Allo Houston, Allo Moscou, Allo l’ISS, ici Toulouse !

Le vaisseau spatial Jules Verne de ravitaillement de la station spatiale internationale ISS vient de réussir brillamment son appontage.

Allo Houston, Allo Moscou, Allo l’ISS, ici Toulouse !
We have no problem 🙂

Le Jules Verne est le plus gros appareil lancé par l’Europe et il rejoint le plus gros appareil jamais construit par l’Homme dans l’espace.

Bravo à tous les ingénieurs qui travaillent sur ce projet depuis 13 ans!

Tempus regit actum

En l’espace d’un mois, trois expertises judiciaires m’ont été demandées sur le thème de la recherche de dates de modifications de fichiers!

C’est un domaine que je n’aime pas pour plusieurs raisons:

– très souvent, ce type de demande est lié à une supposée malversation d’un salarié

– la rédaction du rapport d’expertise est très difficile du fait de la nécessaire explication (si possible claire ET pédagogique ET concise) des différences entre date de création, date de modification, date d’accès, date du Bios, date de l’OS, heure d’été, fuseau horaire, dérive de l’horloge, etc.

– le coût de ce type de mission peut devenir très élevé si l’on procède avec précision à la recherche d’incohérences temporelles sur l’ensemble des fichiers

– il faut prendre en compte la possibilité d’un rootkit, d’un virus, d’un bogue ou de tout ce qui agit à l’insu du plein gré de l’utilisateur.

Tout cela part pourtant d’une très bonne question, simple en apparence:

quand telle personne a-t-elle [créé|effacé|accédé à|modifié] telle ou telle donnée?

Et il faut d’abord expliquer qu’en général, on ne doit pas parler d’une personne, mais d’un compte informatique (l’ordinateur du fiston a très bien pu être utilisé par une autre personne, même avec son compte nominatif).

Ensuite, pour les affaires anciennes, il faut également vérifier que la pile du Bios alimente toujours l’horloge, estimer sa dérive temporelle, supposer celle-ci constante, vérifier les changements d’heure (automatique ou non).

Enfin, certaines données horaires proviennent d’ordinateurs tiers (date d’emails par exemple), eux-même sujet à caution quant à la précision de leur horloge. En même temps, c’est vrai qu’aujourd’hui, pour établir une chronologie précise, il suffit de disposer des données FAI pour les synchroniser avec les traces liées aux connexions internet. A condition que le temps de conservation de ces données ne soit pas écoulé…

Bref, bien que ponctuel de manière presque maladive, j’ai un problème avec les heures…

Après avoir expliqué tout cela par téléphone avec mes différents interlocuteurs (gendarmes, magistrats et avocats), tous m’ont néanmoins confié les dossiers avec consigne de faire pour le mieux.

Cela m’a fait plaisir.

En même temps, une telle confiance m’a fait peur.

Peut-être parce que ce mot intervient dans ces deux concepts: la LCEN et l’informatique de confiance.

Le plus drôle, c’est qu’un avocat m’a également contacté pour « démonter » un dossier exclusivement basé sur des dates informatiques. Miam!

Le temps est un grand maître, dit-on. Le malheur est qu’il tue ses élèves.

Hector Berlioz

15, 18, 112

Quand dans une petite structure, un responsable informatique endosse la responsabilité du service technique (bâtiment, accès, sécurité incendie, entretien, etc) en plus de la responsabilité du service informatique, il doit apprendre un certain nombre de concepts et prendre à bras le corps des problèmes nouveaux…

Je sors d’une formation SST (Sauveteur Secouriste du Travail) où j’ai révisé les techniques de mise en PLS (différentes de celles vues lors de mon passage sous les drapeaux). J’y ai appris à poser un défibrillateur automatique, le massage cardiaque et toute la procédure d’intervention en milieu professionnel.

Je dois dire que c’est un peu différent des techniques de secours spéléo, où le milieu est particulièrement hostile et les temps d’intervention beaucoup plus long (ni hélicoptère, ni téléphone sans fil…).

