Résumé du texte qui suit : Vincent prépare sa sortie et organise la mise en ordre de ses explications pour ses proches. Mais la vie s’accroche et est toujours pleine de surprises.
23 juin
Neuf jours que je suis planqué dans cette auberge à faire semblant… Je reste discret et fidèle à mes habitudes : je limite mes interactions avec les humains. Je n’ai parlé à personne pendant l’exercice incendie de mardi dernier (ou la fausse alerte, je n’ai pas bien compris). Mais curieusement, je me suis inscrit à la promenade nocturne de samedi, organisée par le syndicat d’initiative de L’Éreintante. J’ai adoré me promener de nuit dans la forêt. J’avais pris une canne de marche et un petit sac à dos pour y glisser une torche, une gourde, un sifflet et une couverture de survie. Tout cela m’a rappelé l’époque des sorties spéléos dans le coin, où l’on passait la journée sous terre et où l’on ressortait à l’air libre en pleine nuit. Tout cela me semble si loin. Je me souviens d’un seul nom : la Traversée Gruyère-Surprises, qui fait se rejoindre la lésine du Gruyère et le gouffre des Surprises. Il faudrait que je demande à Mme Lalochère, la patronne de l’auberge si c’est vraiment dans le coin.
Les jours passent. Je suis cloîtré dans ma chambre et je fais des listes : je note tout ce que je dois mettre en ordre avant de, avant de… Bref je mets en ordre ce qui doit être mis en ordre. J’ai commencé par écrire (oui écrire) le mot de passe de mon coffre-fort numérique qui contient tous mes mots de passe. J’ai indiqué où se trouve ma clé d’authentification multifactorielle, et le code de mon téléphone. J’ai écrit le message qui doit être mis sur mon blog, sur mon site pro, sur mes comptes de réseaux sociaux. Et chaque jour, j’écris une lettre à chacun de mes proches. En commençant par Sylvie, l’amour de ma vie. Une lettre par enfant. Une lettre par petit-enfant. Ce que je veux que chacun garde de moi doit tenir sur une feuille.
Je mange toujours seul à une table du restaurant. M. Carolo, l’homme d’action de la propriétaire, me laisse m’installer dans un coin d’où je peux regarder le spectacle de la petite communauté des clients. Les visages fournissent tellement d’indications…
Je regarde le mien dans le miroir de la salle de bain, et je me trouve le teint jaune. Enfin, un peu plus jaune que d’habitude. Mes origines japonaises sont accentuées par la maladie, mais cachent son symptôme le plus visible. Au moins les gens ne me
TOC TOC TOC
On a frappé à la porte de la chambre pendant que j’écrivais dans le carnet. Après avoir ouvert, je suis resté bouche bée.
Imaginez : devant moi se tient Sylvie, ma femme.
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Commentaire de l’auteur :
Le premier paragraphe est un exemple d’interaction de groupe proposée par la Direction de l’auberge (une promenade nocturne dans les environs). Comme indiqué précédemment, j’ai une idée précise de l’histoire que j’ai décidé de raconter, ce qui me met un peu hors jeu concernant les interactions. Les organisateurs (expérimentés) du projet avait prévu le cas et il était possible d’indiquer si l’on acceptait ou refusait les interactions libres avec les autres auteurs. Mais c’est aussi le sel de ce projet que de voir les autres joueurs venir potentiellement bouleverser ses plans, et j’ai donc laissé mon choix sur « oui, j’autorise les interactions libres », tout en croisant les doigts.
Par contre, il y avait également un deuxième type d’interaction possible : les interactions concertées. Le fait de faire écrire par Vincent-personnage dans son carnet « Je reste discret et fidèle à mes habitudes : je limite mes interactions avec les humains. » prépare le terrain à un refus poli si l’interaction proposée ne cadre pas avec le script prévu pour ma marionnette.
Dans les règles du jeu, les organisateurs nous avaient indiqué que l’auberge, bien que fictive, était située approximativement dans le Jura. Il se trouve que j’ai beaucoup pratiqué la spéléologie dans le Doubs et le Jura pendant mes jeunes années. Je me suis donc amusé à faire écrire Vincent-personnage un souvenir de sortie spéléo dans le coin : la Traversée Gruyère-Surprises, qui fait se rejoindre la lésine du Gruyère et le gouffre des Surprises. C’est l’une des deux sorties spéléos où j’ai emmené Mme Zythom pour lui faire découvrir la pratique de ce sport qui lui volait son fiancé un week-end sur deux. Il s’agit d’un petit réseau simple à équiper en cordes et pouvant accueillir des débutants bien encadrés. Il y a 4 entrées possibles et autant de sorties. Vous entrez et descendez, puis vous progressez sous terre avec des difficultés intéressantes (ressauts, toboggan, puits, étroitures) qui illustrent assez bien toutes les sensations que procurent ce sport :-). Puis vous remontez et sortez à la même hauteur que là où vous êtes entrés. Ce qui a beaucoup amusé mon épouse, c’est qu’il a fallu 4h sous terre de l’entrée « Gruyère » jusqu’à la sortie « Surprises », et 5mn de marche en extérieur pour revenir de « Surprises » à « Gruyère » chercher nos affaires… Elle garde aussi un bon souvenir des étroitures (ce qui est rare), où pourtant seul son casque apparaissait !
La fin du billet bute sur une incohérence qui je l’espère est passée inaperçue de la plupart des lecteurs : comment écrire la scène de la surprise de Vincent-personnage lors de l’ouverture de la porte, sachant que ce que vous lisez est une note écrite par Vincent-personnage dans son carnet ? J’ai beaucoup cherché, et je n’ai pas trouvé de solution qui me satisfasse pleinement. Personne n’écrit « TOC TOC TOC » dans un carnet intime ! Mais il me fallait une rupture justifiant l’arrêt d’écriture (la phrase « Au moins les gens ne me » n’est pas terminée). Dans la vraie vie, si l’on est arrêté en pleine écriture, on reprend simplement là où l’on a été interrompu ! Mais c’est moins dramatique. J’apprends mes limites de Vincent-auteur…
Résumé du texte qui suit : Après avoir révélé son secret, Vincent en tire une conséquence pour le moins radicale…
22 juin
Il m’a fallu quelques minutes pour analyser les conséquences de ce que le médecin vient de m’annoncer. Il ne me reste que six mois à vivre !
J’ai alors pris la décision la plus importante de ma vie, et je lui ai dit : “Tu ne dis RIEN à personne. Tu es tenu au secret professionnel. LE PLUS STRICT. Tu ne dis rien à ma femme, ni à la tienne d’ailleurs, ni à mes enfants, ni au maire. À PERSONNE. Tu scannes la feuille de résultats dans mon dossier et tu détruis l’original. Donne-moi mon ordonnance pour les anti-douleurs.”
Je suis rentré chez moi, j’ai embrassé ma femme Sylvie et je lui ai expliqué que le médecin m’avait trouvé fatigué et me conseillait un repos forcé avec des médicaments pour mon mal de ventre.
Puis je me suis réfugié dans mon antre.
Le choc de l’annonce a été terrible. Je fonds en larmes.
J’aime plus que tout Sylvie. J’aime mes enfants. J’aime même mes beaux-fils et belles-filles, c’est dire. J’aime encore plus mes petits-enfants.
Je suis un eudémoniste convaincu. Le bonheur est au cœur de mon existence. Mais comment annoncer aux gens qui m’aiment ma mort prochaine ? J’ai décidé cela en quelques secondes, dans le cabinet médical : rien ne viendra perturber le bonheur des personnes que j’aime, au moins pendant les six prochains mois. Ma mort sera brutale, nette et précise. Disons en une semaine. Oui, c’est ça une semaine pour mourir, c’est bien.
Le bonheur de mes proches, à tout prix.
Je sèche mes larmes. Je réserve sur internet un séjour dans une auberge perdue dans la pampa.
