Mise à jour de la direction

Je suis l’heureux propriétaire d’une voiture de marque Ford, modèle Galaxy, qui fait surtout la joie des enfants et de leurs amis puisqu’elle dispose de 7 vraies places assises et me donne l’agréable sensation d’être un chauffeur de bus, surtout lorsqu’il faut ramener tout ce joyeux monde chez eux à 2h du matin après une « boum ». C’est en fait une voiture qui fait surtout plaisir aux parents des autres enfants.

C’est pratique aussi pour partir en vacances au ski en famille avec un coffre gigantesque rempli de matériels et de vêtements encombrants… C’est donc plein de joie, de bonne humeur et de bonbons Haribo que nous sommes partis vers les montagnes à bord de ce magnifique vaisseau spatial, tout juste sorti de chez le garagiste pour une réparation anodine.

Après 1000 km d’autoroutes à peine désertes, nous voici en train d’aborder à la queuleuleu les premiers virages serrés des charmantes routes de montagne, quand soudain, un voyant s’allume sur le tableau de bord digne d’un airbus A380: incident direction assistée… C’est d’ailleurs à peu près au même moment, comme quoi l’informatique d’une automobile est bien faite, que le volant a décidé de fonctionner comme s’il pesait 10 tonnes.

Je préviens aussitôt les passagers du problème, me démarquant ainsi sensiblement d’un conducteur de TGV. J’arrive à garer le monstre sur le bord de la route, au grand étonnement des enfants tout occupés qu’ils étaient à observer l’inclinaison soudaine des plaines environnantes.

Fidèle à une tradition informatique, je décide de couper le contact, de laisser se reposer le véhicule quelques minutes, d’ouvrir la portière pour sortir faire un tour, de remonter à bord et de redémarrer. Hélas, le secteur automobile n’ayant pas encore appris le charme réparateur du reboot informatique, j’annonce scientifiquement et solennellement à ma famille stupéfaite: « Nous sommes en panne! ».

Seulement voilà, un samedi de chassé-croisé hivernal, je sentais comme un début de grosse galère au bord du chemin… Voyons, à quelle distance sommes-nous de l’objectif? 42 km me souffle mon fidèle TomTom portable, qui n’a rien à envier à Pensées Profondes. Bon, 42 km, ça se tente, même sans assistance, même en montagne.

Voici donc le siège conducteur transformé en salle de musculation: les deux mains solidement accrochées au volant, manches de la chemise remontées, j’entame la longue ascension, tel un prédicateur ressuscité, luttant contre les dix personnes accrochées aux roues pour m’empêcher de virer avec la souplesse et l’élégance habituelles.

Tel un héros des temps modernes (Edward Cullen?), j’arrive par ma force surhumaine à mener mon équipage à bon port.

Une semaine se passe.

Les vacances s’achèvent et avec elles la joie des enfants de la station regardant avec des yeux brillants mon monoski extraterrestre et l’étrange équilibriste posé dessus.

Nous voici à nouveau devant le monstre de métal. Je tourne la clef dans un moment d’intensité émotionnelle rare. Le moteur démarre. La direction fonctionne. Le froid et l’altitude a fait son œuvre, comme chacun sait, réparatrice. Et bien sûr, au beau milieu d’un virage de la descente, après un quart d’heure de voyage, la direction se raidit de nouveau: me voilà parti pour 1000 km de routes aux commandes d’un fer à repasser en fonte, tel Chuck sur son Bell X-1-2 modèle 46-062.

Une fois encore, comme Ulysse, j’arrive à bon port.

Le lendemain, dès le paître jacquet, je fonce chez le garagiste ayant effectué une réparation bénigne (la veille du départ), un « simple » changement de démarreur: « Comment! Quoi! Mon automobile serait sortie de ce garage moins fiable qu’elle ne serait entrée! », dis-je en entrant dans la concession, tel fiert qui ne tue pas.

L’aimable tenancier, au sourire désarmant, prend le problème en main d’une manière toute professionnelle pour garder un bon client: « Ne vous inquiétez pas, je m’occupe de tout ».

Une journée s’écoule pendant laquelle je sauve des étudiants de l’analphabétisme informatique. Le lendemain, je retourne voir mon destrier métallique et son palefrenier.

Lui: « Bon, alors, mécaniquement, on n’a trouvé aucun problème. »

Moi: « … »

Lui: « Et donc on a regardé les consignes du constructeur pour les cas identiques au vôtre. En fait, il y a une mise à jour du logiciel qui équipe votre ordinateur de bord pour mieux étalonner la gestion de la direction assistée. On a fait la mise à jour et votre problème est réglé. »

Moi: « !!! »

Donc, je résume: le véhicule auquel je confie ma vie, celles de ma femme et mes enfants, ainsi que celles de toutes les personnes que je croise, est muni d’un programme capable d’annuler arbitrairement le fonctionnement de l’assistance d’une direction, organe vital s’il en est sur une voiture! Et la solution tient dans une mise à jour ?!

