L’art de la loose

Il y a en France deux niveaux d’experts judiciaires : le niveau régional, avec les personnes inscrites sur les listes des Cours d’Appel, et le niveau national, avec la liste de la Cour de Cassation. 

Comme je n’ai pas trop peur du ridicule, et que j’ai fait mien l’adage « qui ne risque rien n’a rien », j’ai postulé en 2015 pour une inscription sur la prestigieuse liste de la Cour de Cassation. J’ai d’ailleurs publié ici même, dans ce billet, la lettre de motivation qui accompagnait mon dossier de demande d’inscription. Lisez-là, elle montre que je suis super motivé 🙂

Depuis fin décembre, je scrute tous les soirs avec impatience la boite aux lettres en rentrant à mon domicile pour avoir la réponse à ma demande.

Il y a quelques jours, je suis tombé sur cette proposition de loi relative au caractère temporaire de l’inscription des experts judiciaires sur la liste nationale, déposée par Monsieur le Député Jean-Luc Warsmann (l’augmentation de graisse est de moi) :

EXPOSÉ DES MOTIFS


Mesdames, Messieurs,

Cette proposition de loi est relative à la durée d’inscription des experts judiciaires sur la liste nationale et reprend les préconisations émises par la Cour de cassation dans son rapport annuel 2014 « Le temps dans la jurisprudence de la Cour de cassation ».

L’article 2 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires a été modifié par la loi n° 2012-409 du 27 mars 2012 de programmation relative à l’exécution des peines afin de permettre l’inscription sur la liste nationale des experts à des personnes ayant exercé de fonctions semblables dans d’autres États membres de l’Union européenne.

Toutefois, la nouvelle rédaction a omis de reprendre la disposition relative au caractère temporaire de cette inscription qui précisait que la durée d’inscription sur la liste nationale des experts est de sept ans. Aussi, désormais et depuis 2012, l’inscription sur cette liste n’est plus limitée dans le temps. Selon le rapport de la Cour de cassation, cette situation pose en pratique un certain nombre de problèmes.

En effet, bien qu’ils soient âgés et n’exercent plus d’activité expertale, un certain nombre d’experts ne demandent pas leur retrait de ladite liste. Ainsi, la Cour constate que cinquante-deux experts âgés de plus de soixante-dix ans figuraient encore sur celle-ci.

De même, en l’absence de demande de retrait ou de réexamen des candidatures au bout de sept ans, seule la procédure disciplinaire est possible à l’encontre d’experts peu diligents dont l’inscription ne semblerait plus souhaitable sans que, pour autant, leur comportement mérite d’être sanctionné disciplinairement.

La liste nationale s’allongeant sans cesse a pour conséquence que certaines rubriques sont largement pourvues et cela empêche l’inscription d’experts plus jeunes.

Enfin, le non-renouvellement de l’inscription sur une liste de cour d’appel n’a plus aucun effet sur l’inscription sur la liste nationale puisque le caractère temporaire de l’inscription sur cette dernière n’existe plus. En conséquence, nous assistons à des situations incohérentes puisque certains experts peuvent figurer sur la liste nationale alors même que leur réinscription leur a été refusée sur une liste de cour d’appel.

Aussi, cette proposition de loi entend mettre en œuvre cette recommandation de la Cour de cassation en réintroduisant le caractère temporaire de l’inscription des experts judiciaires sur la liste nationale.

Tel est l’objet de la proposition de loi qu’il vous est proposé d’adopter.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

Le III de l’article 2 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il est procédé à l’inscription sur la liste nationale pour une durée de sept ans et la réinscription, pour la même durée, est soumise à l’examen d’une nouvelle candidature. »

De ce fait, je me disais que j’avais une chance supplémentaire d’être accepté, puisqu’à 52 ans, je me sens plutôt « jeune » sur le coup.

Hélas, voici le courrier que j’ai reçu aujourd’hui, signé du premier président de la Cour de Cassation, et qui douche mes espoirs :

[…]

Mais attendu qu’il ressort de l’instruction du dossier que M. [Zythom] n’a de l’expertise qu’une expérience limitée et ne justifie ni d’une reconnaissance par l’ensemble de la profession au niveau national ni d’une notoriété reconnue par ses pairs ; que dès lors, l’intéressé n’exerce pas son activité dans des conditions lui conférant une qualification suffisante pour prétendre à l’inscription sur la liste nationale.

[…]

La demande d’inscription sur la liste nationale des experts présentée par M. [Zythom] est rejetée.

Ouch.

J’ai voulu me frotter à l’élite, me voici renvoyé dans mes 22… Ça brise un peu mon rêve de participer aux enquêtes de niveau national avec les Roxors de la Cour de Cassation.

Quant à acquérir un jour une notoriété reconnue par mes pairs… Peut-être dans l’art de la loose ?

Il y a toujours des sommets qu’on ne pourra pas atteindre. Cela n’empêche pas d’essayer. Je ne regrette rien.

Je continuerai donc à faire de mon mieux, à mon niveau de petit expert judiciaire de province. Et j’en suis fier 🙂

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Source photos : Mamika de Sacha Goldberger

PS: « L’art de la loose » est (pour moi) une référence clin d’œil à un blog aujourd’hui disparu que j’aimais bien. D’où le choix de cette orthographe pour le mot anglais « lose ».

L’analyse d’un disque dur et les poupées russes

J’arrive d’un tribunal relativement lointain où j’ai du me rendre pour aller chercher un scellé. Je le sors de ma voiture et le dépose dans mon bureau. Il s’agit d’un ordinateur assez banal sur lequel j’ai assez peu d’informations : son propriétaire est soupçonné dans une affaire brassant pas mal d’argent et le magistrat me demande de retrouver des images de complices pour lui permettre de démontrer que l’utilisateur de l’ordinateur était bien en contact avec eux…

Je prends quelques photos du scellé avant de l’ouvrir.

L’ordinateur contient plusieurs disques durs que je prends en photo. Ceux-ci sont reliés à une carte RAID. Aïe. Cela va compliquer l’analyse.

Je note scrupuleusement tous les branchements, ainsi que le positionnement des différents disques durs, et je relève leurs caractéristiques individuelles. Je note également la marque et le modèle de la carte contrôleur RAID. Dans le cadre de mon travail de responsable informatique dans une école d’ingénieurs, j’ai l’habitude de plusieurs configurations RAID : RAID logiciel, RAID matériel, RAID 0, 1, 5 et 6. Je sais d’expérience qu’il existe des cartes RAID plus ou moins exotiques. Celle que j’ai sous les yeux ne m’est pas inconnue.

