Un coup d’oeil dans le retroviseur

Il faut parfois faire une pause et regarder un peu en arrière pour faire de l’autocongratulation (cela fait du bien) et un peu d’autocritique (cela ne fait pas de mal).

1) Le mois de septembre est le premier mois qui voit plus de 3000 visites sur ce blog. (3075 pour être précis, contre 2732 en août et 2327 en juillet). Si mes calculs concernant la droite de régression sur ces trois points sont corrects (merci de vérifier, j’ai fait le calcul à la main), cela nous donnera 135856 visites en avril 2037, le mois précédant ma disparition, soit 2% du public qui regardait les 45mn du 1er épisode de « Cold Case » lundi dernier. Merci à Maître Eolas pour l’audience liée à mon apparition dans sa blogroll, France 2 n’a qu’à bien se tenir (et moi aussi).

2) Le livre Zythom : Dans la peau d’un informaticien expert judiciaire est classé 8e meilleure vente dans sa catégorie (Internet et informatique, en français) sur lulu.com! Bon, sur l’ensemble des ouvrages de lulu.com, il arrive 21559e, ce qui est moins bien. Merci à tous les bibliophiles de leur confiance. J’offre une dédicace spéciale au 100e acheteur:)

3) Je n’ai pas tenu parole concernant le dépôt de cette candidature… Mais j’ai quand même perdu 8kg et rêvé un peu. C’est l’essentiel. Il faut laisser la place aux jeunes (mouais mouais).

4) Le billet le plus lu de ce blog est toujours celui-ci. Je ne sais pas s’il faut s’en réjouir. Ceci dit, ce n’est pas demain que je changerai la couleur de fond de ce blog. Celui-ci est 2e, je ne me demande pas pourquoi… Enfin, 3e but not least, étonnant non?

5) Le billet le moins lu est le présent billet.

Merci quand même d’être resté jusque là. Promis, une anecdote d’expertise bientôt en ligne sur ce blog. Elle est prête depuis quelques jours, mais un triste fait divers m’a fait sursoir à sa publication.

Deux milliards de trucs à faire

Après le retour de vacances, après la rentrée des étudiants, après la fin des « vacances judiciaires », voici venu le temps des « deux milliards de trucs à faire »…

Etant malheureusement sujet à la procrastination, mais d’autre part responsable devant mon employeur, aimant devant ma famille, méticuleux et toujours-dans-les-temps devant les magistrats, il me faut gérer correctement l’avalanche des tâches prioritaires.

J’ai donc décidé de procéder scientifiquement et avec méthode: depuis une quinzaine de jours, je consacre un temps chaque jour aux tâches que je n’ai pas envie de faire mais qui sont importantes: je consacre à ces tâches pénibles chaque jour une heure au boulot, une 1/2h à la maison, un 1/4h pour les expertises!

Incroyable mais vrai, cela marche!

Professionnellement, ma pile de dossier « pénibles » diminue. Côté privé, les plantes du jardin sont arrosées (enfin pas tous les jours, mais bon), et le rangement de mon bureau avance. Enfin, les factures à faire et autres tâches fastidieuses concernant les expertises échappent à l’enlisement.

En comptant 8h de sommeil, il me reste donc 13h disponibles pour m’éclater au boulot, en famille et en expertise! Elle est pas belle la vie.

« Il y a les malins et les pas malins. Et le moins malin des malins n’est pas beaucoup plus malin que le plus malin des pas malins. Mais en cas de nombre impair, il peut être les deux à la fois. »
Philippe Geluck « L’avenir du Chat »

Ils débarquent

Ca y est, ils sont là!
Les hordes barbares envahissent le terrain…
Mais non pas eux

————– Minute culturelle ——————–
horde (féminin)
1. (Vieux) Tribu nomade d’Asie centrale.
2. Troupe nombreuse d’hommes qui vivent en société, mais sans avoir d’établissement fixe.
3. Peuplade, groupement d’hommes errants.
4. (Sociologie) Chez Émile Durkheim, groupement humain temporaire et instable.
5. (Péjoratif) Troupe d’hommes indisciplinés, qui se plaisent au carnage, à la dévastation, etc.

source: wiktionary
————– /Minute culturelle ——————-

Ca y est? vous avez deviné?
Les étudiants sont rentrés. Fini le calme dans l’école!

Ave Cæsar, morituri te salutant

5 septembre 2036

Nous sommes le 05/09/2036 et je sens que je vais bientôt quitter cet univers. Je regarde vers le passé et je me souviens.

