Backstage 0810

Comme beaucoup de scientifiques, j’aime les chiffres. Et les nombres aussi.
Je sais, ce ne sont pas des choses qui se disent en société.
C’est un peu honteux.

Quand j’étais jeune, lors des réunions de famille, mes parents, très fiers, donnaient mes résultats scolaires en pâture aux oncles et tantes. Et leurs enfants (mes cousins et cousines) me regardaient par en dessous avec l’air de dire « pfff quel polard ». Et pour briller dans les yeux des filles, il me fallait cacher cette passion pour les nombres, pour les maths, pour l’informatique naissante, pour l’électronique, pour la physique, pour l’astrophysique.

Sur le sac US qui me servait de cartable (nous étions des rebelles à l’époque:), là où tous mes copains inscrivaient les noms des groupes de rock en vogue, moi j’avais écrit les sigles suivants: SHRDLU, Lisp, Lovelace et Turing. Et quand on me demandait leur signification, je me taisais et baissais les yeux.

Quand on me demandait ce que je faisais (alors que je me grillais les neurones en math sup), je répondais « Bah, je fais des études en sciences » et renvoyais la question, tant il est vrai que pour intéresser quelqu’un, il faut l’écouter parler de lui (ou d’elle).

Aujourd’hui, je suis loin de toute cette misère personnelle, et je me plonge avec délice dans les ouvrages qu’il me fallait auparavant recouvrir d’une couverture de « Playboy » pour éviter les regards désapprobateurs: « The International Journal of Forensic Computer Science« , « Paradoxes mathématiques » et autres MISC… Et comme je m’amuse à tenir ce blog, j’ai pu me plonger grâce à vous (et avec délice) dans les nombres des statistiques de consultation que me remonte « google analytics ».

BOOM BOOM BOOM BOOM BOOM BOOM (roulements de tambours)

Voici donc, en exclusivité confidentiel défense, quelques nombres (avec des images, c’est encore plus joli) que vous avez générés en venant me rendre visite sur ce blog, entre le 1er septembre 2006 et 2008:

Le tableau de bord des visites mensuelles:

Je rougis de plaisir de savoir que 4864 personnes se sont égarées ici au mois de septembre 2008! Je sais, c’est à peine une heure de visiteurs du blog de JM Ucciani dessinateur, mais bon, je vous remercie tous, chers lecteurs et lectrices!

Vue d’ensemble des visiteurs:

Profil technique – les navigateurs:

Firefox, numéro un haut la main! Cela devrait faire plaisir à Tristant Nitot.

Profil technique – vitesses de connexion:

Tout cela me permet de voir qu’il existe des visiteurs ayant une liaison internet OC3 à 155 Mb/s (une connexion OC3 est 100 x plus rapide que T1 (1.5 Mb/s) et 3.5 x plus rapide que T3 (45Mb/s)), mais aussi quelques uns en liaison modem 56k (je sais, c’est peut-être une personne qui est venue 1479 fois)…

La synthèse géographique:
69 636 visites, provenant de 119 pays/territoires.


Pour un blog exclusivement en français, cela fait plaisir de voir qu’il y a encore des français à l’étranger:) [Edit 12/10/2008: un lecteur me fait remarquer qu’il n’y a pas que des français qui parle français hors de France… Je suis honteux, vraiment! Je corrige donc.] Pour un blog exclusivement en langue française, cela fait plaisir de voir qu’il y a autant de francophones dans le monde:)

Les mots clefs utilisés qui amènent ici:

Quelques mots clefs sont également intéressants…
image(s) pédophile(s) 284+157+137+73+53+52 = 756 visites qui amènent ici suite à la saisie de ces mots clefs dans les moteurs de recherche.

Mais n’oubliez pas la citation suivante:
« Je me suis jeté dans la boue plus d’un demi-million de fois. Cela permet-il d’en déduire quoi que ce soit sur mon état mental? »
Sepp Maier (gardien de but allemand) via Courtois.

