Revons un peu

Bienvenue en France!

Félicitations! Il faut du courage pour s’installer dans un nouveau pays et nous sommes heureux que vous ayez choisi la France. Vous avez entrepris un nouveau départ qui vous offre des possibilités stimulantes. Votre première année en France sera chargée d’émotions et remplie de changements. Vos chances de réussite seront plus grandes si vous prenez le temps de vous renseigner sur ce qui vous attend et sur ce qu’on attend de vous.

Le présent guide vous offre un aperçu de la vie en France. Vous y trouverez la description de vos droits et responsabilités en tant que résident permanent français ou en tant que citoyen français.

La société et les valeurs françaises peuvent différer de celles auxquelles vous êtes habitué; certaines pratiques culturelles françaises pourront vous sembler étranges en regard des normes établies dans votre culture d’origine. En même temps, certaines pratiques culturelles de votre pays peuvent être jugées inacceptables en France.

Le fait de pouvoir parler le français à votre arrivée en France facilitera votre adaptation. Chaque jour est une occasion d’apprentissage! Trouver un emploi. Participer à la vie de votre quartier. Les françaises et les français estiment qu’ils doivent prendre leurs responsabilités pour obtenir le type de collectivité dans laquelle ils désirent vivre. Tandis que vous vous habituez à la vie en France, n’hésitez pas à poser des questions. Peu importe la ville où vous vivrez, vous trouverez des gens qui vous aideront à vous adapter à votre nouvelle vie et à vous intégrer à la société française.

Dans les semaines, les mois et les années à venir, vous aurez bien des occasions de participer pleinement à la vie française. Profitez-en. Vous et votre famille pourrez grandir ensemble à côtoyer d’autres françaises et français et à contribuer à une vie meilleure pour tous. Vous êtes chez vous.

Le guide « Bienvenue en France » vous indiquera également avec qui communiquer si vous avez besoin d’aide ou si vous désirez plus d’information. Vous avez probablement déjà reçu beaucoup de renseignements généraux sur votre nouveau pays. Les pages qui suivent vous aideront à obtenir des renseignements plus précis sur certaines choses comme les cours de langue et le logement, ainsi qu’à trouver un emploi et une école pour vos enfants en France. Nous ne pouvons vous fournir tous les renseignements dont vous avez besoin, mais nous pouvons vous indiquer les noms des ministères, des organismes et des organisations qui pourront soit vous offrir de l’aide directement, soit vous diriger vers une autre source d’information.

Les organismes d’aide aux immigrants peuvent vous aider à vous tailler une place dans la société française, et bon nombre de leurs services sont gratuits. Communiquez avec eux pour connaître les services qu’ils fournissent. Vous trouverez la liste de ces organismes à la page consacrée aux services pour les nouveaux arrivants du site web « vos droits – service public« .

Nous espérons que le présent guide vous aidera à vous adapter à votre nouvelle vie, une vie que nous vous souhaitons remplie de bonheur et de succès.

Bienvenue en France!

Mode de vie des français

La France est un pays immense. Afin de comprendre ce qu’être français représente, il est important de savoir certaines choses au sujet de nos trois peuples fondateurs, soit les Gaulois (peuple celtique), les Romains (peuple italique) et les Francs (peuple germanique). La société française actuelle est en grande partie la fusion des héritages gallo-romains, des apports germaniques et du christianisme .

La vie au quotidien se déroule la plupart du temps en français. Des gens de divers horizons et de diverses religions, ethnicités et cultures se sont établis en France. Toutefois, les français partagent des valeurs centrales qui orientent et façonnent la vie de tous les jours. Nous sommes fiers de notre identité, de notre histoire et de nos réalisations.

La France dispose d’institutions juridiques et démocratiques qui remontent au Moyen Âge. Ces traditions sont encore vivantes aujourd’hui au sein du Parlement et des assemblées législatives des différents territoires. Nos lois et nos gouvernements sont là pour assurer le traitement équitable des personnes et l’égalité des chances pour tous. Nos lois protègent aussi les minorités. Ensemble, nous nous efforçons de maintenir une société sécuritaire, pacifique et prospère.

La résidence en France et la citoyenneté française entraînent des droits et des responsabilités

Les droits et les responsabilités des citoyens français nous viennent de notre histoire. Nos lois, nos traditions, nos identités et nos valeurs communes sont à l’image de ces droits et responsabilités.

Le fait de vivre en France signifie que vous partagez plusieurs des mêmes droits et responsabilités que les citoyens français. Si vous devenez citoyen français, vous jouirez de tous ces droits et devrez assumer l’ensemble de ces responsabilités.

