En l’absence de poste effectivement dédié à la sécurité, je fais office de RSSI dans mon entreprise, c’est-à-dire que j’assure la responsabilité de la sécurité du système d’information.
En d’autre termes (dixit wikipedia), la sensibilisation des utilisateurs aux problèmes de sécurité, la sécurité des réseaux, la sécurité des systèmes, la sécurité des télécommunications, la sécurité des applications, la sécurité physique, la mise en place de moyens de fonctionnement en mode dégradé (récupération sur erreur), la stratégie de sauvegarde des données et la mise en place d’un plan de continuité d’activité «disaster recovery».
Bien.
Cela tombe assez bien car en tant qu’expert judiciaire, je suis amené plutôt souvent à me prononcer sur la validité des actions menées au sein des entreprises par les responsables concernés par ces problèmes (et ils sont nombreux, les problèmes potentiels).
Seulement voilà, RSSI, c’est un métier à part entière, qui demande des connaissances techniques particulièrement élevées, et dans des domaines très divers. Un métier d’Expert.
Donc, quand on se définit comme un informaticien généraliste devant intervenir sur tous les aspects de l’informatique (i.e. responsable-informatique-dans-une-école-d’ingénieurs-et-expert-judiciaire-en-informatique), il est bon d’avoir plus que quelques bonnes notions concernant la sécurité informatique.
Et heureusement, il y a la pratique, la théorie et le partage d’expérience.
Concernant le partage d’expérience, il y a les blogs: Sid, Bruno Kerouanton, Maître Eolas, et j’en passe d’autres et des moins bons, et il y a les conférences.
A propos des conférences, s’il est parfois difficile d’y aller (temps, distance, frais…), il est souvent possible d’obtenir les actes, et parfois même gratuitement! C’est le cas pour le Symposium sur la Sécurité des Technologies de l’Information et des Communications (SSTIC).
Du coup, il est possible d’accéder à des documents intéressants (quand on arrive à en comprendre le sens). C’est le cas de l’excellent « Recueil et analyse de la preuve numérique dans le cadre d’une enquête pénale » de Nicolas DUVINAGE.
Résumé: Au cours de l’enquête pénale peuvent être saisies et analysées de nombreuses pièces à conviction de toutes natures: traces d’ADN, empreintes digitales, armes, etc, mais aussi disques durs, clés USB, téléphones portables… La présentation portera à la fois sur les grands principes de la criminalistique (étude scientifique des éléments de preuve), qui s’appliquent indifféremment à tous les scellés quelle que soit leur nature, mais aussi sur les particularités du traitement de la preuve numérique (saisie, conservation, exploitation, présentation des résultats). Une conduite à tenir-type sera également conseillée aux RSSI et administrateurs-réseau d’entreprise en cas de découverte d’infraction dans leur périmètre de compétences.
Et parce que nous sommes tous maintenant des RSSI en puissance (je n’ai pas dit « compétents »), et grâce à l’aimable autorisation de l’auteur, je peux retranscrire ici les conclusions de ce document (pour votre bonheur je vous encourage à les lire dans le document original).
———- extrait ———–
QUELQUES CONSEILS
«Les RSSI qui découvrent une infraction…»
Vous découvrez ce que vous pensez/supposez être une infraction… mais vous n’êtes pas magistrat!
• …ce n’est pas forcément une infraction.
• …et même si c’en est une, le suspect n’est pas forcément celui que l’on croit (ex.: poste de travail partagé, trojan, etc).
• …et même si c’est bien lui, il n’est pas forcément coupable (ex.: comportement involontaire).
• …et même s’il l’est pour tout le monde, il ne sera pas forcément condamné (ex.: absence de preuves suffisantes, vice de procédure, etc.).
De fausses accusations (même énoncées de bonne foi et sans intention de nuire) peuvent avoir de lourdes conséquences:
– Il est plus facile de détruire une réputation en 5 minutes que de la reconstruire… même s’il est prouvé que la personne est innocente («Il n’y a pas de fumée sans feu», les accusations de pédophilie sont souvent indélébiles…).
– Pour le suspect:
• Risque de mise à pied ou de licenciement;
• Risque de rupture conjugale, de suicide (pédophilie);
• Méfiance de l’entourage, de la famille, des amis, des collègues…
Conseil n°1: PRUDENCE et DISCRETION:
• Ne pas alerter toute l’entreprise (se contenter par ex du responsable juridique et du directeur du site, faire attention aux éventuelles complicités internes…).
• Laisser faire les spécialistes du droit (signaler les faits à la gendarmerie/police…).
• Ne pas porter de jugement hâtif sur l’intéressé (lui laisser le bénéfice du doute et la présomption d’innocence).
Conseil n°2: Pour autant, il faut réagir! …tout en respectant le droit du travail et les libertés fondamentales de la personne:
• Pas d’analyse des fichiers personnels privés du PC du suspect (cf. «arrêt Nikon» de la Cour de Cassation).
• Pas de «perquisition» dans son vestiaire, dans ses tiroirs en son absence.
Conseil n°3: Pour autant, il faut réagir! …et préserver les éléments de preuve:
• Remplacer le PC suspect par un autre PC (ex.: en prétextant une maintenance, une mise à jour, un problème de sécurité, ou au pire, en prétextant une infraction moins
infamante que la pédophilie [piratage, escroquerie…]).
• Extraire/graver les fichiers issus de serveurs (ex.: logs gravés sur CD).
• Si vous avez impérativement besoin de faire des analyses: réaliser une copie bit à bit des supports mis de côté et n’analyser que ces copies.
• Conserver les supports mis de côté dans un endroit sûr (ex.: coffre-fort) en attendant de les donner à la gendarmerie/police.
——- fin d’extrait ——–
Et si je peux me permettre d’ajouter un conseil: contactez un expert judiciaire. Il saura réaliser les actions techniques préconisées…
On voit des choses et on se demande pourquoi elles existent. Moi je rêve de choses qui n’ont jamais existé et je me demande pourquoi pas?
George Bernard Shaw
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Crédit images darkroastedblend.com
Pour info pour les presta et autres personnes ayant peur des "représailles" professionnelles :
Dans le cas de la découverte d'images à caractère pédo pornographique : L'article 434-1 du code pénal vous "oblige" de dénoncer le délit.