Le disque dur

Le disque dur est posé devant moi sur le bureau. Je l’observe quelques instants en silence. Je viens de passer plusieurs heures à l’extraire d’un ordinateur particulièrement résistant au démontage. Je ne voulais pas faire de rayures avec mes tournevis, aussi ai-je du en fabriquer des souples avec de vieilles brosses à dents…

J’ai maintenant devant moi un disque dur tout à fait banal (et un tas de vis que j’ai mis de côté pour le remontage). Je le regarde fixement, faisant une petite pause dans cette expertise judiciaire solitaire. Comme tous les disques durs non SSD, c’est une merveille de mécanique. Pendant son fonctionnement, les têtes de lecture flottent sur un coussin d’air à quelques nanomètres des plateaux, ce qui ne laisse pas de me surprendre.

Le premier défi, qui consiste à essayer de faire démarrer l’ordinateur sur cédérom sans toucher au disque dur,
a échoué. Mes différents « boot cd » n’ont pas réussi à reconnaître les différents éléments de l’ordinateur, en particulier la carte réseau. En tout cas, pas suffisamment pour me permettre de cloner le disque dur en un temps « raisonnable », et avec la garantie de ne PAS modifier les données inscrites dessus. Préservation de la preuve, garantie d’une expertise ultérieure donnant les mêmes résultats, responsabilité de l’expert, etc.

Le deuxième défi a donc été de réussir à extraire le disque dur du cocon constitué par cette magnifique carcasse aluminium, mince et fragile, sans vis apparente, clipsée de manière invisible. Difficile défi. Heureusement, internet est une source d’informations telle que j’ai pu trouver un site de passionnés ayant déjà entrepris le démontage de ce modèle ET partageant cette expérience. Avec précaution, j’ai entrepris de suivre leurs conseils, et pas à pas, malgré quelques petites différences liées certainement à une évolution du modèle, j’ai réussi à extraire le disque dur.

Le voilà posé sur mon bureau.

Je le prends en photo, je note le numéro de série et les diverses caractéristiques du disque. Je le prends délicatement entre les doigts pour le brancher sur mon ordinateur d’acquisition.

Je mets ce dernier sous tension. Quelques gouttes de sueurs perlent sur mon front : le moment est critique. Le disque dur fonctionne-t-il ? Les plateaux tournent-ils ? Les têtes de lecture vont-elles accéder correctement aux données stockées sur la couche ferromagnétique ? Y a-t-il un bruit suspect ?

Malgré toute mon expérience, mon cœur bat plus vite.

Apparemment tout va bien. Je lance la copie bit à bit du disque dur. Celle-ci va durer une douzaine d’heure. Je m’assure une nième fois que mon système de stockage est suffisant pour recevoir la copie, qu’aucune coupure programmée n’arrêtera le transfert, que la pièce est assez aérée pour évacuer la chaleur (mon bureau est minuscule). Je pars me coucher, un peu inquiet.

Le lendemain, avant de partir travailler, je vérifie que la copie suit son cours, qu’elle avance correctement, que le disque dur ne chauffe pas trop. J’ai hâte d’être ce soir pour pouvoir enfin éteindre le disque dur original.

Dans un coin de mon bureau trône l’ordinateur éventré, entouré de ses vis et clips soigneusement identifiés. Ma journée de travail est terminée, je peux commencer mon activité d’expert judiciaire. Je m’assure que les hashs de la copie et celui du disque dur d’origine sont cohérents, que ma copie numérique est bien sauvegardée et en sécurité. Je commence le remontage du disque dur dans l’ordinateur.

Puis, enfin, vient le défi principal : la recherche des informations que l’on m’a demandée de
faire. Celles-ci sont peut-être cachées quelques parts, dans un fichier
ou dans un container chiffré. Celles-ci sont peut-être dans la zone non
allouée, dans des fragments d’anciens fichiers. Celles-ci n’existent
peut-être pas. Mais ça, je ne le saurais que dans quelques jours ou quelques semaines.

J’aborde avec effroi ce dernier défi…

Tome 5

De temps en temps, je transfère sur papier, en autopublication, une sélection des meilleurs billets de ce blog. J’ai ainsi la joie de vous annoncer la sortie du tome 5 de « Dans la peau d’un informaticien expert judiciaire » !

Le bébé fait 238 pages et le papa se porte bien…

Vous pouvez le commander chez mon éditeur en suivant ce lien.

Parce que j’aime l’esprit de partage qui règne sur internet, il est
également disponible gratuitement sans DRM dans les formats suivants (cliquez pour
télécharger) :

Pdf (3724 Ko)

Epub (4155 Ko)

Fb2 (6635 Ko)

Azw3 (6705 Ko)

Lrf (3103 Ko)

Mobi (3378 Ko)

Papier (238 pages 😉

Je voudrais particulièrement remercier M. Nojhan qui édite le site web Geekscottes et M. Randall Munroe, du site xkcd, pour leurs dessins.

Bien sûr, les tomes précédents sont encore disponibles, en format papier ou électronique sur la page publications.