Grâce aux sacrifices et aux efforts de gens dans le passé, vous avez aujourd’hui, en tant que résident en France, les droits suivants :

– Exprimer librement vos opinions, y compris par la liberté de presse;

– Vivre où vous désirez au pays;

– Pratiquer la religion que vous voulez ou n’en pratiquer aucune;

– Vous associer à toute personne de votre choix et vous rassembler pacifiquement;

– Être protégé contre une arrestation ou une détention illégale ou injustifiée de la part de l’État (gouvernement);

– Bénéficier des services du gouvernement français.

En tant que résident en France, vous avez notamment les responsabilités suivantes :

– Respecter la loi;

– Apprendre le français;

– Travailler pour subvenir à vos besoins et à ceux de votre famille;

– Venir en aide à autrui;

– Protéger notre patrimoine et notre environnement naturel.

Les citoyens français ont aussi le droit de :

– Voter aux élections municipales, cantonales et nationales;

– Faire une demande de passeport français, et entrer au pays et en sortir librement;

– Se présenter à une élection.

En tant que citoyen français, vous avez la responsabilité de :

– Faire partie d’un jury lorsque vous y êtes appelé;

– Témoigner au tribunal, si requis;

– Exercer votre droit de vote de manière libre et démocratique.

Les françaises et français, ainsi que leurs enfants et leurs familles, s’attendent à se faire traiter avec équité, tolérance et respect. En retour, nous nous efforçons de traiter les autres de la même manière. Nous croyons en l’égalité entre hommes et femmes et ne tolérons pas la discrimination fondée sur la race, l’âge, l’orientation sexuelle ou une déficience physique ou mentale. La dignité des personnes est bien établie dans nos lois et traditions.

Il est interdit aux parents de forcer leurs enfants à se marier contre leur gré. La polygamie est illégale selon le Code Pénal, et ainsi, les mariages multiples ne sont pas reconnus par la législation française d’immigration. Ceux et celles condamnés pour avoir pratiqué la polygamie sont sujets à voir leur résidence permanente révoquée.

—————————————

Ce texte est une légère modification du début d’un texte canadien qui commence ici. J’en ai pris connaissance par un tweet de @GrandNicolas retweeté par Maître Eolas.

J’aimerais réellement que notre gouvernement, d’aujourd’hui ou de demain, s’en inspire. Il est inutile de réinventer la roue.

Il y a beaucoup de pays qui sont en avance sur nous.

Le Canada en fait partie.

J’affronterai ma peur

Lorsque j’étais en classe de seconde, j’ai eu à faire un exposé en physique sur un thème libre. Très marqué par mes lectures scientifiques d’alors, j’avais choisi les Tokamak. Pendant l’exposé, je me souviens avoir du expliquer le phénomène de fusion nucléaire à une classe un peu ennuyée. Il faut dire que je n’en avais pas moi-même compris grand chose, si ce n’est que le rapprochement de deux atomes légers produit un atome plus lourd (somme des deux atomes) et beaucoup d’énergie (le côté « magique » de la réaction).

Ce qu’il me reste de cette expérience éprouvante (surtout pour mes camarades), c’est l’idée qu’il ne vaut mieux pas se lancer dans un exposé que l’on ne maitrise pas, même devant une assemblée qui ne s’y intéresse pas, mais aussi l’idée un peu romantique que deux êtres qui unissent leurs efforts peuvent construire quelque chose de plus grand que s’ils devaient s’y prendre séparément. J’ai pu vérifier ce dernier point de nombreuses fois au cours de ma vie, et en particulier dans ma vie privée.

L’éducation des enfants et l’organisation de la vie d’une famille sont deux exemples particulièrement flagrants: c’est beaucoup plus facile à deux. Le pire est qu’on ne s’en rend compte que lorsque l’un des deux fait défaut, de la même façon qu’on n’apprécie vraiment d’avoir l’usage de ses deux jambes qu’après avoir passé plusieurs semaines dans le plâtre.

Dans mon cas, il s’agit de l’hospitalisation de ma moitié pour une opération a priori bénigne. Nous voici donc tous les deux le jour J dans la chambre d’hôpital en train d’attendre l’heure H et la minute M. Sachant que nous devions ABSOLUMENT nous présenter à 8h pour une raison totalement inconnue de nous encore aujourd’hui alors que l’opération était prévue à 16h…

A 15h45, un homme tout de vert vêtu vient chercher mon épouse et son lit pour les emmener vers le bloc opératoire.

Moi: « Quelle sera la durée de l’opération? »

Lui: « Environ 45mn, ne vous inquiétez pas tout ira bien. »

Tu parles, qu’est-ce qu’il peut bien en savoir? Qui me dit qu’il n’est pas là pour me donner le change, tel un Mérovingien d’hôpital?

Me voici donc seul dans une chambre doublement vide.

15mn passent. J’imagine Grégory regardant du haut de la salle d’observation vitrée mon épouse endormie.

