La justice et le temps de travail

Le 9 mai dernier, je publiais sur ce blog un billet intitulé « Expert près la Cour Administrative d’Appel« , dans lequel je racontais ce qu’est une cour administrative d’appel, la création d’un tableau des experts auprès de la cour et des tribunaux
administratifs du ressort, et la procédure d’inscription.

Dans les délais préconisés, j’ai déposé un dossier de candidature. Puis le temps a passé, jusqu’au jour où j’ai reçu ce courrier :

La commission de sélection des experts


Madame, Monsieur,



Dans le cadre de l’instruction du dossier de candidature que vous avez déposé en vue de votre inscription au tableau des experts dont la cour administrative d’appel de [Tandaloor] doit se doter au 1er janvier 2015, je vous remercie de bien vouloir me communiquer le(s) renseignement(s) suivant(s) :

Autorisation de l’employeur à réaliser les missions d’expertises durant le temps de travail

Je vous prie de croire, Madame, Monsieur, en l’assurance de mes sentiments les meilleurs.


Pour le Président de la commission de sélection des experts, le rapporteur désigné.

J’en suis resté estomaqué.

Quel employeur accepterait de signer un document dans lequel il autorise un de ses salariés à travailler pour quelqu’un d’autre pendant qu’il le rémunère pour travailler pour lui ?

J’ai aussitôt appelé à l’aide sur Twitter quelques magistrats qui m’ont répondu qu’ils trouvaient cela normal, et qu’ils avaient besoin de s’assurer que les personnes sur lesquelles ils allaient s’appuyer soient bien disponibles et ne puissent pas se cacher derrière des arguments du type « je ne peux pas, je n’ai pas le temps »…

Grmblrgmgmblgmbl.

J’ai aussi relu un certain nombre des courriers de lecteurs du blog qui me demandent mon aide pour arriver à convaincre leurs services RH de les autoriser à faire acte de candidature à l’inscription sur les listes d’experts. Finalement, je me retrouvais simplement devant le même cas de figure que beaucoup de ces personnes.

Alors j’ai appliqué la solution que je préconise à chaque fois : je suis allé voir mon service RH, j’ai expliqué ma problématique et j’ai obtenu une autorisation de mon employeur « à réaliser des missions d’expertises ». Point.

J’ai la chance de travailler dans une entreprise qui me fait bénéficier de six semaines de congés payés, et de la plupart de mes samedis et dimanches. Lorsque j’ai besoin d’une journée complète en pleine semaine pour faire une expertise, il me suffit de poser une demande de congés payés, puis d’organiser la réunion d’expertise dès ma demande acceptée. Je peux ainsi réaliser « les missions d’expertises pendant les jours ouvrés durant le temps de travail mes vacances » 😉

En tout cas, l’attestation a suffi, puisque j’ai eu l’honneur d’être inscrit sur la liste des experts près la Cour Administrative d’Appel de [Tandaloor] 😉

Il faut savoir interpréter les textes et les intentions, et se souvenir que la justice est aussi une administration…

Et qu’elle a bien besoin de bonnes volontés.

————————————————————————-

Source image : l’excellent YODABLOG (épisode 373) de Thierry Vivien

4 réflexions sur « La justice et le temps de travail »

  1. Pour les fonctionnaires, tout travail rémunéré (hors droits d'auteur) en plus de l'emploi principal doit être spécifiquement autorisé par l'autorité hiérarchique ("autorisation de cumul"), même s'il est réalisé en dehors des horaires de travail de l'employeur principal (donc y compris pour des jobs de week-end, même pour donner une conférence d'une heure payée 30€).

    Pour cela il faut préciser le volume horaire. Je suppose que la justice est incapable de vous préciser combien de missions elle envisage de vous confier et le nombre d'heures que cela représentera?

    (En pratique le volume horaire de l'autorisation est un volume maximal.)

  2. @DM : ça, c'est la théorie. Dans la pratique… c'est totalement différent.
    Lequel professeur donne des cours privé, lequel fonctionnaire informaticien monte une entreprise…

  3. J'ai la chance d'avoir un employeur qui autorise/encourage ses employés à se former/progresser et valider tout diplôme utile.

    Pas eu de souci pour faire signer ce papier. C'est plutôt cool d'avoir un salarié expert judiciaire non ? 🙂

Les commentaires sont fermés.