Les sources de trafic:
LE tableau des tableaux, celui que l’on ne montre jamais, celui des sources de trafic (69 636 visites via 383 sources et supports):

Merci donc à google et à vos marques-pages.
Merci à Sid, Bertrand Lemaire, Bruno Kerouanton

Merci surtout à Maître Eolas (attention site addictif) dont le référencement permanent montre ici l’influence (et je ne parle pas des pics de fréquentation lorsqu’il publie un lien dans un billet – heureusement que je ne paye pas la bande passante de l’hébergement…) Qu’il soit ici publiquement écrit que je lui offre une bière dans le premier endroit où je peux entrer avec un sac sur la tête (je porte très mal la serviette).

Un grand merci aussi à Paxatagore qui a été le premier blogueur à me référencer dans sa blogroll! (Paxatagore, revenez!)

Allez, je lève mon verre à la santé de tous ceux qui sont venus ici passer en moyenne 1mn 56s 31415926535. En particulier à tous les lyonnais 🙂

Et si un jour vous croisez quelqu’un en costume noir avec un autocollant ETAOIN sur son attaché case, alors qui sait, c’est peut-être moi?

Suum quique tribuere

Les experts en série

Depuis mon billet sur la récupération de fichiers, où je cite plusieurs métiers de spécialistes en criminalité informatique, j’ai reçu plusieurs emails de personnes intéressées par ces professions.

On me demande également mon avis sur la meilleure formation, ou sur le choix à faire entre police ou gendarmerie, etc.

STOP. Je ne connais pas ces métiers, je ne sais pas quelle filière suivre pour y parvenir et je travaille tout aussi bien avec des professionnels de la police nationale ou de la gendarmerie (nationale également, il n’y a pas de gendarmerie municipale).

Et comme tout le monde, je regarde les séries télévisées avec leurs lots de suspense, de situations rocambolesques et d’enquêtes scientifiques. Je comprends donc l’intérêt que l’on peut porter à ces métiers, vus à travers la petite lucarne. Mais comme toujours, la réalité est plus douloureuse, et moins télégénique.

Pour autant, si l’on est en général loin des salles hypertechnologiques de la série « Les Experts », si les algorithmes de décryptage sont un peu plus long que dans la série « NCIS », la réalité du terrain est aujourd’hui loin de l’image encore présente à l’esprit du plus grand nombre (me semble-t-il). La réalité, c’est ce qui fait mal quand on éteint l’ordinateur (John Warsen).

Les policiers et les gendarmes avec lesquels j’ai pu travailler disposent d’ordinateurs et de matériels dernier cri. Pas tous, pas partout, mais beaucoup. Et pour ce que j’en ai vu, ils savent parfaitement s’en servir!

Et pourtant, il n’y a pas si longtemps, les seuls ordinateurs des brigades de gendarmerie étaient ceux qu’ils avaient bien voulus acheter à titre personnel et qu’ils utilisaient sur leur lieu de travail.

Et les experts dans tout cela?

Le mot « expert » est un mot dont le sens est multiple (dictionnaire Petit Robert 1991): en tant qu’adjectif, il signifie « qui a, par l’expérience, par la pratique, acquis une grande habileté« , et en tant que nom:

1) Personne choisie pour ses connaissances techniques et chargée de faire, en vue de la solution d’un procès, des examens, constatations ou appréciations de fait (droit 1754).

2) Expert-comptable: personne faisant profession d’organiser, vérifier, apprécier ou redresser les comptabilités, en son nom propre et sous sa responsabilité.

3) Personne dont la profession consiste à reconnaître l’authenticité et à apprécier la valeur de certains objets d’art, pièces de collection.

Mon dictionnaire étant ancien, je me suis tourné vers ROME (le Répertoire Opérationnel des Métiers et des Emplois de l’ANPE) qui me fournit une liste de 28 métiers dont le nom contient le mot « expert »! Dont l’expert(e) informaticien(ne) qui négocie puis prescrit des solutions en matière d’informatique dans les domaines administratif, industriel, scientifique, technique

Rome enfin se découvre à ses regards cruels;

Rome, jadis son temple, et l’effroi des mortels;

Rome, dont le destin dans la paix, dans la guerre,

Est d’être en tous les temps maîtresse de la terre.

