Le piratage

Il y a longtemps que je souhaite écrire un billet sur le sujet du piratage, mais je n’arrive pas à trouver le ton ou les mots justes (ou peut-être simplement un ton politiquement correct).

Mais quand ma fille a reçu de la part du papa d’un de ces copains d’école le cédérom gravé d’un chanteur à la mode, je me suis vraiment rendu compte que le phénomène apparaissait maintenant au grand jour sans complexe.

Comment expliquer à ses enfants que ce que font tous leurs copains est illégal?

Comment expliquer que regarder des clips TV sur YouTube est interdit?

Comment résister?

Comment rester incorruptible?

Je me sens un peu comme Eliot Ness, dans le film de Brian De Palma…

Surtout que je partage en grande partie les idées de Tim O’Reilly sur le sujet (son texte date de 2002!). Extraits sous forme de résumé, de la traduction de Philippe Aigrain:

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– L’obscurité est une menace bien plus grave que le piratage pour les auteurs et créateurs.

Des dizaines de milliers de musiciens éditent eux-mêmes leurs CD. De rares élus ont un contrat d’enregistrement. Parmi ceux-ci, seuls un nombre encore plus petit voient leur disques atteindre des ventes significatives. Le fond de stock des éditeurs musicaux est inaccessible pour les consommateurs parce qu’ils n’atteint jamais les magasins. C’est l’obscurité.

– Le piratage, c’est un impôt progressif.

Pour tous les créateurs, qui travaillent pour la plupart dans l’obscurité, être assez connu pour être piraté serait le couronnement de leur carrière. Le piratage est une sorte d’impôt progressif, qui peut raboter quelques pour cent des ventes d’artistes connus, en échange de bénéfices massifs pour les créateurs bien plus nombreux à qui une visibilité plus grande peut apporter des revenus supplémentaires.

– Les consommateurs ne demandent pas mieux que de respecter la légalité, s’ils peuvent.

Piratage est un mot lourd de sens, que nous réservions autrefois à la copie/revente en gros de produits illégaux. L’application récente de ce mot par l’industrie musicale et cinématographique au partage de fichiers pair à pair fait obstacle au débat honnête.

Le partage de fichiers en ligne est l’œuvre de passionnés qui échangent leur musique parce qu’il n’y a pas d’alternative licite, à un juste prix.

– Le vol a l’étalage est une menace plus grave que le piratage.

Il n’y a pas de problème significatif de piratage aux Etats-Unis et en Europe. Le fait que les logiciels de Microsoft aient été accessibles depuis des années sur des sites de téléchargement ou plus récemment sur les réseaux pairs à pair d’échanges de fichiers n’a pas empêché cette société de devenir l’une des plus grandes et plus profitables du monde. Les estimations de « manque à gagner » supposent que les copies illicites auraient été payées ; à l’opposé on ne tient pas compte des copies qui sont vendues comme « mises à jour » à cause de la familiarité qu’ont permis les copies illicites.

Le problème réel est analogue, au plus, à celui du vol à l’étalage, qui représente une perte agaçante pour les activités commerciales.

– Les réseaux de partage de fichiers ne menacent pas les livres, la musique ou l’édition de films. Ils menacent les éditeurs existants.

Les nouveaux médias n’ont pas remplacé historiquement ceux qui leurs préexistaient, mais ont plutôt étendu les marchés, au moins à court terme. Il y a des occasions d’arbitrages renouvelés entre le nouveau média de distribution et l’ancien, et par exemple, la montée en puissance des réseaux de partage de fichiers a nourri l’échange de vinyles et CD (non disponibles par les canaux commerciaux classiques) sur eBay.

Dans le futur, il se peut que les services d’édition musicale en ligne remplacent les CD et d’autres médias de distribution physique, tout comme la musique enregistrée a relégué les éditeurs de partitions dans un marché de niche, et, pour beaucoup, ont transformé le piano domestique en un emblème nostalgique bien éloigné du centre familial d’accès à la musique qu’il constituait autrefois. Mais le rôle des artistes et des éditeurs musicaux ne disparaîtra pas. La question n’est pas alors celle de la mort de l’édition de livres, de l’édition musicale ou de la production de films, mais plutôt celle de savoir qui seront les éditeurs.