Tiens, une anecdote rigolote: vous n’allez pas le croire, mais j’ai commencé à écrire mes souvenirs au début du siècle, en 2006. A l’époque, on appelait cela tenir un « blog ». Et justement, c’est aujourd’hui la date anniversaire puisque j’ai commencé le 5 septembre 2006.

Au bout d’une année, j’avais écrit 217 billets relatant certains évènements de ma vie privée, de ma vie professionnelle ou de mon activité d’expert judiciaire.
J’étais jeune alors, j’étais plein de vie et mes enfants s’accrochaient à moi dès que je rentrais de ma dure journée de labeur. Après les avoir embrassé dans leur lit, je m’éclipsais dans mon bureau pour écrire ce journal intime public.
Le plus amusant est qu’à l’époque des gens lisaient encore sur des écrans posés près de la machine qui nous permettait de communiquer.
Mais le plus drôle, c’est que certains me posaient des questions, le plus souvent directement, et parfois sous forme de commentaires directement placés sous les bêtises que j’écrivais.

C’était une belle époque. Les gens étaient heureux, la vie était radieuse et mes rhumatismes inexistants.

Alors aujourd’hui, je fête cet anniversaire avec une pensée émue pour tous ceux qui m’ont écrit. Je lève ma souris à leur santé (enfin ce qui fera office de souris…)

Tchin.

Conditions Générales d’Utilisation

Je ne suis pas juriste.

J’ai découvert que ce domaine pouvait être passionnant quand j’ai rencontré ma fem lorsque j’ai commencé mes expertises judiciaires.

Il m’arrive donc de plus en plus souvent de me pencher sur des textes juridiques pour en comprendre les tenants et les aboutissants.

J’aime bien.

Je suis informaticien.

C’est un domaine passionnant dans lequel je baigne depuis tout petit.

Il m’arrive très souvent d’installer des logiciels et de créer des comptes sur internet pour accéder à des services.

Conclusion: je lis maintenant avec attention le contenu des licences logicielles et des conditions générales d’utilisation des services. Vous savez, ces textes qu’il faut lire en entier et que [presque] personne ne lit juste avant de pouvoir accéder au service/logiciel.

Et pourtant vous avez dit que vous avez lu les conditions…

Si, si, vous avez cliqué sur OK après avoir coché une case jurant sur vos enfants, parents et amis que vous les avez bien lu, et que vous vous engagez à les respecter « les présentes conditions d’utilisation modifiables à tout moment« .

Et bien vous devriez les lire pour savoir ce à quoi vous vous êtes engagé. Parfois, d’autres le font pour vous:

Un petit exemple, les Conditions Générales d’Utilisation d’AOL (extrait, les gras sont de moi):

Si vous diffusez un contenu [NDZ: sur les sites Internet qui sont proposés par AOL France], vous garantissez automatiquement être titulaire des droits sur ce contenu ou être autorisé à le diffuser. Par l’effet des présentes, vous accordez expressément à AOL et aux Sociétés AOL pour le monde entier, une licence et un droit gratuits, irrévocables, cessibles, transférables et non exclusifs d’accéder, d’utiliser, reproduire, représenter, diffuser, distribuer, publier, éditer, modifier, adapter, traduire, corriger, numériser, intégrer, transcrire, créer des œuvres dérivées, et/ou inclure le contenu (tout ou partie) dans d’autres oeuvres sous quelque forme, moyen de communication ou technologie que ce soit, pendant la durée des droits dont vous êtes titulaire sur ce contenu, cette durée ne pouvant en toute hypothèse être inférieure à la durée de la mise en ligne du contenu ; en outre, vous garantissez disposer des droits nécessaires à l’octroi à AOL et aux Sociétés AOL de ces droit et licence.

Autre exemple, Microsoft FrontPage 2003 (extrait):

Vous n’êtes pas autorisé à utiliser les Composants Web en rapport avec tout site qui dénigre Microsoft, MSN, MSNBC, Expedia ou leurs produits ou services […]

Sources: Adullact

Un dernier pour la route, CGU de l’Option Anti-virus Firewall PC 1 poste d’Orange (extrait, les gras sont de moi):

Le Logiciel n’a pas d’effet sur les éventuels virus ayant infecté le système du Client avant son installation. Si un virus est déjà présent sur le micro-ordinateur du Client avant l’installation du Logiciel, il est possible que notamment:

– le Logiciel ne détecte pas et/ou n’élimine pas ce virus, ce qui laissera perdurer les dysfonctionnements réels ou potentiels liés au virus;

– et/ou l’installation du Logiciel ne soit pas possible;

– et/ou le Logiciel ne fonctionne pas correctement.

