Je suis l’heureux propriétaire d’une voiture de marque Ford, modèle Galaxy, qui fait surtout la joie des enfants et de leurs amis puisqu’elle dispose de 7 vraies places assises et me donne l’agréable sensation d’être un chauffeur de bus, surtout lorsqu’il faut ramener tout ce joyeux monde chez eux à 2h du matin après une « boum ». C’est en fait une voiture qui fait surtout plaisir aux parents des autres enfants.
C’est pratique aussi pour partir en vacances au ski en famille avec un coffre gigantesque rempli de matériels et de vêtements encombrants… C’est donc plein de joie, de bonne humeur et de bonbons Haribo que nous sommes partis vers les montagnes à bord de ce magnifique vaisseau spatial, tout juste sorti de chez le garagiste pour une réparation anodine.
Après 1000 km d’autoroutes à peine désertes, nous voici en train d’aborder à la queuleuleu les premiers virages serrés des charmantes routes de montagne, quand soudain, un voyant s’allume sur le tableau de bord digne d’un airbus A380: incident direction assistée… C’est d’ailleurs à peu près au même moment, comme quoi l’informatique d’une automobile est bien faite, que le volant a décidé de fonctionner comme s’il pesait 10 tonnes.
Je préviens aussitôt les passagers du problème, me démarquant ainsi sensiblement d’un conducteur de TGV. J’arrive à garer le monstre sur le bord de la route, au grand étonnement des enfants tout occupés qu’ils étaient à observer l’inclinaison soudaine des plaines environnantes.
Fidèle à une tradition informatique, je décide de couper le contact, de laisser se reposer le véhicule quelques minutes, d’ouvrir la portière pour sortir faire un tour, de remonter à bord et de redémarrer. Hélas, le secteur automobile n’ayant pas encore appris le charme réparateur du reboot informatique, j’annonce scientifiquement et solennellement à ma famille stupéfaite: « Nous sommes en panne! ».
Seulement voilà, un samedi de chassé-croisé hivernal, je sentais comme un début de grosse galère au bord du chemin… Voyons, à quelle distance sommes-nous de l’objectif? 42 km me souffle mon fidèle TomTom portable, qui n’a rien à envier à Pensées Profondes. Bon, 42 km, ça se tente, même sans assistance, même en montagne.
Voici donc le siège conducteur transformé en salle de musculation: les deux mains solidement accrochées au volant, manches de la chemise remontées, j’entame la longue ascension, tel un prédicateur ressuscité, luttant contre les dix personnes accrochées aux roues pour m’empêcher de virer avec la souplesse et l’élégance habituelles.
Tel un héros des temps modernes (Edward Cullen?), j’arrive par ma force surhumaine à mener mon équipage à bon port.
Une semaine se passe.
Les vacances s’achèvent et avec elles la joie des enfants de la station regardant avec des yeux brillants mon monoski extraterrestre et l’étrange équilibriste posé dessus.
Nous voici à nouveau devant le monstre de métal. Je tourne la clef dans un moment d’intensité émotionnelle rare. Le moteur démarre. La direction fonctionne. Le froid et l’altitude a fait son œuvre, comme chacun sait, réparatrice. Et bien sûr, au beau milieu d’un virage de la descente, après un quart d’heure de voyage, la direction se raidit de nouveau: me voilà parti pour 1000 km de routes aux commandes d’un fer à repasser en fonte, tel Chuck sur son Bell X-1-2 modèle 46-062.
Une fois encore, comme Ulysse, j’arrive à bon port.
Le lendemain, dès le paître jacquet, je fonce chez le garagiste ayant effectué une réparation bénigne (la veille du départ), un « simple » changement de démarreur: « Comment! Quoi! Mon automobile serait sortie de ce garage moins fiable qu’elle ne serait entrée! », dis-je en entrant dans la concession, tel fiert qui ne tue pas.
L’aimable tenancier, au sourire désarmant, prend le problème en main d’une manière toute professionnelle pour garder un bon client: « Ne vous inquiétez pas, je m’occupe de tout ».
Une journée s’écoule pendant laquelle je sauve des étudiants de l’analphabétisme informatique. Le lendemain, je retourne voir mon destrier métallique et son palefrenier.
Lui: « Bon, alors, mécaniquement, on n’a trouvé aucun problème. »
Moi: « … »
Lui: « Et donc on a regardé les consignes du constructeur pour les cas identiques au vôtre. En fait, il y a une mise à jour du logiciel qui équipe votre ordinateur de bord pour mieux étalonner la gestion de la direction assistée. On a fait la mise à jour et votre problème est réglé. »
Moi: « !!! »
Donc, je résume: le véhicule auquel je confie ma vie, celles de ma femme et mes enfants, ainsi que celles de toutes les personnes que je croise, est muni d’un programme capable d’annuler arbitrairement le fonctionnement de l’assistance d’une direction, organe vital s’il en est sur une voiture! Et la solution tient dans une mise à jour ?!
Mon dieu, ils l’ont fait.