– Ce qui est gratuit finit par être remplacé par un service payant de meilleure qualité.

Pourquoi est-ce que vous paieriez un morceau que vous pourriez avoir gratuitement ? Pour la même raison que vous achèterez un livre que vous pourriez emprunter dans une bibliothèque publique, ou achèterez un film sur DVD que vous pourriez regarder à la télévision ou louer pour le week-end. Parce que ce sera pratique, facile à utiliser, à cause du choix, de la facilité de sélection, et pour les enthousiastes à cause du simple plaisir de posséder quelque chose auquel vous tenez.

– Il y a plusieurs façons d’y arriver.

C’est la leçon finale. Donnez au wookie ce qu’il veut! comme le disait Han Solo dans le premier Stars Wars. Donnez-lui d’autant de façons que vous pouvez en inventer, à un juste prix, et laissez-le choisir ce qui lui convient le mieux.

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Tant que les politiques suivront les éditeurs qui s’accrochent à l’idée qu’ils font faillite à cause des réseaux peer to peer, ils voteront des lois liberticides.

Un peu comme si les autoroutes étaient fermées à la demande des banques, sous prétexte que les gangsters les « empruntent ».

Mais pour autant, ces lois s’imposent à tous.

Si vous voulez les changer: aller voir votre député. Ou votez!

Vous l’avez compris, je me sens comme l’Eliot Ness de la dernière séquence du film, lorsqu’il répond à la question « Qu’allez-vous faire lorsque la prohibition sera terminée? »

« J’irai boire un verre! »

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Photo d’Eliot Ness: source wikipedia.

La psychose du pédophile

Je reprends ici un billet publié sur Numerama sous licence Creative Commons par Guillaume Champeau. Mes commentaires suivent cet article.

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Wikipedia censuré par la psychose du pédophile

Société 2.0 –

Les internautes britanniques n’ont plus accès à une page de Wikipedia reproduisant la pochette d’un album du groupe allemand Scorpions. Les fournisseurs d’accès, sur simple requête d’un organisme co-financé par l’Europe, ont bloqué l’accès à la page, démontrant les dérives et les limites d’un système de filtrage non contrôlé par l’autorité judiciaire.

Voici une affaire qui illustre bien les dérives que nous avions évoquées au sujet du filtrage des contenus pédopornographiques décidé sur simple décision administrative, ou par accord entre partenaires privés. « Où se situera le curseur entre les sites indéniablement pédophiles qu’il faut bloquer, et les sites qui prêtent davantage à interprétation ?« , avions nous demandé à propos du projet du gouvernement français de permettre le filtrage des sites à contenus pédopornographiques. « La morale publique étant une donnée variable dans la société, que censurera-t-on demain au nom de sa protection ?« . En Grande-Bretagne, une page de Wikipedia a été bloquée parce qu’elle reproduisait la pochette de l’album Virgin Killer de Scorpions (de 1976), sur laquelle une fillette pose nue, le sexe toutefois dissimulé derrière l’effet d’un éclat de verre :

Bien que sensible, le blocage est décidé sans contrôle du juge. L’Internet Watch Foundation (IWF) a simplement ajouté l’URL de la page de Wikipedia à sa liste noire des sites soupçonnés d’abriter des contenus pédophiles. L’organisme britannique, financé par l’Union Européenne et plus de 80 entreprises de télécoms, transmet régulièrement son listing aux FAI, qui bloquent immédiatement les URL sur simple requête. Sans vérification préalable.

Au moment où nous publions ces lignes, la page ne peut plus être éditée, mais après discussion les administrateurs de Wikipedia ont préféré maintenir l’image de la pochette. Ils ont eu raison.