30mn. Ma Time Line Twitter me tient compagnie. Je regarde ma montre de plus en plus souvent en rêvant être Ravel, agent du Nexx, capable de me déplacer dans le temps pour y remettre de l’ordre.

45mn. J’imagine la sortie du bloc, les chirurgiens aux fronts trempés de sueur épongés par des infirmières nues sous leur blouse expérimentées. J’imagine des chirurgiennes aux fronts trempés de sueur épongés par des infirmiers bodybuildés expérimentés.

46mn. Bon. Pourquoi est-ce qu’elle n’est pas revenue?

A partir de ce moment, mon esprit rationnel commence à envisager tous les cas possibles, fidèle à mon film d’horreur permanent. Les minutes deviennent des heures, les heures des années.

Je me suis alors souvenu d’un moyen de lutte contre l’angoisse: la litanie du Bene Gesserit contre la peur:

« Je ne connaîtrai pas la peur car la peur tue l’esprit.

La peur est la petite mort qui conduit à l’oblitération totale.

J’affronterai ma peur.

Je lui permettrai de passer sur moi, au travers de moi.

Et lorsqu’elle sera passée, je tournerai mon œil intérieur sur son chemin.

Et là où elle sera passée, il n’y aura plus rien.

Rien que moi. »

Comme je ne suis pas le Kwisatz Haderach, l’être suprême, on ne peut pas dire que ce mantra ait fonctionné. Ma peur était toujours là et prête à se transformer en peur panique.

Il fallait donc que j’affronte ma peur. Je suis allé voir les infirmières qui papotaient devisaient dans un petit bureau jouxtant la chambre.

Moi: « Heu, vous pensez que ma femme va bientôt revenir? Parce que là, j’attaque les ongles de ma deuxième main… »

Elles (unanimes): « Mais monsieur, votre femme se trouve en salle de réveil. Et en général, ça dure bien plusieurs heures. »

Dès le départ, au lieu de demander au petit bonhomme tout vert combien de temps allait durer l’opération, j’aurais du demander dans combien de temps ma femme allait remonter…

Au temps pour moi.

—————————-

Je dois préciser que pendant ces heures d’attente, plusieurs personnes m’ont adressé des petits messages d’encouragement par email ou via Twitter. Qu’elles soient toutes ici remerciées. J’ai un peu honte d’avoir envisagé le pire qui heureusement n’est pas arrivé, et d’avoir eu le soutien de certains qui sont dans une situation où le pire est malheureusement arrivé (relisez la phrase lentement, je suis presque sur qu’elle a un sens).

Grâce à vous, et au dieu bienveillant des roots, j’ai pu affronter ma peur.

—————————-

J+3: Me voici en train de réaliser de manière concrète la place que prend la pièce manquante de mon couple dans l’organisation de la vie de la famille. C’est la mystérieuse propriété de la fusion dont je parlais au début de ce billet, avant de me perdre dans le récit de mon angoisse hospitalière: on réalise beaucoup plus de choses à deux que la somme des choses que l’on réalise chacun séparément. Surtout quand les actifs (les adultes) soutenant les passifs (les ados) passent de deux à un, et que les passifs (ceux qui sont portés par les actifs) passent de trois à quatre. Un rééquilibrage s’avère nécessaire.

Première étape: assurer l’essentiel.

Le travail professionnel, les expertises judiciaires, le travail pour la commune.

Les conduites à l’école et aux activités extrascolaires des enfants.

Les repas, ce qui inclut les courses.

Les lessives (une à deux par jour), ce qui inclut le tri du linge (foncés, clairs, couleurs, 30, 40, 60, 90), le choix des programmes (coton 40 ou 40 fréquence plus, avec essorage ou sans?), le séchage, le repassage (externalisé) et le rangement (sous traité aux enfants).

Les récupérations à l’école (tiens, mais il est 19h[1] !).

Deuxième étape: faire des choix pour survivre.

Sont passés à la trappe: les heures de surfs, les analyses simulées de récupération de données, la glande veille technologique.

Ont été grandement diminués: le temps passé sur Twitter, Xbox, Call of, les jeux passionnants et la lecture.

Le pain frais quotidien a été remplacé par du pain tranché congelé, les repas variés et équilibrés par une permutation pâtes/purée/salade/riz/maïs accompagnés d’un random sur quenelles/steack haché/knackis/thon/pizza/jambon, pour l’instant pour la grande joie des enfants, qui m’ont quand même fait remarquer l’absence de légumes frais (de quoi?).

Troisième étape: dormir et tenir six semaines. Faire des offrandes aux différentes Pythies et Sibylles.

J’affronterai ma peur.

Je lui permettrai de passer sur moi, au travers de moi.

Et lorsqu’elle sera passée, je tournerai mon œil intérieur sur son chemin.

Et là où elle sera passée, il n’y aura plus rien.

Rien que moi.

Et nous deux.

Et nous cinq.

