Graff’ art

Lundi matin, en arrivant sur mon lieu de travail, je remarque un énorme graffiti sur la façade de l’école… Enfer et damnation, un #%$#@ avait pris MON établissement pour cible pendant le week-end et nous laissait sa marque de passage fluorescente.

J’étais consterné.

Il faut dire que je consacre une partie non négligeable de mon temps à essayer de maintenir les bâtiments en bon état, avec un cout non nul, et qu’à une semaine de la rentrée des étudiants, ce TAG faisait un peu tâche.

Les collègues en ont rajouté une couche toute la journée en m’informant, le sourire en coin, qu’un artiste avait décoré la façade, ou en me demandant de faire le nécessaire pour pendre haut et court le coupable.

Le sommet a été atteint quand j’ai reçu un coup de téléphone de la Police Nationale qui m’a informé qu’ils souhaitaient que je vienne déposer une plainte pour dégradation. Ils avaient arrêté le (jeune) coupable et souhaitaient étoffer leur dossier avec des plaintes de victimes.

Comme je suis bien élevé, j’ai dis que j’allais réfléchir.

C’est que le sujet est délicat:

– en tant que responsable technique, je suis consterné par cette dégradation;

– en tant que conseiller municipal (dans une autre commune), je suis atterré par le nombre d’incivilités que je peux rencontrer;

– en tant que citoyen, je ne goute guère les gribouillis sur les biens d’autrui.

En même temps, il n’y a pas mort d’homme, et cela vaut-il la peine d’enfoncer un jeune?

Aussitôt donc, j’appelle les services municipaux spécialisés dans le nettoyage de ce type d’art pictural. Après quelques transferts de services en services (dont un qui m’a demandé d’envoyer une demande écrite d’intervention) je tombe sur la bonne personne en charge du nettoyage.

Lui: « Bon, je vais venir voir ce soir en débauchant si les dégâts nécessitent des produits spéciaux et si je reconnais la marque de l’artiste ».

Moi: « Mais la police m’a appelé, ils ont coincé le jeune qui a fait cela et m’ont demandé de venir déposer une plainte ».

Lui: « Ah bon? Mais attendez demain que je vous dise si c’est un habitué ou un débutant ».

Ce matin, ce technicien nettoyait avec un chiffon et le produit approprié. Je suis allé le voir et il m’a dit: « Vous savez, ce jeune m’est inconnu. Ses tags doivent représenter 0.001% des dégradations urbaines du coin ».

J’ai bien entendu son message et ne suis pas allé déposer plainte.

Il faut bien que jeunesse se passe.

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Source photo: www.banksy.co.uk

11 réflexions sur « Graff’ art »

  1. Est ce bien efficace ? ça part d'un bon sentiment, mais à la lecture d'eolas qui nous répète que la sureté de la sanction vaut mieux que la sanction, je me dis qu'il faudrait ptetre mieux que le gamin se prenne une plainte sans suite, plutôt qu'il se dise "cool, un graff et j'ai rien eu"…

  2. @Xuelynom: Vous ne pensez pas que pour la grande majorité des jeunes, le passage par la case police est suffisant comme punition?

  3. Au pire, dans ce cas là il faut lui faire nettoyer son œuvre. Mais je subodore que la mise de cette "réparation" risque d'être administrativement lourde.

  4. Mon frère, tout aussi inexpérimenté qu'on suppose le jeune en question, s'est fait attraper par la police avec des copains. Le juge les a condamnés à nettoyer leur tag (ou du moins à « faire un effort significatif en ce sens », vu qu'un tag ne s'efface pas si facilement qu'il se fait). Les services techiques de la mairie leur ont prêté le matériel adéquat.

    Malheureusement, je suis incapable de fournir plus de détails juridiques (type de juge, cadre légal, etc.). Tout ce que je sais, c'est que la procédure a été réglée par téléphone (ils n'ont pas été présentés physiquement au magistrat). Quant à l'accord avec la mairie, j'ai l'impression que ça s'est arrangé de façon très informelle…

  5. Etait-ce bien un tag et non un graf ? il y a de la nuance dans l'œuvre: dans un cas il y a créativité picturale en utilisant souvent astucieusement les défauts du support, dans l'autre cas un simple besoin de "salir" avec une signature à la va-vite et à la calligraphie douteuse. Dommage de ne pas avoir ici une photo de l'œuvre, juste pour juger…. 😉

  6. +1 pour Xuelynom…
    Je serais allé porter plainte.
    La loi prévoit des sanctions… c'est au juge de décider de la peine, non aux victimes ou aux témoins.

  7. 0,001% des grafs du coin ?
    En effet, c'est très peu…
    …c'est peut être parcequ'il représente 75% des grafs du coin d'à côté… 😉

    PS : non, pour la grande majorité des jeunes d'aujourd'hui, le passage par la case police ne signifie rien, (sauf une certaine fierté).
    L'année dernière, un jeune qui venait de tuer sa petite amie et l'avoir jeté au bord du cannal, s'est adressé à un de mes collègue (un capitaine) lors de sa garde à vue, en ces mots :
    "ouai vas-y qu'est ce qu'i ya ? t'es stringé sous ton jean ?"

    PS : je n'ai jamais su si mon collègue était effectivement stringé sous son jean… 😉

  8. En reference a l'image, aux USA on peut voir des panneaux sous les ponts d'autoroute incitant a denoncer anonymement (et surement avec recompense) les infames coupables…

  9. La justice trop laxiste? Un sermon et du nettoyage? Ce n'est pas mon expérience. Pour un cas de tag sur du matériel SNCF, la sanction s'est élevée à 30 000 Euros d'amende pour une équipe (ou bande si vous préferez 🙂 de 5, plus quelques mois de prison avec sursis (vécu personnellement dans le camp des parents). Ca fait lourd pour démarrer dans la vie, et Zythom a eu raison, à mon avis.

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