Même si déjà en son temps la pochette avait fait scandale et avait été interdite dans certains pays, l’illustration de Virgin Killer n’est pas une image pédophile. C’est au mieux une oeuvre d’art provocatrice, au pire une image de mauvais goût. Mais aucune fillette n’a été violée pour sa réalisation, et l’on imagine mal que l’image puisse réveiller des pulsions chez les pédophiles en puissance. Et quand bien même il y aurait un doute, ça n’est pas à un organisme privé d’en décider.

Et l’on espère qu’un juge ne l’aurait pas censurée. Toute société doit savoir vivre avec la part de risque qu’induit la vie en communauté. Souhaite-t-on vraiment, pour se prémunir de tout risque, vivre dans une société totalement aseptisée ?

En France, le projet de filtrage du gouvernement vise à imposer aux fournisseurs d’accès une obligation de résultat pour le blocage des contenus pédophiles, qu’ils ne pourront contester. Faudra-t-il qu’ils censurent La Madone aux oeillets de Raphaël ou les images de la pièce Equus de Peter Shaffer ? Et si non, où faut-il tracer la ligne entre ce qui relève de l’image artistique et de l’image pédophile ? La question, simple en apparence, soulève des réponses toutes plus insatisfaisantes les unes que les autres.

Si les problèmes sont aussi nombreux, c’est que le filtrage n’est pas une solution. Ce n’est qu’une manière de cacher le problème. La lutte contre la pédophilie ne passera que par un combat judiciaire et médical contre les pédophiles, pas par la lutte technologique contre leurs contenus réels ou supposés.

L’affaire n’est pas sans rappeler celle du roman Adorations perpétuelles de Jacques Henric. En 1994, la police avait été dépêchée dans les librairies pour faire retirer des rayons des libraires l’ouvrage dont la couverture était une reproduction du célèbre tableau de Courbet, l’Origine du monde. Il avait fallu que quelques librairies fassent de la résistance pour que l’ouvrage ne soit pas interdit. Un an plus tard, le tableau faisait son entrée au Musée d’Orsay, où il est désormais une pièce emblématique de la collection.

Article diffusé sous licence Creative Common by-nc-nd 2.0, écrit par Guillaume Champeau pour Numerama.com

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Depuis l’écriture et la publication de ce billet, la page incriminée est de nouveau accessible.

Les médias et les politiques traitent le thème de la pédophilie de façon très émotionnelle et instaurent un climat hystérique peu propice à une justice sereine et équitable.

Pourtant, Mona Chollet écrivait en 2001 au sujet des accusations de pédophilie portées contre Daniel Cohn-Bendit: « Toutefois, [cette] affaire s’inscrit dans le contexte bien plus large d’un nouvel ordre moral: l’étau se resserre; la liberté des individus, dont l’idéologie sécuritaire triomphante fait peu de cas, est de plus en plus ressentie comme une menace pour l’ordre établi.[…] Voilà un procédé que tous ceux qui tentent de promouvoir la liberté d’expression sur Internet connaissent bien. Un procédé qui revient à dire: quand on cherche la liberté, on trouve le crime. Mais de quelle liberté s’agit-il, au juste?« . Je vous invite à lire son article sur uZine.

Noel Pécout écrit sur son blog Jadislherbe dans un billet intitulé « le pédophile surproduit et antihéros de la société marchande« :