Avertissements :

Les habitués du blog le savent, mais cela va mieux en l’écrivant: la
publication des billets de mon blog, sous la forme de livres, est
surtout destinée à ma famille et à mes proches. C’est la raison pour
laquelle j’ai choisi la démarche d’une autopublication. J’ai endossé
tous les métiers amenant à la publication d’un livre, et croyez moi, ces
personnes méritent amplement leurs salaires! Mise en page, corrections,
choix des titres, choix des couvertures, choix du format, choix des
polices de caractère, marketing, numérisation, etc., sont un aperçu des
activités qui amènent à la réalisation d’un livre. Je ne suis pas un
professionnel de ces questions, je vous prie donc de m’excuser si le
résultat n’est pas à la hauteur de la qualité que vous pouviez attendre.
Le fait d’avoir travaillé seul (avec Mme Zythom-mère pour la relecture, merci à
elle), explique aussi le faible prix de la version papier pour un livre
de 238 pages.

Je me dois également, par honnêteté envers les acheteurs du livre, de
dire que les billets en question sont encore en ligne et le resteront.
Les billets sont identiques, à part les adaptations indiquées ci-après.

Le passage d’un billet de blog à une version papier nécessite la
suppression des liens. J’ai donc inséré beaucoup de « notes de bas de
page » pour expliquer ou remplacer les liens d’origine. Dans la version
électronique, j’ai laissé les liens ET les notes de bas de page. Je vous
incite à lire les notes de bas de page le plus souvent possible car j’y
ai glissé quelques explications qui éclaireront les allusions
obscures.

J’espère que ce tome 5 vous plaira. En tout cas, je vous en souhaite une bonne lecture.

Septieme ciel

Je regarde par la fenêtre de l’avion et la tension monte…

Je n’ai à mon compteur que six sauts, mais le prochain, le septième, est le premier que je vais faire entièrement seul… Je suis monté dans l’avion avec une certaine appréhension, les autres camarades de stage qui m’accompagnent effectuant leur sixième saut sont eux accompagnés de leur moniteur.

Dans l’avion, chacun est silencieux, concentré sur les figures imposées comme exercice pour son saut. Les moniteurs se font des signes entre eux, amusés par notre enthousiasme et notre inexpérience. Chaque stagiaire est dans sa bulle. La mienne grossit, grossit à mesure que l’avion prend de la hauteur. Le stress monte également, ce qui me surprend car les autres sauts ne m’avaient pas fait peur. Mais cette fois, je suis seul, sans moniteur pour me demander si tout va bien, pour me faire vérifier mon équipement encore une fois dans l’avion, pour me déstresser par un geste ou un sourire moqueur.

Je vérifie mon équipement :  la poignée permettant de sortir l’extracteur de la voile est bien en place, les deux poignées de la terrible procédure de sécurité sont bien là (largage de la voile principale et ouverture de la voile de secours), les sangles sont bien mises…

[Note: le mot « parachute » désigne l’ensemble complet : sac + voile principale +  voile de secours + sangles, poignées et dispositifs divers]

Je regarde l’aiguille de l’altimètre tourner lentement : 2500m, 3000m, 3500m, 4000m… Quand elle indique 4200m, le pilote secoue une grosse clochette et l’un des moniteurs ouvre la porte. Le vacarme ambiant augmente d’un cran. Je suis le premier qui doit sauter, je suis assis à même le sol de la cabine exiguë qui peine à loger les 9 parachutistes.

Je me lève tant bien que mal, chacun me laissant une petite place pour me permettre de bouger.

Pendant la montée, j’ai décidé du type de sortie que j’allais faire : un roulé-boulé arrière qui démarre dos au vide. J’ai également repensé à toutes les péripéties qui me sont arrivées tout au long de ces quatre derniers jours, pendant ma formation PAC :

– Lors du 1er saut, j’attendais je ne sais quel signe pour ouvrir ma voile, la main sur la poignée de l’extracteur… L’un des moniteurs a saisi ma main (et la poignée avec) et tiré dessus pour me faire ouvrir la voile !

– Autant la voile s’était ouverte en douceur pour mon 1er saut, autant elle a « claqué » lors du 2e saut. Je suis secoué comme un pantin désarticulé pendant son ouverture. Je ne m’y attendais pas du tout !

– Pour le 3e saut, le moniteur qui nous guide du sol pendant toute la descente sous voile (chaque élève dispose d’une oreillette radio) s’emmêle dans les couleurs des voiles et je prends pour moi un ordre impératif de faire demi-tour, alors que je ne suis plus qu’à 50m du sol. Me voilà donc vent arrière pour me poser. Trop tard pour changer de direction, je me pose en courant, avec une belle gamelle à la clef et une dizaine de mètres à brouter de l’herbe !

– Les conditions  météo ont changé en altitude, et voilà qu’il fait -5°C à 4200m… Je n’avais pas vraiment prévu cela : je n’ai pas de gants, pas de pull. Y fait frette!