J’annonce à Sylvie ma décision de m’isoler trois semaines pour me reposer.
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Commentaire de l’auteur :
Dans ce troisième texte, le problème est posé : quand on apprend la date assez précise de sa mort, comment gérer cette nouvelle et en particulier pour ses proches ? Faut-il l’annoncer sur les réseaux sociaux pour détailler au monde son départ, dans la pure ligne éditoriale d’un épisode de Black Mirror, faut-il le garder pour soi et préparer secrètement sa sortie en beauté en trompant tout son monde au risque que chacun se dise « je n’ai pas profité de lui pendant ses derniers instants », faut-il mettre ses proches dans la confidence et faire souffrir tout le monde en même temps que soi ? Vincent a choisi. Il a également choisi sa fin de vie.
Mais cette note écrite dans le carnet disposé dans une chambre d’auberge cache-t-elle autre chose ?
Résumé du texte qui suit : Vincent vient cacher ses malheurs et son désarroi devant son monde qui s’effondre. Il nous révèle ici son secret.
20 juin
Il m’a fallu presque une semaine pour trouver le courage de franchir le pas et reprendre le chemin de ce carnet. Je pense qu’au stade où j’en suis, cela devrait me faire du bien de mettre des mots sur mon mal-être. Je crois avoir réussi à tromper tout mon monde, à part peut-être Gaston, le chauffeur qui m’a amené ici.
Alors voilà, comme dirait Baptiste Beaulieu…
Depuis des mois, je me plains d’une grande fatigue générale qu’aucun sommeil ne répare, assortie de douleurs abdominales. J’ai donc vu le médecin qui m’a prescrit des analyses. La semaine dernière, les résultats sont tombés et le médecin m’a demandé de venir le voir pour en parler. C’était la semaine dernière, et j’ai déjà l’impression que c’était il y a un mois.
Mon médecin généraliste est un ami depuis 30 ans. Il me connaît bien et soigne toute la famille, ma femme Sylvie, mes enfants et petits-enfants. Mais cette fois-ci, j’ai bien vu dans son accueil un regard particulier. J’ai remarqué également que la salle d’attente était bien vide par rapport à d’habitude.
“Vincent, j’ai un truc terrible à t’annoncer. Tu as un cancer du pancréas. Un cancer fulgurant…” J’ai senti un froid glacial m’envahir. J’ai balbutié un vague “mais c’est quoi le traitement ?”
“Il n’y a aucun traitement à part des soins palliatifs contre la douleur.”
Quand j’y repense aujourd’hui, je revois encore sa mine déconfite. Et le petit mouvement de sourcil quand je lui ai dit : “ah ben au moins le truc positif c’est que je sais maintenant ce que j’ai. Et j’en ai pour combien de temps ?”
“Il te reste environ six mois…”
Le monde s’est écroulé autour de moi.
Puis j’ai pris la décision la plus importante de ma vie.
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Commentaire de l’auteur :
Sur le même principe que le texte précédent, le billet est court. Ils le seront tous, c’est pour moi une conséquence directe de l’idée de trouver un carnet de note vierge dans une chambre d’auberge.
Le texte précédent devait respecter une contrainte littéraire importante (facultative) : “Les initiales des phrases successives devront suivre l’ordre alphabétique. Après épuisement des vingt-six lettres, si le texte continue on redémarre à la première ou on repart dans l’ordre inverse.“ Vous pouvez le relire et vérifier : mission accomplie. Le présent deuxième texte n’était soumis à aucune contrainte littéraire.
J’avais un peu peur de l’effet de ce billet sur l’ambiance de l’auberge, tant côté lecteurs, que du côté du forum des auteurs. En effet, c’est l’été à l’auberge (dont le temps est synchronisé avec celui de la réalité), les billets sont plutôt joyeux, et la pandémie de COVID-19 a été soigneusement bannie par les organisateurs du projet.
Et effectivement, le billet a fait l’effet d’une (petite) bombe. C’est le billet le plus noir à ce moment là de l’aventure collective qui débute. Certains auteurs m’ont contacté en direct pour me demander si c’était réellement une fiction, les commentaires sous le billet montraient une certaine surprise, voire une inquiétude. J’étais content de moi.
J’ai découvert à ce moment là une complexité à laquelle je ne m’attendais pas du tout, digne du film « Inception ». En effet, j’existe dans la vraie vie sous une identité normale. J’écris dans ce projet comme auteur une fiction sous le pseudonyme Vincent-auteur où je mets en scène un personnage Vincent-personnage. Sous les textes que je publie, et sous les textes des autres auteurs, je commente sous le pseudonyme Zythom pour qu’il n’y ait aucun rapport avec Vincent-auteur ou Vincent-personnage. Cela fait beaucoup de personnes dans une seule tête…
Sur le forum des auteurs, il y a beaucoup de discussions, des demandes d’interactions, des encouragements, des questions sur l’écriture, mais aussi des réactions sur les histoires que chaque auteur développe. Or, j’ai une idée très précise de l’histoire que je souhaite raconter, et je veux que ni les lecteurs des textes, ni les auteurs qui échangent avec moi sur le forum n’en devinent la suite avant publication. Cette contrainte a été pour moi très difficile à tenir et a limité plutôt fortement les interactions avec les autres personnages.
A propos d’interaction, la phrase « Je crois avoir réussi à tromper tout mon monde, à part peut-être Gaston, le chauffeur qui m’a amené ici. » renvoyait originellement un lien vers le texte du chauffeur de l’auberge qui m’avait amené. Comme nous ne sommes pas sensé connaître les notes écrites dans les carnets des autres joueurs, nous ne devions pas faire de lien vers les billets publiés, et les organisateurs m’ont suggéré gentiment de supprimer le lien. J’aimais pourtant bien l’idée de liens croisés entre tous les textes, à chaque interaction, tant que les liens n’étaient pas exploités par les auteurs pour faire croire aux lecteurs que les notes étaient lues par les personnages.
Ici, je peux le faire : il s’agissait du texte intitulé « Monsieur Vincent ». Je n’ai pas réussi à créer une interaction plus forte que de citer fugitivement l’existence de Gaston, ni à développer une suite avec lui qui soit cohérente avec l’histoire que je voulais raconter, tout en la cachant à Gaston-auteur. C’est à cela aussi que l’on voit que je suis un écrivain débutant.
Ceux qui ont lu ma série « 25 ans dans une startup » sur mon blog précédent, savent que j’aime bien essayer de placer des cliffhangers. Et ici, la phrase finale a fait son petit effet 🙂
Résumé : Vincent, 56 ans, est un informaticien un peu fatigué. Passionné par tout ce qu’il entreprend, un peu timide, bousculé par son implication dans la vie politique de sa commune, par les fantômes de ses anciens dossiers d’expertises judiciaires, il souhaite faire le point sur lui-même lors d’un séjour solitaire dans cette auberge qu’il a découverte sur internet.
16 juin
Ah quelle bonne idée que ce petit carnet découvert dans la chambre ! Bienvenue à l’auberge m’ont-ils dit à l’entrée. C’est vrai que le taxi brousse qui m’a amené ici avait l’air bien sympathique, mais il a dû me trouver bien taiseux… Du coup, enfermé dans mes pensées, j’ai un peu oublié de lui poser des questions sur la région. Évidemment, je n’ai rien dit de ce qui m’amène dans ce coin isolé !
Franchement, l’idée d’écrire ce qu’il m’arrive dans ce petit carnet me plaît de plus en plus, et je résiste à la tentation du petit clin d’œil à la grande Histoire en écrivant “Rien” à la date d’hier. Gare aux moqueries si ce carnet tombe un jour dans les mains de quelqu’un…
Hier, je suis donc arrivé dans cette auberge où je viens cacher mes malheurs et mon désarroi devant mon monde qui s’effondre. Informaticien taiseux qui souffre des interactions sociales obligatoires, me voilà bien la caricature du nerd asocial. J’ai sans doute l’excuse du poids des secrets que je porte, et de la souffrance que j’impose à mes proches, mais il est trop tôt pour que je confie tout cela à ce carnet. “Knowledge is power”, paraît-il.
