Conclusions provisoires

Ce billet est le 7e d’une histoire qui commence avec ce billet.

Comme je l’indiquais en commençant cette série de billet, c’est l’esprit même d’un blog de raconter ce qui nous arrive de marquant en relation avec le thème du blog, a fortiori quand c’est du blog même dont il s’agit.

C’est pourquoi j’ai entrepris de vous raconter à travers ces quelques billets ce qui peut se passer dans les coulisses d’un blogueur.

Cette (petite) affaire est-elle terminée?

Non. Je citerai ici un passage d’un billet de Paxatagore publié sur le site de Maître Eolas, et qui (bien qu’utilisé en dehors de son contexte) décrit bien mieux que moi la situation dans laquelle je me trouve:

« Il n’y a pas eu de phase contradictoire : pendant la garde à vue, on a demandé au suspect s’il avouait, on a éventuellement vérifié ses déclarations, ses alibis. Mais on ne lui a pas donné accès au dossier. Et s’il a vu un avocat, c’est d’avantage pour se rassurer que pour se défendre, l’avocat non plus n’ayant pas accès au dossier. Du reste, ce dossier n’est matériellement pas réellement constitué et ordonné de façon à être consultable par un avocat ou un magistrat. Souvent, il n’est pas encore ordonné, les pièces pas encore numérotées, les copies, les originaux, les doubles pour les archives n’ont pas été séparés… Le procureur prend la décision de poursuivre, on se retrouve au tribunal et là, et seulement là, les avocats ont accès au dossier. »

Vous l’aurez compris, le Procureur de la République peut parfaitement prendre la décision de me poursuivre devant la Cour d’Appel pour entamer la procédure infamante de radiation de la liste des experts judiciaires.

Il peut aussi classer sans suite.

Il peut également ne rien décider et/ou ne rien dire.

Un magistrat est libre de décider ce qu’il lui semble le mieux à faire pour la société, et sa décision doit être respectée. Je peux simplement vous assurer que je me prépare déjà à l’idée de comparaître devant la Cour d’Appel.

Le confrère à l’origine de la saisine devait-il agir ainsi?

Oui. Aussi curieux que cela m’est apparu au début, la question devait être posée clairement: un expert judiciaire peut-il parler sur un blog de ses activités? La réponse (évidente pour moi) ne coule pas de source pour tout le monde. Comme l’indiquait justement Thomas en commentaire ici, « je m’imaginais face à un blog tenu par exemple par un expert médical, ou psychologue, ou balistique… quel aurait été mon sentiment? »

Au moins aujourd’hui ai-je la réponse sur ce point de ma compagnie d’expert de justice.

Devais-je écrire cette série de billets avant que cette affaire ne soit complètement close?

Oui, et pour plusieurs raisons:

– Vous n’avez pas idée du bien que font les commentaires que vous déposez sur ce blog.

– La mise en ligne des informations que je donne n’influera en rien les décisions des magistrats qui ont/auront à gérer ce dossier.

– Je ne compte pas sur un quelconque effet de buzz puisque les faits sont derrière moi.

– Enfin, il est bon de partager, sous forme de retour d’expérience, des évènements qui peuvent concerner tout blogueur (y compris celui qui sommeille en vous). Ce partage n’aurait pas eu la même saveur, pour vous comme pour moi, si j’avais publié ces billets après une (éventuelle) radiation. Je pense d’ailleurs que je n’aurais pas eu le recul nécessaire pour le faire sans acidité ni amertume. En ce sens là, Sid avait raison dès son premier commentaire sur le premier billet

Pensez-vous que d’autres experts judiciaires devraient ouvrir un blog et raconter leurs activités d’expertise?

Oui, bien sur. J’aimerais même que les différentes compagnies d’experts de justice, ou les regroupements de compagnie, poussent leurs membres à le faire, comme le fait aujourd’hui l’ordre des avocats. Dans le respect, bien entendu, des règles de déontologie.

Enfin je terminerai ce billet en citant (hors contexte je dois l’admettre) cette phrase que l’on trouve sur le site du Conseil National des Compagnies d’Experts de Justice:

«L’expert doit observer une indépendance absolue, ne cédant à aucune pression ou influence de quelque nature qu’elle soit».

Billet suivant: Décision du Procureur Général.

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Crédit images darkroastedblend.com

13 réflexions sur « Conclusions provisoires »

  1. Merci pour ce retour d’expérience, qui ne me conforte toujours pas avec la justice française, les relations inter-professionnelles ou confraternelles, ni vaec la « cohérence mentale » de certains êtres humains. Merci aussi pour ce point de vue honnète, reflet de la vie professionnelle comme personnelle d’un homme, qui a juste comme « habitude » de se servir d’un ordinateur…. 😉
    Respect.