ET l’énergie dégagée.

——————–

[1] Note à benêt: 16h30 sortie école, 18h30 fin de garderie si récupération sortie école pas possible, 19h penser à amener des fleurs et une boite de chocolat à la garderie, 20h commissariat, 21h chez les voisins, le lendemain Tribunal pour enfants (salauds de voisins, maudite mémoire).

Crédit images darkroastedblend.com

Je me demande ce qu’il est devenu aujourd’hui

Il a sa main posée sur mon épaule, nos regards sont rivés l’un à l’autre, je vois dans ses yeux qu’il sait qu’il va mourir…

C’était une fin d’après-midi ensoleillée.

Mais revenons au début de cette journée particulière.

8h du matin, nous sommes réunis dans la cour de la caserne. Nous sommes en treillis militaire. C’est la 4e fois que l’on change de tenue aujourd’hui, depuis notre réveil de 5h du matin… Le gradé nous annonce que nous allons faire un exercice important aujourd’hui et que nous n’avons pas droit à l’erreur. D’un air grave, il nous dit: « Nous allons vous apprendre à utiliser des armes NBC! Transmetteur Zythom, pouvez-vous rappeler à la section qu’est-ce que ça veut dire? »

Moi: « Heu, N pour Nucléaire, B pour Bactériologique et C pour Chimique. Heu, mon Adjudant! »

Lui: « Et savez-vous ce qu’ANP signifie, transmetteur Zythom? »

Moi: « Heu, A pour Acide, N pour Nucléique, P pour Peptidique, mon Adjudant? »

Lui: « Mais non, ignorant inculte, c’est un Appareil Normal de Protection !!! Je vous présente votre meilleur ami pour aujourd’hui, l’ANP M51. Le caporal Desann va vous montrer comment le mettre et le replier. »

Et pendant toute la matinée, nous avons appris à déplier ce masque à gaz (anti gaz) de sa sacoche, à le mettre sur le visage, à le retirer et à le replier.

A ce stade du récit, je dois faire une parenthèse qui concerne un des hommes de ma chambrée, un certain Binks. Binks était un brave gars, mais un peu simplet. Il ne savait pas faire son lit, il n’arrivait pas à apprendre le pliage des draps et des couvertures. Il riait fort, mais agaçait beaucoup des hommes de ma chambrée car à cause de lui, nous étions souvent punis. C’était un peu notre Santiago à nous. Incapable de comprendre le principe de la ligne de mire, il tirait à plus de 20m de la cible sous la surveillance stressée des gradés. Les séances de montage/démontage des armes étaient un supplice pour lui, et l’objet de fréquentes punitions, car il était incapable de remonter quoi que ce soit.

En tant que chef de chambrée, j’étais responsable de Binks. J’avais très vite décidé de le mettre de côté quand nous préparions la chambre pour l’inspection et nous rangions son armoire et son lit pour lui. Un brave gars quand même. J’ai du le protéger un peu plus quand le bruit a couru dans la section que si une personne se suicidait dans une chambre, toute la chambrée était réformée… Certains auraient bien voulu le voir « sauter » par la fenêtre. Une brave chambrée quand même…

Binks n’était pas très adroit de ses mains, ni très agile dans sa tête. Je le regardais plier son masque à gaz pendant l’exercice et je voyais bien qu’il n’y arrivait pas. Avant qu’il ne soit puni à faire des pompes qu’il n’arrivait pas à terminer, je me suis rapproché de lui. Nous avons fait les exercices ensemble, et je pliais son masque à gaz après avoir plié le mien.

Ceci explique pourquoi, lorsque les gradés ont demandé à ce que l’on se mette par deux, il m’a accroché le bras en me disant: « avec toi ». L’exercice consistait à mettre le masque à gaz sur la figure, à retenir son souffle, à dévisser le filtre et à le brandir en l’air, puis à le revisser sur son masque.

Tout le monde connait la difficulté que l’on a, à réinsérer un filetage dans un trou taraudé, surtout quand le dit trou se trouve sous votre menton sans pouvoir le regarder. Autant dire mission impossible pour Binks…

L’exercice dura une bonne heure, à l’extérieur, sous un soleil de plomb qui nous faisait transpirer sous nos treillis et nos ANP. Je crois bien ne jamais avoir vu Binks réussir à revisser son filtre une seule fois. Il respirait donc lourdement l’air chaud ambiant, après seulement quelques secondes, car il ne savait pas retenir son souffle très longtemps.

L’adjudant nous a alors réuni par chambrée pour nous décrire l’exercice final. Il s’agissait d’entrer dans une pièce enfumée avec nos ANP sur le visage. Une fois à l’intérieur, portes fermées, nous devions retirer nos filtres, les brandir en l’air, attendre que tout le monde soit prêt, et au signal, les échanger avec notre binôme avant de les revisser en place et de pouvoir à nouveau respirer.