Le plus dur reste à venir. Même le wifi m’a lâché…
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Commentaire de l’auteur :
J’ai décidé d’être le plus plausible possible. Mon personnage arrive dans la chambre d’une auberge et découvre un carnet dans lequel il décide d’écrire des notes. Il ne va pas écrire un roman dès le premier jour : donc le billet est court. Que peut-on raconter à soi-même dans un carnet ? Une blague, le « Rien » fait référence au mot de Louis XVI dans son journal à la date du 14 juillet 1789, qui a tant fait couler d’encre, semble-t-il à tord.
De quels malheurs parle Vincent ? On peut supposer qu’il s’agit d’une référence aux fantômes de ses anciens dossiers d’expertises judiciaires cités dans le résumé. Mais est-ce le cas ? Il écrit « devant mon monde qui s’effondre » et parle de « secrets que je porte et de la souffrance que j’impose à mes proches« .
S’il a des proches, pourquoi vient-il séjourner seul plusieurs semaines dans une auberge ?
« Knowledge is power » est une blague cryptique qui fait référence à un jeu vidéo sur PS4 mais aussi à la traduction anglaise d’une citation du philosophe Francis Bacon, dans “De haeresibus” en 1597 « Nam et ipsa scienta potestas est » (pas lu, mais un jour peut-être)… Savoir, c’est pouvoir.
EDIT de 19h30 : J’ai oublié de signaler une contrainte littéraire importante sur ce premier texte : « Les initiales des phrases successives devront suivre l’ordre alphabétique. Après épuisement des vingt-six lettres, si le texte continue on redémarre à la première ou on repart dans l’ordre inverse.« Je m’en suis bien sorti: mission réussie.
J’ai participé à un jeu de rôle littéraire regroupant de nombreux blogueurs réunis dans une auberge fictive. Il s’agissait de mon premier jeu collectif d’écriture. L’idée était simple : chaque blogueur invente un personnage, ce dernier occupe l’une des chambres de l’auberge dans laquelle se trouve un carnet qu’il remplit deux ou trois fois par semaine. Les notes de tous les carnets sont publiées sur le site web (bien réel lui).
Un forum de discussion réservé aux blogueurs permet d’échanger et de proposer des interactions entre les personnages.
Il y a eu plus de 80 participants sur les trois mois et demi d’ouverture de l’auberge et plus de 800 billets publiés pendant cette période. Ça a été une aventure épique. Je vais vous présenter mon petit bout de la lorgnette, à travers les 9 billets de l’histoire que j’y ai inventée. Le présent billet fait office d’introduction du projet et du premier texte que j’y ai publié. Chaque texte publié ici sera suivi d’un commentaire de ma part sur son écriture. Le 9e texte sera suivi d’une conclusion sous la forme d’un bilan personnel, avec remerciements aux personnes qui ont organisées ce projet à la complexité insoupçonnée.
Chaque blogueur disposait d’un livret illustré contenant une carte des environs, un plan détaillé de l’auberge (RdC, 1er et 2e étage), les horaires des petits-déjeuners et repas, et les règles du jeu. En voici un extrait :
Les personnages sont soit des clientes ou clients, soit des membres du personnel de l’auberge. Chaque auteur a connaissance des textes écrits par les autres. Mais dans le récit, les personnages n’ont pas connaissance des textes des autres personnages. C’est un petit exercice de dissociation, qui fait tout le sel de ce jeu. […] De façon naturelle, durant leur séjour, les personnages se croisent, se parlent et vivent divers événements, bénins ou non. Ces événements peuvent impliquer d’autres occupants de l’auberge. Il y a des interactions simples et des interactions plus lourdes qui peuvent impacter fortement le récit d’autres personnages.
Mon personnage : C’est la première fois que j’écris une œuvre de fiction. C’est aussi la première fois que je découvre la difficulté d’inventer un personnage : lui trouver un caractère, une identité, un sexe, une personnalité, des sentiments, des idées politiques, etc. J’ai donc cédé à la facilité : ce personnage, ce sera moi. Et sur les conseils de l’organisatrice du projet dont je suis le blog depuis longtemps, j’ai changé mon pseudonyme Zythom pour le prénom Vincent.
Pendant les trois semaines (temps réel synchrone au temps de l’histoire) que j’ai passées à l’auberge, j’ai donc été Vincent.
Qui est Vincent ? Je vous l’ai dit, c’est moi. Voici donc la présentation du personnage Vincent, pour les participants de l’aventure : Vincent Mem, 56 ans est un informaticien un peu fatigué. Passionné par tout ce qu’il entreprend, un peu timide, bousculé par son implication dans la vie politique de sa commune, par les fantômes de ses anciens dossiers d’expertises judiciaires, il souhaite faire le point sur lui-même lors d’un séjour solitaire dans cette auberge qu’il a découverte sur internet.
Je jette quelques idées sur mon brouillon d’histoire, et je commence le premier billet. L’exercice est plus difficile que je ne pensais : il faut un titre (ça, ça va), un résumé, puis le billet. Le résumé est lu avant de lire le billet, et il est relu avant la lecture des billets suivants pour permettre au lecteur de rapidement se replonger dans l’histoire du personnage, qu’il a pu oublier (car il y a beaucoup de personnages !). Il ne faut pas spoiler, mais il faut pouvoir rappeler. Diantre.
Là aussi, pour le premier texte, j’ai fait au plus simple : le résumé est la présentation du personnage.
J’ai été contacté via Twitter par @ddevpros, mentor d’étudiants d’une formation Openclassrooms consacrée au métier de RSSI. Je ne connais pas cette formation, ni n’ai d’intérêts dans Openclassrooms, mais je ne peux pas résister longtemps à une demande d’interview, surtout quand celle-ci est à destination d’étudiants et qu’en plus les interviewers m’autorisent à la publier sur ce blog (autorisation obligatoire car il s’agit d’une œuvre collective). Merci donc à @ddevpros (mentor) et à Zabre (pseudo du mentoré) qui m’ont posé les questions. Je publie l’ensemble ci-dessous, en espérant que cet échange puisse aussi servir à des étudiants qui passeraient par ici.
0] Petite présentation Cette interview étant amenée à être publiée sur votre blog, pourriez-vous vous présenter succinctement pour vos nouveaux lecteurs ?
Je suis informaticien, responsable de la sécurité des systèmes d’information dans une école de commerce, où j’exerce avec passion mon métier. Comme beaucoup de personnes, j’ai aussi un certain nombre d’activités en parallèle. Pour ma part, j’ai choisi de mettre mes compétences au service de la justice qui a accepté pendant 21 ans de m’inscrire sur la liste des experts de justice. J’ai été également conseiller municipal dans ma petite mais magnifique ville de 3500 habitants. Je suis marié à une merveilleuse avocate qui m’aide (et que j’aide aussi !) à essayer d’éduquer trois merveilleux enfants plein de vie et d’intelligence que j’aime.
J’aime la spéléologie, le parachutisme et l’aviron.
J’aime l’informatique et tout particulièrement l’intelligence artificielle (et les réseaux de neurones formels bouclés). J’aime bien aussi cracker les mots de passe.
J’aime la science-fiction (surtout les auteurs classiques de l’âge d’or), l’espace, la cosmologie, les mathématiques et l’épistémologie. Le tout à un niveau débutant.
Je tiens depuis 2006 un blog sous le pseudonyme Zythom, d’abord à l’adresse zythom.blogspot.fr puis à l’adresse zythom.fr
I] Métier actuel et expériences utiles Pour ceux qui ne vous connaissent pas encore, quel est votre métier actuel ?En quoi consiste-t-il au quotidien ?Avez-vous des expériences passées qui vous ont été utiles pour ce métier ?