« On dirait que l’on découvre tout à coup l’existence d’une forme de sexualité depuis toujours ignorée. Pourtant, il n’y a pas si longtemps, la pédophilie, et même l’inceste, bénéficiaient dans le public d’un accueil neutre et parfois bienveillant. Il suffit pour s’en convaincre de se reporter à la presse des années 70 et 80. Qu’on me permette de rappeler l’indulgence amusée et admirative, avec laquelle critiques littéraires et présentateurs de télévision accueillaient les déclarations de Gabriel Matzneff ou de René Schérer, lequel écrivait dans Libération du 9 juin 1978: “L‘aventure pédophilique vient révéler quelle insupportable confiscation d’être et de sens pratiquent à l’égard de l’enfant les rôles et les pouvoirs”. Le cas de Tony Duvert, pédophile déclaré et militant, est encore plus remarquable. En 1973, son roman Paysage de fantaisie, qui met en scène des jeux sexuels entre un adulte et des enfants, est encensé par la critique qui y voit l’expression d’une saine subversion. Le livre reçoit le prix Médicis. L’année suivante, il publie Le bon sexe illustré, manifeste qui réclame le droit pour les enfants de bénéficier de la libération sexuelle que leur apporte le pédophile. En tête de chaque chapitre du livre, se trouve reproduite la photographie d’un jeune garçon d’une dizaine d’années en érection. En 1978, un nouveau roman du même auteur, intitulé Quand mourut Jonathan, retrace l’aventure amoureuse d’un artiste d’âge mûr avec un petit garçon de huit ans. Ce livre est salué dans Le Monde du 14 avril 1976: “Tony Duvert va vers le plus pur”. En 1979, L’île Atlantique lui vaut des éloges dithyrambiques de la part de Madeleine Chapsal.

Que s’est-il donc passé entre 1980 et 1995 pour que l’opinion connaisse un revirement aussi spectaculaire? Le phénomène est d’autant plus remarquable que nos sociétés occidentales contemporaines sont cimentées par l’idéal sacro-saint, mais purement imaginaire, de l’enfant-roi et par l’obsession corrélative de la protection de l’enfance.« 

Bertrand Lemaire dans un billet sur le populisme antipédophile écrit:
« Je ne suis pas pédophile mais je me préoccupe des libertés publiques pour chacun, y compris les pédophiles, les terroristes… et ceux qui sont accusés de pédophilie (comme à Outreau) ou de terrorisme (comme de pauvres bougres gardés à Guantanamo). »

Au delà des questions posées par Guillaume Champeau, Noel Pécout ou Bertrand Lemaire, interrogations dont je me fais ici l’écho, l’expert judiciaire ayant pour mission la recherche d’images à caractère pédopornographique est confronté à toutes sortes de problèmes, dont le principal est « Qu’est-ce qu’une image pédopornographique? ».

Je vous renvoie à ce billet de juin 2007 qui reste toujours d’actualité.

Pour ma part, je classe à part, dans un premier dossier, les images et films particulièrement atroces mettant en scène en général un homme et une petite fille de moins de 10 ans.
Le deuxième dossier contiendra les images douteuses (a priori des mineurs de 18 ans).
Enfin le troisième dossier contiendra les images à interrogation: un visage d’enfant au milieu d’un dossier pornographique (un glissé/déposé malheureux?), une situation étrange avec des enfants. La photo de l’album de Scorpions aurait trouvé sa place dans ce dossier (car je ne connaissais pas cette couverture).

Le rapport d’expertise expliquant bien entendu toutes les interrogations et précautions d’usage. A charge pour l’enquêteur, et in fine le magistrat, de décider ce qui est illégal (ou pas).

On voit bien que l’on est aux antipodes d’un système automatique sans contrôle. En France, la justice est saisie, fait intervenir un technicien compétent (en général un OPJ spécialisé) pour extraire les images, pour finalement décider du caractère légal ou non du contenu.

Cela va-t-il durer?

Mais surtout, pourquoi ce type de dossier constitue-t-il la majorité des expertises judiciaires sur lesquelles je suis missionné depuis quelques années?

Au bas de l’escalier

Je sors d’une réunion d’experts où j’ai eu à répondre à un feu nourri de questions. J’ai la tête en feu, et l’esprit vide.

Une bonne nuit de sommeil et me voilà en train de refaire mon exposé. Mais pourquoi n’ai-je pas présenté les choses comme cela, pourquoi n’ai-je pas dit cela? Je prépare même un discours que je n’ai pas tenu, tout en me faisant reproche de ne pas avoir été capable de le faire en direct.