« La fumée dans la pièce est du gaz lacrymogène, ça pique les yeux, mais vous devez faire comme si c’était mortel. Aujourd’hui des homme vont mourir! » lâche l’adjudant.

Nous entrons dans la pièce à la queue leu leu. L’un d’entre nous agite les bras et nous bouscule pour ressortir. Son masque était mal ajusté. Notre premier « mort » par les gaz.

Nous voici face à face par deux. Binks est devant moi. Il a sa main posée sur mon épaule, nos regards sont rivés l’un à l’autre, je vois dans ses yeux qu’il sait qu’il va mourir… Au top, nous enlevons nos filtres. Je vois Binks dévisser le sien, puis prendre une grande bouffée d’air, après avoir enlevé son filtre. Il est « mort » sur le coup.

Je me demande ce qu’il est devenu aujourd’hui.

Dennis MacAlistair Ritchie

J’ai commencé la programmation sur un IBM 5100 prêté par un parent d’élève à notre petit club d’informatique de lycée, en 1979… Le professeur de Maths qui nous encadrait bénévolement pendant la pause déjeuner nous avait initié à l’algorithmique sur un problème de réduction de fractions entières. La programmation s’effectuait en BASIC.

Parallèlement, je découvrais comme beaucoup de jeunes de cette époque les joies de la programmation en assembleur sur ma calculatrice, une TI57.

Puis, après avoir travaillé un mois l’été, j’avais réussi à m’acheter un vrai ordinateur, un TRS-80 modèle I muni de 16Ko de mémoire vive. L’année suivante, je travaillais encore un mois pour m’offrir l’extension mémoire 48Ko…

Je venais d’avoir mon bac, et je découvrais les joies de l’informatique personnelle et ses logiciels perfectionnés: Wordstar, VisiCalc, Moonbase Fallout…

Ma véritable initiation aux langages évolués viendra en école d’ingénieurs avec Pascal, Fortran, Lisp et Smalltalk.

Finalement, je ne découvrirai le langage C que pendant mon doctorat, parallèlement (si je puis dire) au langage Occam. Tous mes travaux de recherche se sont fait avec l’aide de ces deux langages.

Mais la maîtrise véritable des subtilités du langage C, et la découverte de son histoire, ne viendra que lorsque j’ai eu la charge de l’enseigner à mon tour en école d’ingénieurs. Utiliser un langage de programmation, c’est une chose, préparer un cours pour l’enseigner, puis affronter les questions des étudiants en TP, c’est une autre chose. J’ai passé cinq années très riches sur ce sujet, en me creusant la tête chaque année sur la meilleure manière de faire passer les concepts de pointeurs à des étudiants non informaticiens. J’ai pris les exemples les plus simples, les comparaisons les plus claires possibles, j’ai travaillé les sujets de TP pour qu’ils soient progressifs et didactiques. J’ai usé ma salive, mes cordes vocales, mon énergie pour que 100% de mon amphithéâtre maîtrise les concepts, et pas seulement les deux premières rangées, toujours attentives. J’ai menacé, tempêté, félicité, encouragé, noté, dénoté, soutenu, maintenu, poussé mes étudiants pour qu’ils restent concentrés, qu’ils perçoivent la magie de la programmation, la joie de la réussite à faire fonctionner un programme complexe.

La vie m’a ensuite écarté de ces joies et peines de l’enseignement. Je n’ai pas beaucoup pratiqué la programmation, en tout cas plus dans des conditions aussi stimulantes. J’ai à peine effleuré la programmation orientée objet. Un peu de php, un zeste de python, un doigt de html, xml, et autres joyeusetés.

Je suis resté bloqué sur l’époque du langage C.

C’est pourquoi j’ai aujourd’hui une pensée émue pour les proches de Dennis MacAlistair Ritchie qui nous a quitté ce 8 octobre 2011.

#include <stdio.h>

int main(int argc, char ** argv) {

printf(« Goodbye Worldn »);

return (EXIT_SUCCESS);}

————————

Source photo: Wikipédia.

Je rame

Il y a quelques temps, j’ai rencontré mon moi d’il y a 25 ans: j’ai repris un sport que j’ai pratiqué pendant mes trois années d’école d’ingénieurs, l’aviron. Cela m’a fait tout drôle de refaire des gestes que je croyais perdu dans les limbes de ma mémoire. Et il faut croire que c’est comme le vélo, cela ne s’oublie pas vraiment.

Alors je ferme les yeux, et je me retrouve dans un huit d’aviron (huit rameurs, huit rames et un barreur). Nous sommes immobiles, bateau arrêté, pelles dans l’eau, jambes pliées, prêts à donner toute notre puissance.

Autour de nous des centaines de personnes nous observent. Il s’agit d’un spectacle-exhibition. La rivière est étroite à cet endroit là, les pontons et les quais sont remplis de curieux.