– Je n’ai pas réussi l’exercice du 4e saut consistant à rester en chute libre volontairement sur le dos pendant quelques secondes… Je suis tellement cambré que je me retourne immédiatement. A moins que ce ne soit mon (léger) ventre qui décale mon centre de gravité 😉

– Le roulé-boulé avant du 5e saut était correct (voir vidéo ci-après). Mais lorsque j’ai ouvert les bras, je me suis retrouvé sur le dos ! Du coup, je me suis cambré pour me retourner, mais le retournement a été plus brutal que prévu et je me suis désarticulé (voir vidéo).

– Pendant l’exercice consistant à faire un 360° à plat, à droite, puis à gauche, j’ai les deux coudes trop bas. Du coup, je n’arrive pas bien à tourner. Il me faut un peu de temps pour comprendre, mais à 200 km/h, le temps manque. Priorité au contrôle de l’altimètre et à l’ouverture de la voile !

– Lors du 6e saut (et dernier saut accompagné), après le roulé-boulé arrière et les deux séries de tonneaux de l’exercice, une fois stabilisé, j’ai perdu mes surlunettes ! Ce qui veut dire que mes lunettes de vue était exposée directement au vent relatif de la chute libre à 200 km/h. Elles sont restées par miracle sur mes yeux. Le moniteur a apprécié que je ne m’en occupe pas plus que ça et que je me concentre sur ma stabilité, mon altimètre et mon ouverture de voile. Néanmoins, juste avant que la voile ne me secoue comme un prunier, j’ai sauvé mes lunettes en mettant les deux mains sur les yeux !

5e saut PAC, où le pantin désarticulé qui cherche à se stabiliser 😉
Musique audionautix.com (Pentagram)

–oOo–

Je suis maintenant seul pour sauter de l’avion. Je tiens la barre à deux mains.

Je me lance un « go » dans la tête, lâche la barre qui me retient à l’avion, lance la tête en arrière, attrape mes deux genoux avec les mains et commence une série de 4 pirouettes arrières dans le vide.

Je me mets sagement à plat et stabilise comme je peux ma position. Je teste quelques mouvements des bras et des jambes et analyse leurs impacts sur ma position.

Je regarde mon altimètre toutes les cinq secondes.

A partir de 2000m, je ne le quitte plus des yeux, en révisant mentalement la procédure de sécurité à faire si la voile ne s’ouvre pas.

A 1700m, je sors l’extracteur et déclenche l’ouverture de la voile.

A 1500m, la voile est correctement déployée, je pousse un cri sauvage de joie et prend les commandes. Les six minutes suivantes sont une formalité : je profite de la vue, je fais quelques 360° sous voile, je me rends tranquillement vers mon point de rendez-vous de 300m, je fais mon approche finale et je me pose en douceur (sur les fesses, c’est ma technique 😉

Je savoure le plaisir intense que je viens de vivre. Je vous laisse deviner la définition la plus appropriée de l’expression « septième ciel » qui s’applique à ce que je ressens après ce septième saut.

J’ai une pensée pour Sid et je le remercie de m’avoir encouragé à faire cette formation.

Puis je range mon parachute et rentre à pied au hangar, avec des étoiles plein les yeux et la musique de « Top Gun » dans la tête 😉

Premier saut J-20

Ceci devrait être le billet le plus court de mon blog, et aurait pu s’intituler « au cas où »…

J’ai enfin réussi à planifier la date de mon premier saut en parachute : ce sera le 11 août 2014 si la météo s’y prête.

Comme Sid me l’avait conseillé, j’ai choisi une PAC (Progression Accompagnée en Chute), c’est à dire une série de sauts tout seul, accompagné de près par un moniteur (deux pour le premier saut), très différents du saut en tandem. Normalement je dois faire 7 sauts à 4000m, avec à chaque fois environ 40s de chute libre. J’ai déjà hâte d’y être.

J’ai réussi à extorquer une attestation de bonne santé à mon médecin qui s’inquiète de ma santé mentale… Il me reste à me maintenir (juste) sous la barre des 90 kg (poids max accepté par les parachutes du club) et à trouver des attaches pour mes lunettes… J’espère pouvoir rapidement vous raconter mes aventures.

J’aurai une pensée toute particulière pour toi, Sid.

Pépites du passé

La ligne de téléphone n’est pas utilisée, la maison est calme, je peux tenter une connexion à internet. Je suis déjà détenteur d’une adresse email professionnelle, de part mon métier d’enseignant-chercheur, mais j’ai également une adresse email personnelle. Nous sommes à la fin des années 1990.

Je ne suis pas encore fixé sur mon fournisseur d’accès à internet: il faut dire que le choix est pléthorique, entre LibertySurf, FreeSurf, Free et les autres. Je surveille de près ma consommation téléphonique pour éviter son explosion : en effet, les unités téléphoniques sont à ajouter au coût d’accès à internet. Heureusement, mon Minitel trône fièrement à côté du téléphone dans la salle à manger, et ses services payants m’ont déjà habitué à l’usage du chronomètre.

En ce moment, je teste Oreka qui m’offre 18 heures d’accès à internet gratuitement, communications incluses. Je me suis vite habitué à la bannière publicitaire que mon cerveau n’interprète même plus.