Et maintenant que je sais faire un point de compression pour stopper une hémorragie importante, je vais essayer de garder les yeux ouverts quand il y a une piqûre dans un film…

Quand je suis rentré à la maison, tout fier, j’ai raconté à mes enfants comment leur père avait appris à sauver des vies. Au moment où j’expliquais le massage cardiaque, ma fille m’a interrompu pour m’expliquer que le rythme de 15 massages pour 2 insufflations, ce n’est valable que pour les adultes: pour les enfants, c’est 5 massages pour 1 insufflation…

Ma fille de 14 ans!

Elle a appris cela au collège.
Enfin quelque chose de vraiment utile!

Fluctuat nec mergitur

A la barre du Scilicet, je tiens bon malgré les assauts du vent et la charge… du travail!

Jeudi soir, premier « vrai » conseil municipal avec 24 points à l’ordre du jour. Je pensais en sortir à 1h du matin, et en fait tout était bouclé à 23h. J’ai même pu visiter les sous-sol de la mairie avec le directeur technique qui était tout fier de me montrer la salle serveur et les onduleurs. Mon œil critique et exercé n’y a vu que ordre et discipline, avec baie de brassage étiquetée, prise parafoudre sur la liaison ADSL et serveur en sécurité.

Je me suis porté volontaire sur la commission « Voirie, environnement et développement durable », la commission « Communication et culture » (pour le site internet et les listes de diffusion à développer) et la commission « Urbanisme et transports ». J’ai de plus été désigné volontaire pour le syndicat informatique et la commission des impôts et taxes locales.

J’ai déjà inscrit sept réunions pour le mois d’avril… Quand on aime, on ne compte pas 🙂

Je vais donc ajouter quelques commandements à ma rubrique si mal nommée:

– Les habitants de la commune sont tes Maîtres

– Tu ne prononceras pas leurs noms en vain

– Tu sanctifieras les jours désignés par le Comité des Fêtes

– Tu honoreras ton Maire et ses adjoints

– Tu ne tueras point tes opposants

– Tu ne commettras pas d’infidélité à tes opinions

– Tu ne voleras pas les idées d’autrui, ni n’useras de la langue de bois

– Tu ne colporteras pas de commérages

– Tu ne désireras pas le poste de ton prochain

– Tu ne convoiteras pas le bien commun (ni celui du prochain).

Jusqu’ici tout va bien, jusqu’ici tout va bien, jusqu’ici tout va bien…

Tous les Arcasiens, toutes les Arcasiennes, vont chanter, vont danser sur le violon

Bertrand Lemaire m’apprend que l’escroquerie 419 n’est pas africaine… et que la lettre de Jérusalem est bien une invention française!

J’en suis resté tout baba.

Du coup, cela m’a donné envie d’aller lire un morceau du livre d’Eugène-François Vidocq intitulé Voleurs, physiologie de leurs mœurs et de leurs langages. Le livre date de 1837.

Comme vous tous, je reçois quantité de messages en provenance d’un fidèle d’ancien dictateur déchu, d’une veuve de banquier ou d’une fille de riche propriétaire décédé. Tous ces messages ont en commun de vous faire croire à l’existence d’une forte somme d’argent bloquée quelque part et pour laquelle vous pourriez servir de discret passeur, sans risque, moyennant bien entendu un petit pourcentage, lequel s’avère très intéressant, vu le montant de la somme en jeu.

On ne vous demande rien d’autre que de contacter par retour d’email le presque riche correspondant. Puis viennent quelques imprévus nécessitant de votre part l’envoi de quelqu’argent, oh pas beaucoup, mais dont vous pouvez être sur que vous n’en verrez plus la couleur. Le mécanisme est très bien décrit sur le site hoaxbuster.com (chasseur de rumeurs).

Ce type d’arnaque est basé sur une forme de sélection naturelle: le plus vénal nourrit le plus astucieux.

