Les offres se suivent, les entretiens aussi. Je suis souvent retenu pour un deuxième, puis un troisième entretien, mais à chaque fois un autre candidat est retenu. Je ne baisse pas les bras et je continue à chercher le job qui correspondrait à mes envies : soit DSI dans une petite structure, soit quelque chose autour de l’expertise judiciaire, soit RSSI dans une entreprise où je pourrais trouver ma place.
Un follower Twitter me fait suivre une offre particulièrement intéressante : un poste d’assistant spécialisé informatique est ouvert depuis plusieurs années et non pourvu dans… la section de lutte contre le terrorisme du parquet de Paris.
Oui, oui, vous avez bien lu. LA section C1 dite pôle antiterroriste…
Incrédule, j’envoie un email avec mon CV et une lettre de présentation. Je reçois une réponse et un questionnaire à remplir. Puis suit un entretien téléphonique. Le courant passe bien, mes motivations sont comprises, et j’ai parfaitement conscience des enjeux techniques et humains.
Je reçois une convocation pour un entretien avec plusieurs magistrats de ce service, dont la cheffe de la section de lutte contre le terrorisme, les assistants spécialisés cybercriminalité et la personne en charge du recrutement.
L’entretien se déroule dans le nouveau palais de justice de Paris.
Le jour J, je me présente à l’accueil, avec deux heures d’avance. La personne de l’accueil me remet un badge visiteur et m’explique le chemin à suivre pour monter dans les étages jusqu’à celui du cabinet du Procureur de la République.
Comme je suis en avance, je me dis qu’il est judicieux de faire un repérage discret des lieux avant l’entretien. Je prends donc la direction de la colonne d’ascenseurs indiquée par l’accueil. Je badge aux différents lecteurs qui se présentent à moi, jusqu’à me trouver face à un ascenseur qui ne semble pas capable de m’amener au 26e étage. Ce n’est pas grave, pensé-je en mon for intérieur, je n’ai qu’à monter et changer d’ascenseur… Erreur : je me suis retrouvé ensuite face à d’autres ascenseurs qui ne semblaient pas vouloir reconnaître mon badge. J’ai pris mon mal en patience, en essayant de prendre un air intelligent, et j’ai attendu qu’un ascenseur s’ouvre pour enfin arriver à bon port.
Une fois au 26e étage, je pousse une porte qui semble m’amener vers le cabinet du procureur. Je me retrouve entre deux portes, dans un sas. Et bien entendu, mon badge n’ouvre aucune des deux portes… Je repère alors un interphone et sonne en espérant que quelqu’un va répondre. Rien ne se passe.
J’attends, en essayant vainement de prendre un air intelligent.
Au bout de 10mn, une personne entre dans le sas et me découvre en train d’attendre. Je crois qu’elle en rigole encore : une heure et demie d’avance sur son rendez-vous, bloqué dans un sas, à faire peur au personnel.
J’ai fini par patienter en salle d’attente. Les vigiles de la vidéosurveillance doivent encore se souvenir de cette scène étrange d’un gugusse prenant en photo la salle d’attente sous toutes ses coutures et Paris vu du haut du Palais de Justice 🙂
L’entretien se déroule parfaitement. Je suis évidemment impressionné par les personnes présentes. Travailler avec elles serait un honneur pour moi.
Le poste est a peu près réparti en quatre parts égales :
– Forensic : reprise d’analyse de supports informatiques
– OSINT : recherches internet diverses et variées pour documenter les dossiers
– Assistance/expertise quotidienne pour les magistrats et les enquêteurs
– Participation groupes de travail, représentation, etc…
Le candidat idéal doit savoir un peu tout faire, sans être forcément un spécialiste dans tout.
Le statut du poste est conforme à ce qui était indiqué dans l’offre parue sur la bourse interministérielle de l’emploi public : les assistants spécialisés sont recrutés par voie de contrat, en qualité d’agent contractuel de catégorie A, pour une durée de 3 ans renouvelable.
Je rentre dans ma province profonde avec les yeux qui brillent comme quelqu’un qui rêve depuis tout petit de devenir pompier et qui est à la porte de la caserne…
Quelques jours plus tard, je reçois le contrat d’engagement à durée déterminée, et découvre un point qui avait échappé à ma sagacité : le contrat est d’une durée de 3 ans renouvelable une seule fois.
A 54 ans, pour mettre mes compétences au service de mon pays dans la lutte contre le terrorisme, je dois démissionner de mon poste de salarié du privé, pour un CDD de 6 ans maximum. C’est la perspective annoncée est d’être chômeur à 60 ans (ou à 57 si les budgets et mon poste sont supprimés). Je n’ai pas de corps de rattachement à réintégrer…
La mort dans l’âme, je me vois obligé de décliner l’offre malgré son intérêt évident.
Putain, intégrer le pôle antiterroriste…
Je continue mes recherches.
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Ce récit est basé sur des faits réels, les noms et certains lieux ont été changés.
Pour être a peu près dans le même cas que vous ( contractuel catégorie A) dans la fonction publique, il est vrai qu'on ne peut enchaîner plus de 6 ans en CDD, on peut continuer en CDI après
Sauf qu'il m'a clairement été expliqué que je ne serai pas pris en CDI ensuite.
Est-ce que l'on peut rompre ce CDD ?
Si oui, vous auriez pu continuer vos recherches en //
Sinon, un ami a eu plusieurs CDD de 3 ans renouvelables et a changé de ministère plusieurs fois (idem pour un autre pote qui a fini à RFF puis SNCF).
Sans doute, mais je ne cherchais pas un travail "provisoire" en attendant d'en trouver un "plus stable", car j'étais déjà en CDI. Je cherchais un travail passionnant pour m'y donner corps et âme.