En matière d’analyse inforensique d’un groupe de disques RAID, vous pouvez réaliser une image bit à bit de chaque disque séparément, indépendamment du contrôleur RAID. Vous pouvez également faire une image du disque globalement à travers le contrôleur RAID, avec le risque de rater une partition cachée par le firmware du contrôleur.

Je ne prends pas de risque : je prends dans mon stock de disques durs des disques ayant les bonnes capacités, et je procède aux prises d’images : une première prise d’images de chaque disque par sécurité (au cas où l’un d’entre eux tombe en panne), une image globale à travers le contrôleur RAID, puis un clonage de chaque disque pour reconstruction du RAID sur ma propre carte RAID afin de pouvoir démarrer l’ordinateur sur des disques différents. Bref, c’est ceinture ET bretelle.

Une fois que j’ai enfin la possibilité de regarder le contenu du groupe de disques durs, je commence mon analyse « primaire » par la recherche d’images. Au bout de quelques jours, je me rends à l’évidence : il n’y a rien d’intéressant.

Je regarde alors les différents logiciels installés, et je vois qu’un logiciel de virtualisation est présent sur le disque dur, ainsi que plusieurs machines virtuelles. Intéressant 🙂

Je récupère une copie de chaque image virtuelle et je procède à leur analyse. La plus intéressante est celle dont la date d’utilisation est la plus récente. Il s’agit d’une machine Windows. Je recommence une analyse complète. Rien.

La machine est plutôt « propre », avec peu d’informations en cache et en base de registres. Je note la présence du logiciel « CCleaner » que je connais bien pour ses capacités de nettoyage mais aussi pour sa fonction « effaceur de disques ». Je regarde dans cette direction. Pas concluant.

Je trouve dans le répertoire de l’utilisateur quelques fichiers cc_XXX.reg typique du nettoyage par CCleaner de la base de registres. Ce sont des sauvegardes des clefs de registres qui vont être supprimées par CCleaner. Je regarde le contenu de ces fichiers et je tombe sur une information qui m’intéresse au plus haut point : la machine virtuelle Windows a contenu un jour un logiciel (effacé depuis) de stéganographie…

En informatique, la stéganographie est une technique permettant de cacher de l’information dans un fichier. Avec le nom du logiciel, je cherche sur internet, et je découvre que sa particularité est de cacher des images dans d’autres images. Bien.

Je récupère toutes les images présentes sur l’ordinateur, et sur les différentes machines virtuelles.

Je récupère tous les mots de passe présents sur l’ordinateur et ses machines virtuelles, via les outils de récupération des comptes Windows, mais surtout via les différents emails encore présents sur les différents supports (lire le billet « Cracker les mots de passe« ).

Je récupère le logiciel de stéganographie sur internet. Je fais plusieurs essais sur mon ordinateur pour me familiariser avec le logiciel. C’est assez ludique.

Je me rends compte alors d’un réflexe que j’ai, à savoir de conserver une version originale de l’image dans laquelle je vais cacher l’information. J’ai donc deux fois la même image, mais avec des tailles différentes.

Je recherche sur le scellé toutes les images identiques mais de tailles différentes. J’en trouve dix !

Je teste le logiciel de stéganographie, avec ces images et tous les mots de passe que j’ai pu récupérer. BINGO ! L’un des mots de passe a été utilisé pour insérer des images dans d’autres images sur la machine virtuelle Windows.

Je récupère toutes les images cachées. Il s’agit de documents scannés contenant les noms et signatures des personnes mentionnées dans mon ordonnance de désignation.

Je préviens le magistrat par téléphone. Il me dit que cela conforte d’autres éléments de preuve. Je suis un peu déçu, mais j’attaque la rédaction de mon rapport. Il va me falloir être pédagogue pour expliquer tout cela clairement.

Parfois l’enchaînement des opérations que je note sur mon cahier d’investigation me fait peur. Et si je n’avais pas fait telle ou telle recherche ? Et si je n’avais pas vu telle ou telle information ?

Ici, l’information intéressante se trouvait cachée dans des images, qui se trouvaient dans une machine virtuelle stockées dans une grappe de disques durs… Un empilement de poupées russes que j’aurais très bien pu rater.

J’aurais simplement écrit « je n’ai pas trouvé les éléments recherchés ». Cela ne veut pas dire qu’ils n’existent pas. Cela veut simplement dire que je ne les ai pas trouvés. Et parfois, je me dis que j’ai vraiment failli passer à côté…

Et ça, ça m’empêche de dormir.

La gratuité des expertises judiciaires

Depuis 1999, je suis inscrit sur la liste des experts judiciaires en informatique de ma cours d’appel. Lorsque j’ai demandé mon inscription, je ne savais même pas que l’on pouvait demander des honoraires pour les missions qu’allaient me confier les magistrats.

Ma démarche initiale était de mettre mes connaissances au service de la justice, et de me rapprocher de l’univers professionnel de mon épouse avocate.

Mon épouse m’a fait alors remarquer que tout travail mérite salaire et qu’un savoir d’expert avait un prix. Les tribunaux possèdent d’ailleurs des grilles tarifaires leur permettant de vérifier les éventuels abus. Donc, aussitôt cette grille récupérée, j’ai fixé mes honoraires qui ont peu évolué depuis.

J’ai raconté tout cela dans un billet récent : combien coûte une expertise ?

Pendant des années, j’ai suivi consciencieusement cette procédure :

– le magistrat me contacte, en général par écrit, pour me donner une mission d’expertise (c’est l’ordonnance de mission) ;

– j’établis un devis que j’adresse au magistrat pour acceptation, avec éventuellement une demande de provision (sauf cas d’urgence) ;

– une fois le rapport déposé, j’envoie une note de frais et honoraires (et j’attends, parfois fort longtemps).

Cette procédure est venue se compliquer avec l’entrée en lice du logiciel abominable Chorus.

Mais depuis quelques temps, j’en suis arrivé à me demander si je ne vais pas réaliser mes expertises judiciaires gratuitement, et cela volontairement.

Arguments pour :

– Je suis fier d’être inscrit sur cette fameuse liste des experts judiciaires. Cela suffit à mon bonheur.

– La justice est, en France, à bout de souffle, car étranglée financièrement. Pourquoi creuser ce gouffre, quand la plupart des juridictions manquent des moyens les plus élémentaires pour fonctionner (fax en état, téléphones portables pour les astreintes, papiers pour les photocopieurs, codes à jour, post-it, stylos, etc.) ?

– Le développement de mon activité de consultant privée, boostée par mon inscription sur la liste des experts, devrait suffire à financer mes activités expertales qu’elles soient judiciaires, administratives ou privées.

– Simplification extrême de la procédure : plus besoin de faire de devis, plus besoin d’attendre le feu vert pour démarrer les opérations d’expertise. Tout cela amène un gain de temps phénoménal.