Il y a donc profusion d’experts, surtout si vous utilisez le mot comme adjectif:

Technicien expert, il est expert dans cet art, dans cette science, il est expert en la matière…

Des experts en série.

Et parmi eux, il y a les experts judiciaires (il parait que l’on doit dire maintenant « experts de justice », mais j’ai beau regarder mes codes, je ne vois mention de cela nulle part…).

Et si, comme Woody Allen, vous me disiez « J’ai des questions à toutes vos réponses« …

Comme par exemple, qu’est-ce qu’un expert judiciaire? Vous trouverez la réponse par exemple ICI, mais pour répondre simplement, un expert judiciaire est une personne qui prête devant la cour d’appel le serment suivant: « Je jure, d’apporter mon concours à la Justice, d’accomplir ma mission, de faire mon rapport, et de donner mon avis en mon honneur et en ma conscience. »

Et si en plus, à titre personnel, vous avez prêté le serment d’Archimède, vous aurez droit à toute ma considération…

Attention, tous les mots sont importants.

Merci de lire à voix haute.

Les gras sont de moi, vous pouvez parler plus fort.

Serment d’Archimède

Considérant la vie d’Archimède de Syracuse qui illustra dès l’Antiquité le potentiel ambivalent de la technique,

Considérant la responsabilité croissante des ingénieurs et des scientifiques à l’égard des hommes et de la nature,

Considérant l’importance des problèmes éthiques que soulèvent la technique et ses applications,

Aujourd’hui, je prends les engagements suivants et m’efforcerai de tendre vers l’idéal qu’ils représentent :

• Je pratiquerai ma profession pour le bien des personnes, dans le respect des Droits de l’Homme[1] et de l’environnement.

• Je reconnaîtrai, m’étant informé au mieux, la responsabilité de mes actes et ne m’en déchargerai en aucun cas sur autrui.

• Je m’appliquerai à parfaire mes compétences professionnelles.

• Dans le choix et la réalisation de mes projets, je resterai attentif à leur contexte et à leurs conséquences, notamment des points de vue technique, économique, social, écologique… Je porterai une attention particulière aux projets pouvant avoir des fins militaires.

• Je contribuerai, dans la mesure de mes moyens, à promouvoir des rapports équitables entre les hommes et à soutenir le développement des pays économiquement faibles.

• Je transmettrai, avec rigueur et honnêteté, à des interlocuteurs choisis avec discernement, toute information importante, si elle représente un acquis pour la société ou si sa rétention constitue un danger pour autrui. Dans ce dernier cas, je veillerai à ce que l’information débouche sur des dispositions concrètes.

Je ne me laisserai pas dominer par la défense de mes intérêts ou ceux de ma profession.

• Je m’efforcerai, dans la mesure de mes moyens, d’amener mon entreprise à prendre en compte les préoccupations du présent Serment.

• Je pratiquerai ma profession en toute honnêteté intellectuelle, avec conscience et dignité.

Je le promets solennellement, librement et sur mon honneur.

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PS: En relisant le billet, je me rends compte que je suis parti dans tous les sens… Mais c’est mon blog, et je vous dis Merci d’être venu 🙂

To do is to be (Platon)

To be is to do (Marx)

Doo be doo be doo (Frank Sinatra)

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[1] Selon la déclaration universelle de l’ONU (10 décembre 1948)

Autosatisfaction

Il n’est pas si fréquent que je reçoive des emails d’encouragement en provenance des acteurs majeurs du monde judiciaire que sont les enquêteurs. Aussi, ai-je été particulièrement touché lorsque j’ai reçu l’email suivant (publié avec l’aimable autorisation de son auteur):

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Cher Monsieur Zythom,

C’est en me « promenant sur le réseau international de communication entre ordinateurs » que je suis tombé (presque par hasard) sur votre blog.