Je suis l’heureux propriétaire d’un USRobotics Sportster Fax Modem 14,4k flambant neuf qui trône à côté de mon ordinateur, dans un fouillis de câbles que l’on ne voit jamais sur les publicités informatiques.

A chaque fois que je l’allume, je pense aux ouvrages d’un de mes auteurs de Science-Fiction favori: Isaac Asimov et son entreprise US Robots, inc. J’aime sa séquence sonore de connexion, difficile à décrire, mais parfaitement reconnaissable à l’oreille. Je connais la signification de chaque voyant que je regarde clignoter en attendant avec impatience l’établissement de la connexion.

Je relève les emails de ma boite Mygale.org ainsi que ceux de ma femme. Grâce à son informaticien de mari, elle a été la première avocate de son barreau à disposer d’une boite email, ce qui lui a valu un article clin d’œil intitulé « la femme araignée » dans le journal des jeunes avocats. J’espère qu’elle l’a gardé…

Je m’occupe des différents sites perso que je fais vivre chez différents hébergeurs: sur Mygale.org bien sur, mais aussi sur Chez.com et GeoCities. Il faut dire que l’édition des pages HTML est maintenant grandement facilitée par la suite logiciel Netscape Communicator. Je suis un virtuose de la mise en page et du mélange multimédia : des images gif animées avec du son et du texte…

Je repense aujourd’hui à tout cela parce qu’en rangeant l’IMMENSE bazar qu’est mon bureau, je suis tombé sur mon vieux modem USR. Un jour, quand j’arriverai à la couche géologique contenant les données de mes vieux sites perso psychédéliques, je ferai pleurer vos yeux. En attendant, je pose sur ce blog un billet de souvenirs pour me rappeler de ces pépites qui ont illuminées ce pas-si-lointain passé. Ne croyez pas pour autant ceux qui pensent que c’était mieux avant. L’age d’or de l’informatique est devant nous

Sed fugit interea tempus fugit irreparabile,

dum singula amore capti circumvectamur

(Mais en attendant, il fuit : le temps fuit sans retour,

tandis que nous errons, prisonniers de notre amour du détail.)

Evolution professionnelle

A l’approche des 50 ans, l’année dernière, j’ai décidé de vérifier mon employabilité. Selon l’Organisation internationale du travail (et Wikipédia), l’employabilité est « l’aptitude de chacun à trouver et conserver un emploi, à progresser au travail et à s’adapter au changement tout au long de la vie professionnelle« . Pour moi, cela consistait à vérifier, bien qu’aimant mon entreprise, mon chef, mes collègues, mes étudiants et mon travail, si je pouvais trouver une entreprise qui voudrait m’aider à développer mes aptitudes dans l’univers de l’inforensique.

J’ai donc pris mon courage à deux mains, mis à jour mon CV et j’ai cherché sur le marché du travail l’entreprise idéale et le poste associé. J’ai cherché du côté clair de la Force (les petites annonces du marché ouvert de l’emploi, les candidatures spontanées) mais aussi de son côté obscur (le réseau, les amis, les relations, la NSA, tout pour accéder au marché caché de l’emploi).

Pour ne rien regretter, j’ai ciblé large: mobilité sur toute la France y compris Paris, aucune prétention salariale a priori, pas de préférence grosse entreprise ou PME ou TPE, privé, public, CDI ou CDD, prêt à démarrer comme un débutant, comme un senior, comme un expert. J’ai des compétences d’encadrement, je sais travailler en équipe, je respecte les règles établies. Bref, le salarié (presque) idéal.

J’ai donc appliqué les règles de recherche d’emploi que je préconise auprès de mes étudiants (lire ce billet où je les explique).

Le blog m’a bien aidé, Twitter également (un retweet de Maître Eolas,
c’est 3000 personnes qui viennent sur le blog !) et j’ai pu ainsi
décrocher plusieurs entretiens d’embauche. Certains se sont
bien passés, d’autres moins bien.

Tout bourgeois veut bâtir comme les grands seigneurs ,
Tout prince a des ambassadeurs,
Tout marquis veut avoir des pages.

Et il m’est arrivé ce que je pensais dès le départ: aucune proposition n’a abouti.

Il y a plusieurs explications à cela:

– je suis nul

– j’ai plus de 45 ans

– je ne sais pas me vendre

– mes compétences n’intéressent personne

– la crise

– je n’ai pas de réseau

– je suis nul

– c’est la faute à internet

– les entreprises n’ont pas su voir mon énorme potentiel

– mes enfants ont tout fait pour ne pas déménager

– je suis nul.

Ok, donc, comme Rocky Balboa, je vais devoir m’entraîner dans un coin tout seul pour affûter mes muscles et JE REVIENDRAI (heu, non, ça c’est Arnold). C’est d’ailleurs ce que m’a conseillé sérieusement le responsable de mon entretien à l’ANSSI: « vous devriez vous entraîner sur l’analyse de systèmes live et revenir dans deux ans ».

Putain DEUX ans!