Nos yeux sont fixés sur le premier rameur qui va donner la cadence. Sur le quai, l’entraineur tient un drapeau et va nous donner le signal de départ. Nous sommes là pour montrer au public la technique du départ de course en aviron.

A l’arrière du bateau une corde est attachée et disparaît dans l’eau.

Le drapeau tombe, tous ensembles nous poussons sur nos jambes avec les bras tendus. Nos fesses sont posées sur des sièges coulissants. Le premier coup de rame s’effectue à 3/4 de coulisse. Les bras tirent ensuite pour sortir les pelles de l’eau et repousser l’aviron dans l’air.

Vite les jambes se replient, les pelles plongent ensemble dans l’eau. Les deux coups de rames suivants se font à 1/2 coulisse. Deux coups rapides donc: clac, clac. Le bateau prend de la vitesse.

Le quatrième coup de rame s’effectue à 3/4 de coulisse. Tous les coups de rame suivants se font à pleine coulisse, à pleine puissance. Le bateau atteint une vitesse incroyable: en quelques secondes, nous sommes passés d’une immobilité parfaite à un bolide qui fend l’eau.

Derrière nous la corde s’est tendue, et le skieur nautique est sorti de l’eau. Nous l’avons tracté sur cent mètres sous les applaudissements du public. La puissance développée au départ d’un huit d’aviron est telle qu’elle permet de sortir un skieur nautique de l’eau (le tracter ensuite est enfantin).

Souvenir.

Je rouvre les yeux, nous sommes en septembre 2011, et j’ai des ampoules plein les mains et les pieds. L’eau bouillonne autour de moi, nous ramons en soulevant des gerbes d’eau, à peine synchronisés les uns avec les autres.

On ne devrait pas vieillir…

Mais alors comment se remplir la tête de souvenirs?

😉

Mon 11 septembre 2001

Le 11 septembre 2001, je me souviens très bien de ce que je faisais, comme beaucoup de monde, alors que je suis souvent incapable de me souvenir avec précision de ce que je faisais la semaine dernière.

J’étais en TP d’informatique avec mes étudiants. Un TP consacré à la recherche d’information sur Internet… Altavista était encore l’un des moteurs de recherche les plus utilisés. Windows 98 SE était encore bien utilisé dans mon établissement. C’était une autre époque, un autre monde.

J’étais en TP avec mes étudiants quand l’un d’entre eux m’appelle pour me montrer les deux tours en feu. L’information a fait le tour de la salle et nous nous sommes tous retrouvés hypnotisés face aux écrans.

J’aimerais pouvoir dire que j’ai tenu des propos alertes sur le monde libre face à la lâcheté du terrorisme. Mais je me souviens surtout avoir dit à mes étudiants quelque chose comme: « A force d’opprimer les peuples, de vivre grassement sur leur misère, les pauvres se rebellent… Le fossé est trop grand entre ceux qui ont des problèmes de cholestérol et ceux qui ont des problèmes de malnutrition. »

Un étudiant m’a alors regardé en disant: « Monsieur Zythom, nous sommes en train de regarder des milliers de personnes mourir. Ce n’est pas le moment de parler politique. »

Me faire ouvrir les yeux et le cœur si justement par un jeune de 18 ans m’a montré à quel point je pouvais être à côté de la plaque dans un moment historique.

A titre de pénitence, j’ai regardé mourir des gens en boucle toute la soirée. Et je n’ai plus jamais fait la moindre allusion plus ou moins politique avec mes étudiants.

Alors oui, je me souviens d’où j’étais, de ce que je faisais, mais aussi de ce que je disais. Et chaque année, les commémorations me renvoient à ma propre insensibilité. Je suis pitoyable.

Et vous, vous souvenez vous vraiment de votre attitude ce jour là?

—————————-

Photographie Marc Lamey

Attention Haute Autorité

J’ai beaucoup de retard dans mes flux RSS d’information, et c’est donc avec deux semaines de retard que je suis tombé sur cet article de Numérama: « Une Haute Autorité du Net pour le blocage des sites en France?« .

J’ai bien entendu lu avec attention le texte proposé par les quatre signataires

Jean-Pierre BIGOT, créateur de l’entreprise ESALAB et expert judiciaire près la Cour d’Appel de Versailles;

Jacques GODFRAIN, ancien ministre de la coopération (1995-1997) et auteur de la loi n° 88-19 du 5 Janvier 1988 relative à la fraude informatique;

– Carole VUJASINOVIC, Magistrate, Juge d’instruction au pôle financier du TGI de Paris ayant enquêté sur le piratage du film « Bienvenue chez les Ch’tis« ; et

Maître Gérard HAAS, avocat, défenseur et protecteur des acteurs de l’e-commerce (slogan trouvé sur son site), cofondateur de l’association Cyberlex.