Je suis responsable de la sécurité des systèmes d’information. Mon rôle dans l’entreprise est de définir et mettre en œuvre la politique de sécurité du système d’information, diagnostiquer et analyser les risques numériques, choisir les mesures de sécurité et élaborer le plan de leur mise en œuvre, sensibiliser et former sur les enjeux de la sécurité informatique, auditer et contrôler l’application des règles de la politique de sécurité, et enfin effectuer une veille technologique et prospective.
Toutes mes expériences passées me sont utiles pour ce métier : j’ai été enseignant ce qui me sert pour la sensibilisation à la sécurité, j’ai été DSI ce qui me sert pour les aspects managériaux, budgétaires et de gestion de projets, j’ai été expert judiciaire ce qui me sert pour les aspects techniques, j’ai été chercheur ce qui me sert pour la veille technologique et l’envie d’apprendre et de toujours progresser.
II] Périmètre d’action/champ Vous travaillez dans une école de commerce. Quel est le périmètre ou champ d’action que vous avez à couvrir ?
Mon périmètre couvre l’ensemble des risques numériques de l’entreprise. Je suis aidé en cela par l’ensemble du personnel, puisque chacun est concerné par la sécurité informatique et a un rôle à jouer (la chaîne, le maillon, etc.).
Comment gérez-vous le matériel que l’on pourrait qualifier de “non maîtrisé » ? (ex : les ordinateurs personnels des étudiants)
Le plus simplement du monde : ne faire confiance à personne. Les concepts de BYOD ou de Zero Trust sont parfaitement implantés dans l’univers de l’enseignement supérieur, car consubstantiels à sa mission. Comme vous ne maîtrisez pas les éléments terminaux, il faut parfaitement maîtriser les réseaux et les serveurs. Tout est énormément segmenté.
Comment gérez-vous la donnée personnelle de manière générale ?
C’est une préoccupation majeure de l’école. J’assiste quotidiennement le DPO de l’entreprise dans cette mission où j’interviens sur la dimension sécurité. Nous sommes tous les deux associés très tôt aux projets pour aider, conseiller et nous assurer de la conformité vis à vis des lois et règles de l’art.
III] Environnement Disposez-vous de ressources matérielles et/ou humaines pour vous assister au quotidien ? Suffisamment ?
Je dispose de scanners de vulnérabilités, d’outils de gestion de parc, de parefeux très performants et de ressources matérielles très conséquentes. Mais surtout, l’école dispose d’une équipe d’informaticiens extrêmement compétents, qui n’ont pas besoin de moi, ce qui me permet de me concentrer sur la sensibilisation de la direction et des utilisateurs.
Pensez-vous que les autres employés sont sensibilisés à la sécurité informatique ? Faites-vous des exercices de sensibilisation ? Des formations en interne ? Ou même à l’usage des étudiants ?
Aujourd’hui, tout le monde est sensibilisé à la sécurité informatique. Néanmoins, les efforts des attaquants sont tels, et leurs astuces si déroutantes, qu’il faut toujours et toujours former les utilisateurs. Les emails de phishing sont quasi parfaits, les faux sites ressemblent de plus en plus aux vrais sites, les appels téléphoniques se faisant passer pour des services supports sont de plus en plus réalistes… Dans quelques années (mois?) les deepfakes vocaux permettront de se faire passer au téléphone pour une personne connue et de confiance !
Pour cela, j’utilise tous les outils de communication à ma disposition : emails d’alerte (avec au passage un rappel d’une règle de bonne pratique), site intranet, site de formation en ligne, chaîne vidéos… Le tout à destination des personnels, des professeurs et des étudiants. Si possible dans la bonne humeur, tout en restant professionnel.
IV] Démarches/Normes Dans votre manière de travailler, appliquez-vous des démarches comme ITIL ou des normes comme ISO27001 ? Si non, est-ce par choix ou par obligation ?
J’ai été formé à différentes méthodologies, que j’ai ensuite enseignées. J’en connais le formalisme, l’intérêt mais aussi les limites. J’ai suivi une formation ITIL lorsque j’étais DSI pour optimiser les processus du service informatique. J’ai suivi une formation de Risk Manager ISO/CEI 27005:2018 (c’est son nom complet). J’ai étudié EBIOS, je lis attentivement les différentes normes ISO27xxx et en particulier les documents de l’ANSSI (particulièrement bien faits). Tous ces documents donnent des règles très importantes et des idées qu’il faut suivre.
Mais il faut rester pragmatique. Les méthodologies s’appuient sur des modèles d’entreprise, sur des modèles de comportement, sur des vulnérabilités documentées, sur des retours d’expériences. Les normes sont le langage de la formalisation des connaissances sur un sujet donné au moment de sa rédaction. Mais le monde bouge, les modèles sont imparfaits, les méthodologies évoluent, les référentiels également.
Il faut savoir se détacher de la norme. Par exemple, dans ma politique de gestion des mots de passe, j’ai écris noir sur blanc qu’il ne fallait pas changer son mot de passe régulièrement. S’il est bon, complexe, différent pour chaque compte, non compromis, pourquoi en changer ? Parce que « c’est plus sûr » ? Vous en êtes certain ? Les utilisateurs n’ont-ils pas un nombre impressionnant de solutions de contournement des politiques de gestion des mots de passe qui impose d’en changer tous les x jours ?
Avez-vous des règles spécifiques liées au domaine d’activité (éducation)
Les règles spécifiques au domaine d’activité de mon entreprise sont décrites dans le référentiel général de sécurité (RGS) puisque l’école à une mission de service public.
Les règles du RGS sont par ailleurs durcies par celles du CNRS puisque l’école héberge un laboratoire du CNRS.
V] Travail au quotidien Suivez-vous une méthodologie de travail comme l’agilité ?
La méthode Agile a été initialement conçue pour le domaine du développement logiciel. J’ai eu l’occasion d’étudier en détail la méthode agile dite « Scrum » dans le cadre d’une de mes expertises judiciaires. Ce que j’en ai retenu est qu’il n’est pas nécessaire de disposer d’un cahier des charges complet et très détaillé, pour ensuite faire un long travail de développement qui finalement est présenté au client qui trouvera souvent à redire, voire à exiger des modifications qui s’avéreront très coûteuses car trop tardives dans le cycle de développement en cascade, en V ou en spirale. La méthode agile nous propose d’avancer par petites touches concentrées sur l’essentiel, et faire beaucoup d’allers-retours avec le client. C’est un dérivé des méthodes itératives. J’utilise ce principe le plus souvent possible.
Mais ma méthode de travail (mon hygiène de vie ?) est surtout de suivre les accords toltèques et en particulier les n°3 et n°5 :
– Accord n°3 : Ne faites pas de suppositions. Ayez le courage de poser des questions et d’exprimer ce que vous voulez vraiment. Communiquez le plus clairement possible avec les autres, afin d’éviter les malentendus.
– Accord n°5 : Soyez sceptique, mais apprenez à écouter. Ne vous croyez pas vous-même, ni personne d’autre. Utilisez la force du doute pour remettre en question tout ce que vous entendez. Écoutez l’intention que sous-tendent les mots et vous comprendrez le véritable message.
Etes-vous en contact avec des organismes tel que l’ANSSI ? Si oui, est-ce une obligation ou une volonté ?
Je suis abonné aux flux RSS de toutes les rubriques du site de l’ANSSI, et je dévore leurs guides et recommandations. J’aimerais beaucoup travailler avec eux (en dehors des contacts ponctuels que j’entretiens avec eux), mais mon entreprise n’est pas OIV…
J’ai donc un contrat avec une entreprise privée qui stipule les termes de mise à disposition d’ingénieurs spécialisés en crises cybers pour nous aider en cas de blackout.