Je n’intégrerai donc pas les équipes de cette agence gouvernementale, et je le regrette. J’aurais aimé travailler avec des jeunes et brillants ingénieurs sur des sujets très techniques toujours en pointe. J’aurais aimé pouvoir relever ce challenge. Mais, comme pour mes tentatives de voyages dans l’espace (lire cette série de billets, surtout celui-ci), il faut savoir se faire une raison: j’ai une capacité à changer d’emploi nulle.

Maintenant, positivons:

– j’ai un boulot

– j’aime mon boulot

– mon entreprise est performante sur un marché porteur

– mon entreprise apprécie mon travail

– j’ai un travail dynamique, prenant et passionnant

– j’ai des perspectives de progrès et d’amélioration

– j’habite un coin de paradis

– j’ai une bonne santé

– j’ai une famille formidable

– le chiffrement RSA n’a pas encore été cracké.

Un lecteur avisé pourrait objecter: « mais pourquoi diable avez-vous eu envie de chercher un autre emploi? » Ma réponse est imparable: « parce que ».

Parce que je voulais voir ce que je valais encore sur le marché du travail.

Parce que je suis effrayé à l’idée d’avoir passé 20 ans dans la même entreprise.

Parce que je suis effrayé à l’idée de passer les 15 prochaines années dans la même entreprise.

Un lecteur avisé pourrait objecter: « qu’importe le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse ». Certes. C’est d’ailleurs ce que je me dis aussi. Bien obligé.

Alors j’ai pris une décision:

Puisque j’aime mon entreprise, plutôt que de changer d’environnement, je vais essayer d’améliorer mes compétences dans toutes les activités que je mène actuellement, et sortir de ma zone de confort. Professionnellement, il faut que j’améliore mes compétences de manager et que je favorise la progression de mes collaborateurs. Côté expertises, il faut que je développe mon activité d’expertises privées et que j’apprenne à me vendre. Côté vie publique, il faut que j’essaye de m’impliquer plus encore dans la vie de la commune.

Selon le Ministère français chargé de l’emploi (et toujours Wikipédia), l’employabilité est « la
capacité d’évoluer de façon autonome à l’intérieur du marché du
travail, de façon à réaliser, de manière durable, par l’emploi, le
potentiel qu’on a en soi
« .

Conclusions:

De ses échecs, il faut savoir apprendre. Et se relever.

Et ne pas attendre qu’on vienne vous offrir le poste idéal.

Il faut le créer soi-même.

Et savourer sa chance d’avoir un métier qu’on aime.

C’est dans les vieux pots qu’on fait la meilleure soupe.

Putain 15 ans !

[MAJ du billet du 8 novembre 2013]

Questionnaire de Proust

L’histoire du questionnaire de Proust est à lire ici.

Je me suis essayé à l’exercice (pas si facile), en voici le résultat :

Ma vertu préférée : la Science (vertu spéculative).

La qualité que je préfère chez un homme : la compétence.

La qualité que je préfère chez une femme : la compétence.

Ce que j’apprécie le plus chez mes amis : qu’ils s’intéressent à moi.

Mon principal défaut : l’égocentrisme.

Mon occupation préférée : apprendre.

Mon rêve de bonheur : explorer les gouffres de la planète Mars.

Quel serait mon plus grand malheur ? : la mort de mes proches.

Ce que je voudrais être : l’inventeur de l’intelligence artificielle.

Le pays où je désirerais vivre : Cocagne.

La couleur que je préfère : 470 nm.

La fleur que j’aime : la fleur du Persea americana.

L’oiseau que je préfère : Deepo, la mouette à béton de John Difool.

Mes auteurs favoris en prose : Frank Herbert, Isaac Asimov, Arthur Charles Clarke, Alfred Elton van Vogt.

Mes poètes préférés : Stéphane Mallarmé, en particulier ce sonnet aux rimes en x-or.

Mes héros dans la fiction : Muad’Dib, Elijah Baley, Gosseyn.

Mes héroïnes favorites dans la fiction : Susan Calvin, Ellen Riplay, Leeloo.

Mes compositeurs préférés : Mozart, John Williams.

Mes peintres favoris : Banksy, Boulet.

Mes héros dans la vie réelle : M. et Mme Michu.

Mes héroïnes dans l’histoire : Hypatie d’Alexandrie, Augusta Ada King-Byron.

Mes noms favoris : Zythom (mais j’ai d’autres pseudonymes 😉

Ce que je déteste par-dessus tout : mon côté obscur.

Personnages historiques que je méprise le plus : j’essaye de ne mépriser personne.

Le fait militaire que j’admire le plus : la bataille de Camerone.

La réforme que j’estime le plus : la réforme clisthénienne.

Le don de la nature que je voudrais avoir : la fermeté de ma jeunesse.

Comment j’aimerais mourir : rapidement.

État d’esprit actuel : concentré.

Fautes qui m’inspirent le plus d’indulgence : les fautes de goût.

Ma devise : Nunc est bibendum.

Récupération de données

J’ai déjà fait part ici même plusieurs fois des techniques que j’utilise pour récupérer des données dans le cadre de mes expertises judiciaires.