– Plus besoin non plus de râler contre les lenteurs des paiements.
– Je suis salarié, je peux financer un déplacement pour des réunions d’expertise. Je finance déjà la totalité du temps que je passe en autoformation sur l’état de l’art, à chaque mission que l’on me donne.
– Si le nombre d’expertises monte en flèche, j’ai toujours la possibilité de refuser, parce que je serais débordé.

Arguments contre :

– Certaines dépenses obligatoires, telles que l’assurance en responsabilité civile (lire le billet intitulé « le prix de la liberté« ) sont assez conséquentes (1200 euros), sans parler du coût des ouvrages spécialisés et des formations (fortement recommandées).

– Est-il juste que je paye de ma poche les différents déplacements, les jours de congé payés pris pour les réunions d’expertise ?

– Mes connaissances, et l’avis que je donne au magistrat, ont une valeur. N’est-il pas normal que cette valeur soit transcrite en euros sonnants et trébuchants ?

– Pour certaines personnes, tout ce qui est gratuit est de mauvaise qualité. Les avocats commis d’office savent de quoi je veux parler. C’est bien entendu faux, mais les gens sont comme ça. Surtout que finalement les avocats commis d’office sont payés par l’État, alors que moi, je propose de payer moi-même le coût de l’expertise. Les gens sont-ils prêts à comprendre ma démarche.
– Comment les magistrats vont-il appréhender cette proposition ? Vont-ils penser que je cherche à tout prix à faire des expertises ? Cette attitude originale ne cache-t-elle pas quelque chose de suspect ?

J’ai conscience que je peux me poser cette question car je ne vis pas du revenu de mes expertises judiciaires, que je suis inscrit comme expert dans une rubrique où les dépenses peuvent être relativement minimes, surtout si l’on s’appuie sur des logiciels gratuits. Je n’englobe pas dans ma réflexion les experts-traducteurs, ni les laboratoires, ni même l’ensemble des autres experts. Je pense uniquement à mon cas.

Cette idée de travail gratuit se retrouve dans la communauté des développeurs open source, et des développeurs de logiciels gratuits. Pourquoi pas dans la communauté des prestataires de services ? Je travaillerais gratuitement pour le public, mais je me ferais payer toutes les prestations privées.

J’avoue que cette idée de proposer mes services gratuitement à la Justice tourne de plus en plus dans ma tête.

Je trouve que ça a une certaine classe, et que ça correspond assez bien à mes idéaux initiaux.

J’hésite néanmoins.

Qu’en pensez-vous ?

La professionnalisation de l’expertise judiciaire

La revue « Gazette du Palais » change de format et propose un numéro gratuit accessible ici. Vous trouverez, à la page 15, un article écrit par Maître Nicole Chabrux et intitulé « Le business de l’expertise judiciaire en matière de dommages corporels ».

Extrait :

La revendication de la professionnalisation de l’expertise judiciaire
[…] de nombreux experts ont compris qu’il y avait là un « Marché de l’expertise judiciaire » très attractif en termes de revenus, et sans commune mesure avec les responsabilités engendrées par l’exercice plein et entier de la médecine.
Certains n’ont pas attendu et en ont déjà fait un véritable business : il y a quelques mois, devant le juge en charge du contrôle des expertises, l’expert, dont le remplacement était sollicité par la victime au profit d’un expert relevant d’une spécialité particulière, s’est présenté devant le juge afin de voir sa désignation maintenue et n’a pas hésité, comme gage d’une compétence avérée et large, à revendiquer 600 expertises judiciaires par an !
Il s’avère que cet expert n’exerce – depuis son inscription sur les listes en 1985, soit depuis 30 ans – ni la chirurgie, ni l’activité de médecin, ayant, en pratique, fait de l’expertise judiciaire son « métier ». Il n’est pas certain que les magistrats qui le désignent fréquemment soient au fait de cette situation.
Cet expert ne pratique donc pas la médecine, il est expert en barème du concours médical depuis trente ans ! Au regard de la facturation appliquée sur une base moyenne de 2 200 € l’expertise, il paraît en effet beaucoup plus rentable et confortable d’exercer le métier d’expert judiciaire en barème que d’exercer la médecine avec son cortège de responsabilités et ses contraintes financières (primes d’assurance en hausse constante et pouvoirs publics qui se désengagent au profit des mutuelles).
C’est la raison pour laquelle, sous couvert d’une meilleure formation des experts, certains avancent l’idée de la professionnalisation de cette activité.

Je vous invite à lire l’article au complet car il montre les dérives de notre système judiciaire où, parfois, l’expert judiciaire peut prendre le pas sur le juge.

Ma position sur le sujet ? Elle n’a pas changé depuis ce billet de 2006 où j’écrivais:

La professionnalisation des experts ? Un non sens puisqu’on aboutit
alors à un personnage hyperspécialisé dans une profession qu’il n’exerce
plus et dont il va perdre à terme la maîtrise et par conséquent le
droit d’émettre un avis des plus pertinents.

La seule voie d’avenir de professionnalisation à mon sens, est celle du regroupement des experts judiciaires au sein de laboratoires agréés (lire ce billet de 2009). Et encore, je reconnais que cette vision pose encore de nombreux problèmes.

La solution réside sans doute, comme le souligne l’auteur, dans le constat de l’empiétement croissant du pouvoir des experts sur l’impérium du juge, et d’encourager ces derniers à exiger des justifications claires et scientifiques des avis exposés dans leurs rapports par les experts.

Les conférences

Cliquez sur la photo pour l’agrandir

Le 10 décembre dernier, j’étais invité par les organisateurs du NetSecure Day de Rouen à faire une conférence sur les défis de l’expert judiciaire.

La journée était fort bien organisée, l’accueil chaleureux et les organisateurs sympathiques. J’ai aimé pas mal des présentations faites ce jour-là, et surtout, l’atmosphère était sympa, jeune et détendue, et il y avait beaucoup de gens cools pour un événement pas encore blindé par les commerciaux…

L’entrée était gratuite, les participants nombreux et passionnés, le buffet de midi de qualité (et gratuit !) et les intervenants de qualité (si, si ;-). Si vous habitez dans la région, je vous recommande d’y aller (la prochaine journée aura sans doute lieu en décembre 2016).

Si vous avez raté la journée 2015, toutes les conférences (vidéos et visuels) sont en ligne sur le site : www.netsecure-day.fr/nsd15/

J’ai pu récupérer la vidéo de mon intervention, avec l’aimable autorisation des organisateurs. Je l’ai mise sur ma chaîne YouTube, et je la pose ici pour les lecteurs du blog que ça pourrait intéresser :

Vous pouvez aussi trouver les visuels en suivant ce lien.