Et d’articles, en articles, en articles… j’ai apprécié, puis aimé, puis respecté son contenu, sa forme, son style…

Et l’idée m’est venue de vous féliciter de vif mail…

Enquêteur Spécialisé en Criminalité Informatique, en fonction à la Police Judiciaire de [bip], j’effectue régulièrement des exploitations de systèmes informatiques lesquelles concernent en grande majorité des affaires de pédophilie, incitations à la haine raciale, escroquerie, abus de confiance,… ainsi que plus rarement, en matière d’homicides…

J’ai trouvé sur votre blog une mine de conseils, j’ai souri en vous lisant, faisant alors le parallèle avec mes affaires, m’étant retrouvé dans des situations similaires…

J’ai appris aussi, car c’est ce qui arrive lorsque l’on a l’habitude de faire comme on fait… et que l’on voit quelqu’un faire autrement, on se dit alors : « et!! mais c’est pas con ça! »

Alors voilà cher Monsieur Zythom, je ne vous connais pas mais à travers votre blog, j’ai pu voir un homme, féru et passionné d’informatique, expert judiciaire, qui aime son travail et qui le fait bien.

Dommage qu’ils ne soient pas tous comme vous…

Bravo !

Au plaisir de vous lire
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J’ai longtemps hésité avant de publier cet email, non par modestie (j’ai un égo très développé), mais parce qu’il égratigne un peu sur la fin la communauté des experts judiciaires. Mais il fait gris et il pleut. Et j’ai besoin de montrer qu’on m’apprécie un peu.

C’est aujourd’hui dimanche, tiens ma jolie maman
Voici des roses blanches, toi qui les aime tant…
Berthe Sylva

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Photo crédit Dark Roasted Blend

Récupération d’images et plus encore

Vous êtes un particulier, vous avez perdu dix années de photographies numériques parce que votre petit dernier a malencontreusement effacé deux ou trois répertoires de votre disque dur en faisant le ménage (mais bon, ils étaient gros, et ça fait de la place maintenant…).

Vous êtes un jeune expert et vous hésitez à dépenser 5000 euros dans un logiciel d’analyse inforensique parce que, heu, deux expertises par an, c’est pas beaucoup…

Vous êtes N-TECH (gendarme spécialisé issu du CNFPJ Centre National de Formation de Police Judiciaire de Fontainebleau), et vous avez égaré votre «lot enquêteur».

Vous êtes ESCI (Enquêteur Spécialisé en Criminalité Informatique – Police National), mais vous ne retrouvez plus la clef d’activation de votre logiciel Marina (Moyen Automatique de Recherche d’Images Non Autorisées).

Vous êtes journaliste et vous ne retrouvez pas l’image que vous avez prise et merde-c’est-le-bouclage/j’ai-pas-de-sauvegarde/qui-a-touché-mon-portable

Ou tout simplement curieux de voir toutes les images cachées au fil du temps dans les recoins de votre ordinateur.

Alors, ce billet est pour vous.

Je suppose que nous sommes dans le cas d’une analyse d’une copie du disque dur. Pour réaliser une telle copie, vous pouvez déjà lire ce billet toujours d’actualité.

En tout cas, votre disque dur doit encore fonctionner et ne pas être crypté (avec bitlocker par exemple) car je n’aborde pas ici l’analyse post-mortem, ni l’analyse de la mémoire vive

Enfin, il ne s’agit pas d’effectuer une analyse complète des données du disque dur comme vous pouvez vous entrainer à le faire ICI.

Hypothèse: vous avez une image ISO (ou dd) de votre disque dur et vous aimeriez bien en analyser les images.

Il vous faut cet outil: PhotoRec qui est capable de mener à bien cette analyse avec un nombre incroyable de formats d’images.

Il s’agit d’un billet du vendredi, alors ne comptez pas sur moi pour vous écrire un mode d’emploi, surtout que le site de PhotoRec est très complet.

Et vous savez quoi, ce logiciel permet également de récupérer toutes sortes de fichiers: des fichiers cachés sur cédérom, des fichiers GPG et leur clef effacés, et au total plus d’une centaine de format de fichiers!

Ce logiciel travaille bien sur filesystem FAT, NTFS, ext2/ext3, HSF+.