Je vous propose aujourd’hui une méthode assez simple qui m’a permis de récupérer tout un ensemble d’images, de films et de musiques d’un ami bien en peine de voir son disque dur tomber en panne. Lisez bien l’ensemble du billet avant de commencer, entraînez vous sur un vieux disque, essayez de comprendre les différents paramètres de chaque commande pour les adapter à votre cas. Je ne suis pas responsable des problèmes que vous allez générer… (mais je compatis 😉

Conditions :

Vous êtes rendu destinataire d’un disque dur illisible, mais qui semble fonctionner correctement : vous pouvez le brancher sur un ordinateur, vous l’entendez démarrer sans bruit suspect, sans odeur particulière, mais le système d’exploitation ne le voit pas, ne le détecte pas ou ne retrouve aucune donnée.

Matériels :

J’utilise deux ordinateurs. Le premier sera celui dans lequel sera placé le disque dur illisible. Vous devez être capable de le faire démarrer sur CD, DVD ou clef USB. Le deuxième ordinateur est sous Windows et dispose de suffisamment d’espace disque pour pouvoir stocker une image du disque que vous allez récupérer. Les deux ordinateurs sont branchés sur le même réseau.

Logiciels :

– la distribution DEFT que vous placerez sur CD, DVD ou clef USB

– le logiciel PhotoRec que vous téléchargerez en choisissant la bonne version de Windows (32 ou 64 bits).

– un répertoire appelé « partage » sur l’ordinateur Windows et configuré de manière à être accessible en écriture avec le compte windows « zythom »

Procédure :

– Placez le disque dur illisible dans le premier ordinateur

– Bootez le sur la distribution DEFT

– Puis tapez les commandes :

#mkdir   /root/tempo

(création d’un répertoire provisoire en mémoire vive dans /root)

#mount  -t cifs  -o username=zythom   /root/tempo    192.168.0.1/partage

où 192.168.0.1 est l’adresse IP de l’ordinateur Windows.

– Tapez ensuite la commande :

#dd_rescue   /dev/sda  /root/tempo/image.dd

où « /dev/sda » doit être le device correspondant à votre disque dur illisible (à adapter selon votre configuration).

– Patientez quelques minutes ou quelques heures (ou quelques jours), en fonction de la taille de votre disque dur.

– Quand la commande est terminée, vous pouvez éteindre l’ordinateur n°1. Vous devez disposer d’une image bit à bit du disque dur illisible sur votre ordinateur n°2, celui sous Windows, dans le répertoire « partage », sous le nom « image.dd ». Cette image peut être exploitée par différents logiciels pour y récupérer les données, en particulier photorec.

– Sur l’ordinateur n°2, dans une fenêtre de lignes de commandes, tapez la commande : photorec  image.dd

– Suivez les indications du logiciel PhotoRec et laissez le extraire toutes les données qu’il reconnaît.

– Envoyez ensuite vos dons au créateur du logiciel,par exemple en regardant les dates et origines de vos pièces de la zone euro 😉

Si ma technique ne fonctionne pas, parlez en avec un informaticien et ne vous découragez pas : il y a plein d’autres méthodes permettant de récupérer les données. Seul conseil valable dans tous les cas : n’utilisez plus le disque dur, vous risquez d’effacer définitivement les données que vous essayez de récupérer.

Bon courage.

PSES 2014

Chaque année depuis maintenant 5 ans, Pas Sage en Seine (PSES) propose un cycle de conférences, de talks, de rencontres, avec des bidouilleurs, des « gens du réseau », des artistes, des hacktivistes, des entrepreneurs, des journalistes, des curieux…

Depuis ma lointaine province, j’entendais parler de cette manifestation, sans pour autant avoir pu m’y rendre. Cette année, l’un des organisateurs, Skhaen, m’a contacté pour m’inviter à faire une présentation de mon activité d’expert judiciaire, avec comme sujet « Vous n’avez vraiment rien à cacher ? ».

J’ai eu plaisir à venir et à rencontrer un tas de gens sympathiques et curieux qui ont suivi ma présentation avec bienveillance. Pour ceux qui n’ont pas pu venir à Numa y assister, les organisateurs l’ont mis en ligne :

Mon seul regret: ne pas avoir pu assister aux 4 jours de conférences…Surtout qu’il y avait du beau monde : Manhack, Stéphane Bortzmeyer, Kitetoa, Maître Eolas, et bien d’autres !

Encore bravo aux organisateurs pour le travail fourni et les résultats obtenus.

Merci à Skhaen pour l’invitation et l’accueil.

A quand une casquette PSES ?

😉

Les vidéos des présentations PSES 2014.

Petit guide de survie à l’expertise informatique

J’ai beaucoup apprécié le billet du blog « Eclat(e) d’une jeune avocate » intitulé « Petit guide de survie à l’expertise construction (part I)« . J’y ai retrouvé certaines situations que j’ai pu vivre en expertise, ou dont ma femme (avocate) me parle quand elle est elle-même en expertise.