Je profite de ce billet pour expliquer ma philosophie concernant ma participation à ce type de manifestation.

On me sollicite parfois pour participer comme invité à une conférence. C’est très gratifiant (on se sent désiré et soudainement important). En général, l’organisateur prend en charge les frais de séjour (logement et repas), les frais d’accès à la conférence (si l’entrée est payante) et parfois les frais de déplacement. Cela s’arrête là, car pour ma part, je ne fais pas partie des conférenciers qui se font payer pour venir…

Mais je me souviens aussi d’une période où j’avais un peu de mal à joindre les deux bouts : j’étais étudiant, j’étais fou, j’étais jeune. Je me passionnais alors pour l’informatique, pour l’intelligence artificielle et j’avais les yeux qui brillaient quand on me parlait des conférences qui se déroulaient sur ces sujets dans le monde. J’ai eu la chance ensuite de pouvoir intégrer un laboratoire qui a pu me permettre de partir dans des endroits de rêve pour échanger avec des personnes qui étaient des dieux vivants pour moi et dont j’avais lu toutes les publications. Je me souviens néanmoins de cette (courte) période où j’aurais bien voulu assister à des conférences, mais où mes moyens ne me le permettaient pas.

Je pratique donc depuis longtemps la chose suivante : à chaque fois que je suis invité VIP dans une conférence, je demande à payer moi-même tous mes frais : trajet, entrée, logement et repas. En échange, je veux la garantie qu’un étudiant soit sélectionné pour être entièrement pris en charge par l’organisation, à ma place, et ainsi pouvoir participer à l’événement. Un étudiant, fauché si possible, du type qui aurait bien voulu venir mais qui ne peut pas faute de moyens.

J’ai la chance d’avoir un métier passionnant, comme
salarié, comme expert et comme consultant free-lance. Ces activités
rémunérées me nourrissent et me permettent de nourrir ma famille et de lui
fournir un toit et des smartphones vêtements décents. J’ai aussi une épouse qui ne veut pas que je parle d’elle sur ce blog participe grandement à cet état de fait. Je peux donc financer moi-même ma participation à une conférence où j’interviens.

J’ai conscience du problème que j’ajoute à l’organisation (j’entends souvent ce qu’il se passe dans la tête de mon interlocuteur : « oh put*, encore un truc à gérer en plus »), mais en général, c’est très bien pris, et toutes les conférences qui m’ont invité ont joué le jeu, je tiens à le souligner.

C’est ma manière de tendre la main à mon moi d’il y a 30 ans.

Et de l’aider à franchir une marche.

Devenir Expert Judiciaire

Vous êtes nombreux à me contacter pour avoir des détails sur la question de savoir comment devenir expert judiciaire. Je vais répondre de manière groupée en rédigeant une mise à jour de mes billets précédemment publiés sur ce sujet.

Expert Judiciaire : définition.

« Les experts judiciaires sont des professionnels spécialement habilités, chargés de donner aux juges un avis technique sur des faits afin d’apporter des éclaircissements sur une affaire. Ce sont des spécialistes de disciplines très variées (médecine, architecture, gemmologie, économie et finance, etc.).

Leurs avis ne s’imposent pas aux juges qui restent libres de leur appréciation. »

Source : Ministère de la Justice

Les experts judiciaires sont des professionnels reconnus pour leur compétence et leur expérience dans leur domaine d’activité qui sont chargés par le juge d’apporter des éclaircissements et de donner un avis technique sur des éléments d’une affaire. Ils prêtent serment et exercent leur mission en toute indépendance sous le contrôle du juge.

Les experts sont inscrits sur une liste établie auprès de chaque cour d’appel. Ils perçoivent des honoraires dont le montant, selon les domaines, est réglementé ou fixé par le juge.

Source : Cour d’Appel d’Angers

Un expert judiciaire, c’est quelqu’un qui est inscrit sur une liste tenue par une Cour d’Appel.
Le simple fait d’être inscrit sur cette liste donne le droit d’utiliser
le titre « d’expert près la Cour d’Appel de X ». Cette liste
permet aux magistrats ayant besoin d’un avis technique de désigner
quelqu’un pouvant les éclairer dans une affaire sur laquelle ils
travaillent.

Pour être inscrit sur cette liste, vous devez avoir un « vrai » métier
(celui qui vous fait vivre). Les magistrats qui gèrent cette liste
considèrent que l’activité d’expert judiciaire doit être une activité
annexe, ce qui me semble tout à fait raisonnable, tant il serait
dangereux de vivre uniquement aux crochets des régies judiciaires, qui
payent souvent avec beaucoup de retards (lire ce billet par exemple).

Le titre d’expert judiciaire est un titre prestigieux… Ou du moins qui
jouit d’un certain prestige. Beaucoup de personnes aimeraient bien
l’ajouter sur leur CV ou sur leur carte de visite. Certains considèrent
même qu’il s’agit de la consécration ultime d’une carrière
professionnelle, une forme de reconnaissance auprès de leurs pairs. Mais ne vous y trompez pas, en demandant à être inscrit sur une liste de Cour d’appel, vous acceptez seulement de consacrer une partie de votre temps au service de la justice et de lui apporter votre concours, vos connaissances techniques, votre expérience professionnelle en exécutant telle mission qui peut vous être confiée par une juridiction.

Devenir expert judiciaire : mode d’emploi.

La procédure pour devenir expert judiciaire est relativement simple: il vous suffit de déposer un dossier avant le 1er mars de chaque année auprès du procureur de la République.
Votre dossier va suivre tout un parcours, et s’il est accepté, vous
verrez votre nom inscrit sur une liste gérée par votre Cour d’Appel.
L’inscription sur cette liste fait de vous un expert judiciaire. Bravo
cher confrère ou chère consœur.

Le dossier de demande d’inscription sur la liste des experts judiciaires
doit comprendre toutes les précisions utiles permettant de juger de la
qualité de votre candidature, notamment les renseignements suivants :

1° Indication de la ou des rubriques ainsi que de la ou des spécialités dans lesquelles l’inscription est demandée. Vous trouverez la nomenclature des branches, rubriques et spécialités sur ce site.

2° Indication des titres ou diplômes du demandeur, de ses travaux
scientifiques, techniques et professionnels, des différentes fonctions
qu’il a remplies et de la nature de toutes les activités
professionnelles qu’il exerce avec, le cas échéant, l’indication du nom
et de l’adresse de ses employeurs.
En terme plus simple, ressortez votre CV et mettez le à jour.

3° Justification de la qualification du demandeur dans sa spécialité.
Vous avez des lettres de recommandation, des courriers de vos pairs qui
admirent vos compétences, c’est le moment de les sortir de leurs cadres
et d’en faire une photocopie.