Il fonctionne avec des disques durs, CD-ROM, CompactFlash, Memory Stick, SecureDigital, SmartMedia, Microdrive, MMC, USB Memory Drives…

Bravo à Christophe GRENIER pour ce travail exemplaire!

D’ailleurs, si vous avez quelques pièces anciennes à lui faire passer

Felix qui potuit rerum cognoscere causas (ou pas)

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Image crédit Dark Roasted Blend

Voie Z

Lors d’une correspondance ferroviaire, dans une gare dont je tairai le nom afin de ne pas faire de publicité au risque de voir ce billet tomber sous le couperet de l’extension adblockPlus de mon navigateur favori, lors d’une correspondance donc, je remarque une incongruité: les voies de la gare sont numérotées 1, Z, 2, 4, 6 et 8…

Vous l’aurez remarqué comme moi, les nombres impairs sont absents sauf le premier d’entre eux, et une voie porte le doux nom de « voie Z ».

Sur le quai, j’étais semble-t-il le seul à m’être rendu compte de cette double anomalie, ou plutôt le seul à me poser la question, ou encore plus vraisemblablement le seul à ne pas avoir la réponse…

Afin d’en avoir le cœur net, et puisque j’avais 37mn à tuer, je me suis approché d’un homme en « bleu SNCF » qui officiait sur le quai. Après lui avoir expliqué ma surprise et mes interrogations, l’homme eut l’air interloqué et m’a répondu que « c’est la première fois qu’on me pose cette question » et qu’il faut le laisser tranquille car il a beaucoup de chose à faire, mentant ainsi effrontément…

Je repère alors deux femmes, élégamment vêtues du costume SNCF, auxquelles je soumet mon problème.

Les deux femmes sourient (montrant ainsi leur immense supériorité sur l’homme) et me répondent la chose suivante:

« concernant les numéros impairs, les voies impaires sont réservées au tri et à la préparation des trains. Elles sont donc plus loin, en dehors de la zone accessible au public. »

Zythom: « Mais pourquoi une voie n°1? »

« Heu, ben, heu, c’est pour les trains de marchandises… » me répondent-elles (un peu au hasard me semble-t-il). »

Zythom: « Et la voie Z? »

« Et bien, nous nous sommes déjà posées la question, mais vous voyez, tous les anciens sont partis à la retraite, et la réponse à nos questions est partie avec eux… »

Voici donc comment une entreprise perd son savoir et sa mémoire…

Alors ce matin, avec l’aide d’internet, j’ai un début de réponse à cette question à deux euros: « C’est juste une voie « zone » d’attente ou de garage. Toute[s] les gares n’en on[t] pas mais sur les grande[s] ligne[s] c’est une obligation car ça empêche [permet à] un train qui a des problèmes de se mettre sur cette voie en attendant qu’une solution soit trouvé[e] donc [de] laissé[er] le champs libre au[x] autres. Salut »

Source Yahoo

Mais dans mon esprit, la réponse secrète restera « voie Z, comme Zythom… »

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Photo crédit Dark Roasted Blend

Magic Boulet

Cher Mr Boulet,

Je tiens un blog dont vous n’avez certainement jamais entendu parler, et où j’aborde certains aspects de ma vie professionnelle, de mon activité d’expert judiciaire, de ma vie publique et de ma vie de famille…

Je suis sur que si vous lisiez ce courrier, vous m’imagineriez en costard cravate triste, les cheveux rares et un air sérieux. Vous n’avez pas complètement tort, car le monde est ainsi fait qu’un expert judiciaire lorsqu’il sort de chez lui doit se plier aux règles d’usage s’il veut pouvoir passer pour quelqu’un de sérieux: je mets donc une veste de costume lorsque j’officie et/ou lorsque je rencontre mes homologues. L’habit FAIT le moine et on n’imagine pas un magistrat siégeant en chemise hawaïenne ou un dessinateur de bd travaillant en costume trois-pièces.