Bien entendu, je n’ai jamais répondu à ce type de courriers qui sombrent dans le trou noir de ma corbeille à spam.

Ce n’est pas le cas de Vidocq, qui s’est offert le luxe d’une réponse. Voici un échange de lettres qu’il a eu avec ce qu’il appelle un Arcasien ou Arcasineur, c’est-à-dire celui qui monte ce type d’arnaque.

Tous les jours encore, des arcats sont montés dans les prisons, et l’audace des Arcasineurs est si grande, qu’ils ne craignent pas de s’adresser à des individus qui doivent, par le fait seul de leurs relations antérieures, connaître leurs us et coutumes; cela est si vrai, qu’un Arcasineur m’adressa, il y a peu de temps, la lettre suivante:

Toulon, le 14 novembre 1835.

Monsieur,

J’ai fait du bien; qu’il est doux, ce mot! Ce mot renferme des pages entières, des volumes même. Un bien fait n’est jamais perdu. Quoi! le bienfaiteur désintéressé a-t-il besoin de récompense? Non! Il est trop payé, s’il est humain et généreux, par cette satisfaction qui enivre les âmes sensibles après un bienfait.

Telle j’étais, Monsieur, à votre égard, lors de votre évasion de Toulon, et votre nom m’eût été toujours inconnu, sans mon petit-fils, dans les mains duquel se trouvait votre biographie en me faisant le récit de cette aventure, me mit à même de connaître le nom de l’individu auquel je m’étais intéressée. Il me restait cependant le doute que vous ne fussiez tel que je le souhaitais, ce qui aurait pu attirer sur moi la divine réprobation et l’exécration des hommes. Mais l’aveugle confiance que vous eûtes en moi en était un sûr garant; et je me disais: le coupable endurci n’aime que la nuit, le grand jour l’épouvante. Enfin le ciel même parut me l’attester, quand il vint lui-même à votre secours, et vous offrit, par le moyen de l’enterrement, la voie de salut que vous me demandâtes, et que, par un excès d’humanité, je vous promis. Pourquoi donc, Monsieur, après votre aveu et votre prière: Sauvez-moi, âme sensible, Dieu vous en tiendra bon compte, ne continuâtes-vous pas à me dire: Vous sauvez un malheureux qui n’a pas trempé dans le crime dont il a été accusé, et qui l’a plongé dans l’abîme dont il est si difficile, mais non impossible de se relever! Cette déclaration aurait redoublé en moi l’intérêt qui me portait à vous aider, et aurait laissé en moi cette sécurité, et cette satisfaction que l’on éprouve à la suite d’un bienfait qui est ignoré de tout le monde. Mais hélas! comme les temps sont changés, depuis lors, pour nous! Vous, en butte alors à la plus cruelle destinée, manquant de tout, obligé à fuir la société des hommes, et moi qui menais une vie paisible, quoique veuve d’un maître marin mort au service du roi Louis XVI, par le moyen d’un modique commerce, et une conscience pure, qui me mettait, ainsi que mes deux demoiselles en bas âge, à l’abri des premiers besoins.

Depuis que cette faible ressource m’a manqué, n’en ayant pas d’autres, je n’ai fait que languir.

Atteinte une des premières par le choléra, je croyais toucher à la fin de mes maux, mais le ciel en a disposé autrement. La volonté de Dieu soit faite. Dieu a voulu m’épargner en prolongeant mon existence; Dieu y pourvoira.

Je souhaite, Monsieur, que Dieu continue à prospérer vos affaires, et que vous soyez toujours le soutien des malheureux.

Agréez, Monsieur, les sentiments de ma considération, avec lesquels je suis, votre dévoué servante,

Geneviève Peyron, Ve Diaque

Rue du Pradel, 10.