4° Le cas échéant, indication des moyens et des installations dont le candidat peut disposer.
Vous travaillez dans une université ou dans une grande entreprise dont vous avez le droit d’utiliser les installations pour une prestation extérieure officielle, si possible
gratuitement, alors c’est le moment de le signaler par écrit.
L’institution judiciaire est si mal pourvue en budget par les politiques
en charge des affaires…

Un coup d’œil sur le site web de votre Cour d’Appel est indispensable pour savoir s’il faut des documents complémentaires (photos, etc.) et pour télécharger le document intitulé « dossier de candidature ».

Comment s’effectue le choix parmi les candidatures ?

La décision d’inscription est prise par l’assemblée générale des magistrats du siège après enquête du Parquet. 

C’est en fonction des besoins exprimés par les juridictions du ressort que l’assemblée générale de la cour d’appel apprécie les mérites des candidatures en veillant à ne retenir que celles déposées par d’excellents professionnels présentant, par ailleurs, des garanties de moralité, d’impartialité, d’indépendance et de disponibilité.

Source : dossier de candidature à la Cour d’Appel de Paris

Je n’en sais pas plus. La procédure de sélection est relativement opaque : vous pouvez avoir un dossier fantastique, mais postuler une année où la Cour d’Appel n’a pas de besoin, ou inversement… Vous ne devez pas être déçu de ne pas être inscrit dès la première
demande. Le nombre d’experts retenus tient à des facteurs indépendant
des candidats, comme l’évolution du nombre d’expertises, le nombre
d’experts dans une discipline, les orientations générales de la
Chancellerie ou encore à d’autres facteurs relatifs à l’institution
judiciaire. Seuls les magistrats pourraient indiquer quels sont les
critères qui tiennent aux candidats eux-mêmes. Au vu des pièces
demandées, on peut toutefois estimer que les magistrats examinent la
compétence, l’expérience, la notoriété, la disponibilité, l’indépendance
et les moyens de remplir les missions que présentent les candidats.

Le rejet de la demande d’inscription sur la liste des experts, doit être spécialement motivé : l’assemblée générale des magistrats du siège, doit mettre l’intéressé en mesure de connaître les raisons pour lesquelles sa demande a été rejetée (source Dictionnaire du Droit Privé de Serge Braudo). 

Un
conseil: après un refus, ne pas hésiter à représenter sa candidature
l’année suivante, surtout si l’on peut faire valoir des éléments
nouveaux.

Faut-il suivre une formation particulière pour devenir expert judiciaire ?

A ma connaissance, il n’y a pas de formation obligatoire pour devenir expert judiciaire. Il me semble important néanmoins de vous rapprocher du regroupement d’experts judiciaire de votre Cour d’Appel pour en savoir plus. Ces regroupements sont de statut associatif et s’appellent en général « Compagnie pluridisciplinaire d’experts de justice » et il y en a souvent une par Cour d’Appel. Je ne comprendrais pas un candidat expert judiciaire qui ne se rapprocherait pas de la compagnie pluridisciplinaire de sa Cour d’Appel. Y adhérer, au moins au début, est un conseil que je donne toujours.

Par contre, une fois inscrit sur la liste des experts judiciaires, il y a des sessions de formation obligatoire à suivre, en particulier sur la procédure. Ne les manquez pas !

Conclusion.

Il vous reste jusque fin février pour déposer votre dossier (qui doit être arrivé avant le 1er mars). N’oubliez pas de relire quelques billets de ce blog dans la rubrique Expert, et en particulier celui-ci avant de vous lancer dans l’aventure.

Pour casser un peu le mythe, la lecture de ce billet peut être utile…

Si votre demande est acceptée, vous serez convoqué pour prêter serment.
C’est aussi le bon moment pour contacter une compagnie d’experts pour
parler formations, procédures, assurance, et pour comprendre également dans quel guêpier vous êtes tombé avant de contacter les impôts, l’URSAFF et autres joyeusetés à qui vous allez expliquer votre activité (et comment ils doivent la gérer).

A bientôt, chère consœur et cher confrère 🙂

Smtp et voeux 2016

Je vous souhaite à tous une heureuse et bonne année 2016.

Qu’elle soit l’occasion pour vous et vos proches de réussir tous vos projets personnels et professionnels, et de réaliser pleinement combien la vie est importante.

Ce message, je vous le transmet par l’intermédiaire de mon blog, à chaque lecteur qui atterrit ici par la magie du web ou des agrégateurs de flux RSS.

Mais j’ai souhaité également le transmettre à mes amis, à mes relations, à mes clients et à mes prospects. C’est là que le problème devient beaucoup plus compliqué que la rédaction d’un simple billet de blog…

Car, si j’ai bien effectivement fait réaliser une magnifique carte de vœux que je complète d’un petit mot gentil, il ne m’est pas possible d’en envoyer des milliers d’exemplaires. Il me faut donc me résoudre à envoyer mes vœux par email.

J’ai longtemps géré moi-même le serveur d’envoi des emails de mon établissement. J’avais mis en place un magnifique serveur sendmail avec le fichier de configuration qui va bien, que j’avais ensuite migré vers un serveur Postfix plus facile à paramétrer. Je vous parle là de la fin du siècle précédent… L’ensemble s’est progressivement complexifié avec la lutte antispam, par l’ajout d’Amavis et Spamassassin, puis d’un greylisting avec PostGrey. Sans oublier la lutte antiviral avec ClamAV.

Je me souviens des utilisateurs qui râlaient parce qu’on avait introduit un délai de 10mn dans la réception des emails…

Puis, l’email a été introduit dans la pédagogie et chaque étudiant s’est vu offrir une adresse email (quelle modernité à l’époque !). Les volumes d’échange ont ensuite progressivement augmenté, les exigences aussi : il a fallu mettre en place la gestion de carnets de contacts, des passerelles vers des domaines internes, etc. Et un jour, les ordinateurs portables sont arrivés, puis les smartphones et les tablettes.

J’ai pris en 2009 la décision d’externaliser les 4000 boîtes aux lettres vers l’un des prestataires les plus performants de l’époque : Gmail. Je n’ai jamais regretté, malgré les débats, les collègues d’autres établissements sceptiques voire hostiles.

A titre personnel, j’utilise les services de plusieurs fournisseurs de boîtes aux lettres : Gmail, Laposte.net, Free.fr, Gandi.net et bien sûr Protonmail.com

Me voilà donc en fin d’année 2015 à préparer l’envoi de mes emails de vœux, comme chaque année. Sauf que cette fois, j’ai des milliers d’emails à envoyer… Et à ce niveau-là, on commence à dépasser les seuils de détection mis en place par tout le monde : aussi bien par le fournisseur d’accès à internet, le gestionnaire du serveur smtp que vous voulez utiliser pour l’envoi, et tous les serveurs smtp de réception, en particulier ceux des GAFA utilisés par beaucoup de mes destinataires.