Comment gérez-vous la communication auprès de l’école ? De la même manière, comment gérez-vous la documentation des process de la sécurité ?
J’interviens beaucoup à l’oral avec des présentations des enjeux et des risques, soit auprès du conseil d’administration, du comité de direction, des différents services de l’école ou association d’étudiants. C’est mon côté « ancien professeur » qui aime faire des présentations et aime faire un « one man show » adapté à son public pour faire passer les messages. C’est parfois très difficile car j’ai un trac incroyable pour parler devant des personnes que je ne connais pas dont je crains le jugement. Mais souvent les gens sont bienveillants.
La documentation des process de la sécurité est faite à travers les différents documents que j’écris et que je révise, ainsi que leurs annexes : PSSI, politique de gestion des mots de passe, politique des règles de parefeux, analyses de risques, mise en place de la cellule de crise cyber, comité sécurité, etc. Les travaux que je mène avec les différents acteurs de la sécurité sont également documentés : appels d’offres du service achat intégrant un volet sécurité, dépôts de plainte du service juridique à chaque attaque numérique, etc.
Avez-vous de l’astreinte au niveau sécurité ?
Non, mais en cas de crise cyber, je suis sur le pont 24/7 auprès de l’équipe informatique qui a mis en place une astreinte.
VI] Challenge technique Avez-vous des backups de données ?Si oui, comment les gérez-vous ? Avec des méthodologies telles que “3 2 1” ?
Les données de l’entreprise sont sauvegardées dans les règles de l’art, telles que rappelées par la méthodologie « 3 2 1 ». Par contre, il ne faut pas oublier que vos sauvegardes ne servent à rien si elles ne sont pas vérifiées régulièrement et si vous ne disposez pas de serveurs pour les exploiter rapidement en cas d’incident majeur. Ces aspects sont décrits dans le plan de reprise d’activité (PRA) qui est le complément du plan de continuité d’activité (PCA).
Comment gérez-vous les mises à jour des logiciels ? Sont-elles faites automatiquement dès qu’une nouvelle version est disponible ou attendez-vous plusieurs jours ? Pourquoi ?
Parfois les éditeurs nous font l’honneur de séparer les mises à jour de leurs logiciels en deux parties : mises à jour de sécurité et mises à jour fonctionnelles. Dans ce cas les mises à jour fonctionnelles sont mises en attente et étudiées par un processus sérialisé classique tests – pré prod – prod. Les mises à jour de sécurité sont quant à elles appliquées immédiatement.
Si les mises à jour intègrent une partie sécurité, elles sont appliquées immédiatement.
Si l’on ne sait pas, ou si l’on n’a pas le temps d’analyser les mises à jour, elles sont appliquées immédiatement.
Si une mise à jour casse un serveur (ce qui est de plus en plus rare), le PCA entre en action.
Avez-vous un plan d’urgence en cas d’attaque informatique ?
Oui, il y a un plan détaillé de réactions face aux attaques. Le premier chapitre est consacré aux défaillances de base (panne matérielle d’un ordinateur, etc.), puis le niveau de criticité des problèmes augmente jusqu’à déclencher les PCA, PRA et cellule de crise cyber.
Avez-vous déjà vu ou fait face à une attaque ?
Oui, toutes les semaines, mais pas encore du niveau DEFCON 1…
Lors de problématiques de sécurité, vous et vos équipes faites vous des post mortems ?
Oui, dans tous les cas, mais de manière plus ou moins détaillée. L’analyse post incident est versée « au dossier » (par exemple dans le cas de l’instruction d’une plainte) mais surtout vient modifier si nécessaire les différentes procédures de sécurité et plans associés. C’est le principe de la roue de Deming en qualité (ou PDCA).
Comment faites vous pour rester toujours au fait des dernières actualités et évolutions ? En d’autres termes, avez-vous une veille technique et comment vous formez-vous ?
Je suis très curieux par nature, donc je lis beaucoup. Mais ce que je trouve de loin le plus efficace est l’échange avec mes pairs, et en particulier les retours d’expérience. Je suis membre du CESIN et de différents groupements de RSSI, de DSI, d’experts judiciaires. C’est plus difficile d’en parler publiquement, mais je m’attache depuis 2006 à partager mes expériences sur mon blog. Cela ne m’a pas valu que des amis.
Les blogs, les réseaux sociaux et les forums sont des lieux d’échange extraordinaires. J’ai un lecteur de flux RSS qui totalise des centaines de flux que je lis scrupuleusement.
Disposez-vous d’outils de monitoring de sécurité ? De remontées d’alertes ? Exemple : un nouveau port est ouvert.
Je ne suis pas rattaché à l’équipe de production. Les administrateurs réseaux disposent heureusement de tous les outils d’alerte et de supervision de leurs équipements. Je n’en ai pas les compétences ni le savoir faire. Ils constituent le cœur du dispositif de défense temps-réel. Ce sont les soutiers de l’entreprise qui assurent son fonctionnement et sa sécurité.
Les outils que j’utilise sont les suivants : – une distribution Kali sur mon poste de travail et sur une machine dans « le Cloud » – des scanners Nessus, OpenVAS etc. – l’accès au logiciel de patch management des admins réseaux – un tableur pour les indicateurs de sécurité…
VII] Audit interne/externe Réalisez-vous des audits ? Si oui, sont-ils réalisés en interne ou par le biais de prestations externes ?
Je réalise quelques audits de sécurité à l’aide des outils cités ci-dessus, mais l’essentiel des audits est réalisé par des sociétés spécialisées à travers des prestations que je supervise.
Comment abordez-vous le côté législatif de ces audits ? Le côté humain ?
L’aspect juridique est extrêmement important. Je m’appuie sur mes connaissances, sur ma capacité à aller me renseigner sur la jurisprudence (qui fait partie de la veille à faire dans le métier de RSSI). Je n’ai pas encore audité l’aspect humain de la sécurité informatique, car je préfère défendre les utilisateurs plutôt que de leur tendre des pièges.
Suivez-vous un calendrier d’audits ? (ex : audit tous les ans de l’application abc)
Je mène des campagnes d’audits adaptées en fonction de la criticité des services : tous les jours, tous les mois, tous les trimestres, tous les ans. Beaucoup d’audits sont automatisés. Les audits externes sont menés sur une base annuelle. Les outils tiers sont audités sous la responsabilité contractuelle des prestataires, avec communication des conclusions d’audit.
VIII) Blacklist (OS – technologies) Dans votre environnement de travail actuel, avez-vous des restrictions sur des OS ou technologies interdites ?Si oui, est-ce de votre volonté ou une obligation de vos supérieurs ?
Les postes de travail des salariés de l’entreprise sont supervisés et administrés. L’utilisateur n’est pas administrateur de son poste de travail, sauf exceptions tracées. Dans le contexte d’une grande école, il n’est pas souhaitable de durcir de manière excessive le poste de travail (verrouillage des ports USB, etc.). La sécurité doit donc se faire également du côté de l’anticipation et la remédiation : sauvegarde des postes de travail, chiffrement des disques durs pour les vols/pertes, accompagnement des utilisateurs dans le choix des applications dont ils ont besoin, dans les problèmes qu’ils rencontrent.
Le support informatique est essentiel, et est l’un des facteurs clefs de la sécurité informatique. Changer un mot de passe peut s’avérer compliqué, créer un mot de passe d’application quand on est en authentification multifacteur également.
IX] Point de vue humain Comment décririez-vous votre sentiment au quotidien ? Le métier de RSSI est-il stressant ou prenant mentalement ?