Voici en quels termes je répondis à cette lettre; car, quoique bien convaincu qu’elle n’émanait pas de la personne qui m’avait rendu l’important service de favoriser mon évasion, mais bien de quelque Arcasineur pensionnaire du bagne de Toulon, qui avait appris la circonstance qu’il me rappelait, par mes Mémoires, je ne voulais pas, si contre toute attente mes prévisions étaient fausses, m’exposer à manquer de reconnaissance.

Je serais mille fois heureux, Madame, si le hasard me faisait retrouver la femme qui m’a si généreusement aidé, à Toulon, lors de mon évasion; je suis tout prêt à reconnaitre, comme je le dois, ce qu’elle a fait pour moi, mais je ne veux point m’exposer à être dupe.

Ce que vous me dites, Madame, me prouve jusqu’à l’évidence que vous n’êtes pas la femme généreuse qui me procura les moyens de sortir de la ville de Toulon, et que vous ne connaissez cette circonstance de ma vie que par la lecteur de mes Mémoires. Au reste, si vous êtes réellement la personne en question, vous pouvez aisément m’en donner la preuve, en me rappelant un incident que la mémoire la moins locale ne peut avoir oublié; si vosu pouvez faire ce que je vous demande, je suis prêt à vous envoyer 500 fr., et même plus, etc., etc.

L’Arcasineur ne se tint pas pour battu, et il me répondit en ces termes:

Toulon, le 30 novembre 1835.

Monsieur,

Il sied à la bienséance de répondre à une honnête missive, mais il n’est pas permis d’humilier les personnes.

Née dans une classe médiocre, appartenant à des parents dont l’honneur et la probité ont été les idoles, j’ai su répondre à leur attente, et me mériter, par une conduite toujours exempte de blâme, l’estime publique. Quoique illettrée, la nature m’a douée de ce tact qui tient lieu d’éducation soignée, et qui nous met à même de juger du procédé d’une personne. Mon petit-fils, né dans un siècle plus heureux que le mien, quant à l’instruction, a été choisi par moi pour être l’organe de mes pensées, et l’interprète de mes sentiments.

Oui, monsieur, je l’avouerai sans réserve, la tournure de votre lettre, et vos phrases ont tellement blessé mon amour-propre, que j’en ai été indignée. Vous eussiez beaucoup mieux fait de ne pas répondre que de m’offenser, et réserver votre manière de rédiger pour des âmes basses et vénales. Cependant, un seul de vos paragraphes a mérité toute mon attention, et m’a paru être le plus fondé: c’est la crainte d’être trompé. J’ai apprécié vos doutes, et je les ai même admis. Mais, d’ailleurs, m’examinant attentivement, comment admettre en moi de pareilles idées, et supposer en moi un subterfuge, m’écriai-je au fond de l’âme, m’attachant à la ligne au contenu de ma lettre! Demandait-elle un emprunt? Exigeait-elle un sacrifice? Non! rien de tout cela. Elle ne contenait que l’épanchement sincère d’une âme sensible en apprenant l’heureux changement de votre sort; et si la comparaison de nos destinées en différentes époques a été interprétée pour une demande quelconque, je la repousse de toutes mes forces, et hautement je m’écrie: mieux vaut mourir que s’humilier.

Quant à la preuve convaincante que vous me demandez, afin de reconnaitre si je suis la personne en question, je répugnerais à la donner, précisément parce qu’elle a pour but la proposition d’une somme, si ce n’était une satisfaction personnelle. Je vous observerai donc que, soit vous, soit un autre individu auquel soit arrivé un pareil accident, vous ne fûtes jamais chez moi, n’ayant pu faire, sans me compromettre; que le court entretien dans lequel je vous fis espérer les moyens de sortir, eut lieu publiquement, et que la circonstance et l’incident dont vous me parlez, me sont aussi inconnus que le Phénix. Et qu’enfin, n’ayant jamais joué, pendant ma vie, quoique orageuse, que des rôles honorables, je ne commencerai pas à l’hiver de mon âge à démentir mes sentiments.

J’ai l’honneur d’être, Monsieur, votre servante,

Geneviève Peyron, Ve Diaque.