Si je vous écris cette lettre, ce n’est pas pour vous demander une dédicace (je n’oserais pas, ou alors « pour Louis[1]« ) ou un dessin sur commande, mais parce que je fais parti de vos admirateurs et que je n’ose pas mettre de commentaire sur votre blog.

Je viens de finir votre album « Notes – Tome 1 – Born to be a larve » et j’ai adoré. Fidèle lecteur de votre blog, j’ai retrouvé avec plaisir tous les billets que j’y avais dévorés, ainsi que les inédits que vous avez glissés dans l’album. J’ai ri à chaque pages et je me suis surpris à m’identifier à votre personnage, mais aussi à vos amis, à vos lecteurs et parfois aux personnes dont vous dénoncez les défauts avec brio.

J’ai dévoré l’album, sans syndrome « du collègue rigolo[2]« , ni syndrome « Frankenstein[3] » et je vous assure que j’attends avec impatience la sortie du tome 2…

Je n’ai jamais été très fort pour les compliments, aussi j’arrête ici ce billet, et je m’en vais relire l’album et corner ses pages comme vous m’avez appris à le faire sans complexe.

Fanatiquement,
Zythom

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[1] Vous n’avez qu’à acheter l’album…
[2] Voir note n°1…
[3] Voir note n°1…

Un train de sénateur

J’ai voté dimanche pour les élections sénatoriales.

Comme indiqué dans ce billet, c’était ma première participation en tant que grand électeur.

J’ai donc fait quelques découvertes:

– la participation à l’élection est obligatoire, sous peine d’une amende de 100 euros.

– le vote est centralisé en un seul lieu pour l’ensemble du département, ce qui entraine le déplacement de milliers d’élus, alors qu’il pourrait être organisé (par exemple dans les sous préfectures) de façon à minimiser les coûts.

– chaque élu a droit à une indemnité forfaitaire de 15 euros, plus le paiement des frais de déplacement.

– le vote est extrêmement rapide, chaque votant ayant visiblement l’habitude de tenir lui-même un bureau de vote. Pas de bousculade, pas de vote sans passer par l’isoloir, pièce d’identité et convocation prêtes: bonjour / je place l’enveloppe sur l’urne / je signe / a voté / l’enveloppe tombe / je récupère ma carte d’identité / au revoir.

Mais j’avais à l’esprit une question posée par un lecteur de ce blog et à laquelle je n’ai pas donné de réponse. Cette question m’a interloqué. La voici:

« Une question qui me taraude, comment avez vous l’impression que votre vote représente le choix de vos électeurs et non votre choix personnel? Je ne connais pas la taille de votre commune, mais dans les petites communes on vote souvent pour le voisin que l’on connaît et que l’on sait efficace, mais dont on ignore parfois la sensibilité politique. Démocratie me semble parfois vite dit. »

Je n’ai pas de réponse simple à cette question, mais il me semble que vous confondez « élection » et « démocratie ».

Mais avant, je voudrais faire quelques précisions:

J’ai été choisi par le maire pour être sur sa liste car j’assistais dans le public à tous les conseils municipaux (nous sommes trois dans le public dont deux de plus de 70 ans) et parce que j’avais accepté d’aider à la tenue d’un bureau de vote.

Lors des élections municipales, il n’y avait pas d’autres listes dans ma commune, pourtant de plus de 5000 habitants. Pourtant le taux de participation a été bon, et les votes favorables élevés. Le maire ne m’a pas demandé de m’inscrire à son parti politique. Il ne m’a pas plus donné de consigne de vote.

« Comment avez vous l’impression que votre vote représente le choix de vos électeurs et non votre choix personnel? » Et bien, j’avoue que je ne me suis pas posé la question. En tant que simple citoyen, j’ai toujours voté en suivant mon intime conviction. Et donc, naturellement, comme grand électeur, j’ai voté de la même façon. Je ne me sens redevable à personne, je ne me sens pas obligé de devoir voter comme aurait voté la majorité des électeurs qui ont voté pour moi.

« Démocratie me semble parfois vite dit. » J’avoue que je n’ai pas souvent creusé la question sous cet angle mais je vous renvoie aux articles de wikipédia traitant des sujets suivants:

démocratie

élections

libéralisme

démocratie participative

suffrage universel.