Je travaille 9h pleines par jour mais sans stress, en tout cas avec beaucoup moins de pression que l’équipe de production en charge des serveurs et des réseaux. Je suis quelqu’un de réservé a priori, mais très bavard quand je suis avec d’autres passionnés. J’aime beaucoup mon métier et l’informatique de manière générale. Donc, le soir quand j’arrive chez moi après 9h devant mes écrans, j’allume mon ordinateur pour tester « des trucs », bidouiller « des machins » ou démonter « des bidules ». J’aime bien comprendre comment fonctionnent les systèmes informatiques, comment est stockée l’information sur un disque dur, comment fonctionne l’apprentissage d’un réseau de neurones bouclés (donc à états), comment mettre au point une sonde Suricata avec un Raspberry Pi…
Professionnellement, je suis donc un peu pareil : j’aime bien comprendre, apprendre, aider, enseigner, communiquer en confiance et avec bienveillance.
Au début, j’étais en attente de la catastrophe, du grand blackout, du méga cryptolocker de la mort, et je dormais très mal. Maintenant je dors mieux car j’ai expliqué à tout le monde que la catastrophe arrivera de toutes manières, quoi que l’on fasse, que nous nous y préparons, que le risque zéro n’existe pas, que ce n’est pas la sécurité informatique qui coûte cher, mais l’absence de sécurité informatique.
Mais je suis encore puceau en matière de grande crise cyber, donc je ne sais pas encore comment ça se passera et si mon poste servira de fusible… Je ne suis pas pressé d’être dépucelé.
Quelles sont vos horaires types, s’il y en a ?
8h30 – 18h30 avec une pause d’une heure. J’ai 20mn de marche dans la forêt pour aller au travail. Idem pour rentrer le soir. Je suis un homme heureux.
Qu’est-ce que la COVID a changé dans votre manière de travailler ? Le contact avec les équipes est-il plus compliqué ?Une fois la crise sanitaire “finie”, allez-vous faire perdurer le télé-travail ?
Je n’aborderai pas ici l’aspect terrible de cette crise sanitaire avec sa cohorte de morts et les souffrances engendrées dans l’ensemble de la population.
J’habite à 450 km de mon lieu de travail. Je fais donc un A/R de 900 km en train chaque semaine pour aller travailler (je loue un logement près de mon entreprise). Mon entreprise étant à la pointe en matière de vie au travail, j’ai pu bénéficier dès mon embauche de deux jours de télétravail par semaine. La crise sanitaire liée à la COVID-19 m’a simplement fait basculer en 100 % de télétravail, comme beaucoup des collaborateurs de l’entreprise.
Personnellement, j’ai très bien vécu cette période : j’avais les codes du télétravail (bureau réservé, équipement adapté, isolement domestique, liaison fibre, liaison de secours, etc.) et l’habitude des réunions en visioconférence. Et puis cela m’évite 900 km de train par semaine.
L’aspect des discussions informelles me manque, mais j’arrive à le susciter avec une partie des collègues avec lesquels je peux faire une discussion en « off » par exemple après une réunion. Finalement, avec un peu de bonne volonté, on a réussi à numériser « radio moquette » 😉
Une fois la crise sanitaire finie, je vais enfin pouvoir aller remanger avec mes collègues 3 fois par semaine, croiser des étudiants souriants et dynamiques, et surtout prendre une bière avec les copains.
Enfin le retour en présentiel…
FIN] Evolution ? Avez-vous des envies d’évolutions pour la suite ? Si oui, lesquelles ?
J’ai énormément d’envie d’évolutions pour la suite : j’aimerais travailler avec un SOC, j’aimerais apprendre, comprendre et enseigner les bonnes pratiques en perpétuelle évolution, j’aimerais arriver à faire admettre naturellement que la personne qui clique sur un lien de phishing n’est pas fautive, mais une victime, j’aimerais que les analyses de risque que je produis arrivent jusqu’à la direction, j’aimerais avoir une équipe de passionnés à manager…
J’aimerais surtout être jeune à nouveau pour avoir le temps de mener à bien mes envies d’évolution.
Merci pour toutes vos réponses.
Merci pour toutes vos question. Et préparez bien la relève : dans 10 ans, j’aurai 100 ans…
Ce petit billet pour prévenir mes lecteurs que ce blog va partir un peu dans tous les sens, alors ne m’en veuillez pas… Voici approximativement le programme des prochains billets.
J’ai participé l’été dernier à un exercice littéraire très riche d’enseignements, et je voudrais en faire un bilan à la Asimov (toute proportion gardée), en publiant les billets de l’histoire que j’ai inventée, avec des explications introductives et conclusives pour chaque billet. Pour que cela fasse sens, je vais les publier les uns à la suite des autres, pour garder la continuité de l’histoire. Les introductions spoileront sans doute un peu l’histoire, mais présenteront le contexte de sa construction, et les conclusions seront un exercice de bilan critique.
J’apprends beaucoup sur la sécurité informatique, et pas seulement au niveau technique. J’ai envie de faire part ici de cet apprentissage, non pas pour les experts de ce domaine qui n’apprendront rien, mais pour les débutants, les étudiants et les utilisateurs qui se débattent entre leur chaise et leur clavier. Ce seront des billets entre le rapport d’étonnement, la mise en place des règles que je préconise, des expérimentations d’outils… Il faut que j’arrive à me défaire de cette idée que quand on écrit sur la sécurité informatique, on se heurte nécessairement à des roxors hautains lanceurs de piques assassines. Je crois qu’il y a de la place pour une approche bienveillante, même dans ce domaine.
Je bricole pas mal avec les réseaux de neurones de ma jeunesse. J’explore des outils « clef en main » mais je tente aussi le hacking de ces technos pour mieux comprendre ce qu’elles font. En ce moment, ça part un peu dans tous les sens, mais c’est passionnant. A voir s’il y a matière pour jeter ça dans un billet.
Un professeur m’a contacté pour m’interviewer avec l’un de ses étudiants sur le métier de RSSI. L’exercice est toujours périlleux, mais mes réflexes d’ancien expert judiciaire reviennent souvent à la charge : quand on me demande mon avis, j’ai toujours envie de le donner (en mon âme et conscience). Peut-être ce travail commun de questions/réponses trouvera-t-il le chemin de ce blog…
Je m’amuse pas mal à bricoler le réseau de la maison et mes services autohébergés. Entre mes nouvelles bornes Wifi, mes tests sur les NIDS, la segmentation, les parefeux, les routeurs et ma découverte de l’IPv6, j’ai beaucoup à écrire, pour faire un retour d’expérience, mais aussi pour avoir vos avis.
Je suis tombé dans la marmite de la généalogie, et je passe des week-ends entiers à remonter le temps et découvrir les terres de mes ancêtres. Là aussi, il y a beaucoup à dire et tant à partager 🙂
Je teste pas mal de générateurs de blogs statiques. Je me suis rapidement mis au Markdown, mais je tâtonne encore : je cherche le bon équilibre entre mains dans le cambouis et poils dans la main… Donc il va peut-être y avoir du changement de ce côté-là aussi 🙂
Je lis beaucoup en ce moment : des livres papiers, des billets de blogs, des articles de recherche, des comptes rendus de conférences… J’admire tant de gens, j’apprécie tant leur énergie, leur entrain, que parfois je m’épuise. J’ai fortement réduit le temps passé sur les réseaux sociaux, même si cela reste ma bouffée d’oxygène et ma fenêtre sur le monde : j’ai choisi de suivre les bonnes personnes, et pour l’instant j’ai échappé à la malveillance. J’ai prévu de faire un point sur le thème des réseaux sociaux également.
La publication en livres des billets de ce blog a pris du retard. Je ne désespère pas d’arriver à enfin sortir les tomes 7 et 8, toujours en version électronique gratuite sans DRM et en version papier pour ma famille et mes amis.
Ce blog restera ce qu’il a toujours été : le web log extime de Zythom, à destination de la première IA qui sera capable d’en absorber toute la substance et me faire vivre pour l’éternité. En vrai, il est surtout à destination de mes enfants et de leurs futurs enfants, pour qu’ils sachent ce que faisait leur (pé)père quand il ne jouait pas avec eux.