Ce phénomène s’appelle « l’esprit de l’escalier« , par référence à un texte de Diderot intitulé Paradoxe sur le comédien:

« Cette apostrophe me déconcerte et me réduit au silence, parce que l’homme sensible, comme moi, tout entier à ce qu’on lui objecte, perd la tête et ne se retrouve qu’au bas de l’escalier. »

Seuls les esprits vifs et brillants peuvent, sans préparation aucune, écouter une question et y répondre immédiatement de la meilleure façon possible. Les autres, les esprits moyens ou médiocre comme moi, répondent du mieux possible, et se rendent compte le lendemain ou le surlendemain qu’ils auraient pu répondre autrement.

Wikipédia nous renvoie vers un autre auteur classique, Jean-Jacques Rousseau, qui écrit dans « Les Confessions » (livre III):

« Deux choses presque inalliables s’unissent en moi sans que j’en puisse concevoir la manière: un tempérament très ardent, des passions vives, impétueuses, et des idées lentes à naître, embarrassées, et qui ne se présentent jamais qu’après coup. On dirait que mon cœur et mon esprit n’appartiennent pas au même individu. Le sentiment, plus prompt que l’éclair, vient remplir mon âme; mais, au lieu de m’éclairer, il me brûle et m’éblouit. Je sens tout et je ne vois rien. Je suis emporté, mais stupide; il faut que je sois de sang-froid pour penser. Ce qu’il y a d’étonnant est que j’ai cependant le tact assez sûr, de la pénétration, de la finesse même, pourvu qu’on m’attende: je fais d’excellents impromptus à loisir, mais sur le temps je n’ai jamais rien fait ni dit qui vaille. Je ferais une assez jolie conversation par la poste, comme on dit que les Espagnols jouent aux échecs. »

Je ferais une assez jolie conversation par la poste…

Il est plus facile d’écrire un billet de blog, bien assis chez soi devant son ordinateur, que de répondre en direct aux questions d’une assemblée curieuse.

Mais on apprend toujours beaucoup sur soi, à s’exposer ainsi.

Vous êtes de Lille ?

Depuis la sortie du film de Dany Boon sur les gens du Nord, cette belle région est maintenant mieux connue de la France entière. Mais tout n’a pas été dit…

Vous savez que vous êtes de Lille quand:

– Petit vous aviez des crayons de bois et non pas des crayons à papier
– En voiture on vous dit « remonte le carreau », vous savez quoi faire!
– La ducasse n’est pas pour vous uniquement une bière (Ah bon ch’t’une bière ??)
– Prononcer le « t » à la fin du mot « vingt » ne vous paraît pas bizarre
– Il ne pleut pas c’est qu’il fait beau !
– Vous savez ce qu’est de la cassonade
– Vous vous méfiez en voiture des « 62 »
– Pour le LOSC vous iriez loin… (Au moins jusqu’au grand stade de Villeneuve)
– Vous lavez par terre avec une raclette/un racleau et une wassingue
– Vous allez acheter l’essence et la bière en Belgique
– Vous dites « marcher à pied de chaussettes »
– Vous jugez la convivialité d’une ville au nombre de ses cafés
– Vous ne prenez pas les baraques à frites pour des gens du voyage
– Il drache… on sort couvert
– Eurostar, Thalys et TGV sont des mots courants
– Vous connaissez la rue de la soif à Lille
– Vous réalisez que Bruxelles est vachement mieux que Paris
– A chaque fois que vous partez en vacances vous trouvez qu’il fait bon
– Vous réalisez que vous êtes vachement plus musique électro que vos amis des autres régions
– La chanson d’Alain Souchon « le baiser » vous rappelle vos aventures à Bray-Dunes
– Au Tri Postal tu n’apportes pas ton courrier
– Vous confondez pas la voix du Nord avec une ligne de train
– Vous n’avez jamais prétexté une grève des conducteurs de métro quand vous arrivez en retard au taf.
– La définition du mot froid vous semble vraiment différente dans le sud
– Vous regardez A s’barraque de Dany Boon sans les sous-titres
– Vos doigts sentent la moule le premier week-end de septembre
– La pluie ne vous empêche pas de sortir
– Les frites avec de la mayo ça vous parait normal
– Vous vous offusquez des reportages dans le Nord sur les chaînes nationales… mais ça vous fait quand même bien rire
– Dès le moindre rayon de soleil, vous squattez les terrasses (même en plein hiver)
– Vous dîtes « s’il vous plaît » en tendant la monnaie pour payer vos achats
– Pour vous, le gris est une couleur
– Vous rêvez de vivre au soleil mais l’idée de quitter Lille est difficile
– Vous savez prononcer Pot’je vleech (mais vous savez peut-être pas l’écrire)
– Vous trouvez le clapotis de la pluie romantique
– Pour vous la métropole, c’est Lille et sa région… Pas la France entière
– Vous savez que Rijsel et Lille ne font qu’une
– Une semaine sans patate c’est impossible
– Pour vous, le carnaval à ne surtout pas manquer ce n’est ni Rio ni Nice mais celui de Dunkerque
– La phrase « je t’appelle et je te dirai quoi » n’est pas pour vous une bizarrerie mais un apport futur d’information