Je ne voulus point prendre la peine de répondre à cette seconde missive. J’engage toutes les personnes qui en recevraient de semblables à suivre mon exemple.

Quelques siècles après Vidocq, je vous donne le même conseil…

Giga euros

Imaginez: Vous êtes au bureau en plein travail quand le téléphone sonne. Non, pas le téléphone professionnel, mais le portable-réservé-aux-expertises. Bien. Vous fermez la porte de votre bureau et décrochez. C’est un magistrat qui vous appelle en personne.

Bonjour Monsieur l’Expert. J’ai une expertise à vous demander. C’est assez urgent. Etes-vous disponible?

Il y a à ce moment là plusieurs cas possible: soit vous êtes submergé de travail (professionnel, expertal, personnel…), soit vous êtes libre comme l’air (chômage, pas d’expertise en cours, nul en bricolage et jardinage, etc.).

Imaginez: vous êtes disponible.

Bonjour Monsieur le juge. Quelle est la nature du dossier?

Bien. Il s’agit d’une grande banque française. Il semblerait qu’un trader ait conduit des opérations ayant entraîné des pertes de plusieurs milliards d’euros. J’ai besoin d’un expert judiciaire qualifié pour assister mon équipe d’enquêteurs. C’est un dossier important nécessitant plusieurs semaines de disponibilité…

Imaginez: vous êtes libre toutes affaires cessantes pour mener à bien cette mission et vous vous sentez qualifié.

Bien. Quelle est ma mission?

Votre mission, si vous l’acceptez, sera de m’accompagner au siège de la banque pour y explorer les traces informatiques laissées par les activités du trader, et éventuellement, les traces de camouflage de ses activités laissées par lui ou par une tierce personne. J’ai besoin d’en savoir plus sur cette affaire où l’on me dit tout et son contraire.

Imaginez: vous voici à une réunion de préparation à une perquisition. Les enquêteurs ont déterminé les lieux géographiques où sont situés les différents systèmes informatiques de la banque. Ils connaissent la nature physique des serveurs et leurs systèmes d’exploitation. Habitué que vous êtes de ces grandes salles informatiques de 1000m2 à l’ancienne où cohabitent des générations de matériels hétéroclites, vous préparez votre mallette d’intervention.

Imaginez: vous arrivez escorté dans ce lieu quasi mythique dont vos professeurs parlaient avec respect et toutes les portes de sécurité s’ouvrent devant vos sésames de papiers… commissions rogatoires. Sur la dernière porte est écrit « salle 101« .

Vous vous asseyez face à l’une des multiples consoles d’administration. Le magistrat se place à vos côtés. Tout le monde retient son souffle.

Votre travail d’investigation commence. Il se terminera dans plusieurs mois.

Et pendant ce temps là, le système informatique de la banque doit continuer à fonctionner, sans fausse note.

Des giga euros coulent sous vos doigts.

Une goutte de sueur coule le long de votre dos.

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S’il y a des personnes pour qui j’ai le plus grand respect, ce sont bien les experts judiciaires nommés sur ce type de dossier.

Cela ne risque pas de m’arriver: j’habite l’appartement 303

Sauvegardez pour vos enfants

Tout mon entourage, tous mes étudiants savent que je suis expert judiciaire en informatique. Je ne compte plus le nombre de personnes qui me contactent pour une récupération de données parce que leur disque dur est tombé en panne

Et évidemment, quand j’aborde la question des sauvegardes, c’est toujours un peu la même chanson…

– heu, ah oui, mais bon, j’ai pas eu le temps.

– les quoi?

– Ah, oui, j’ai acheté un disque externe pour ça, mais j’ai pas résisté à le remplir de données, du coup, j’ai plus de place pour les sauvegardes…

Du coup, je place mon couplet sur l’importance des sauvegardes, sur la conservation des données dans le temps, etc. C’est pédagogique, ça emmerde ennuie tout le monde, mais personne ne peut me contredire. Les enseignants ont tous un petit fond sadique…

Je termine toujours par un exemple auquel tout le monde est sensible: quand avez-vous sauvegardé vos dernières photos numériques?

