contact avec vous pour se la jouer expert judiciaire, c’est un menteur. Merci de me prévenir immédiatement. Je n’aurai aucune tolérance à ce sujet.

Et j’ai un excellent avocat.