Il semble en effet qu’il n’y a pas de critère officiel internationalement reconnu pour indiquer ce qu’est une démocratie ou ce qu’elle n’est pas, mais que l’existence d’une élection au suffrage universel indirecte ne soit pas un critère invalidant le concept démocratique.

J’ai voté pour la personne qui me semble la mieux à même à agir pour le bien de ma commune.

Et vous savez quoi?

Elle a été élue 🙂

Nomenclatura

Vous souhaitez devenir expert judiciaire?
Parfait, mais dans quelle matière?
Informatique allez-vous me dire?
Bien, mais ce n’est pas si simple…

En effet, les experts judiciaires sont inscrits dans une branche et/ou rubrique et/ou spécialité dont le détail est fourni par la nomenclature définie par l’arrêté du 10 Juin 2005 dont vous trouverez le détail ICI.

Wikipédia nous enseigne que « nomenclature » signifie « inventaire des termes propres à un domaine défini ». Le mot viendrait du latin « nomenclatura » qu’il ne faut pas confondre avec le terme russe Nomenklatura (номенклату́ра) qui désigne, de façon péjorative, l’élite du parti communiste de l’Union soviétique et les privilèges qui lui sont associés…

Si vous êtes un spécialiste de l’installation et de la réparation des conduits de cheminée, c’est-à-dire un fumiste, alors les choses sont claires: fumisterie est classée dans la branche « C. – Bâtiment. – Travaux publics. – Gestion immobilière », rubrique « C.1. Bâtiment. – Travaux publics. », spécialité « C.1.26. Thermique. » où apparait votre domaine: génie thermique (chauffage, four, fumisterie, ventilation).

Mais que nous dit cette nomenclature concernant l’informatique?
L’informatique apparait principalement dans la branche « E. – Industries » sous la rubrique « E.1. Electronique et informatique », dont les cinq spécialités sont:
E.1.1: Automatismes.
E.1.2: Internet et multimédia.
E.1.3: Logiciels et matériels.
E.1.4: Systèmes d’information (mise en œuvre).
E.1.5: Télécommunications et grands réseaux.

Mais vous trouverez une référence informatique également dans
la branche « G. – Médecine légale, criminalistique et sciences criminelles ».
Rubrique « G.2 Investigations scientifiques et techniques »
Spécialité: « G.2.5 Documents informatiques »

La règle veut que chaque expert choisisse et propose son inscription dans les spécialités de la nomenclature dans lesquelles il se sent spécialiste. La cour d’appel vérifie puis les mentionne en face son nom sur la liste des experts judiciaires.

Les magistrats (et les avocats) peuvent ainsi sélectionner l’expert le plus à même de répondre aux questions qu’ils se posent dans leurs dossiers.

Un conseil: il est préférable de limiter le nombre de spécialités plutôt que de refuser systématiquement toutes les expertises qu’un magistrat vous demandera dans ce domaine. Par exemple, si vous avez demandé votre inscription dans la spécialité « E.1.5 Télécommunications et grands réseaux » parce que vous connaissez bien la problématique des PABX, vous risquez quand même d’avoir beaucoup de demandes d’expertises de téléphones portables. Et si vous n’êtes pas équipés des logiciels et matériels adhoc (parfois forts onéreux) concernant cette problématique, il vaut mieux éviter. C’est tout le problème d’une nomenclature: pas assez détaillée, elle englobe des disciplines très vastes (ex: E.1.3 Logiciels et matériels), et trop détaillée, elle devient inutilisable par le non spécialiste qu’est le magistrat (ex imaginaire: E.0.1.1.2.3.5.8.13.21.34 la sécurité des RPC sous Windows article excellent par ailleurs:).