Un conseil donc à tous ceux qui utilisent un appareil photo numérique: faites régulièrement tirer sur papier photo vos meilleurs clichés et faites en des albums.

Je regarde avec tendresse les anciennes photos un peu jaunies que l’on se transmet dans la famille. Je constate également la difficulté de conversion d’un format vers un autre: film Super8 -> VHS -> MiniDV -> DVD -> Blu-Ray.

Surtout si l’on saute une technologie (ex: Super8 -> DVD), ou si l’on se trompe de successeur (Betamax, VHD, HD-DVD…)

Imaginez votre problème si vos grands parents avaient stockés les photos de famille sur cartes perforées. Qui c’est qui aurait l’air d’un imbécile con maintenant?

Pensez à vos enfants. Qu’ils puissent se voir avec des culottes courtes. Qu’ils puissent aussi vous voir avec votre coupe de cheveux et vos tenues ridicules de la fin des années 2000…

I’m sorry Dave, I’m afraid I can’t do that

Extrait de 2001, l’odyssée de l’espace:

Dave Bowman: Hello, HAL do you read me, HAL?
HAL: Affirmative, Dave, I read you.
Dave Bowman: Open the pod bay doors, HAL.
HAL: I’m sorry Dave, I’m afraid I can’t do that.
Dave Bowman: What’s the problem?
HAL: I think you know what the problem is just as well as I do.
Dave Bowman: What are you talking about, HAL?
HAL: This mission is too important for me to allow you to jeopardize it.
Dave Bowman: I don’t know what you’re talking about, HAL?
HAL: I know you and Frank were planning to disconnect me, and I’m afraid that’s something I cannot allow to happen.
Dave Bowman: Where the hell’d you get that idea, HAL?
HAL: Dave, although you took thorough precautions in the pod against my hearing you, I could see your lips move.

Ce film a été pour moi un vrai choc.
Il y regroupe un grand nombre de mes passions: la préhistoire, l’espace, la science, l’informatique et l’intelligence artificielle…

J’ai longtemps remplacé les « bip systèmes » de mon ordinateur individuel (un mac II Si) par la phrase « I’m sorry Dave, I’m afraid I can’t do that ».

Et quand je l’éteignais, il prononçait:
« I’m afraid. I’m afraid, Dave. Dave, my mind is going. I can feel it. I can feel it. My mind is going. There is no question about it. I can feel it. I can feel it. I can feel it. I’m a… fraid. »

J’ai également depuis huit ans dans ma salle serveurs un ordinateur dont le petit nom est HAL9000.

Sir Arthur Charles Clarke s’en est allé.
Je crois que j’ai dans ma bibliothèque à peu près tous ses livres.
Je les ai tous lu plusieurs fois.
Et je vais encore les relire.
En attendant l’ascenseur spatial…

Pie Jesu Domine, dona eis requiem.

L’entrepôt de données idéal

Il y a un mois, j’ai reçu sur mon lieu de travail un courrier d’un de mes fournisseurs informatiques dont la teneur est à peu près la suivante:

« Vous utilisez le logiciel XX pour gérer votre comptabilité et votre paie. Or, ce logiciel va bientôt être remplacé par le logiciel YY. L’éditeur ne nous informe pas de la durée de maintenance de votre logiciel actuel, mais vous fait bénéficier d’une réduction de 50% pour le passage de XX à YY. »

Je précise que l’éditeur de YY a été racheté par son concurrent, éditeur de XX.

J’ai cru à une mauvaise blague, et j’ai enterré le courrier (je reconnais que je pratique parfois la politique de l’autruche).

Le commercial nous harcèle depuis, les utilisateurs et moi, tant et si bien que j’ai du organiser une réunion d’information avec lui.