Mon dieu, ils l’ont fait.

Les grands bonhommes verts

Image créée avec un LLM (Cliquez sur l’image pour l’agrandir)

Nous sommes isolés dans ce grand désert blanc. Il est temps de faire une pause. Blottis les uns contre les autres, tels des manchots empereurs immobiles, nous restons silencieux devant la beauté de la nature qui nous entoure.

Nous sommes dans les années 80, l’année 2000 est encore loin et reste une référence de modernité futuriste. C’est l’époque où je me suis plongé par hasard dans l’univers de la science fiction en ouvrant par le milieu « Dune » de Frank Herbert (un pavé de 746 pages!) sans pouvoir le refermer avant d’arriver à la fin pour le recommencer ensuite depuis le début.

Alors que mes pensées vagabondent à plusieurs années lumières, j’aperçois au loin un groupe de personnes. Je les regarde s’avancer comme des Fremen, démarche silencieuse, souple et arythmique, fondus dans le désert blanc. Ont-ils les yeux bleus sur fond bleu à cause de l’Épice?

Mon guide les a aperçus et se redresse, attentif.

Il se rassoit, soulagé, en disant: « Tiens, voilà les grands bonhommes verts… »

La réverbération du soleil alentour m’empêche de distinguer les détails. Je plisse les yeux pour mieux voir. Certains portent un distille avec un tuyau en provenance de leur dos. Ils sont tous vêtus de vert, avec une grosse bosse sur leur dos. Leurs têtes sont nues, lisses et vertes également. En regardant bien, je distingue une antenne qui leur sort du dos…

Je me sens comme Luke Devereaux dans « Martiens, Go Home! » de Fredric Brown: que font tous ces martiens sur ma planète!

Ils s’avancent vers moi, je commence à distinguer leurs visages. Ils transpirent. Leurs crânes nus sont en fait des casques, la bosse de leur dos un énorme sac à dos duquel dépasse une antenne de transmission, et leur démarche de Fremen vient des raquettes qu’ils ont aux pieds. Ils passent devant nous silencieux, comme si nous n’existions pas.

Un groupe de militaires tout de vert kaki vêtus marche dans la neige. Je viens de finir mon service militaire, je les regarde avec compassion.

Quelques minutes après, mon moniteur de ski se lève et nous rechaussons nos monoskis. La montagne renvoie en écho son cri: « Allez! On les rattrape, bande de limaces! »

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Je pars demain au ski. Il paraît que la mode va revenir aux monoskis. J’aurais moins l’air d’un dinosaure 😉

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Mademoiselle

J’ai toujours appelé mes étudiantes « madame », et cela les a toujours fait réagir de façons diverses.

Un jour, alors que j’étais en train de faire cours dans un amphithéâtre, une étudiante arrive en retard. J’ai une gestion des retards qui consiste à ne jamais rien dire quand la personne retardataire se fait discrète. Après tout, tout le monde peut arriver en retard, avec même parfois une très bonne raison. Il me semble inutile que je perturbe moi-même le cours en faisant une remarque.

Sauf que cette jeune personne (mes étudiants ont entre 17 et 25 ans) a décidé de venir s’assoir au milieu de l’amphithéâtre au milieu d’une rangée, obligeant ainsi la moitié des étudiants de la rangée à se lever pour qu’elle puisse aller s’assoir.

Je m’interromps alors, regarde la personne en train de faire bouger tout le monde et prends ma voix la plus glaciale possible en prenant l’amphithéâtre à témoin: « Je vais attendre que Madame s’installe ! »

L’étudiante me répond du tac au tac: « Mademoiselle ! Pas Madame ! »

Je lui explique alors, toujours avec ma voix la plus glaciale: « Votre vie privée ne regarde que vous. Je n’ai pas à connaître votre situation familiale, si vous êtes mariée ou célibataire. Dans la mesure où je m’adresse aux jeunes hommes ici présents sous le vocable « Monsieur », en non pas « Mondamoiseau » pour la plupart, par souci d’égalité, je m’adresse à toutes les jeunes femmes ici présentes sous le terme « Madame », ne vous en déplaise! »

Ayant mis tous les étudiants mâles de mon côté par ce trait d’humour décapant, je poursuivais mon cours, magistral et serein, comme un petit Salomon d’amphithéâtre (ref).

J’ai toujours regretté l’attitude que j’avais eue ce jour là, car il est si facile de clouer au pilori une jeune fille, même un peu impertinente, quand on dispose du « pouvoir » de l’autorité du professeur. A ma décharge, il arrive aussi que les professeurs se fassent déborder par l’impertinence des étudiants, mais c’est une autre histoire.