Je suis également allé sur le blog ouvert pour l’occasion, j’ai lu attentivement les commentaires (un seul à l’heure où j’écris ce billet).

Je retiendrai pour ma part un passage que je vous livre (les soulignés sont de moi):

« Considérant qu’une régulation «proportionnée» aux cybermenaces est nécessaire, mais que la voie judiciaire est difficilement praticable, nous préconisons la création d’une autorité indépendante, spécialisée pour être efficace, et garante du respect des libertés publiques sur le net et de sa neutralité, dont les décisions de contrôle seraient astreintes aux mêmes exigences que celles du juge, respect du contradictoire, droit de défense, droit de recours, etc… »

Tout d’abord incrédule (le texte est quand même signé par quatre acteurs de l’univers de la justice), j’ai ensuite pensé à ce billet d’Authueil sur les réflexions menées par des groupes de travail plus ou moins opportunistes: Débat de fond et présidentielle dont je vous livre ici un extrait qui illustre mon propos:

« Les débats de fond sont un processus en général lent, éclaté, collectif et médiatiquement peu visibles. Cela se déroule par le biais de colloques, d’articles confidentiels dans des revues spécialisées, de rencontres informelles et de discussions de couloirs. Cela concerne un nombre finalement assez réduit de personnes, mais souvent, sur des thèmes et des questions assez précises. Quand un sujet est technique, il faut déjà savoir de quoi on parle, ce qui constitue parfois une barrière à l’entrée, même s’il y a plusieurs cercles. On peut avoir ceux qui maitrisent parfaitement, sont reconnus dans le milieu concerné et ont réfléchi au sujet. Ils sont au cœur du processus, comme éléments moteurs, mais pas forcement comme décideurs. Il y a ensuite ceux qui comprennent ce qui se dit, sans pour autant avoir une maitrise technique complète. Ce qu’ils comprennent, ce sont les enjeux, et c’est dans cette catégorie que l’on retrouve, entre autres, les politiques (qui sont rarement des experts pointus, même si ça arrive). »

Alors, lorsque même des personnes ayant de très hautes qualités morales en arrivent à proposer une censure échappant au pouvoir judiciaire, lorsque se profilent des discussions de couloirs et des colloques de spécialistes sur ces thèmes, il me semble important de soutenir les organisations de défense des droits et libertés des citoyens sur Internet.

Et donc, pour la première fois de ma vie, j’ai fait un don à la Quadrature du Net… Je vous invite à réfléchir à faire de même.

Je préfère choisir ma propre Haute Autorité du Net, ou au moins essayer.

Le vélo

Pour changer un peu du billet précédent et aborder un sujet plus léger, si je puis dire, j’ai une révélation à vous faire: j’ai (sans doute provisoirement) abandonné ma voiture pour aller travailler… en vélo.

J’ai pratiqué beaucoup de sports dans ma jeunesse (foot, natation, tennis, ski, voile, handball, aviron, badminton, squash, pour finir par spéléologie jusqu’à l’âge adulte), mais depuis quelques années (disons une dix-huitaine d’années) je suis surtout concentré sur les sports virtuels…

Alors, quand Mme Zythom s’est plainte du coussin qui poussait autour de ma taille, j’ai décidé de prendre une décision un jour d’envisager de peut-être m’intéresser à l’éventualité de reprendre une activité sportive. Les années ont passé, j’ai tâté un peu du jogging, sport peu sur s’il en est (enfin surtout si l’on est une femme), mais avec de piètres résultats. Je n’ai pas la volonté de veuve Tarquine, ni de mon beau frère marathonien…

Alors, parmi plusieurs autres résolutions de janvier, j’ai inscrit dans ma « wish list« :

– encourager le personnel de l’établissement à venir en vélo plutôt qu’en voiture

– venir moi-même en vélo

– acheter un vélo

J’ai donc construit au printemps, à la demande de mes collègues, un garage à vélos dans l’enceinte de mon lieu de travail, pour permettre le rangement de 16 vélos en toute sécurité, à l’abri des intempéries et des dégradations. J’ai également fait rénover la douche et les vestiaires attenants. La dizaine de collègues cyclistes m’ont chaudement remercié et nous avons pu également y garer trois vélos que l’on met en prêt pour les petits déplacements urbains de la journée.

Restait à faire le saut moi-même… C’est ainsi que j’ai pu vérifier qu’il est difficile de modifier ses habitudes de confort bien assimilées.

Première étape: prévenir mes enfants que je ne pourrais plus les accompagner le matin à leur collège/lycée et qu’ils vont devoir prendre le bus à la place chaque matin. « pas grave m’a dit l’ainée », « mais tu vas jamais y arriver! » m’a dit la cadette.