Et bien sur, il faut relire ce billet et celui-ci

La clef USB mystère

Je suis en pleine expertise informatique. Le magistrat m’a confié un ordinateur, des cédéroms, des disquettes et des clefs USB à analyser. Je sors toute ma panoplie d’outils d’investigation. Me voici enquêteur…

Je procède méthodiquement. Prise d’empreinte numérique avec HELIX à travers le réseau. Prise de notes sur un cahier d’écolier pour décrire chaque étape, tel un Gustave Bémont. Je note le nom du scellé, son numéro, sa description.

Un cédérom, une clef USB, un disque dur… Petit à petit tous les scellés y passent.

Vient le tour d’une petite clef USB sans inscription. Je la place dans ma machine de prise d’empreinte. Elle se met à clignoter. Bien. Seulement voilà, la machine d’analyse (sous Linux) ne voit pas la clef USB…

Ma machine d’analyse est sous GNU/Linux (HELIX) se qui veut dire que quasiment aucun périphérique ne lui résiste: toute la communauté open source se démène pour mettre au point des pilotes permettant d’exploiter tous les périphériques possibles et imaginables.

Par pure réflexe de Windowsien, je redémarre la machine. Toujours rien.

Je commence à transpirer: la clef USB est-elle grillée? Est-ce moi qui l’ai grillée? Aurais-je détruit une pièce à conviction?

J’essaye la clef sur tous les ports USB de tous les PC de la maison avec mon live-CD. Rien.

Je m’assois à mon bureau. Perplexe.

Mon regard tombe sur le cadre dans lequel j’ai placé ce dessin effectué par Monsieur Ucciani en dédicace.

Je prends une grosse loupe et regarde à travers le plastique de la clef USB pour voir si un composant a lâché. Je vois une minuscule inscription presque complètement effacée sur le dessus du plastique: Blue…tooth.

Cela fait une heure que je cherche à analyser le contenu d’une clef USB mémoire, alors que j’ai à faire à une clef USB radio…

Parfois je me félicite de bloguer sous pseudonyme.

La banque alimentaire

Conseiller municipal, c’est aussi répondre à diverses sollicitations. Quand on m’a demandé si j’acceptais de consacrer deux heures de mon samedi pour aider à la collecte d’aliments, j’ai immédiatement accepté.

Samedi, 14h devant le magasin Netto, prévoir des vêtements chauds.

J’arrive à 13h45. Les « collègues » sont contents que la relève arrive. Ils me transmettent les consignes. Nous sommes deux: un côté entrée pour distribuer les sacs plastiques et répondre aux questions des clients, et moi côté sortie pour récupérer les dons des clients et les ranger dans des cartons. Très vite le rythme est rodé avec mon partenaire.

Les clients du magasin sont en général gentils. Moi qui suis plutôt « bourru », je suis souriant et détendu. Je remercie chaque personne avec discrétion. Il y a beaucoup de gène dans l’acte de faire un don en nature. Je pense que chacun imagine que le pire n’est pas toujours pour les autres.