Dans la plupart des cas, les étudiantes réagissent par un sourire, surtout si cela se passe à la fin d’une discussion, quand je réponds à un « Au revoir, Monsieur » par un « Au revoir, Madame ». J’ai souvent comme remarque: « C’est la première fois qu’on m’appelle comme ma mère! ». J’explique ensuite ma vision de l’égalité mondamoiseau-mademoiselle, ce qui les fait franchement rire. Parfois la discussion peut même se prolonger sur le thème plus général du sexisme, avec des idées qui n’ont rien à envier aux suffragettes…

Je leur rappelle également qu’avant la Première Guerre mondiale, les femmes étaient généralement considérées comme intellectuellement inférieures, voire ne pouvant pas penser par elles-mêmes, ce qui ne lasse pas de les surprendre, elles qui s’engagent dans des études d’ingénieurs!

Une fois, dans mon bureau, une étudiante est restée tétanisée par mon « Au revoir Madame » et s’est effondrée en larmes… Entre deux sanglots, elle m’a expliqué que sa maman venait de mourir et que sans le faire exprès, le fait de l’appeler, elle sa fille, Madame, avait touché une corde sensible. Je me suis excusé comme j’ai pu, tout en lui donnant mon mouchoir en tissu (propre!) confirmant ainsi à ses yeux être définitivement ancré dans le XXe siècle…

Pourtant, je suis heureux de rappeler en conseil municipal qu’on ne dit pas ‘heure des mamans’ pour la sortie des classes, mais ‘heure des parents’ (ou ‘heure des nounous’). J’accompagne tous les jours mes enfants à l’école, et je ne suis pas au chômage pour autant. Les mentalités changent doucement, très doucement, et cela passe par une attention aussi sur les petits détails.

Je vouvoie aussi mes étudiants, par respect, même les plus jeunes, ce qui ne manque pas également d’en étonner certains.

Il faut bien là aussi une première fois.

Frimas d’hiver

J’aime beaucoup l’outil Twitter qui me permet de découvrir des liens ou des informations en quelques heures minutes sur tous les thèmes. Hier, je suis tombé sur un flood de @eBlacksheep qui racontait un souvenir militaire qui m’a touché, parce que j’ai connu à peu près la même expérience. Je le publie ici, pour mon plaisir et avec son aimable autorisation. Je garde la mise en page propre aux messages courts de Twitter.

Sur la colline, le vent sibérien brûle mes derniers espoirs de confort. J’attends le transport qui me soustraira aux morsures du froid.

Contingent 99/12, je me souviens. Le Valdahon, la petite Sibérie. On nous a coupé les cheveux, très courts.

On nous a ordonné de mettre des joggings bleus électriques avec un sigle bleu blanc rouge et une épée.

Et puis nous avons attendu, raides et alignés, dans le froid de la petite Sibérie, dans le vent furieux d’appétit.

Nous ne savions pas. Nous ne savions pas que notre bonheur par la suite de porter le kaki serait la marque de notre chute.

Un matin, soleil endormi derrière l’horizon nous nous levons. Saisis immédiatement par le vent hurlant, dévoreur de talent.

Au garde à vous, nous attendons. Nos yeux pleurent, nos âmes se tapissent au fond d’un vide insoupçonné.

L’on part chercher un fusil, un FAMAS et un chargeur vide. Les camions arrivent. Nous les regardons plein d’espoir, promesse d’ailleurs.

Nous attendons, stoïques et souffrants, dans le vent. L’odeur du gasoil froid nous retourne le cœur, l’esprit s’est rendu au midi.

Nous montons enfin, le treillis raidi, la parka à peine doublée, insignifiants talismans. La petite Sibérie nous a pris.

Dans le camion, c’est pire, partout le vent, le cahot et le tumulte. Froid assis est pire que froid debout.

Nous arrivons dans des bois blancs, le givre à l’œuvre a dévoré les couleurs et nous regarde menaçant.

Paquetage ordonné, tente montée de tremblements, de doigts gourds, de larmes gelées. Vient le rassemblement.

Il neige. Une neige pourrie, mouillée qui gèle à nos pieds. Nous partons en maraude dans les bois accomplir moult exploits.

De retour, transis, gelés, épuisés, mouillés jusqu’au ticheurt un feu nous attend au camp de fortune. Vite, mettre les pieds dedans.

Enfin sentir la vie, la flamme, l’espoir. Vite se détourner, courir, ils ont lancé une grenade dans le feu en rigolant grassement.

Trois blessés pour cette blague de potache. L’un a couru, épuisé, dans une branche et saigne abondamment. Les autres brûlés par les braises.

Il faut demeurer aware, c’est la guerre. La nuit, mouvements par petits groupes. Les infirmiers font des va-et-vient.