J’ai baissé les bras : le temps m’a manqué pour savoir combien d’emails pouvaient être envoyés par Gandi ou LaPoste avant qu’un mécanisme ne coupe mon publipostage. J’ai bien pris un peu de temps pour mesurer la réputation de mon adresse IP personnelle, mais je n’ai pas voulu prendre le risque de la voir dégradée par un algorithme qui considérerait mon publipostage de vœux au même titre que la participation à un botnet vantant les mérites d’une pilule bleue. Je n’ai donc pas osé utiliser mon serveur smtp personnel de peur de me voir couper ma ligne ADSL…

J’ai été triste de voir que finalement, la lutte contre ce fléau qu’est le SPAM (90% des emails circulant sur internet) m’empêchait d’envoyer mes vœux à mes amis, relations, clients et prospects.

Je me suis même demandé si l’envoi de vœux ne constituait pas finalement un SPAM. La réponse ne m’a pas plu.

J’ai donc abandonné l’idée du « Do It Yourself » et me suis alors tourné vers des services spécialisés dans l’envoi de publipostage : trop chers, trop orientés Business pour de simples vœux…

J’ai donc choisi le serveur smtp de mon établissement, avec l’autorisation de mon patron. Notre serveur est bien identifié chez Google et Microsoft, il a les bonnes configurations SPF et DKIM hors de ma portée.

J’ai trouvé cela un peu triste, mais je me suis dit qu’il fallait évoluer avec son temps : l’année prochaine, je n’utiliserai que mes cartes imprimées ;-).

L’email, c’est has been.

J’ai quand même eu plus de 600 réponses sympathiques en 48h qui m’ont fait chaud au cœur 🙂

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Crédit photo Dalton Ghetti

Les populations légales

Je parle assez peu sur ce blog de mon activité de conseiller municipal. Pourtant, ce qu’elle me permet de découvrir ne lasse pas de me surprendre, tant du point de vue humain que du point de vue technique.

Aujourd’hui, en préparant le prochain conseil municipal, j’ai découvert la notion de populations légales. Je vous propose, sans rire, de devenir expert en calcul de populations légales.

Qu’est-ce que cela peut bien être que cette notion et à quoi sert-elle ?

Je ne suis pas juriste, mais j’ai cru comprendre que le nombre d’habitants d’une commune a son importance dans un grand nombre de domaines, comme par exemple la détermination de l’assiette de certains impôts, ou l’organisation des listes électorales.

Et naïvement, je pensais que le nombre d’habitants d’une commune, et bien c’est le nombre de personnes qui habitent la commune. FAUX.

Le terme générique de « populations légales » regroupe pour chaque commune :

1) sa population municipale

2) sa population comptée à part

3) sa population totale, qui est la somme des deux précédentes.

(j’aime bien ce genre de présentation 😉

C’est comme en algorithmique : nous avons décomposé le problème en sous-problèmes supposés plus simples à résoudre : la population totale d’une commune est la somme de sa population municipale et de sa population comptée à part.

Bien.

Accrochez vous.

La population municipale :

Voyons maintenant comment se compte la population municipale.

La population municipale est la somme de 4 catégories de personnes :

1) Celles ayant leur résidence habituelle sur la commune

2) Celles détenues dans les prisons situées sur la commune

3) Celles sans abri recensées sur la commune

4) Celles résidant habituellement dans des habitations mobiles, recensées sur la commune.

Attention, il y a un piège : la « résidence habituelle » indiquée au point n°1 est à préciser ainsi :

a) si la personne est mineure et réside ailleurs du fait de ses études, la résidence habituelle est la résidence de sa famille.

b) si la personne réside dans l’une des communautés suivantes : établissement de santé, maison de retraite, foyer social ou assimilé, communauté religieuse, caserne, quartier, base ou camp militaire, la résidence habituelle est la communauté.

c) si la personne est majeure et réside dans une communauté appartenant à la catégorie « établissement hébergeant des élèves ou des étudiants », la résidence habituelle est la communauté.

d) si la personne est majeure MAIS que du fait de ses études elle réside hors de la résidence familiale ET hors communauté, la résidence habituelle est son logement.

e) si la personne est mariée (ou en concubinage ou PACSé) et réside pour des raisons professionnelles hors de la résidence familiale ET hors communauté, la résidence habituelle est sa résidence familiale.

f) si la personne ne se trouve dans aucun des cas précédent, la résidence habituelle est la résidence dans laquelle elle réside le plus souvent.

Vous l’avez remarqué, dans les cas a) et e) la résidence habituelle n’est pas celle où la personne réside le plus souvent…

Attention, il y a encore un piège : dans le cas a), les élèves internes mineurs recensés dans un établissement scolaire sont comptés dans la population municipale de la commune de leur résidence familiale ET dans la population comptée à part (voir plus loin) de la commune de leur établissement scolaire. Ils seront donc comptés DEUX fois…

J’adore.

Je prends un cachet d’aspirine, naïf que j’étais à vouloir compter les gens de ma commune…

L’INSEE m’explique que la population des ménages est calculée en ramenant les résultats de la collecte en 2013. Il est bien écrit « en 2013 », pas « de 2013 ». Pour ramener les résultats de la collecte « en 2013 », on utilise la tendance observée sur la commune entre la dernière population légale au 1er janvier 2012 et l’enquête de recensement de 2014.

Et, je ne plaisante pas, le paragraphe se termine par : « et on ajoute ensuite la population recensée dans les hôtels ».

Concernant la population des habitations mobiles terrestres (pourquoi « terrestres », vous allez le comprendre au paragraphe qui suit) et les personnes sans abri, le chiffre est maintenu constant entre deux enquêtes de recensement, pendant cinq ans (pour les communes de moins de 10 000 habitants, le recensement se fait tous les cinq ans).

Enfin, ne pas oublier de prendre en compte les mariniers et les personnes vivant sur les bateaux de ces derniers (qui ont, eux, été recensés en 2011) : ils sont comptabilisés dans la commune dans laquelle ils ont déclaré avoir une résidence.

La population comptée à part :

La population comptée à part de la commune comprend les personnes recensées sur d’autres communes et qui ont conservé une résidence sur la commune.

Pour être plus clair, elle comprend :

1) Les personnes se trouvant dans la situation décrite au a), qui résident du fait de leurs études sur le territoire de la commune et qui ont leur résidence habituelle située dans une autre commune.

2) Les personnes se trouvant dans la situation décrite au b), dont la résidence familiale est située sur le territoire de la commune et qui ont leur résidence habituelle située dans une autre commune.