Les dons doivent être des produits non périssables. Personne ne s’est trompé, ce qui prouve que tout le monde connait le principe. Certains prennent l’initiative de donner des produits pour bébé: lait en poudre 0-3 ans, petits pots, etc. Renseignements pris auprès des organisateurs, c’est une très bonne initiative.

Les deux heures s’écoulent lentement. Une de mes piles de cartons s’écroule car l’un d’eux a lâché sous le poids. J’évite la catastrophe de justesse et transfère le contenu de la pile vers les autres cartons. Un client vient me voir d’un œil goguenard et me félicite de ma discrétion. Il me raconte un peu sa vie « je suis un SDF de l’éducation nationale ». Je ne comprends pas ce qu’il veut dire par là. Il ne répond pas à mes questions. Je comprends qu’il veut que je l’écoute. Une autre cliente vient me voir et me demande si elle peut me prendre un carton vide pour son caddie. Je suis un peu surpris et bredouille un acquiescement. Elle ne donnera rien en sortant.

Toutes les catégories de personnes donnent: des vieux, des moins vieux, des bien-habillés, des grands, des petits… Mon partenaire, un habitué de ce genre d’activité m’avait dit qu’il ne donnait pas de sac aux jeunes, car ils ne donnent jamais. Et pourtant, plusieurs fois, des jeunes sont venus me voir avec un paquet de pâtes ou une grosse boite de conserve dans les bras. Cela nous a donné du baume au cœur à tous les deux.

16h, la relève arrive. Deux heures passées debout dans le froid des portes d’entrée… cela fait réfléchir sur le métier d’hôtesse de caisse!

Je fais un petit tour dans le magasin pour récupérer les sacs plastiques abandonnés par ceux qui n’ont pas su les refuser à l’entrée, et qui n’ont pas pu les remplir.

J’en rempli un avec des plaquettes de chocolat et des pâtes de fruits.

C’est probablement ce que j’aimerais que l’on me donne si un jour je me trouve dans le besoin. Chacun son vice. La relève sourit quand je leur donne le sac. Pourvu qu’ils sourient toujours dans deux heures.

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Source image minimiam via Dark Roasted Blend.

Véhicule électrique

Il y a parfois des moments magiques dans la vie d’un ingénieur.

La conduite d’un véhicule électrique en fait partie, du moins pour moi.

Il y a des villes en France où il est possible, pour une somme modique, de louer ponctuellement un véhicule électrique. Le principe de la location est simple: vous payez à la durée, en prenant le véhicule à un parking spécial (équipé de bornes électrique de recharge) et en le déposant éventuellement à un autre parking spécial. Comme un vélib’ finalement.

La mise en charge du pack de batteries est gérée par un technicien qui branche (ou débranche) tous les soirs les véhicules qui en ont besoin. Vous ne pouvez pas emprunter un véhicule qui est en charge ou qui est déchargé (les portes ne s’ouvrent pas).

Me voici donc, avec un ami, dans le parking de mon point de départ. Le système est prévu pour fonctionner avec la seule compétence de l’usager. Je choisis une Peugeot 106 qui semble en bon état. Je présente la carte d’abonnement près du capteur situé sur la fenêtre et miracle, les portes se déverrouillent.

Nous voici assis dans la voiture. Première surprise: il n’y a pas de pédale d’embrayage, ni de levier de vitesse. Et comme je l’apprendrai par la suite, il n’y a même pas de boite de vitesses…

Je suis à la lettre les instructions indiquées sur le cadran et tape le code de sécurité lié à la carte d’abonnement de mon ami. Je tourne la clef de contact toujours présente dans le véhicule (on ne peut pas la retirer). Deuxième surprise: il n’y a pas de démarreur (évidemment me suis-je dit). Par la force de l’habitude, je cherchais à « lancer » le moteur. Dans le cas d’un véhicule électrique, il suffit de mettre le contact et hop, le moteur est sous tension, donc démarré… sans tourner.

