Je ne peux pas le cacher, je suis fier d’être expert judiciaire. Je ne m’en vante pas partout, sauf peut-être sur ce blog, mais je suis fier que la justice ait décidé de m’accorder sa confiance pour accepter d’utiliser mes compétences. Pourtant je sais garder la tête froide, et rester modeste « comme il faut ».
Bien m’en a pris.
Je vérifie tout plusieurs fois lors d’une expertise. J’imagine toujours le pire, aussi ai-je plusieurs stratégies de vérification: je procède à une prise d’image avec tel outil, et pendant son analyse, je prends une autre image avec un autre outil et j’effectue dessus les vérifications et confirmations de mes découvertes (ou absences de découvertes).
Je prends des photos, des notes, des mémos. Je relie mes notes, je travaille sur plusieurs jours en essayant de suivre le conseil de David J. Way dans son manuel de construction de clavecin.
Mais surtout, quand je tombe sur quelque chose de curieux, je le signale par écrit dans mon rapport, et n’hésite pas à contacter l’Officier de Police Judiciaire (OPJ) en charge de l’enquête.
Quitte parfois a être ridicule.
Dans ce dossier, j’avais ouvert l’unité centrale de l’ordinateur à la recherche d’un système de stockage: rien, nada, keutchi, walou. Et pas de système rack qui pourrait expliquer l’absence de disque dur comme dans ce dossier…
Je contacte l’OPJ pour lui faire part de mon désarroi. Celui-ci s’étonne que je ne trouve rien car il a lui même éteins le PC lors de la saisie. Nous discutons un peu au téléphone et je lui déclare que je vais procéder de nouveau à un examen approfondi de l’unité centrale.
Le soir même, de retour dans mon bureau d’investigation, je réouvre l’unité centrale et regarde de nouveau à l’intérieur: une carte PCI « différente » attire alors mon regard… Mon premier disque dur SSD sur carte PCI.
Je n’ose pas imaginer ce qui se serait passé si j’avais rendu mon rapport en l’état. Comment ai-je pu passer à côté de cette nouvelle technologie. Fatigue? Incompétence?
Alors, un conseil aux jeunes experts judiciaires: soyez fiers d’être au service de la justice, mais restez modestes et n’ayez pas peur du ridicule. Croire que l’on est infaillible peut mener à la catastrophe.
Soyez fiers, mais ne faites pas le fier.
Vu la vitesse à laquelle évolue la technologie, s’il y a bien un domaine dans lequel il faut faire preuve de modestie et d’humilité (et de prudence), c’est bien l’informatique !
Ce qui fait la qualité d’une personne, c’est son aptitude à confronter ses doutes… et apprendre de ses erreurs ou de sa méconnaissance…
Vous faites tout ceci à merveille… 🙂
C’est peut-être une légende urbaine, mais j’ai entendu parler d’une saisie de serveur amusante dans un pays qui impose de garder des logs de connection.
Ce serveur gardait ses logs en RAM-disque. La première chose qu’a fait la police a été de l’éteindre.
Je ne sais pas comment est passée l’excuse « ah mais on gardait des logs c’est juste la police qui les a détruits ».
Bonjour,
Je suis à la fois policier et enquêteur en criminalité informatique (pas un expert, juste un policier avec des connaissances), je parcours votre blog très régulièrement, merci de l'enrichissement qu'il me procure, techniquement et humainement.