3) Les personnes majeures âgées de moins de 25 ans qui se trouvent dans la situation décrite au c), dont la résidence familiale se trouve sur le territoire de la commune et qui ont leur résidence habituelle située dans une autre commune.

4) Les personnes majeures âgées de moins de 25 ans qui se trouvent dans la situation décrite au d), dont la résidence de la famille se trouve sur le territoire de la commune et qui ont leur résidence habituelle située dans une autre commune.

5) Les personnes sans domicile fixe rattachées à la commune et non recensées sur le territoire de la commune.

Pour ce dernier point, il semble qu’il soit fait usage des listes des préfectures.

Calcul de la population totale de ma commune :

Si vous êtes encore avec moi, voici ce que tout cela donne dans ma commune :

En 2014, le recensement (qui se fait une fois tous les cinq ans car ma commune a moins de 10 000 habitants) nous dit :

– ménages : 5412

– communautés : 380

– sans abri ou résidant dans une habitation mobile terrestre : 9

Total = 5801

Population municipale ramenée au 1er janvier 2013 :

– ménages : 5282 (normal, la population de la commune augmente)

– communautés : 380

– sans abri ou résidant dans une habitation mobile terrestre : 9

– mariniers : 0 (pas de cours d’eau à l’horizon)

Total = 5671

Population comptée à part au 1er janvier 2013 : 142

Population totale au 1er janvier 2013

(chiffre qui sera pris en compte à partir du 1er janvier 2016) :

5671 + 142 =

5813

Le premier qui me dit en conseil municipal que nous sommes 6000, je lui explique gentiment : NON, NOUS SOMMES 5813, RESPECTEZ UN PEU LE TRAVAIL DE CEUX QUI SE DÉCARCASSENT A COMPTER.

Désolé.

Je voudrais adresser tous mes remerciements et encouragements à l’Insee dont la devise est « mesurer pour comprendre ».

Note pour les juristes : ce billet contient toutes les approximations et erreurs habituellement rencontrées chez les novices du droit. Je conjure les étudiants en droit révisant ce type de problème de se référer directement aux textes originaux, et en particulier au décret n°2003-485 du 5 juin 2003 relatif au recensement de la population, publié au Journal Officiel n°132 du 8 juin 2003 et certainement révisé depuis.

Le prochain billet de la rubrique « vie publique » sera consacré à la préparation budgétaire et à ses différentes rubriques. /o

Responsable informatique et technique

Mes amis me demandent rarement des précisions sur mon métier, et ça me chagrine de ne pas raconter ce que je fais. Je profite donc de mon blog pour vous décrire mes deux premières journées de la semaine, et montrer ainsi pourquoi j’aime tant mon métier.

Je suis responsable informatique et technique dans une grande école d’ingénieurs privée généraliste (et dynamique). J’y suis responsable de tous les aspects techniques, non seulement informatiques (actifs réseaux, serveurs, logiciels, achats, maintenance, sécurité, routeurs, VLAN, virtualisation, ERP, sauvegardes, PCA, PRA…) mais aussi techniques (hygiène, sécurité des biens et des personnes, électricité, chauffage, contrôle d’accès, espaces verts, reprographie, vidéoprojection, sonorisation, sécurité incendie, etc.).

Avec mon équipe de 6 techniciens (compétents), je supervise la résolution de tous les problèmes (et si possible leur anticipation). Il y a 1000 étudiants et 120 salariés chaque jour sur les deux campus de l’école.

Lundi.

J’arrive déjà fatigué car le week-end a été bien rempli, avec la cérémonie de remise des diplômes qui a eu lieu samedi (grosse journée pour moi : 8h – 23h sans pause déjeuner) et la tenue du bureau de vote le dimanche (8h – 10h et 16h – 19h).

J’arrive au travail comme d’habitude à 9h en vélo. La météo est à la pluie, j’arrive humide.

Premier problème : j’avais cours à 8h30, alors que j’avais noté sur mon agenda que mes premiers cours commençaient à 9h30. La boulette…

Je file en salle, je présente mes excuses aux étudiants du Mastère Spécialisé et je commence mon cours. Les étudiants sont réactifs et les échanges intéressants. Je suis joie.

11h30, j’enchaîne avec un entretien avec l’un de mes techniciens pour faire le point sur les tâches en cours (je fais un entretien chaque semaine avec chaque technicien).

12h je me plonge dans mes dossiers, factures, bons de commande, etc. A 14h, j’émerge de mes emails fin prêt pour le comité de direction : 4h de réunion mensuelle de pilotage de l’école, c’est LA réunion importante où tout se décide.

A 18h, je m’échappe de l’école (toujours en vélo, et toujours sous la pluie) pour une réunion municipale consacrée à la voirie.

20h, je profite des enfants et de mon épouse autour d’un repas familial. Les devoirs sont vérifiés, les douches aussi. Il reste deux ados à la maison, et ils demandent tout mon amour et toute mon attention. Je prends par SMS des news de l’aînée qui est en plein partiels dans sa 3e année de médecine.

21h, je réponds aux emails de mon activité d’expertise. Un avocat souhaite que j’intervienne sur une assistance à huissier de justice.

Un petit coup d’œil à Twitter (1h) puis je m’amuse avec mon nouveau jouet TensorFlow.

Mardi.

Cette fois, j’ai bien vérifié, je n’ai rien avant 9h30. J’arrive avec mon vélo à 9h. Je rends visite de manière informelle à mes équipes pour voir les différents problèmes en cours de traitement. Mes techniciens sont efficients.

Coup de fil pour un problème de vidéoprojecteur dans un amphi. Le technicien spécialiste étant en formation, je prends le problème à ma charge : l’écran est tout jaune. J’essaye avec un ordinateur portable, même problème. Ce n’est donc pas un problème informatique, mais probablement un problème de câble. Je contacte mon installateur qui me promet une intervention dans la journée. Je préviens la direction des études que l’amphithéâtre sera indisponible sur un créneau de cours pendant l’intervention.

Email de la scolarité pour me signaler un problème d’impression à la reprographie. C’est important car il s’agit des sujets d’examen pour jeudi. Je file voir de quoi il retourne. Un problème de communication vite réglé. Ouf.

10h, j’ai rendez-vous pour rendre les deux voitures que l’école loue pendant quatre ans. Le contrat arrivant à échéance, j’ai négocié avec le garage pendant plusieurs semaines pour son renouvellement et le choix des options sur les nouveaux véhicules. Je dois les récupérer après avoir rendu les anciens. Me voilà parti avec un membre de mon équipe et tous les papiers.