Le froid a aboli nos sens, nous perdons l’équilibre, ne voyons plus, nos gestes ne sont plus nos volontés. Beaucoup de blessés.

Des branches, des racines, des visages giflés, des entorses. Certains craquent et menacent de leurs armes chargées à blanc.

Dans la tente, l’ordre de dormir avec son FAMAS est donné. C’est l’ordre de dormir avec un pain de glace à ses côtés.

Nul sommeil pour celui qui mouillé, frigorifié, affamé est allongé sur la terre gelée. Attente. Espoir du jour, du soleil froid.

Enfin. Deux ne se sont pas réveillés, ils sont hospitalisés. Hypothermie. Je calcule pour autant que je peux.

En 24 heures de terrain le peloton a perdu plus d’un homme par heure.

Nous repartons, mes doigts mouillés et gelés ressemblent à la peau fripée d’un vieux bébé. Mon index ne bouge plus.

Pour tirer sur les cibles en carton cachées dans la forêt, je bouge ma main, l’index raide sur la gâchette.

Ce n’est plus un coup de doigt, c’est un coup de main. Mouvement, une grenade explose au ralenti, je plonge en planant longtemps, j’atterris.

Les épines du buisson m’accueillant ont fait leur œuvre. ma main est visqueuse dans le gant mouillé.

Le pouce ouvert, flétri et mou, s’est offert sans résistance à la pointe de la nature. Ce n’est rien me dit-on.

Je lèche mon sang. Vampire de moi même. Encore deux blessés dans mon groupe, cette fois, retour au camp.

Le colonel commandant le régiment est là, mine sévère. Le peloton est décimé. Alerté par l’infirmerie, il est venu commander.

Le regard dur sur l’adjudant chef commandant le peloton, il ordonne le retour au régiment.

Je me souviens, petite Sibérie. Je me souviens du vent idiot, du froid insensé qui faisait sonner les cloches de la destruction.

3 février 2012 eBlacksheep

Ce moment magique où le disque dure

Mon activité d’expert judiciaire en informatique est connue de mon entourage et de mes amis, en particulier le fait que je sais « faire parler » un disque dur. Il m’arrive donc parfois d’être contacté par un ami qui m’avoue son désespoir de ne plus arriver à lire les données de son disque dur. La conversation donne en général ceci:

« Je n’arrive plus à accéder à mon disque dur externe. J’y stocke les photos de la famille. Je me suis pris les pieds dans l’alim et le disque dur a volé dans la pièce… Quand je l’ai rebranché, plus rien. »

Ce moment gênant où le disque dur ne démarre plus…

« … mais rassure moi, tu as bien des sauvegardes? »

Ce moment troublant où l’on réfléchit à la date de la dernière sauvegarde.

« Heu, mouis, mais pas récentes. »

« Bon. Qu’est ce qu’il fait comme bruit ton disque dur? »

« Et bien, justement, il ne fait plus aucun bruit. Enfin, si, un petit sifflement d’une seconde, puis rien pendant deux secondes, puis de nouveau un petit sifflement… »

« Ok. Ton disque dur est mort. Tu peux faire une croix sur tes données. »

Ce moment particulier où l’on annonce que toutes les données sont perdues à jamais…

« Non!? Et tu ne peux rien y faire? Même toi?

« Bah. A l’impossible nul n’est tenu. Si ton disque est mort, à part l’intervention d’une société spécialisée avec démontage en salle blanche, je ne vois pas. »

Le deuil.

Étape 1: le choc.

Cette courte phase du deuil survient lorsqu’on apprend la perte. C’est une période plus ou moins intense où les émotions semblent pratiquement absentes.

Exemple: « …!? »

Étape 2: la colère.

Phase caractérisée par un sentiment de colère face à la perte. La culpabilité peut s’installer dans certains cas. Période de questionnements.

Exemple: « Mais c’est nul! Tu peux rien faire? Mais alors, comment je vais récupérer mes données? $#%!§ (biiip) »

Étape 3: le marchandage.

Phase faite de négociations, chantages…

Exemple: « Non, mais tu peux vraiment rien faire? Et si je t’envoie le disque dur, tu peux essayer quand même? Avec un peu de chance… Et puis, toi, tu sais y faire avec ça. A chaque fois que je t’appelle, mon PC remarche, même quand tu interviens à distance! »

Étape 4: la dépression.

Phase plus ou moins longue du processus de deuil qui est caractérisée par une grande tristesse, des remises en question, de la détresse.

Exemple: « Toutes les photos depuis la naissance du dernier!!! Pourtant, j’avais décidé d’acheter ce disque dur pour faire des sauvegardes. Mais bon, voilà, plutôt qu’un disque de secours, c’est vite devenu un disque principal, avec toute la place qu’il proposait. Comment je vais faire? »

Étape 5: l’acceptation.

