Ce billet du dimanche emprunte un texte de la Cour de Cassation afin de préciser un point important du travail de l’expert judiciaire: il doit remplir personnellement la mission qui lui est confiée. Les actes accomplis en méconnaissance de cette obligation ne peuvent valoir opérations d’expertise.
Ainsi, viole l’article 233 du nouveau Code de procédure civile, la cour d’appel qui refuse d’annuler une expertise dont les réunions ont été tenues par le conjoint de l’expert (2e Civ., 27 avril 2000, Bull., II, n°68, p.47), étant ajouté que, en une telle occurrence, la demande d’annulation du rapport d’expertise ne peut être déclarée irrecevable pour le motif, inopérant, que le demandeur l’avait présentée pour la première fois en appel et avait conclu au fond après le dépôt du rapport (2e Civ., 7 mai 2002, Bull., II, n°90, p.72).
Cependant, l’expert peut déléguer à des collaborateurs des tâches purement matérielles; il ne peut, en revanche, leur déléguer des actes d’exécution à caractère technique inhérents à sa mission, telles des opérations de mesurage de propriétés, lesquels ne peuvent être, le cas échéant, exécutés que sous sa direction, son contrôle ou sa surveillance (2e Civ., 10 juin 2004, Bull., II, n°286, p.242).
Par ailleurs, les éléments d’un rapport d’expertise déposé au cours d’une instance, fût-elle atteinte par la péremption, peuvent être retenus à titre de renseignements et utilisés comme tels par le nouvel expert désigné dans la nouvelle instance, après réassignation, et auquel il ne saurait être fait grief de ne pas avoir accompli personnellement sa mission (2e Civ., 7 novembre 2002, pourvoi n° 01-03.352).
Toutefois, en vertu de l’article 278 du nouveau Code de procédure civile, l’expert peut prendre l’initiative, sans en référer au juge, de recueillir l’avis d’un autre technicien, mais seulement dans une spécialité distincte de la sienne (3e Civ., 23 octobre 1984, Bull., III, n°172 ; 2e Civ., 19 février 1997, Bull., II, n°49, p.28; 23 octobre 2003, Bull., II, n°323, p.262) et à condition que cela ne s’accompagne pas d’une délégation de pouvoirs ou ne constitue pas une véritable « sous-traitance » (3e Civ., 8 avril 1999, Bull., III, n°89, p.61). A cet égard, la cour d’appel doit rechercher si l’expert n’avait pas délégué l’accomplissement de sa mission (même référence).
L’expert peut confier à un tiers qui dispose des instruments appropriés, l’exécution d’investigations à caractère technique, sans manquer pour autant à son obligation de remplir personnellement sa mission et sans méconnaitre les exigences du procès équitable (2e Civ., 16 mai 2002, Bull., II, n°101, p.80).
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Source: Cour de Cassation, bulletin d’information n°632 du 15/01/2006.