Etonnant, non ? (™ Desproges)

(edit du 05/09/2007) Bruno Kerouanton m’indique en commentaire un lien très intéressant: www.eulahallofshame.com. Mdr comme disent les jeunes…

Cent pour cent

L’un des avantages de travailler dans une école d’ingénieurs est de rester au contact avec les domaines d’études auxquels j’ai été confronté dans mes propres études, il y a de nombreuses années.

J’agace parfois mes amis quand je leur rappelle quelques uns des mots qui firent les beaux jours de leur jeunesse ou les cauchemars de certaines de leurs nuits: wronskien, Points d’Young-Weierstrass, approximation de l’inverse du hessien, etc. qui sont pourtant très loin de mes préoccupations professionnelles quotidiennes.

Je m’amuse pourtant à leur poser quelques unes des questions simples que j’utilise lors des oraux des concours de recrutement auxquels je participe:
-1- Quelle est l’inclinaison (en degrés) d’une pente de 100%?
-2- Quelle est la température d’évaporation de l’eau?
-3- Pouvez-vous m’expliquer comment une flaque d’eau sur le sol s’évapore?
-4- Pourquoi les nuages restent-t-il en l’air?
-5- Pourquoi un fouet claque-t-il dans l’air?
-6- une bille tourne sans frottement dans un tuyau d’arrosage lové par terre. Quelle est la forme de la trajectoire de la bille à la sortie du tuyau?

J’attends du candidat des réponses claires, ou des demandes de précisions lorsque la question n’est pas complète. Je suis souvent déçu. Il vaut mieux parfois dire « je ne sais pas ».

Vous trouverez quelques questions (et leurs réponses) de cet acabit sur ce site.

Vous verrez, c’est assez amusant (enfin, je trouve).

Le principe de l’échange de Locard

Edmond Locard est le médecin français créateur du premier laboratoire de police scientifique à Lyon en 1910. Son ambition était de substituer la preuve matérielle au seul témoignage humain par l’analyse systématique des traces laissées par le coupable.

Parmi ses innombrables travaux, le principe dit « d’échange de Locard » reste le plus célèbre:

on ne peut aller et revenir d’un endroit, entrer et sortir d’une pièce sans apporter et déposer quelque chose de soi, sans emporter et prendre quelque chose qui se trouvait auparavant dans l’endroit ou la pièce.

Je pense que ce principe s’applique également lors de la recherche de preuves informatiques. Pour paraphraser Locard,

on ne peut chiffrer ou déchiffrer une donnée, l’inscrire ou la supprimer d’une mémoire sans apporter et déposer une trace sur l’ordinateur, sans modifier et prendre quelque chose qui s’y trouvait auparavant.

C’est la base même de l’informatique légale (forensic) pratiquée par un expert judiciaire.

Et bien entendu, comme toujours, se déroule une course permanente entre gendarmes et voleurs pour savoir qui disposera des meilleurs outils techniques. Lire pour cela le très instructif site forensicwiki.org et en particulier cette page.

Cette surenchère se faisant pour le plus grand bonheur des administrateurs informatiques qui disposent ainsi d’outils leur permettant de sécuriser leurs réseaux, ou des utilisateurs qui peuvent ainsi protéger les données des regards indiscrets ou récupérer un mot de passe perdu.

C’est de ce point de vue un débat continuel entre protection de la vie privée et accès à des données permettant de confondre un dangereux criminel.

Débat d’actualité.

Bogue suite

Je trouve particulièrement amusant que le mot « bug » soit entré dans le vocabulaire de base des jeunes adolescent(e)s. Ma fille utilise (trop) souvent l’expression « Papa, vient voir ya la télé qui bugue ». Cela me fait toujours sourire, me fait fondre et m’oblige à courir donner un grand coup de poing sur le décodeur TNT (en fait, je le débranche et le rebranche, cela vous rappelle quelque chose?).

J’ai raconté il y a quelques temps une anecdote dans laquelle la discussion lors de la réunion d’expertise a porté sur la définition du terme « bug » ou « bogue ».

En me promenant sur le réseau international de communication entre ordinateurs (c’est plus classe à mon âge que de dire « surfer sur Internet »), je suis tombé encore et toujours sur un article de wikipédia où il est question de « Mandelbug« , « Schödinbug« , « Heisenbug » et « Bohr bug« .