Deuxième étape: acheter un vélo. Mon vieux biclou ayant fait son temps et la rouille son œuvre, il me fallait choisir un nouvel instrument de torture qui puisse aussi être un fidèle compagnon. J’ai fait ce que je sais faire de mieux: je suis aller voir sur internet. Et j’ai étudié les vélos à assistance électrique, les vélos de course, les vélos de ville, les vélos tout terrain, les vélos à 1000 vitesses, les vélos à cardan, les freins à disque, à tambour, à étrier à tirage latéral, à tirage central, à double pivot… J’ai fini par aller voir un marchand à qui j’ai expliqué le cahier des charges suivant:

Je voudrais un vélo:

– pour aller au travail tous les jours et en revenir

– qui ne fait pas de bruit quand je freine (freins à disque ou à tambour)

– avec une chaine qui ne salisse pas (cardan ou chaine carénée)

– avec un porte bagage et des sacoches pour transporter mes affaires

– avec moins de cinq vitesses, si possible sans plateau ni dérailleur

– avec des lumières avant et arrière sur dynamo

– avec un casque et un gilet de sécurité

– avec une « sucette rouge » pour faire passer les voitures au large

– pas cher, solide et demandant le moins d’entretien possible.

« Pas de problème » m’a répondu le vendeur en allant chercher le vélo de mes rêves dans son arrière boutique. Tout y est, sauf le frein avant qui est à patins, mais bien réglé pour ne pas faire de bruit. La dynamo est un système d’aimants placés sur les rayons des roues et alimente des leds clignotantes à l’avant et à l’arrière.

Troisième étape: repérer le trajet sur Google maps. Établir minutieusement le chemin à parcourir entre la maison et le boulot en découvrant des pistes cyclables inconnues, en estimant la distance probable et en évitant les endroits les plus dangereux, les ronds points de folie, etc. Bilan, après une étude approfondie, mathématique, rigoureuse, je tiens un parcours qui n’a rien à voir avec le chemin que j’emprunte habituellement, chemin optimisé par 18 années d’expérimentations scientifiques voiturières.

Quatrième étape: le choix des vêtements. Comment s’habiller pour aller en vélo au travail? J’opte pour la solution tennis+jean+Tshirt avec dans mes sacoches une chemise pliée proprement, une serviette de bain avec savon-douche, un coupe-vent et un poncho pour la pluie. Je laisse dans mon bureau des chaussettes de rechange (en cas de fortes pluies) et mes chaussures de sécurité de travail.

Cinquième étape: ben faut y aller maintenant… 10 km aller, 10 km retour: 25 minutes dans chaque cas (au lieu de 15 mn en voiture), 35 mn en cas de pluie (le poncho se gonfle comme une voile…).

Cela fait maintenant six semaines que j’ai abandonné ma voiture pour me rendre cinq jours par semaine au travail. Au début, j’avais un peu mal aux jambes et aux fesses (rapport à la selle). Maintenant, j’ai toujours mal aux jambes et aux fesses. Je crois qu’il faut que j’insiste 🙂 J’ai découvert que je pouvais écouter la radio avec mon baladeur MP3. J’ai découvert un univers où l’on peut remercier les gens qui vous laissent passer (piétons, automobilistes, autres cyclistes). J’ai aussi découvert les nuages de moucherons (et leur goût!), les promeneurs de chiens avec laisse de 20m, les branches basses, les pas-priorités-aux-vélos dans les ronds-points…

Et pour l’instant, même les matins pluvieux ne m’ont pas encore découragé. On verra avec la neige de cet hiver. Il reste à survivre aux automobilistes et aux autres cyclistes.

Jusqu’ici tout va bien.

Jusqu’ici tout va bien.

Jusqu’ici tout va bien.

J’ai même perdu 2 kg.

Le respect des anciens

C’est peut-être l’approche de la cinquantaine qui commence à me faire prendre conscience que je ne suis plus le jeune homme d'(avant) hier.

A 15 ans, j’avais fait le calcul de l’âge que j’allais avoir en l’an 2000: 36 ans! Cela me paraissait à la fois lointain et déjà un âge respectable.

Maintenant que j’ai bientôt 48 ans, j’ai réalisé que :

– le 19 janvier 2038, j’aurai 74 ans, et serai peut-être à la retraite quand on m’appellera pour sauver le monde.

le 28 juillet 2061 (Odyssée trois), j’aurai presque 98 ans et un beau télescope (en cuivre) avec systèmes d’optique adaptative.

Mais bon, comme je dois mourir le 15 mai 2037, j’espère que vous penserez à moi ces jours là, avec un peu du respect dû aux anciens. Surtout si je tombe en pleine analyse d’un vieil ordinateur neuronal des années 20 (autant dire au champ d’honneur;).

Un billet du vendredi, court et nawak, pour le plaisir de partager une belle œuvre de street art (image cliquable).