La vie est si courte, et il y a tant de choses à faire. A bientôt.
La première fois que je t’ai rencontré, tu dépassais de la foule réunie dans ce café de Lille privatisé pour une rentrée « saoulennelle » où le champagne coulait à flots.
Puis nos chemins se sont recroisés au procès de Maître Eolas dont tu étais l’avocat et où j’intervenais comme expert informatique. Tu m’avais sauvé la vie en venant m’annoncer que finalement je n’interviendrais pas à la barre des témoins, quand la panique menaçait de m’emporter dans cette salle des pas perdus.
Pour t’excuser de m’avoir fait venir inutilement de ma province profonde, tu m’avais proposé de prendre un verre dans un bar près du palais, avec Maitre Eolas et Pascale Robert-Diard. Je m’étais retrouvé, sans y croire vraiment, entouré de grandes personnes importantes, moi le petit expert de province taiseux.
Tu m’avais placé dans ta Mô’groll en bonne compagnie et ça m’avait ému. Quand je t’en avais remercié, tu avais éclaté de rire en ajoutant « et maintenant tu me dois une bonne bouteille ». Nous l’avons bu ensemble à ton cabinet que tu venais d’aménager et que tu m’avais fait visiter avec fierté, non sans m’avoir présenté ta secrétaire « la seule vraie personne qui fait tout fonctionner ici ».
Les organisateurs des Confluences Pénales de l’Ouest nous avaient placé dans le même hôtel. Tu me titillais en DM sur Twitter pour un soi-disant problème informatique sur les ordinateurs de ton cabinet, parce « bon l’informatique ça ne marche jamais comme on le souhaite ». Mais tu étais avocat ET geek, à ta façon. En descendant de ma chambre d’hôtel, je t’ai vu de dos à la réception, et chose extraordinaire que seule une personne comme toi a réussi à me faire faire, je t’ai accueilli d’un tonitruant « AH BEN T’ES ENFIN LA, MIN BILOUTE » lancé à la cantonade. Tu t’étais retourné doucement avec un grand sourire, en demandant à l’accueil d’appeler la sécurité…
Ces deux jours, aux Confluences Pénales de l’Ouest, ont été riches de discussions privées, lors de nos marches côte à côte dans les rues d’Angers. Parmi ces anecdotes, tu m’avais raconté celle du nom de la SCI que vous aviez donné avec des camarades de jeunesse et qui m’avait fait rire. J’ai depuis oublié ce nom et je m’étais promis de te le demander lors de notre prochaine rencontre. Tu m’avais aussi confié que tu étais malade en me demandant de ne pas en parler. J’ai tenu parole. Nous avons beaucoup parlé du sens de la vie, de l’importance des proches, et de mille anecdotes qui donnent du sel à l’existence. Tu savais faire oublier le gouffre de notoriété et de compétences qui nous séparait.
Ta mort laisse un grand vide, bien sûr auprès de tes proches et de tes amis, mais aussi auprès des personnes comme moi qui t’ont croisé quelques fois. C’est dire la place de ton humanité, ta tendresse et ton excentricité…
Il y a deux ans, j’ai changé d’entreprise et de métier. En deux ans, j’ai découvert le fonctionnement de ma nouvelle entreprise, le télétravail deux jours par semaine, la vie loin de ma famille trois jours par semaine dans une petite location, un nouvel équilibre de vie.
Mes nouveaux collègues m’ont bien accueilli, d’autant mieux que j’ai tout de suite expliqué ma démarche : « je suis RSSI débutant avec expérience, et vous ne m’avez pas attendu pour faire de la sécurité informatique, donc je ne vais pas vous expliquer votre métier, malgré mes cheveux blancs« .
L’équipe en charge des serveurs et réseaux est au top, l’équipe de développement fait du développement de qualité, l’équipe support fait ce qu’elle peut face aux utilisateurs… Bref un bon service informatique comme je les aime.
Apprendre un métier, même quand on a de l’expérience (surtout !) reste un vrai challenge. J’ai beaucoup progressé, mais je sais que jamais je n’atteindrai les compétences techniques d’un roxor de l’ANSSI.
Pour autant, je ne suis pas un suxor… J’arrive à défendre pas mal de projets portés et demandés par les équipes techniques, qui n’étaient pas nécessairement entendu auparavant. Je communique plutôt pas mal et j’ai réussi à trouver un ton légèrement humoristique qui semble bien passer auprès des utilisateurs. Le niveau de sécurité monte petit à petit, et de moins en moins de monde se dit « ça ne m’arrivera pas, pas à moi », et de plus en plus sont demandeurs de protections, dont ils ont besoin aussi bien dans l’univers professionnel que personnel.
Pourtant la tache est immense. Les problèmes sont complexes, la pression est permanente. Depuis deux ans, je me couche souvent le soir vers 21h, lessivé. Mais je n’arrive pas à dormir avant 23h, pour enchaîner sur une journée de 10h…
Je SAIS qu’une crise cyber d’envergure nous tombera dessus, mais je ne sais pas quand. Je prépare les PCA et PRA, la mise en place de la cellule de crise cyber et ses liens avec la cellule de crise classique, mais je sens bien que le jour où ça va exploser, je vais prendre cher… Et pour quelqu’un qui aime tout prévoir, qui aime être prêt à tout, c’est difficile de vivre avec une épée de Damoclès.
Je me sens comme le démineur qu’on envoie nettoyer le terrain sous le feu de l’ennemi.
Et sur ces deux années, l’une s’est déroulée en pleine pandémie, qui bien sur continue. Tous les plans d’urgence ont été déclenchés, les licences VPN de secours ont été activées, le personnel a été équipé rapidement en ordinateur portable, les professeurs ont très rapidement modifié leur pédagogie pour basculer en distanciel, puis en enseignement hybride. Une grande école de commerce, c’est un organisme très adaptatif qui survit dans un milieu très concurrentiel : les professeurs sont formidables, de haut niveau, le personnel solidaire et les étudiants très motivés.
Mais les étudiants souffrent, même les plus favorisés. La solitude est pesante. Leur jeunesse leur file entre les doigts, ce moment exceptionnel qui ne reviendra pas.
Leur seul lien avec l’extérieur, confinés dans leur chambre, passe beaucoup par l’informatique. Tout le travail pédagogique des professeurs passe par l’informatique. Tous les outils professionnels des salariés de l’école passent par l’informatique. Le numérique est partout et grâce à lui, et aux efforts de tous, le système est résilient.
Mais le RSSI, et bien sûr toute l’équipe informatique, sait sur quoi tout cela tient. Même les plus grands tombent sous le coup d’une faille zéro jour exploitée par des États, ou par des scripts kiddies. Même les journaux grands publics parlent de catastrophes numériques qui touchent, un coup une grande entreprise, un autre un groupe d’hôpitaux…
Alors le soir, je prie pour que mon monde existe toujours le lendemain. Et, comme face à la mort, c’est plus dur quand on n’est pas croyant.
Vous voyez, je gère bien le stress. J’ai été élevé à la dure.
Le billet précédent se terminait ainsi : Il me reste à vous narrer les échanges avec le vendeur de Backmarket, et le service après-vente d’icelui.
Ayant constaté avec le support Microsoft que la licence Windows 10 fournie avec le PC d’occasion était déclarée chez eux comme « piratée », j’ai contacté aussitôt le vendeur de Backmarket. Voici nos échanges :
Jour J
Bonjour, après appel auprès du support Microsoft, il s'avère que la
clef d'activation de Windows 10 est une clef enregistrée comme piratée
chez eux (depuis un an). Merci de m'adresser une clé Windows 10 correcte
et valide.
Bien à vous
Zythom
Jour J+2
bonjour' OK je vous envoie merci
Jour J+8
Bonjour, Je n'ai encore rien reçu. Pouvez-vous me dire par quel canal
vous comptez me l'adresser ?