Problème: le véhicule est garé face à un muret. Il me faut donc faire une marche arrière pour sortir du stationnement. Comment reculer avec un véhicule sans boite de vitesses? Je cherche un peu sur le tableau de bord et découvre un bouton « R » (probablement pour « Reculer » ou « Rear »). J’appuie dessus et effectivement, un voyant du tableau s’allume avec une flèche vers l’arrière. Je desserre le frein à main et appuie sur la pédale d’accélérateur. Avec douceur, le moteur se met à tourner et la voiture recule.

Me voici sur la route, et après une accélération fulgurante, je roule à la vitesse règlementaire de cinquante kilomètres par heure. Pas de vitesse à passer, la rotation du moteur électrique est « simplement » modulée par la position de la pédale d’accélérateur. Pour freiner, il me suffit de lever le pied de la pédale et le frein moteur joue pleinement son rôle. Pour freiner plus rapidement une pédale de frein est disponible mais très vite elle devient presque inutile.

J’arrive à un premier feu tricolore et m’y arrête puisqu’il est passé au rouge. Etrange sensation que celle d’avoir un moteur qui ne tourne plus parce que l’on n’avance plus. Finalement, c’est assez logique quand on y pense. C’est également étrange de savoir que la marche avant est enclenchée sans avoir à débrayer (puisque le moteur ne tourne pas). Le feu passe au vert et un simple appui sur la pédale d’accélérateur suffit à refaire avancer la voiture.

J’emprunte une voie rapide. Me voici à 90 km/h. Une autre surprise m’attend: le bruit. Comme le moteur ne fait aucun bruit (absolument aucun!), les seuls bruits que l’on entend sont celui du vent et… celui du roulement des pneus sur la route!

Nous voici à destination. Je gare le véhicule et coupe le contact. J’ai fait 20 km en une demi heure pour un coût de 3 euros. La jauge de carburant (l’indicateur de charge) m’indique une baisse de quelques %.

Il me reste à battre le record de vitesse de la Jamais contente qui a été le premier véhicule automobile à franchir le cap des 100 km/h… en 1899!

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Source photo Wikimedia Commons

Faire parler un appareil photo

Des chercheurs de l’Université Polytechnique de Brooklyn de New York ont mis au point une technique permettant de déterminer le modèle d’appareil photo numérique à partir une image numérique prise avec cet appareil [New Scientist via Gizmodo]

Extrait de l’article de Gizmodo:

Lorsque l’appareil photo numérique capture une photo, il crée chaque pixel grâce à une micro-puce constituée de millions de condensateurs dont la charge électrique dépend de l’intensité lumineuse en un point donné. Chacun de ces condensateurs a une lentille et un filtre de couleurs, permettant de créer un seul pixel à partir d’une mosaïque constituée de filtres rouge, vert et bleu.

Les couleurs et l’intensité lumineuse que nous pouvons voir dans nos photos numériques sont créées par un logiciel de dématriçage qui est spécifique à chaque modèle d’appareil photo. De ce fait, chaque appareil photo numérique génèrera des pixels particuliers que les spécialistes seront en mesure d’attribuer à un appareil donné.

Il me semble évident que si cette technique s’avère effective, elle pourrait permettre d’amener un élément de preuve liant un suspect (et le matériel saisi chez lui) et l’image numérique utilisée dans une affaire criminelle (un enlèvement par exemple).

Si elle est améliorée, elle pourrait permettre un lien non plus entre une image numérique et un modèle d’appareil, mais avec un appareil photo numérique précis et unique, comme pour les machines à écrire et les imprimantes.

Par contre, je suis plus réservé sur la conclusion de l’article du New Scientist:

« If we can identify the camera, then there is a possibility that we can identify who bought it and where. »
[Si nous pouvons identifier l’appareil photo, alors nous pourrions peut-être savoir qui l’a acheté et où.]

Parce que pour l’instant, il ne s’agit que d’identifier le modèle d’appareil (et encore, à 90%).

Cela me rappelle que j’ai déjà beaucoup de mal à faire parler les mémoires des imprimantes

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Crédit images darkroastedblend.com