  2. Votre témoignage montre également que la qualité d’expert judiciaire n’est pas absolue, et qu’il peuvent être remis en question par leurs pairs, c’est aussi des faits très intéressants.
    L’expert judiciaire reste un justiciable comme les autres, et ne bénéficie d’aucun traitement de faveur du fait de son concours apporté à la Justice.
    Merci pour tous ces éclaircissements sur cette fonction peu/mal connue, et pourtant si utile à la Justice.

  3. Bonjour,

    Cette histoire est assez navrante. Vous êtes courageux d’avoir enduré ceci en silence…

    Seriez vous fondé à porter plainte contre X pour dénonciation calomnieuse?
    Rien ne vous est reproché. Je cite la conclusion: « La mention «roman» ou «anecdotes» pourrait utilement compléter… ».
    C’est une suggestion que vous suivez car vous êtes arrangeant.
    Mais en fait au final, rien ne vous est reproché. Vous avez fait l’objet d’une dénonciation calomnieuse. Enfin, c’est ainsi que je le vois.

    Je ne demande pas si vous souhaitez -ou avez- porté plainte. Je souhaite savoir si cela est du domaine du possible.

    Avec ou sans la mention anecdotes, tant que le fond de votre blog ne change pas, je continuerai à vous visiter!

    Très cordialement,

    Christophe

    PS: Je suis bien indiscret mais qui a pris en charge vos frais? La Compagnie ou vous?

  4. @Christophe: Tous les frais (avocat, déplacements, jours de congé posés, etc.) sont entièrement à ma charge.

    Je n’accuse personne pour cela, et ça fait parti de la fatalité que de devoir supporter ce type de dépense.

    Je pense qu’il ne faut pas chercher un coupable à tous nos maux.

  5. Bonjour,

    finalement, un expert judiciaire n’a parfois rien d’un expert juridique,

    je ne sais pas si je suis clair mais je rie pour deux au nez de votre « accusateur », si l’on peut appeler cette tartuferie une accusation, car je me doute que votre hauteur, et votre prudence, vous garde de le faire vous-même.
    C’est de bon coeur.

    Et bravo pour votre conclusion à ce billet.

    noisette

  6. Je vous lis depuis un moment, je voulais juste vous assurer de mon soutien moral le plus complet sur cette affaire, qui, même s’il ne vous serve a rien, vous assure de ma plus grande sympathie !

  7. Hum je n’étais même pas au courant de cette affaire malgrés mon interêt réel pour votre blog et votre activité. Je voulais juste vous signifier ma sympathie, mon soutien et mon admiration.

  8. @Tous: Merci à tous pour vos commentaires d’encouragement. Je suis sur que je ne les mérite pas, mais cela fait très plaisir quand même.

  9. Sid à trés souvent raison, au début c’est agaçant, mais on finit par s’y faire, et comme il est sympathique, on en arrive même à lui pardonner :p

    Je trouve quand même que la justice est un peu dire avec les siens sur ce coup.
    Les « recommandations » me paraissent uniquement là pour justifier la procédure, ce qui est compréhensible.
    Ceci dit on en vient a se demander si votre collègue, à l’origine de cette procédure, n’a pas un blog doté d’un moins bon pagerank que le votre et si ce n’est pas la seule raison de celle ci…

    En tout cas sachez que votre blog (tout romancé qu’il soit?!) m’a fait découvrir les fonctions d’expert judiciaire, « profession qui n’en est pas une (et c’est heureux!) » qui était pour moi assez obscure.

    Je m’étonne cependant que la commission n’ai pas retenu contre vous votre tentative de fuite vers Mars. Est-ce un point qui leur a échappé?

  10. Finalement, votre affaire confirme ce que je pensais déjà : certains font des procès en justice avec désinvolture comme d’autres jouent à la bataille avec des cartes.

    La justice entre les mains de certains, c’est comme un rasoir entre celles d’un singe.

  11. Bonjour, je viens tout juste de découvrir votre blog (à cause d'une vidéo) et surtout votre parcours.
    c'est assez marrant d'un coté que du fait d'avoir un status de part sa profession obligerais à obligatoirement se caché sous peine de sanctions.
    Un peu comme si Benoit XVI avais son blog, un pseudo et parlais des dessous du vatican 🙂

    En espérant que ça cette affaire s'arrête là, salutations distinguées

  12. Cher Zythom,
    Je compatis avec vos mésaventures qui malheureusement prouvent la bassesse de certains.
    J'ai moi-même le plus grand mépris pour la Justice et ses professionnels, ayant moi-même été scandaleusement massacré dans un procès prud'hommal.

  13. @Anonyme: Il faut pourtant croire en la Justice et en ses professionnels car la grande majorité de ces personnes est réellement formidable. Je continue d'ailleurs de travailler pour elle, comme expert judiciaire ou comme secrétaire de mon épouse, parce que j'ai encore la foi.

    Par contre, je peux comprendre que des vies peuvent être brisées par cette machine, soit à cause de son manque fragrant de moyens, soit par la dureté des lois imposées par le législateur.

    Ce n'est pas pour rien que l'on dit "il vaut mieux un mauvais arrangement qu'un bon procès".

    Bon courage.

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