11h30, nous avons enfin réussi à nous extraire des explications du responsable de la remise des voitures qui voulait à tout prix rentrer dans le détail de fonctionnement des véhicules. Je sais maintenant regonfler un pneu avec le compresseur qui remplace la roue de secours, et où se trouve le réservoir à additif pour le diesel…

12h, je trie mes emails et mes dossiers urgents. Le téléphone sonne toutes les 10mn : un fournisseur veut que je change de téléphonie, un enseignant me parle des nouveaux TBI, le contrat Matlab arrive bientôt à terme, la borne du parking a un défaut de fonctionnement… J’ai pris l’habitude depuis 20 ans de ne pas manger le midi pour traiter tous les problèmes et assurer l’astreinte de la pause méridienne.

A 14h30, nouvel entretien en tête à tête avec un autre membre de mon équipe pour traiter les problèmes et les tâches en cours.

14h50, appel spécial SST : un étudiant a fait un malaise. J’interviens immédiatement, et sur place je trouve l’étudiant allongé, respiration irrégulière et yeux un peu révulsés. Je lui prends la main, demande s’il m’entend et peut me serrer la main. Il réagit. Je le mets en PLS et appelle aussitôt les pompiers. Nous sommes trois SST à gérer le problème et nous travaillons efficacement en équipe : gestion des affaires de l’étudiant, création d’une zone d’intimité, couverture en attendant les secours, surveillance de la respiration, accueil des pompiers. Ils arrivent rapidement, et évacuent l’étudiant vers l’hôpital (l’étudiant sera de retour le lendemain sans séquelle).

15h15, le nouveau vigile que j’ai recruté pour l’opération « vigipirate – alerte attentat » toujours en vigueur me rappelle que la signalétique « visiteur » n’a pas été remise en place depuis la remise des diplômes de samedi. J’imprime les feuilles et les mets dans les panneaux adhoc. Problème réglé.

15h30, réunion « administration informatique » avec deux de mes informaticiens. Nous faisons notre point hebdomadaire des projets en cours. Bases de données, mise à jour de serveurs, achat de disques durs pour le PRA, etc.

17h coup de fil de l’huissier qui a réussi à avoir mon portable pro. Impossible d’intervenir avant fin janvier. Je n’ai plus de jours de congés… mes compteurs RH sont négatifs. « C’est dommage, j’aime bien travailler avec vous ». Cela fait plaisir d’entendre un compliment. Les gens ne se doute pas du plaisir qu’on peut avoir à recevoir un compliment.

17h10, un étudiant vient me voir pour régler un détail de la désintégration (le départ en stage des étudiants de 5e année) qui se profile : il me demande l’autorisation d’installer un babyfoot humain géant gonflable dans le hall d’accueil de l’école. Nous regardons les dimensions et les aspects sécurité. Tout est OK. Il est content, ça promet de faire une bonne animation. Il en profite pour me dire toute sa satisfaction pour les plantes mellifères qui ont été installées par les étudiants de 1ère année le long du parking de l’école pour les ruches mises en place par l’école de commerce voisine. Cela fait parti du « plan vert » de l’école : quand les pédagogues, les étudiants et les services supports travaillent main dans la main, cela donne des projets extra.

17h20, une alerte Centreon m’informe d’un problème d’espace disque sur un espace de stockage. Je vérifie si le problème est bloquant, j’annule l’alerte car les disques ont été commandés et devraient arrivés avant que cela ne devienne critique.

Je profite d’un moment de répits pour lire mes SMS et quelques tweets de ma TL.

La réunion avec le fournisseur de vidéoprojecteurs est calée pour évoquer l’abandon du VGA par de nombreux constructeurs d’ordinateurs portables (au profit du HDMI, mais pour combien de temps) et l’impact de cette évolution sur les 40 salles équipées de l’école.

Un candidat pour un stage me contacte pour un rendez-vous. Je le verrai après-demain. J’ai déjà discuté de plusieurs sujets avec mon équipe informatique.

La CDA veut me voir pour savoir s’ils peuvent avoir un badge d’accès à
nos parkings privés afin de sécuriser leurs manœuvres de véhicules avec
remorque.

Le plombier m’informe de sa solution au problème des toilettes qui fuient.

Les téléphones DECT de l’école vieillissent et deviennent obsolètes. Il va falloir que je pense à les remplacer. Et pourquoi pas par une flotte de smartphones ? Oui, mais à quel coût ? Une étude s’impose…

Je reçois les plans du futur système informatique de l’école que nous construisons au Maroc. Il faut que je donne rapidement mon avis sur un point technique : le switch central est-il assez puissant…

19h fin des cours à l’école. Les appels téléphoniques diminuent. Je prends un peu d’eau pour calmer mon estomac qui proteste : le petit déjeuner est loin.

L’éclairage du hall a été réparé.

Le vidéoprojecteur de l’amphithéâtre aussi (il s’agissait bien d’une broche dessoudée).

Je discute un peu avec le personnel d’entretien qui commence à nettoyer l’école. Je leur demande des nouvelles de leurs enfants, de leurs conjoints. Ils font partie des travailleurs invisibles de l’école, et j’essaye de corriger cela.

20h, j’arrive à la maison. Mon épouse m’a prévenu, elle est en GAV. Je prépare un repas rapide et nous mangeons sans elle. Je mets son repas dans le four encore chaud. Elle rentrera à 23h et me trouvera en train de lire mes flux RSS sur mon vieil (mais fidèle) ordinateur. Je discute politique avec les enfants. Ils m’impressionnent par leur maturité, mais m’effraient par leur manque de confiance en eux. Je les rebooste comme je peux.

22h la maison est silencieuse. Je m’affale devant mon ordi.

Demain est un autre jour, et chaque journée est différente.

C’est ça que j’aime.

NetSecure Day 2015

Les organisateurs du NetSecure Day 2015 m’ont fait l’honneur de m’inviter pour parler sur scène à leur conférence qui aura lieu le 10 décembre 2015 à Rouen.

Qu’est-ce que le NetSecure Day ?

Extrait de leur site

« Le #NSD15 c’est la journée Normande de la sécurité numérique organisée par l’association NetSecure Day pour sa 3ème édition.

Au cours de cet événement vous retrouverez des conférences techniques, stratégiques, juridiques ainsi que des retours d’expériences.
C’est gratuit et ouvert à tous, étudiants ou professionnels, experts ou néophytes, informaticiens ou non.
Le #NSD15 est la journée pour apprendre et partager autour de ce domaine qui est, plus que jamais, au cœur de toutes les attentions. »

Si vous voulez venir me voir présenter « les défis de l’expert judiciaire », cela se passe à Rouen, jeudi 10 décembre 2015 de 11h à 12h.

Le reste du programme de la journée est en ligne sur cette page.

N’hésitez pas à venir me voir, surtout à midi (après ma conf), pour échanger et discuter IRL.

Avis aux rouennais et aux rouennaises 🙂