Vous voyez bien, cher lecteur, toute la difficulté de l’activité d’expert judiciaire en informatique (pardon, en E.1.2, E.1.3 et E.1.4). Il vous faudra être à la fois un généraliste de l’informatique pour couvrir tous les métiers que l’informatique englobe, et un spécialiste capable de répondre aussi bien aux questions suivantes:
– y a-t-il présence d’images de nature pédopornographique sur le disque dur et si oui donner les dates des fichiers et les sources de provenance?
– le logiciel de comptabilité a-t-il été installé dans les règles de l’art?
– l’ordinateur a-t-il été piraté, comme le prétend son propriétaire, pour stocker à son insu des images de nature pédopornographique?
– fournir tout élément susceptible de permettre la manifestation de la vérité…

Et parfois, c’est très difficile.

Et toujours, il faut avoir le courage de le dire au magistrat.

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L’image représente un disque dur de 250 Mo de 1979.
Crédit Dark Roasted Blend.

Election des sénateurs


J’ai été choisi pour être Grand Electeur.
Cela signifie que je vais aller voter dimanche prochain pour les élections sénatoriales.

C’est la première fois.
J’ai été choisi (avec d’autres) parmi les 27 élus du conseil municipal.

J’ai déjà rencontré certains candidats qui sont venus se présenter aux grands électeurs à la mairie. Je reçois par courrier leurs professions de foi. C’est toujours intéressant.

Je sais déjà pour qui je vais voter.

C’est quand même fantastique de vivre en démocratie.

De droit un peu

Je sais qu’il y a dans mes lecteurs quelques juristes, et je les prie de m’excuser pour ce billet qui ne présente absolument aucun intérêt pour eux.

Etre expert judiciaire demande de connaître quelques rudiments de droit. Si vous êtes un peu hermétique à cette science, alors faites comme moi, épousez une avocate. C’est la seule femme que vous regarderez avec de plus en plus d’intérêt à mesure que passeront les années (où alors suivez les conseils d’Agatha Christie et changez de métier…).

Et en feuilletant ses livres de chevet, vous tomberez sur quelques textes qui peuvent (éventuellement) vous surprendre, vous amuser ou vous faire peur…

Code pénal – Art. 224-8: Le fait par quiconque, en communiquant une fausse information, de compromettre sciemment la sécurité d’un aéronef en vol ou d’un navire est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75000 euros d’amende.

Je vous jure que j’éteins toujours mon téléphone portable, et que je désactive ma carte wifi lorsque je me trouve dans un aéronef en vol!

Code pénal – Section 3 : De la livraison d’informations à une puissance étrangère. – Art. 411-6: Le fait de livrer ou de rendre accessibles à une puissance étrangère, à une entreprise ou organisation étrangère ou sous contrôle étranger ou à leurs agents des renseignements, procédés, objets, documents, données informatisées ou fichiers dont l’exploitation, la divulgation ou la réunion est de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation est puni de quinze ans de détention criminelle et de 225000 euros d’amende.

Bon, ça calme tout de suite. J’espère que les personnes habilitées à accéder à E.D.V.I.G.E. ont un bon parefeu, un bon antispyware et un bon antivirus. Et qu’ils n’installent pas de logiciel P2P

Code civil – Art. 559: Si un cours d’eau, domanial ou non, enlève par une force subite une partie considérable et reconnaissable d’un champ riverain, et la porte vers un champ inférieur ou sur la rive opposée, le propriétaire de la partie enlevée peut réclamer sa propriété ; mais il est tenu de former sa demande dans l’année : après ce délai, il n’y sera plus recevable, à moins que le propriétaire du champ auquel la partie enlevée a été unie, n’eût pas encore pris possession de celle-ci.

Ami lecteur, si ta résidence secondaire est située près d’un cours d’eau, veille à y aller au moins une fois par an…

Code civil – Art. 564: Les pigeons, lapins, poissons, qui passent dans un autre colombier, garenne ou plan d’eau visé aux articles L. 431-6 et L. 431-7 du code de l’environnement appartiennent au propriétaire de ces objets, pourvu qu’ils n’y aient point été attirés par fraude et artifice.

Hu hu hu.
Je suis sur que je ne suis pas au bout de mes surprises.
J’aurais du m’inscrire en droit 🙂

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Image provenant du site darkroastedblend.com