Bien à vous
Zythom
Jour J+15
bonjour' vous achète une clé sur internet il coute 10 euros je vous
rembourse merci bien
Jour J+15
Bonjour, il n'est pas question d'acheter une clé et d'attendre un
éventuel remboursement de votre part. Merci de m'adresser une clé valide
le plus rapidement possible, par ce canal de communication.
Bien à vous.
Zythom
A partir de ce moment-là, il n’a plus été possible d’obtenir une quelconque réponse de ce vendeur, ni directement, ni par l’intermédiaire de Backmarket (qui sert de plateforme de vente) qui l’a relancé plusieurs fois. Silence radio total. La suite de la conversation se fera exclusivement avec le SAV de Backmarket :
Jour J+15
Bonjour [Zythom],
J'espère que vous allez bien.
Je vous remercie pour votre e-mail, que j'ai lu avec attention.
Je suis vraiment désolée de cette situation singulière qui je peux
le comprendre peut être agaçante.
Ayant à cœur votre satisfaction, je vous informe que je viens
d'adresser une demande à [vendeur taiseux] concernant votre clé
d'activation Windows.
Il dispose de 24 heures ouvrées pour apporter une réponse à ma demande.
Je vous confirme que le marchand va vous apporter une solution adéquate
et conforme à notre charte qualité.
N’hésitez pas à échanger directement avec votre marchand tout au long
de la procédure.
Rassurez-vous, je reste à votre écoute pour appuyer vos demandes si le
besoin s'en fait sentir.
Dans l'attente, je vous souhaite de passer une excellente fin de
journée.
Bien à vous,
[prénom d'une personne du SAV]
Jour J+21
Bonjour,
Comme indiqué précédemment, je ne compte pas payer une licence et
attendre un hypothétique remboursement d'un vendeur m'ayant vendu un
ordinateur avec une licence indiquée comme piratée par Microsoft.
Par conséquent, je vous informe que sans licence Microsoft valide
reçue par ce canal de communication d'ici un mois à compter de la date
d'aujourd'hui, je déposerai une plainte auprès du Procureur de la
République contre Backmarket et ce vendeur.
Bien à vous,
Zythom
Je dois dire que cette réponse, que j’ai fait lire à mon épouse après envoi, l’a faite sourire : « tu comptes poursuivre cette société et ce vendeur au Pénal ? »
Bon, j’ouvre ici une parenthèse pour les lecteurs, afin de vous faire profiter du savoir de la meilleure juriste du monde. En cas de litige avec un commerçant en ligne, il faut : – essayer de trouver un accord avec le vendeur par email. – si pas d’accord, envoyer une lettre en recommandée avec avis de réception détaillant les éléments du problème et toutes les références possibles. – si pas d’évolution, il faut contacter une association de consommateur pour essayer de trouver un accord amiable, ou la Fédération des Entreprises de Vente A Distance si le site y est adhérent, ou saisir le service de médiation de la consommation, ou signaler le problème à la DGCCRF via la plateforme SignalConso, ou directement un avocat qui vous expliquera comment entamer une procédure devant les tribunaux. – ensuite, c’est parti pour une longue lune de miel avec votre avocat·e qui vous aidera à saisir la justice civile, c’est-à-dire le juge des contentieux de la protection (ex juge du tribunal d’instance) ou le tribunal judiciaire (fusion du tribunal d’instance et du tribunal de grande instance) selon le montant du litige. Fin de la parenthèse en partie issue du site economie.gouv.fr pour la raison exposée dans le paragraphe suivant.
En effet, étant marié avec une avocate, j’ai la chance d’avoir une professionnelle du droit à mes côtés. Je ne sais d’ailleurs pas qui de l’épouse ou de la professionnelle m’a répondu : « Tu te débrouilles avec ton litige à 130 euros ».
La voix de la sagesse.
Mais malgré mon absence totale de compétences juridiques sérieuses, en dehors de ma capacité en Droit en Recherches sur Internet, j’ai reçu la réponse suivante du SAV de Backmarket :
Jour J+24
Bonjour [Zythom],
Je reviens vers vous concernant le suivi de votre dossier.
Le marchand ne disposant pas d'une clé d'activation en stock vous a
proposé d'en acheter et de vous faire rembourser.
Cependant, cette proposition ne vous convient pas.
Ce que je vous propose désormais comme ultime solution, c'est de
renvoyer l'appareil au marchand pour qu'il procède à votre
remboursement.
Je vous ferai un code promo pour vous permettre d'acheter un autre
appareil.
Dans l'attente de vous lire, je vous souhaite de passer une excellente
journée.
Bien à vous,
[Prénom d'une personne du SAV]
Et là, forcément, je me dis que l’affaire est mal engagée. J’ai bien conservé les cartons d’emballage, mais je me suis bien gardé de dire que j’étais en train de prévenir (indirectement) la mairie que le disque dur du PC d’occasion contenait encore toutes leurs données. Impossible de renvoyer le tout (d’ailleurs ce n’est pas mon souhait).
Jour J+26
Bonjour,
Cette solution ne me convient pas. J'attends l'envoi d'une clé
d'activation non piratée pour que l'achat effectué sur votre plateforme
soit conforme à la législation en vigueur.
Bien à vous,
Zythom
Jour J+28
Bonjour [Zythom],
Comme nous sommes toujours sans nouvelles du revendeur, quelle
alternative preferez-vous?
- Vous renvoyez le produit (sans frais bien sur) et je vous rembourse
la commande
- Vous achetez la clé que je vous rembourse dès réception de votre reçu.
Vous pouvez être certain que votre remboursement sera fait très
rapidement dès que j'aurai reçu votre email avec le justificatif de
paiement.
Dans l'attente de votre retour, je vous souhaite une belle journée,
[Prénom du support niveau 2 du SAV]
Bon, soit je laisse tomber, soit j’achète moi-même cette fichue clef d’activation. Je vais donc sur le site de Microsoft pour passer l’achat et là, STUPEUR. Microsoft mérite bien son surnom de Micro$oft… 145 euros la licence la moins chère ! (je rappelle que j’ai payé le PC complet, livraison incluse, 130 euros).
Bienvenu dans l’univers des licences Windows.
Comme je ne suis ni revendeur, ni assembleur, je considère que je n’ai pas le droit d’acheter une licence EOM (Original Equipment Manufacturer). Je n’ai le droit, formellement, que d’acquérir une licence dite « Retail ». Me voici donc à la recherche d’un site vendant une licence Retail Windows 10, et j’en trouve une à 64 euros. Je contacte donc le SAV Backmarket :
Jour J+29
Bonjour,
Sur le site officiel Microsoft, la licence Windows 10 la moins chère
coûte 145€
cf https://www.microsoft.com/fr-fr/store/b/windows
Il semble y avoir beaucoup de sites qui vendent des licences pirates
(à quelques euros), et d'autre part comme je ne suis ni revendeur, ni
assembleur de PC, je n'ai pas le droit d'acquérir une licence EOM.
J'ai trouvé un site qui semble vendre des licences à un prix correct
(64 euros ttc)
Me confirmez-vous la prise en charge de ce coût ?
Bien à vous,
Zythom
Réponse positive du SAV de Backmarket, achat par mes soins, remboursement rapide par le site, dossier clôt.
Conclusions : – j’ai parfaitement conscience d’être un acheteur pénible en matière informatique (pour le reste, je suis un acheteur nul) ; – il faut encourager les sites de reconditionnement qui donne une deuxième vie aux objets ; – il faut bien effacer les données avant de donner/vendre un ordinateur, une tablette ou un téléphone : vous risquez de tomber sur quelqu’un qui en fera mauvais usage ; – j’admire les gens qui travaillent dans les SAV : ils sont patients et arrivent très souvent à trouver une solution. Une place leur est réservée au Paradis ; – les vendeurs de PC avec licence piratée brûleront en Enfer pour l’éternité.