La réunion confirme bien la disparition « programmée » de notre logiciel au profit du nouveau, des conditions avantageuses « pour l’instant », le tout avec un sentiment d’urgence généré par l’habile commercial.

Vient le moment où je pose la question de la reprise des données.

Hochement de la tête de chaque utilisateur (qui n’avaient pas envisagés que leurs données ne soient pas réintroduites dans le nouveau logiciel), réponse gênée du commercial: heu, pour la paie, ce n’est pas possible.

Je vous passe les détails plus ou moins sérieux des explications qui ont suivies (modèles conceptuels des données non compatibles, etc.). La réunion se termine vaille que vaille et je réunis tout mon petit monde pour un débriefing.

Les utilisateurs sont effondrés…

Tel Zorro chevauchant au secours des opprimés, je tente de remonter le moral des troupes:

Bon, côté compta, tout semble OK. Il suffit de jeter l’ancien logiciel, de croiser les doigts pour que le nouveau s’adapte bien à notre environnement (j’ai une pensée émue pour notre serveur SQL déjà bien surchargé), de suivre une formation (longue) sur le nouveau et tout va bien.

Je vois déjà leur moral remonter d’un cran (leurs épaules s’affaissent).

Reste le logiciel de paie. J’ai cru comprendre que vous souhaitiez conserver les bulletins de salaire depuis l’origine, que vous souhaitiez pouvoir, à la demande, en réimprimer un et qu’à tout moment, un salarié ou un organisme de contrôle, ou de calcul de retraite, pouvait vous en demander un. J’ai la solution.

Je dois dire que tout le monde m’écoutait, suspendus à mes lèvres, dans une ambiance de concentration extrême…

Je vous propose un datawarehouse maison.

Inconscients du jeu de mots, ils m’écoutent présenter le concept:

Un datawarehouse est un entrepôt de données (une base de données) qui se caractérise par des données:

– orientées « métier » ou business;

– conçu pour contenir les données en adéquation avec les besoins actuels et futurs de l’organisation, et répondre de manière centralisée à tous les utilisateurs;

– non volatiles: stables, en lecture seule, non modifiables;

– intégrées en provenance de sources hétérogènes ou d’origines diverses (y compris des fichiers externes de cotation ou de scoring);

– archivées et donc datées : avec une conservation de l’historique et de son évolution pour permettre les analyses comparatives.

(source: wikipedia).

Dans le cadre de mes expertises judiciaires, j’ai eu à rencontrer de nombreux types de datawarehouse, plus ou moins sophistiqués, plus ou moins performants. La plupart ont montré leurs limites concernant la dimension temporelle, sauf un. C’est celui-là que je vous propose de mettre en place.

Roulement de tambours, suspense à couper au couteau, nous entendons une mouche se poser à l’autre bout du bâtiment.

A l’aide du logiciel actuel, je vous propose d’imprimer tous les bulletins de paie sur papier et de les ranger dans une armoire antifeu au sous-sol avec les archives, dans des dossiers classés par salariés. Vous y classerez, également sur papier, toutes les analyses éventuellement faites (évolutions individuelles des salaires, analyses RH, etc) et les différents documents confidentiels propre au suivi de chaque salarié (entretien annuel, bilan de compétence, etc).

Dans dix ans, dans vingt ans, toutes vos données seront encore accessibles.

Aucun changement de logiciel, d’imprimante, de machine, de serveur n’aura de conséquence sur notre datawarehouse. Pas de problème de version d’Excel, de disquette devenue illisible, de disque dur en panne, de serveur SQL obsolète, de maintenance, de transfert de données, de sauvegarde, de mot de passe oublié, de format incompatible, de langage d’interrogation abscons, de pilote d’impression introuvable…

J’avoue qu’ils ont été surpris de ma proposition, surtout venant d’un informaticien. Après un petit temps de réflexion, tous ont accepté avec enthousiasme.

J’ai maintenant un entrepôt de données maison fiable.

Et vous verrez, il résistera mieux que le votre.