Dernière étape du deuil où l’endeuillé reprend du mieux. La réalité de la perte est beaucoup plus comprise et acceptée. L’endeuillé peut encore ressentir de la tristesse, mais il a retrouvé son plein fonctionnement. Il a aussi réorganisé sa vie en fonction de la perte.

Exemple: « Écoute, j’ai bien compris que je n’avais aucune chance de récupérer mes données, mais plutôt que de jeter le disque dur, je te l’envoie pour que tu tentes l’impossible, même le démontage. Si tu y arrives, c’est fantastique, et si tu ne peux vraiment rien faire, c’est tant pis pour moi. »

Une fois le disque dur récupéré, j’ai immédiatement branché celui-ci sur une prise de courant. Résultat: bzzz (1s) « … » (2s) bzzz (1s), etc.

Comme expliqué à mon camarade, je ne suis pas magicien. Un disque dur est un miracle de technologie, une mécanique de précision. Tellement précis que les têtes de lecture sont profilées pour flotter sur un coussin d’air au plus près des plateaux magnétiques.

Je démonte quand même le boitier USB. J’en extrais le disque dur que je branche directement sur mon PC. Même bruit particulier. Comme si quelque chose empêchait les plateaux de se mettre à tourner. Je pars me coucher.

Le lendemain soir, je retrouve le disque dur que j’ai posé sur mon bureau où il va finir sa vie comme presse-papier. Je le regarde, pensif. Bzzz, « … », bzzz, « … », c’est vraiment comme si le moteur électrique n’arrivait pas à lancer la rotation des plateaux. J’inspecte les vis particulières qui scellent le boitier. Je sais que si je l’ouvre, dans l’atmosphère normalement poussiéreuse de mon bureau, je condamne définitivement les données stockées sur les plateaux.

Il ne me reste plus qu’une seule chose à tenter, une méthode que je tiens de mon père, qu’il tenait lui même de son père.

Je branche le disque dur sur une alimentation SATA externe que j’utilise lorsque je n’ai plus assez de branchements issus de l’alimentation de mon PC. Je constate qu’il fait toujours ce bruit de « démarrage bloqué ».

Je le saisis fermement.

Je le soulève de 10 cm au dessus de mon bureau.

Je frappe cette mécanique de précision, sensible et fragile, sèchement sur la surface de bois de mon bureau.

Une fois.

Deux fois.

Sur la tranche.

Sur le dessus.

Ce moment fascinant où l’on tape sur le bureau avec un disque dur.

Et ce soir là, un petit miracle s’est produit. Quelque chose que je n’avais jamais vécu auparavant. Le genre de truc qu’on lit sur internet sans vraiment y croire, du même genre que le coup du congélateur. Impossible ou improbable, il a toujours quelqu’un qui vous jure que ça marche, que ça a marché.

J’ai frappé un disque dur sur mon bureau, et il s’est remis à fonctionner. La méthode utilisée par mes père et grand-père sur leur télévision fonctionne donc. C’était donc vrai, la force brutale peut vaincre l’ingénierie la plus pointue.

J’ai pu récupérer toutes les données et rendre à un papa heureux toutes ses précieuses photos. J’ai certainement un peu entamé la durée de vie de son disque, mais je l’ai prévenu: « fais tes sauvegardes et prie pour que ton disque dure ».

—————

– Cette anecdote n’a aucun intérêt si ce n’est peut-être parce qu’elle est parfaitement authentique.

– J’engage mes lecteurs à ne pas répéter cet acte désespéré sur leurs propres disques durs, et encore moins sur des disques durs ne leur appartenant pas. Il s’agit effectivement ici d’un miracle. Et par définition, cela ne se reproduira pas.

– Aucun scellé n’a été blessé pendant cette séquence.

Message de service

Pour répondre à plusieurs personnes qui me questionnent à propos de ce blog, j’ai créé une page FAQ en haut du blog, que j’alimenterai au fur et à mesure que le besoin s’en fera sentir.

Par ailleurs, j’entreprends, essentiellement pour mes parents qui n’ont pas d’ordinateur, un travail d’autopublication similaire à celui que j’avais entrepris en 2007. Je vais faire une sélection de billets déjà publiés que je vais cette fois commenter à la façon d’Asimov (en moins talentueux évidemment).

En 2007, j’avais publié mon livre aux éditions Lulu.com. J’ai comme objectif cette fois d’y mettre en place également le téléchargement gratuit d’une version pdf pour ceux qui seraient intéressés.

On verra le temps que j’arrive à consacrer à ce petit projet, mes parents étant très sensibles à la grammaire et à l’orthographe…

Stats 2011

Tenir un blog, c’est aussi aller de temps en temps regarder les statistiques de consultations, c’est-à-dire les traces que vous laissez lorsque vous me faites l’honneur de venir par ici.

