Expertises privées

Un expert judiciaire est une personne dont la pertinence de l’avis technique est reconnue. Cet avis peut être recherché par une partie indépendamment de toute action en justice (par exemple). L’expert judiciaire joue alors le rôle de conseil, compétent techniquement et procéduralement.

De fait, les expertises peuvent être classées en deux catégories : les expertises privées ou officieuses, et les expertises judiciaires (pénales et civiles). Les expertises privées se déroulent dans un cadre contractuel où l’avis expertal est requis à titre personnel ou conciliatoire.

André Comte-Sponville, lors du XVIIe congrès national des experts judiciaires à Marseille le 22 octobre 2004, a parfaitement présenté les différences entre les deux catégories:
« La mission-type de l’expert est de dire le vrai, autant qu’on peut le connaître, c’est-à-dire le possiblement vrai et le certainement faux… Il doit être impartial, indépendant et objectif…Le conseil, lui, n’est pas impartial: il a pris parti. Il peut être indépendant intellectuellement, mais surtout il s’engage… au service de la victoire. Le conseil dit l’utile… Expert du juge, expert de l’une des parties, conseil de l’une des parties… rien n’interdit que le même individu (bien sûr dans trois affaires différentes) occupe tantôt l’une, tantôt l’autre de ces trois postures; mais il semble exclu qu’il occupe les trois et même deux des trois, dans la même affaire. »

Ce dernier point est bien entendu confirmé par les règles de déontologie du Conseil National des Compagnies d’Experts de Justice (extraits):
I-7) L’expert doit conserver une indépendance absolue, ne cédant à aucune pression ou influence, de quelque nature qu’elle soit. Il doit s’interdire d’accepter toute mission privée de conseil ou d’arbitre, à la demande d’une ou de toutes les parties, qui fasse directement ou indirectement suite à la mission judiciaire qui lui a été confiée.
Lire également le chapitre V entièrement consacré à ce sujet.

5 réflexions sur « Expertises privées »

  1. La citation est tronquée : André Comte Sponville parle de trois missions et seules deux sont citées dans l’extrait : expert, conseil… et le troisième, qu’est-ce ?

  2. « Expert du juge, expert de l’une des parties, conseil de l’une des parties »

    Je corrige le billet.
    Merci!

  3. « La mission-type de l’expert est de dire le vrai… »

    Dans une affaire assez médiatisée un expert avait dit quelque chose du genre « tant que le prix horaire d’une expertise sera le prix horaire d’une femme de ménage, on aura des expertises de femme de ménage… »

    Il y aurait donc une vérité d’expert et une vérité de femme de ménage !

    (Non, n’insistez pas, je ne vous dirai pas de quelle affaire il s’agit).

  4. Un expert judiciaire reste un être humain. S’il est une chose de dire le vrai dans un rapport, il en est une autre de résister à une pression médiatique non sollicitée.

    L’expert d’Outreau a fait un travail extrêmement fouillé, et est reconnu au niveau européen pour ses travaux sur la parole des enfants. Comme beaucoup d’experts, et de personnes en rapport avec la justice, il mène un combat pour que la France se dote de moyens décents pour sa Justice.

    La phrase malheureuse qu’il a eu, qui plus est sortie de son contexte, a été exploitée par les politiques et les média.

    Je vous renvoie à la lecture d’un court billet sur ce point: l’ expert d’outreau reste expert.

  5. Loin de moi de vouloir me moquer de cet expert, j’ai juste voulu faire un commentaire humoristique.

    Je sais ce qu’est une expertise, le travail que cela demande et le montant des honoraires généralement alloués par les tribunaux ; mon père est expert judiciaire (dans un autre domaine que le votre).

    Je salue votre position à l’égard de votre confrère et vos propos dans le court billet relatif à cette affaire.

    Ceci étant dit, la technicienne de surface reste la meilleure experte de sa discipline !

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