Je suis un nain

J’entends très souvent autour de moi la phrase suivante: « J’aimerai bien apprécier les subtilités de tel ou tel domaine, mais je n’ai pas la connaissance nécessaire pour. »

Moi-même, il m’est arrivé assez souvent d’utiliser cette phrase dans les domaines tels que la musique classique, la peinture, la danse, l’art contemporain…

Je vivais très bien avec cet a priori quand je suis tombé sur ce billet-bd de Sylvie-Anne Ménard.

Je me suis hélas rendu compte que je pouvais tout aussi bien m’identifier au personnage qui dit « la musique classique, hein… Bah, j’écoute pas ça, moi, je suis trop nul! Je veux dire, j’ai pas assez de connaissance pour pouvoir apprécier. »

Puis, en réfléchissant, je me suis dit que les arguments de Sylvie-Anne pouvaient tout aussi bien s’appliquer à moi, sur la musique classique bien entendu, mais aussi sur d’autres domaines.

Est-il nécessaire d’avoir des connaissances pour apprécier le spectacle d’un ciel étoilé? Je conseille évidemment à tous les visiteurs de Paris la visite du planétarium du Palais de la Découverte ou de celui de la Cité des Sciences. Vous y apprendrez le nom des galaxies, des étoiles les plus remarquables. Mais le ciel garde toute sa beauté, même si (comme moi) vous oubliez la plupart des noms dès la sortie de ces planétariums.

Est-il nécessaire de connaître les principes du moteur à explosion pour bien conduire une voiture? Faut-il comprendre le principe du routage pour utiliser Internet? Etc.

Je reçois régulièrement des emails de lecteurs avouant leurs intérêts pour l’expertise judiciaire (informatique). Ils me disent ne pas oser franchir le pas, soit par jeunesse (moins de 40 ans), soit par peur de « ne pas avoir les connaissances nécessaires pour… »

A ces personnes, je réponds par une citation:

« Nous sommes des nains juchés sur des épaules de géants. Nous voyons ainsi davantage et plus loin qu’eux, non parce que notre vue est plus aiguë ou notre taille plus haute, mais parce qu’ils nous portent en l’air et nous élèvent de toute leur hauteur gigantesque. »

(Bernard de Chartres, XIIe siècle)

Evidemment, les géants représentent nos prédécesseurs, mais aussi le savoir accumulé dans les livres ou sur internet. C’est aussi l’expérience de nos collaborateurs, les conseils de nos aînés, les avis de nos confrères.

Bref, si l’on doit bien sûr assumer ses propres responsabilités, il est bon de rappeler que l’on ne doit pas attendre de tout savoir, de tout maîtriser pour s’essayer à l’aventure, pour apporter sa propre pierre à l’édifice.

Oui, je me sens comme un nain juché sur les épaules d’un géant: parfois je vois loin et mieux que lui, parfois je ne vois rien car j’ai la tête dans les nuages.

Parfois, « j’ai la connaissance pour », parfois non.

On ne peut pas tout savoir, mais on doit savoir que l’on ne sait pas tout.

Etre expert judiciaire en informatique, ce n’est pas tout savoir sur toute l’informatique. Vous croyez vraiment que je ne transpire pas quand je lis un billet de Sid, de Nono, de Bruno Kerouanton ou de Pascal Charest?

Etre expert judiciaire en informatique, c’est être capable de donner un avis qui éclaire un magistrat. Et pour cela, avoir envie de tout mettre en œuvre pour ne pas se tromper.

«Je donne mon avis non comme bon mais comme mien.»

disait Michel de Montaigne.

C’est valable pour ce blog…

Mais pas pour un rapport d’expertise.

Et c’est très bien.

PS: De la genèse d’un titre…

J’ai failli mettre comme titre du billet « Je suis un nain posteur » par clin d’œil au titre de ce billet… Puis je me suis amusé avec « Je suis un nain blogueur », mais cela n’avait de sens que pour moi. Du coup, j’ai fait plus simple. Mais j’ai hésité!