Seulement voilà, aucun outil n’existe pour établir des données véritablement fiables, ce qui constitue souvent un casse tête pour les dircoms et leurs webmasters.

Pour ma part, j’utilise Google Analytics depuis l’ouverture de ce blog et cela m’amuse de savoir que mes lecteurs de 2011 utilisent à plus de 58% Firefox, devant Chrome (17%) et IE (12%).

Pour avoir une petite idée de la volumétrie, Google Analytics m’indique que pour l’année 2011, le blog a reçu 135 351 visites contre 126 040 en 2010 et 103 767 en 2009.

Mais comme vous revenez plusieurs fois sur le blog, je trouve le paramètre « visiteurs uniques » plus pertinent (pour ce qu’il vaut réellement…):

53 694 en 2011

56 061 en 2010

42 514 en 2009

Mais si vous revenez, c’est qu’un nouveau billet est annoncé par votre agrégateur de flux RSS, un tweet ou un de vos cercles Google+ (à moins que vous soyez simplement plusieurs derrière un proxy a venir lire le même billet). C’est pourquoi, je trouve que l’indicateur le plus pertinent est le nombre de visiteurs uniques divisé par le nombre de billets à l’année:

53 694 visiteurs uniques en 2011 pour 50 billets, soit 1073 lecteurs

56 061 en 2010 / 60 billets, soit 934 lecteurs

42 514 en 2009 / 112 billets, soit 380 lecteurs

27 471 en 2008 / 146 billets, soit 188 lecteurs

17 687 en 2007 / 200 billets, soit 88 lecteurs et

876 en 2006 / 52 billets, soit 16 lecteurs.

Bien sur, ces chiffres sont très approximatifs, car un nouveau lecteur peut très bien lire plusieurs billets en une seule visite, ou comme je l’ai dit, plusieurs lecteurs se cacher derrière une seule adresse IP. Ma famille, mes amis, ma sœur, mes cousins et leurs amis ont très bien pu mettre en place une stratégie de clics à partir de plusieurs ordinateurs/téléphones/tablettes depuis chez eux ou depuis leurs employeurs pour faire augmenter les stats de ce blog, pensant me faire plaisir.

En 2011, vous étiez dans 130 pays, ce qui ne lasse pas de me faire voyager virtuellement dans des contrées où je n’irai probablement jamais.

Ceux qui viennent ici en passant par un moteur de recherche, ont très majoritairement tapé dans celui-ci le mot clef « Zythom » (7982), en 2e position vient « expert judiciaire informatique » (365) puis « devenir expert judiciaire » (254), ce qui me gène un peu pour quelqu’un qui parle pas mal de son service militaire ou de ses souvenirs d’enfance 😉 Vous êtes quand même 109 à atterrir ici après avoir tapé « images pedophiles », 108 pour « image pédophile », 85 « image pedophile », 74 « image pedophilie », 71 « images pédophiles » et 5 « nudisme et pédophilie »… Je ne juge pas ces visiteurs, car je pense à la citation suivante: « Je me suis jeté dans la boue plus d’un demi-million de fois. Cela permet-il d’en déduire quoi que ce soit sur mon état mental? » Sepp Maier (gardien de but allemand).

Si vous êtes venus ici après avoir cliqué sur un lien ailleurs que dans un moteur de recherche (ou dans vos marques-pages), vous êtes, en 2011:

– 16076 en provenance de maitre-eolas.fr

– 1908 via boulesdefourrure.fr

– 1375 via sid.rstack.org

– 1234 via sebsauvage.net

– 969 via maitremo.fr

– 542 via laplumedaliocha.wordpress.com et

– 530 via standblog.org

Que tous ces grands blogueurs en soient remerciés. On dit parfois que le blogueur est un loup pour le blogueur, mais ce n’est pas nécessairement vrai.

Vous êtes 66% sous Windows, 17% sous Linux et 12% sous Mac. Seuls 1,3% d’entre vous ont la chance de me lire sur fond blanc sur iPhone…

Et n’oubliez pas, alors que 2012 sera l’année des sondages, « Les statistiques, c’est comme le bikini. Ce qu’elles révèlent est suggestif. Ce qu’elles dissimulent est essentiel. » (Aaron Levenstein)

To do is to be (Platon)

To be is to do (Marx)

Doo be doo be doo (Frank Sinatra).

2011 est mort, vive 2012

En relisant mon billet de l’année dernière, je me rends compte qu’il est toujours valable concernant les différents bilans sur mon activité d’expert judiciaire et mes vies professionnelle, publique et personnelle. La vie continue, et une année est passée dont j’ai relaté certains évènements ici même.