Sans nécessairement écrire le billet croisé dont je n’ai pas le talent, je me suis dit « tiens, ça, c’est une bonne idée de billet ». Voici le résultat.

Sachez à titre liminaire que toutes les situations ci-après exposées reposent sur des faits réels que j’ai vécus ©.

Une expertise judiciaire, du point de vue de l’expert judiciaire, ça commence par la lecture des missions envoyées par le magistrat. Ces missions sont souvent écrites à l’origine par l’avocat d’une des parties, en général celle qui demande l’expertise. L’avocat ayant lui-même retranscrit ce que son client lui a demandé, ledit client ayant essayé de traduire ce que son service informatique lui a remonté comme problème. Ceux qui connaissent le jeu du « téléphone arabe » peuvent imaginer facilement le résultat final. Prévoir donc un coup de fil au magistrat, à l’avocat, au client et au responsable informatique pour avoir une explication de texte avant d’accepter les missions demandées.

Puis vient le moment palpitant consistant à faire coïncider les agendas pour organiser la première réunion. L’usage veut que l’expert appelle en premier les avocats, puis les parties. Dans la pratique, il est conseillé d’appeler en premier le chef d’entreprise du lieu où se trouve le matériel à expertiser, afin de savoir s’il existe une salle de réunion assez grande pour loger tout le monde, et si l’entreprise n’est pas en plein inventaire, ou en congés (ou en liquidation !), à la date retenue par les avocats. Ensuite, muni de trente créneaux pour les six mois à venir, vous pouvez commencer à contacter les avocats… pardon, les secrétariats des cabinets d’avocat. Prévoir de vous munir du numéro de référence du dossier donné par le cabinet d’avocat appelé, du numéro de référence du dossier donné par le greffe du tribunal, du nom de l’entreprise, etc. Commencer toujours sa première phrase par « Bonjour, je suis M. Zythom, expert judiciaire (à prononcer distinctement), je souhaite parler à Maître Bâ, pour organiser une première réunion d’expertise, dans le dossier « Entreprise GrosClient », le tout avec une voix caverneuse et assurée, pour franchir le barrage du secrétariat.

Une fois des dates communes trouvées entre les agendas des avocats et le votre, entamer la ronde des agendas des parties. Au passage, s’assurer que l’avocat contacté est toujours mandaté par le client, et en profiter pour relever les prénom et nom du gérant de l’entreprise. Prévoir un deuxième tour avec les avocat si aucune date ne s’avère satisfaire tout le monde. Ne me parlez pas de doodle, personne ne semble connaître son existence dans cet univers parallèle au mien.

Prévoir un coup de fil au greffe du tribunal pour lui indiquer que la date fixée pour le dépôt du rapport pose un léger problème, étant entendu que l’échéance de six mois initialement inscrite dans les missions, correspond en fait à la date arrachée pour la première réunion. Obtenir une prolongation de mission.

Adresser un courrier recommandé avec avis de réception aux parties et à leurs avocats pour leur indiquer les date, heure et lieu de réunion. Fournir les coordonnées GPS aux avocats parisiens, et vérifier que l’heure de début de réunion est compatible avec les différents trains des parties concernées, ou les distances en voiture fournies par Google maps ou Mappy (ajouter 30mn pour les horaires indiqués par iPhone Plans…)

Ne pas oublier de demander aux parties de fournir une copie des pièces du dossier afin de pouvoir s’assurer que le déchiffrage des missions est compatible avec les pièces. Interdire l’envoi par fax, certains secrétariats n’hésitant pas à vous refaxer les 90 pages déjà envoyées sous prétexte qu’une page n’est pas passée. Demander un numérotage des pages. Remettre toutes les pièces en ordre, certains secrétariat ayant eu du mal avec l’agrafeuse, voire avec le recto/verso du photocopieur qui vient de changer.

Chaque partie vous enverra toutes ses pièces, identifiée avec un numéro différent. Il vous faudra tout classer selon votre choix, et apposer votre propre numérotation, avec bordereau récapitulatif reprenant tous les numéros utilisés par les parties.

Certains cabinets facétieux vous enverront leur dossier en original. Prévoir la demande de récupération en début de réunion. Faire des copies à vos frais…

Quand la date fatidique s’approche, ne pas hésiter à envoyer un petit email aux parties pour leur rappeler l’échéance imminente. Ne pas répondre aux suppliques de déplacement de la date, même celles assorties des menaces les plus explicites du genre « si vous ne déplacez pas cette réunion, je demande votre récusation » (!), ou « je ne pourrai pas être présent car j’ai un dossier « TresGrosClient ». Tenir bon. Repenser à l’énergie qu’il a fallu pour coordonner les agendas. Penser au ton froid du greffe quand vous avez demandé une prolongation de date de dépôt du rapport.

Le jour de la réunion, il faut arriver en avance pour repérer les lieux. Rien n’est plus ridicule qu’un expert perdu dans la campagne en train de chercher le lieu de la réunion qu’il a organisée. Arriver la veille est une option. Arriver deux jours avant est un manque de confiance en son GPS.