Pour tous ceux que les billets truffés de liens agacent, je résume un peu les définitions:

Mandelbug: c’est un bogue dont les causes sont si complexes que son comportement apparaît chaotique ; il le reste tant que le testeur n’arrive pas à établir précisément un comportement déterministe d’apparition du bogue.

Schödinbug: c’est un bogue qui n’est pas découvert et non gênant pour les utilisateurs, mais qui apparaît après que quelqu’un a relu le code source ou utilise le logiciel d’une façon non habituelle.

Heisenbug: c’est un bogue basé sur le principe d’incertitude d’Heisenberg « observer une structure modifie son état » (ex: le programme tourne sous le débogueur, mais pas sur la ligne de commande).

Bohr bug: c’est un bogue qui, à la différence des heisenbugs, ne disparaît ni n’a ses caractéristiques modifiées lorsqu’il est recherché: il est persistant.

A cette liste, j’ajoute le:

Zythombug: c’est un bogue qui disparaît au moment où arrive l’informaticien que l’utilisateur a fait venir pour le dépanner.

Dans l’expertise citée en tête du présent billet, nous avions affaire à un « mandelbug ». Je ne suis pas sur que les parties auraient appréciées mes explications…

Et pour ne pas mourir idiot, un extrait du dictionnaire de l’Académie française (neuvième édition):

I. BOGUE n. f. XVIe siècle. Mot de l’Ouest, probablement issu du breton bolc’h, «cosse de lin». BOT. Enveloppe de certains fruits, armée de piquants. La bogue de la châtaigne, du marron d’Inde, de la faine.

II. BOGUE n. f. XVIe siècle. Emprunté de l’ancien provençal boga. ZOOL. Poisson de la famille des Sparidés, commun en Méditerranée, à nageoire dorsale épineuse.

III. BOGUE n. f. XIXe siècle. Emprunté de l’italien du nord boga, «chaîne, anneau de fer», d’origine germanique. Anneau fixé au manche d’un gros marteau de forge.

Interro demain pour voir!

Allez vous coucher plus tôt

Je faisais il y a quelques années auprès de mes étudiants un cours de programmation en langage C. J’avais compilé dans ce cours l’ensemble des erreurs communément faites par leurs prédécesseurs lors des séances de travaux pratiques que j’encadrais (ce qui n’empêchait pas malheureusement les étudiants de retomber dans les mêmes ornières…).

En relisant avec nostalgie ce cours, je suis tombé sur une recommandation que je faisais aux étudiants et qui me semble toujours valable aujourd’hui:

Lorsque vous travaillez tard sur un projet important, la fatigue vous entrainera à faire la « petite » erreur qui va anéantir en quelques secondes des heures de travail. Allez donc vous coucher avant que cette erreur n’arrive.

Voici ce qu’écrivait David .J. Way dans un manuel de construction de clavecin (20e siècle):

‘Penser’ est la cause de toute erreur. La preuve en est que chaque personne qui commet une erreur dit toujours « Oh, mais je pensais… ». Ne faites pas attention à ce genre de pensées – avant d’assembler des éléments, vous devez être conscient de ce que vous faites. Assemblez les morceaux sans colle, étudiez si ça va et contrôlez le résultat en le comparant avec votre dessin qui montre comment les morceaux s’emboîtent.

Et après avoir collé quelques morceaux, contrôlez le résultat une fois de plus. J’ai entendu tant de fois la triste anecdote: « Hier soir, j’ai fait ça et ça, mais ce matin j’ai regardé ce que j’ai fait… »

Cher constructeur, si vous aviez regardé hier soir, vous auriez pu encore séparer et corriger votre assemblage. Beaucoup d’entre vous construisent pendant leur temps de loisir, par conséquent vous êtes tentés de travailler tard dans la nuit. Mais, à en croire les plaintes qui me parviennent, la plupart des erreurs concernent la dernière chose que vous faites avant d’aller vous coucher. Cessez donc votre travail un peu plus tôt.

Je pense toujours que tout informaticien devrait tenir compte de cet avertissement.

Archéoinformatique

« L’informatique des entreprises (…) est à l’image d’un site archéologique. (…) Tout au fond, on tombe sur de vrais fossiles, calcifiés : la carte perforée n’est plus physiquement là, mais on peut trouver son « empreinte » sur des disques durs dernier cri, jusqu’à des traces d’organisation en quatre-vingt « colonnes » ».

Pierre Vandevingste, La Recherche.

Cette remarque est tellement vraie…