Il me faut par contre faire le point sur ma liste de résolutions 2011:

– être toujours vivant, si possible en bon état [ok, ça, c’est bon]

– arriver à obtenir le paiement des expertises judiciaires effectuées (deux ans de retard) [OUI, le solde m’a été réglé juste avant Noël !!]

– acquérir une paire de lunette vidéo 3D [raté, mais j’ai toujours bon espoir d’une baisse des coûts avec l’arrivée des TV 3D]

– arriver à faire fonctionner cette $#%µ& régulation de chauffage au boulot [raté, mais le propriétaire a prévu des travaux au budget 2012…]

– faire évoluer les serveurs web du boulot [YES, outre un gros projet d’évolution de notre ERP, un projet Extranet a démarré en 2011 et se poursuivra sur 2012]

– faire un peu plus de sport et plus régulièrement [OUI, vélo tous les jours + aviron une fois par semaine]

– m’intéresser de plus près aux outils des Pentesters [raté, là aussi, c’est un métier. Par contre, je suis invité en 2012 à une manifestation importante sur la sécurité, j’en parlerai ici même]

– assister au moins une fois à une Berryer [encore raté]

– postuler pour une inscription sur la liste de la Cour de Cassation [raté]

– suivre plus de formations techniques, en particulier auprès des pentesters [raté]

– approcher quelques experts judiciaires pour leurs soutirer des billets invités [OK, mais seule une personne a accepté]

– me préparer à devenir expert judiciaire « prestataire de services » [ok ;-]

– mettre en place des enquêtes de satisfaction clients auprès des étudiants [raté]

– encourager le personnel de l’établissement à venir en vélo plutôt qu’en voiture [OUI: construction d’un garage à vélo en 2011]

– venir moi-même en vélo [Ok, cf billet ici]

– acheter un vélo [Yes]

– migrer le système d’information de mes trois sites de production [Ok pour 2]

– suivre de près la rénovation de l’école primaire de ma commune [Ok, chantier démarré et suivi de près]

– finir l’implantation de l’aire d’accueil des gens du voyage et les accueillir [raté, recours de la commune voisine :(]

– dire et montrer l’amour que je porte à mes proches et être réellement présent dans les difficultés. C’est un peu simplet, mais la vie a aussi besoin de choses simples [Ok, mais pas assez à mon goût]

Si j’ai bien compté, cela fait 12 résolutions réalisées pour 8 toujours dans les tuyaux… Finalement, l’année 2011 n’a pas été si mal de ce point de vue 😉

Comme il faut toujours aller de l’avant, je complète avec les résolutions suivantes:

– mettre à jour et étoffer l’offre de conférences sur l’expertise judiciaire (et revoir mes tarifs 😉 que je propose aux lycées, aux universités et aux grandes écoles;

– passer (et rester!) sous la barre mythique des 25 pour mon IMC

– apprendre à déléguer efficacement pour mettre en valeur mes collaborateurs et les faire progresser;

– maintenir avec plaisir le rythme de 4 à 5 billets par mois;

– continuer à répondre présent aux magistrats qui me le demandent;

– manger un fruit par jour…

Je sens que 2012 va être une belle année.

Bonne année à tous! Qu’elle vous apporte joie et bonheur.

Et parce que j’aime bien pasticher Margot Motin:

un quintal de Chantilly Powa dans ta face!

Poutoux-poutoux-coeur-paillettes-et-bonne-année

🙂

Astreintes de Noel

A quelques minutes de fêter Noël avec les gens que j’aime, j’ai une pensée pour tous les hommes et femmes qui sont ce soir d’astreinte au travail, en particulier les magistrats, policiers, gendarmes, pompiers, agents EDF et tous ceux qui travaillent dans les hôpitaux.

Et tous ceux qui sur les routes vont tenter de recoller les morceaux de vies brisées.

Je n’oublie pas non plus les informaticiens qui veillent sur le bon fonctionnement de leurs systèmes, ni les avocats qui répondent présents auprès de ceux qui ont besoin d’eux. J’ai aussi une pensée pour tous ceux qui ne peuvent pas être près de leurs amis ou leur famille pour une raison ou pour une autre.

Depuis ma maison douillette, avec mon nœud papillon un peu ridicule qui fait sourire tous ceux que j’aime, je vous adresse à tous mes meilleurs vœux de Noël.

Le don du sang

J’ai toujours eu peur des piqures et pourtant, je suis un adepte du principe du don du sang. Il me faut donc lutter en permanence contre ma phobie et faire un effort surhumain pour aller donner mon sang.

Les étudiants de l’école d’ingénieurs où je travaille organisent régulièrement la venue d’une équipe de collecte de sang. A chaque fois, je sens une peur panique monter en moi à l’idée même de devoir me faire piquer le bras.

Cela remonte à l’époque de mon service militaire.