Venir habillé « en dimanche » est un signe de compétence. Il faut éviter les T-Shirts geeks, les baskets ou les chemises hawaïennes. Un expert judiciaire en informatique est avant tout un expert judiciaire, un sachant, un savant, une personne comprise de ses seuls semblables. L’habit fait le moine, il faut assortir la cravate, la veste, la chemise, le pantalon, les chaussettes et les chaussures. Ne pas hésiter à demander conseil à son épouse. Ne pas tenir compte des remarques étonnées des enfants qui prennent leur petit déjeuner. Une avocate m’a fait remarqué une fois, sur un ton dubitatif, que j’étais en chemisette. Il faut savoir que dans certains milieux autorisés, les chemisettes sont combattues et leurs porteurs exposés sur l’escalier des gémonies.

Entrer le premier dans la salle de réunion et choisir soigneusement sa place, souvent repérable par l’unique fauteuil en cuir présent dans la salle. Ne pas tenir compte du soulèvement de sourcil du PDG de l’entreprise quand il entrera dans la salle de réunion, légèrement en retard.

Refuser tout café/croissant/petit pain au chocolat qui pourrait vous être proposés, en précisant bien « je ne peux pas accepter de collation qui ne soit pas proposée en présence des tous les participants, et en leur absence, du fait de l’obligation du contradictoire ». La double négation et le sens obscur de la phrase assoit votre prestige auprès de la secrétaire qui vous accueille.

L’heure de la réunion étant arrivé, ne pas céder aux appels désespérés de l’avocat(e) perdu(e) dans la campagne et qui voudrait que vous veniez la chercher dans un village homonyme mais situé à 300 km du lieu de réunion. Commencer la réunion à l’heure pile, chaque région ayant son soi-disant quart d’heure qui ne sert qu’à justifier l’impossibilité chronique de certains à arriver à l’heure.

Expliquer le rôle de l’expert judiciaire. Rappeler qu’il n’est pas expert en droit, afin de valoriser aux yeux de leurs clients les avocats présents. Lire les missions à voix haute, ce qui permet aux experts en droit de se rappeler le dossier, lu en diagonal dans le train.

Enfin, le cœur du problème technique peut être abordé. C’est le moment où les clients, chauffés à blanc depuis tant de mois (d’années?), se jettent des SCUD et sortent des tranchées… D’où l’importance de la présence des avocats qui jouent un rôle actif pour jeter de l’huile sur le feu traduire modérer les propos de leurs clients.

Au bout de deux ou trois heures de réunion, tout le monde se calme petit à petit et les sachants peuvent commencer à s’exprimer. C’est alors le début du règne des informaticiens, le temps des sigles et des remarques rigolotes des avocats : « heu, Monsieur l’expert, ERP c’est bien Établissement Recevant du Public, éclairez moi ? »

Le repas est pour moi un moment solitaire. Il se limite à un paquet de biscuits avalé rapidement pendant que je classe mes notes, numérote les pièces étudiées, et commence à rédiger les premières réponses aux questions du magistrat.

L’après-midi est consacré à la somnolence des avocats et des PDG présents. Les informaticiens se complaisent dans des discussions précises sur les concepts qui leur sont chers. Parfois, un avocat appuie les dires de son client avec une intervention brève et prudente. Un bon expert sait laisser de la place à chacun pour que tout le monde « fasse le job ».

Après une phase d’écoute active, vient ensuite le temps des premières prises de position. Il faut donner un avis. L’expert prend position. La tension remonte.

En fin de réunion, prendre date immédiatement, en présence de toutes les parties, pour une prochaine réunion. Non seulement cela économise tous les courriers RAR, mais aussi tout le temps perdu à contacter tout le monde plusieurs fois… Gare à ceux qui sont partis en avance.

Une fois la réunion terminée, féliciter tout le monde pour la bonne tenue de la réunion, même si les SCUD volaient bas et en nombre.

Dès le soir, relire ses notes et les mettre au propre, écouter son dictaphone, noter les phrases clefs, les moments forts, les remarques pertinentes.

Dès le lendemain, commencer son pré-rapport. Ecrire aux avocats pour donner une date limite de réception des pièces complémentaires demandées en réunion.

Recharger l’encre du fax.

Préparer la réunion suivante.

Donner une date limite pour les dires.

Recevoir des dires volumineux le jour d’expiration du délai.

Modifier en profondeur son rapport pour prendre en compte les dires.

Recevoir des dires tardifs hors délai.

Pleurer.

Recevoir des dires après le dépôt du rapport auprès du greffe.

Pleurer.

Recevoir un courrier incendiaire parce qu’on n’a pas pris en compte les dires hors délai.

Pleurer.

Assister à l’audience où son rapport est discuté par les parties.

Pleurer chaudement.

Recevoir un compliment du magistrat qui trouve votre rapport clair et complet.

Être en joie.

Recevoir sa note de frais et honoraire.

Payer avec : la facture de l’encre du fax, le remboursement des traites de la Ferrari, le dernier Call of Duty…

Et le soir, au coin du feu, discuter avec ma femme du sens caché du dernier texte modifiant le déroulement de la procédure expertale : ♥