Nous étions tous en file indienne, les 180 appelés du régiment, pour passer la visite médicale. Pourquoi celle-ci n’était-elle pas organisée en petit groupe avec horaire de convocation, je ne le saurai jamais. Une longue file d’attente était donc en place, depuis la porte de l’infirmerie, jusque dans la cour, en passant par toute une série de couloirs dans lesquels nous attendions silencieux. L’entrée dans l’infirmerie se faisait par une porte, la sortie par une autre un peu plus loin, dans le même couloir.

J’étais dans le début de la file.

A chaque sortie d’un appelé, celui-ci remontait tout le couloir pour sortir dans la cour. Nous lui demandions ce qui se passait à l’intérieur, et surtout si ça faisait mal. Les réponses étaient variables, un peu floues, et l’inquiétude régnait dans la file.

Mon tour est vite arrivé. J’entre dans la pièce. Je salue l’infirmière d’un « bonjour madame ». Elle me répond sèchement: « On dit bonjour Capitaine, et je suis médecin ». Oups. Elle me demande de me dévêtir pour l’examen. « Heu, dévêtir comment? ». « Vous vous mettez torse nu et en sous vêtement. » « Oui Capitaine. Ai-je l’autorisation de garder mes chaussettes? ». Son regard noir m’a servi d’autorisation.

[Je vous passe l’épisode toujours embarrassant de la palpation des testicules, pour en arriver directement à la prise de sang.]

« Allongez-vous ici, et tendez votre bras en serrant le poing ».

J’obtempère en prenant la précaution de regarder attentivement un détail sur le mur opposé à mon bras. C’est d’ailleurs intéressant de constater que je n’ai absolument aucun souvenir de ce que mes yeux pouvaient bien observer, mais que je sens encore aujourd’hui l’aiguille entrer dans mon bras. Je me souviens très bien également des mots utilisés par ma Capitaine-médecin en retirant l’aiguille: « Merde, merde, merde » tout en courant à l’autre bout de la pièce chercher un énorme paquet de coton.

A ma question posée d’une voix blanche: « Heuu, qu’est-ce qu’il se passe? », elle a répondu succinctement: « Rien, j’ai juste claqué la veine ».

A ce stade du récit, je dois préciser que mes notions d’anatomie remontent au découpage d’une grenouille et au dépeçage d’une moule au lycée, et que pour moi, une veine est une sorte de tuyau dans lequel coule du sang. Une « veine claquée » est donc pour moi l’équivalent d’un tuyau d’arrosage sous pression qui vient d’éclater.

En fixant le mur de plus en plus intensément, l’image qui s’impose à mon cerveau concernant mon bras gauche est donc un petit geyser de sang qui doit éclabousser toute une partie de l’infirmerie.

Je palis légèrement.

Le médecin revient immédiatement avec un ÉNORME paquet de coton qu’elle place entièrement sur mon bras blessé, en me demandant de bien vouloir le maintenir en place avec ma main valide, tout en exerçant une pression pour arrêter le sang.

Je palis un peu plus.

Elle s’empare d’une bande et entreprend d’effectuer le plus gros bandage que j’ai jamais pu voir sur un bras en emprisonnant l’intégralité du paquet de coton. Elle me montre le flacon de sang ponctionné et étiqueté. Elle me prie de bien vouloir sortir pour laisser la place au suivant.

Je me lève et me dirige avec précaution vers la sortie.

A ce moment là, une méchante idée a germé dans mon cerveau mauvais. Et si je faisais une blague à mes compagnons d’infortune?

J’ai donc mis ma veste de survêtement sur l’épaule, ouvert la bouche et essayé d’avoir la tête la plus livide possible (ce qui était relativement facile).

Je suis sorti dans le couloir.

Un grand silence s’est aussitôt fait.

J’ai remonté doucement la file d’attente.

A chaque question « qu’est-ce qui s’est passé? », je répondais « ha la vache, y m’ont pas raté! », en tenant mon bras bandé comme s’il était cassé.

Je ne sais pas si c’était les vapeurs d’éther dans le couloir ou le temps d’attente débout excessivement long, mais je sais que plusieurs appelés sont tombés dans les pommes après mon passage.

Le lendemain, je soulevais doucement l’emplâtre de coton, et miracle de la cicatrisation, seul restait de l’explosion veineuse un petit bleu.

De cette expérience, j’ai attiré beaucoup d’estime et de respect de mes camarades.

Et une peur bleue des piqures.

C’est pour cela que je dois me forcer pour aller donner mon sang.

Parce que je risque de tomber dans les pommes devant les étudiants.

Mais surtout parce que c’est nécessaire.

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PS: Lorsque j’ai pu jeter un coup d’œil à mon dossier militaire, j’ai pu y lire « flacon de prise de sang égaré ». Tout ça pour ça…